COUR D'APPEL DE DOUAI TROISIÈME CHAMBRE ARRÊT DU 14/09/2006 * * * No R : 05/04260 Tribunal de Grande Instance d'ARRAS du 19 Mai 2005 REF :
GG/MD APPELANTE S.A. MAAF Ayant son siège social Chauray 79036 NIORT représentée par la SCP CONGOS-VANDENDAELE, avoués à la Cour assistée de Me Bertrand MEIGNIE, avocat au barreau de DOUAI INTIMÉS Monsieur Daniel Y... agissant tant en son nom personnel qu'ès qualitès d'administrateur des biens et de la personne de sa fille mineure Noémie née le 31/10/1989 à ARRAS. né le 01 Juin 1964 à MAZINGARBE (62670) Demeurant ... 62690 AUBIGNY EN ARTOIS représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assisté de Me Didier ROBIQUET, avocat au barreau d'ARRAS Monsieur Paul Z... né le 21 Février 1938 à BERLES MONCHEL (62690) Demeurant ... 62127 VILLERS SUR SIMON représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assisté de Me Didier ROBIQUET, avocat au barreau d'ARRAS Madame Marie Antoinette A... épouse Z... née le 10 Septembre 1939 à FRAMECOURT (62130) Demeurant ... 62127 VILLERS SUR SIMON représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me Didier ROBIQUET, avocat au barreau d'ARRAS Monsieur Jean-François Z... Demeurant ... 62810 AVESNES LE COMTE représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assisté de Me Didier ROBIQUET, avocat au barreau d'ARRAS MUTUELLE NATIONALE DES HOSPITALIERS ET DES PERSONNELS DE SANTE Ayant son siège social 331 avenue d'Antibes Amilly 45213 MONTARGIS régulièrement assignée, n'ayant pas constitué avoué CAISSE DES DÉPÈTS ET CONSIGNATIONS 56, rue de Lille 75356 PARIS représentée par la SCP DELEFORGE FRANCHI, avoués à la Cour Intervenant volontaire Monsieur Thomas Y... né le 27 Mai 1987 à ARRAS (62000) Demeurant ... 62690 AUBIGNY EN ARTOIS représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assisté de Me Didier
ROBIQUET, avocat au barreau d'ARRAS DÉBATS à l'audience publique du 01 Juin 2006, tenue par Monsieur GAIDON et Madame BERTHIER magistrats chargés d'instruire l'affaire qui ont entendu seuls les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Président de chambre Monsieur GAIDON, Conseiller Madame BERTHIER, Conseiller ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 14 Septembre 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président et Madame AMBROZIEWICZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. ORDONNANCE DE CLÈTURE DU : 18 Mai 2006
Sur le rapport de Monsieur GAIDON, Conseiller.
Le 6 janvier 2000 à 19 h 45 à SAVY-BERLETTE sur la RN no39, un accident de la circulation s'est produit entre un véhicule automobile de marque VOLKSWAGEN type Golf de couleur bordeaux, conduit par Jean-Marie B... et assuré auprès de la SA MAAF, et un véhicule automobile de marque RENAULT type clio de couleur noire conduit par Catherine Y... née Z..., dans les circonstances suivantes :
hors agglomération et à un endroit dépourvu d'éclairage public, sur une route bi directionnelle comprenant deux voies de circulation avec marquage et rectiligne, les deux véhicules circulant en sens inverse se sont heurtés tous deux à l'avant gauche en se croisant.
Les deux conducteurs sont décédés des suites de l'accident.
Jean-Marc C..., seul témoin direct des faits, entendu par les services de gendarmerie, a déclaré qu'il était devant le véhicule RENAULT qui suivait son propre véhicule, et qu'au moment du choc, le véhicule RENAULT s'est brutalement déporté sur sa gauche, entrant ainsi en collision avec le véhicule VOLKSWAGEN.
Par actes d'huissier en date des 8 mars, 10 mars, 31 mars 2004, Daniel Y... agissant en son nom personnel et és qualités de représentant légal de ses enfants mineurs d'âge, Thomas et Noémie Y..., Paul Z... et Marie Antoinette Z... née A... et Jean-François Z... ont assigné aux fins d'indemnisation de leur préjudice, la SA MAAF en présence de la Mutuelle Nationale des Hospitaliers et des Personnels de Santé (ci-après MNH) et de la Caisse des Dépôts et Consignations.
Par jugement en date du 19 mai 2005, le Tribunal de Grande Instance d'ARRAS a : - déclaré que les circonstances de l'accident survenu le 6 janvier 2000 à SAVY-BERLETTE et ayant entraîné la mort de Catherine Z... épouse Y... sont indéterminées, - dit que n'est rapportée la preuve d'aucune faute de Catherine Y... de nature à exclure ou à limiter le droit à l'indemnisation de son dommage et par voie de conséquence de ses ayants droit, - en conséquence condamné la SA MAAF assureur du véhicule de Jean-Marie B... à indemniser les conséquences dommageables du dit accident, - condamné la SA MAAF à payer à Daniel Y... en son nom personnel :
[* la somme de 22.000 ç en réparation de son préjudice moral,
*] la somme de 108.551,73 ç en réparation de son préjudice économique,
[* la somme de 8.953,95 ç au titre des frais funéraires, - condamné la SA MAAF à payer à Daniel Y... és qualités d'administrateur des biens et de la personne de son fils Thomas :
*] la somme de 20.000 ç au titre de son préjudice moral,
[* la somme de 9.816,04 ç au titre du préjudice économique, - condamné la SA MAAF à payer à David Y... és qualités de représentant légal de sa fille Noémie Y... les sommes suivantes :
*] 20.000 ç au titre de son préjudice moral,
[* 11.820 ç au titre de son préjudice économique, - condamné la SA MAAF à payer aux époux Z..., parents de la victime :
*] la somme de 12.000 ç chacun au titre du préjudice moral,
[* la somme de 305,19 ç au titre du préjudice matériel, - condamné la SA MAAF à payer à Jean-François Z... frère de la victime :
*] la somme de 6.000 ç au titre de son préjudice moral, - condamné la SA MAAF és qualités d'assureur de Jean-Marie B... à payer à la Caisse des Dépôts et Consignations par subrogation dans les droits de :
[* Thomas Y... : 33.588,03 ç au titre de la pension principale d'orphelin et la somme de 99,43 ç au tire de le pension temporaire d'orphelin,
*] Noémie Y... : 33.588,03 ç au titre de la pension principale d'orphelin et la somme de 99,43 ç au titre de la pension temporaire d'orphelin, - dit que ces sommes s'imputeront à due concurrence sur les préjudices économiques des ayants droit de Catherine Y..., - condamné la SA MAAF à payer :
aux époux Z... la même somme sur le même fondement,
[* à Jean-François Z... une indemnité procédurale de 500 ç,
*]à la Caisse des Dépôts et Consignations une somme de 800 ç au titre
de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le premier juge a notamment considéré que le seul témoignage de Jean-Marc C... ne présentait pas un degré de fiabilité suffisant pour permettre d'avoir un exact aperçu des circonstances de l'accident.
La SA MAAF a interjeté appel le 8 juillet 2005.
Thomas Y..., devenu majeur est intervenu volontairement à la procédure.
Par écritures déposées le 7 novembre 2005, la SA MAAF conclut à l'infirmation du jugement, au débouté les consorts D... et de la Caisse des Dépôts et Consignations, et demande à la Cour à titre subsidiaire, de : - réduir les demandes formulées par les consorts D... au titre de la réparation des préjudices moraux, - débouter David Y... de sa demande de réparation du préjudice matériel, - débouter les époux Z... de leur demande au titre des frais de bouche, - fixer le préjudice économique de :
* David Y... à la somme de 65.485,81 ç,
* Thomas Y... à la somme de 10.765,08 ç,
* Noémie Y... à celle de 12.963,71 ç, - dire que la condamnation au bénéfice de la Caisse des Dépôts et Consignations ne saurait être supérieure aux sommes allouées aux enfants au titre du préjudice économique, - condamner solidairement David Y... et les époux Z... au paiement d'une somme de 1.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle expose les faits suivants :
L'accident s'est produit dans une portion de route droite et non en courbe, et il existait au vu des constatations de la gendarmerie, une bonne visibilité axiale et latérale.
Elle soutient les moyens et arguments suivants :
Aucun élément matériel ne permet de mettre en doute le témoignage de Jean-Marc C... qui est clair et non contradictoire avec les éléments recueillis par les enquêteurs ; à ce titre :
- le déplacement brutal vers la gauche de son axe de circulation d'un véhicule qui suit, de nuit, ne peut qu'attirer l'attention pour vérifier si ce mouvement constitue l'amorce d'un dépassement ;
- le véhicule de Catherine Y... était nécessairement éclairé par les feux du véhicule venant en sens inverse, et de nuit, avec l'éclairage de ces faux les bandes blanches séparatives des voies de circulation sont particulièrement visibles ;
- il n'est pas démontré que le véhicule de Jean-Marc C... se trouvait dans une courbe lors de l'accident.
Au regard de ces éléments, la faute commise par Catherine Y... qui s'est brutalement déportée à gauche de son axe de circulation, faute exclusive de l'accident, doit exclure l'indemnisation de son préjudice par application des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985.
Subsidiairement, sur l'indemnisation des préjudices et sur la demande de la Caisse des Dépôts et Consignations, le tribunal a omis de déduire la créance des organismes sociaux ayant servi un capital décès à David Y..., conjoint survivant, et le recours de la
Caisse des Dépôts et Consignations qui bénéficie d'une subrogation légale dans les droits des victimes à due concurrence du montant des préjudices, ne saurait être supérieur au préjudice économique respectif des enfants.
Par écritures signifiées le 25 janvier 2006, les consorts D... ont conclu à la confirmation du jugement, et demandent à la Cour de condamner la SA MAAF à payer au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile la procédure d'appel :
- à David Y... en son nom personnel et és qualités une indemnité de procédure de 1.000 ç,
- aux époux Z... une somme identique sur le même fondement,
- à Jean-François Z... et à Thomas Y... une indemnité de procédure de 500 ç.
Ils soutiennent les moyens et arguments suivants :
Au terme de l'enquête et de leurs constatations, les gendarmes n'ont pu localiser le point de choc ni expliquer les circonstances de l'accident.
Le témoignage de Jean-Marc C... en raison de son caractère "douteux" ne peut être retenu ; à ce titre :
- le témoin était entrain d'aborder une courbe, de sorte qu'il est surprenant qu'il ait regardé dans son rétroviseur vers l'arrière au moment de l'accident ;
- à supposer que Jean-Marc C... ne se trouvait pas dans la courbe et qu'il ait pu observer la collision, l'éclairage des feux perçus par réflexion dans un rétroviseur intérieur provoque l'éblouissement et le témoin ne pouvait plus dès lors discerner les
détails et les emplacements ;
- Jean-Marc C... a quitté les lieux de l'accident après sa survenance ;
- Jacques E..., gérant d'un café situé à proximité du lieu des faits, a fourni une attestation au terme de laquelle un chauffeur routier a appelé en premier les secours et un autre témoin a déclaré que c'était la voiture de couleur rouge qui s'était déportée.
Au vu de ces éléments, aucune faute n'est établie à l'encontre de Catherine Y... et ne peut être opposée à ses ayants droit.
Subsidiairement, la capital décès perçu par David Y... a été réglé au titre d'un contrat d'assurance et ne peut être déduit dans le cadre de la fixation du préjudice matériel du conjoint survivant. La SA MAAF, pour le calcul du préjudice économique des consorts Y..., ne pouvait déduire des revenus respectifs une somme forfaitaire de 10 % au titre de charges fixes.
Par écritures signifiées le 21 mars 2006, la Caisse des Dépôt et Consignations a conclu à la confirmation du jugement, et demande à la Cour, y ajoutant de :
- dire que le remboursement par la SA MAAF des sommes versées par l'intimée devra intervenir par le versement d'une somme unique,
- dire que dans l'hypothèse où le montant de l'indemnité mise à la charge du tiers responsable serait insuffisant pour désintéresser intégralement l'intimée, il conviendra de procéder à une répartition au marc l'euro.
Elle soutient les
Elle soutient les mêmes moyens et arguments que les consorts D....
Assignée à personne habilitée le 15 novembre 2005, la Mutuelle MNH n'a pas comparu. SUR CE
Attendu que l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 dispose que "la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis" ; que l'article 6 de la même loi prévoit que " le préjudice subi par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d'un accident de la circulation est réparé en tenant compte des limitations ou exclusions applicables à l'indemnisation de ces dommages" ;
Attendu qu'il résulte de la procédure établie par les services de gendarmerie à la suite des faits, versée aux débats, que l'accident s'est produit de nuit, sans éclairage public, et hors agglomération, sur une route bi directionnelle à deux voies de circulation avec marquage au sol, dans sa partie rectiligne, par collision entre deux véhicules automobiles circulant en sens inverse, qui se sont heurtés tous deux à l'avant gauche en se croisant ;
Attendu que cette procédure ne fait état que d'un témoin direct des faits, en la personne de Jean-Marc C..., qui déclare aux services enquêteurs : "Je circulais depuis TINCQUES sur la RN 39 et je me dirigeais vers ARRAS... ; Dès l'emprunt de la RN 39 à TINCQUES, j'avais remarqué la présence de deux véhicules derrière moi. A BERLES-MONCHEL, le premier à me suivre s'est arrêté, le second a poursuivi sa route derrière moi en conservant une distance de
sécurité que j'évalue entre 40 et 50 mètres. Pour traverser l'agglomération de SAVY-BERLETTE j'ai réduit ma vitesse à 70 km/heure. Le véhicule qui me suivait en a fait de même puisque l'écart est demeuré le même.---------------------------------------------------------------- -------------------------Sans pouvoir être précis, quelques dizaines de mètres après le pont qui enjambe la Scarpe, je me souviens parfaitement avoir croisé une automobile qui progressait d'ARRAS vers SAINT-POL à une vitesse qui m'a semblé normale. Toujours par habitude, j'ai à cet instant regardé dans mon rétroviseur intérieur. Là j'ai très nettement vu le véhicule qui me suivait partir sur la voie de circulation opposée à la nôtre et y percuter l'automobile que je venais de croiser.------------------------------------------------------Malgré mon auto radio qui fonctionnait j'ai d'ailleurs nettement entendu le "boum"-----S.I. : L'automobiliste qui me suivait n'a pas empiété progressivement sur le couloir de circulation opposé mais très soudainement, voire brutalement.------------------------------ S.I. :
En ce qui me concerne, il est clair que le point de choc se situe dans la voie de circulation ARRAS/ST POL. Les deux tiers avant côté conducteur du véhicule qui me suivait sont entrés en contact avec l'avant de l'automobile qui circulait d'ARRAS vers ST-POL.-------------------------------------------------------------- ---------------------------- -------Ensuite, j'ai fait demi-tour et je suis allé prévenir les secours à la station-service "Le relais fleuri". Le temps nécessaire à cette manoeuvre, quand je suis repassé tout doucement sur les lieux de l'accident, là une automobile et un camion arrivés entre temps s'étaient arrêtés-------------------------------------------------------------- -------------------- En ce qui me concerne, derrière moi il n'y avait
que la voiture impliquée dans l'accident et personne devant moi "... ;
Attendu qu'il résulte de l'examen de la procédure que le véhicule automobile circulant dans le sens ST POL/TERNOISE-ARRAS est celui conduit par Catherine Y..., suivant le véhicule conduit par le témoin ; que les services de gendarmerie précisent encore dans le procès-verbal de transport : "Le point de choc présumé n'a pu être déterminé précisément. Cependant la zone de choc présumée se situe dans le couloir de circulation de B (véhicule VOLKSWAGEN Golf), à proximité de la ligne longitudinale continue séparative des voies de circulation...cela à la seule vue des dires du témoin" ;
Attendu que pour tenter de faire écarter les éléments clairs, précis et circonstanciés du témoignage de Jean-Marc C..., les consorts D... produisent une attestation de Jacques E... exploitant du café " Le Rally Fleurie", ainsi qu' un procès-verbal de constat en date du 14 juin 2001, et les intimés critiquent la teneur des déclarations de Jean-Marc C... ;
Attendu que Jacques E... indique que le 6 janvier 2000, un chauffeur routier s'est présenté dans son établissement pour signaler la survenance d'un accident sur la RN no39 "au niveau du pont à près de 400 mètres de là", que quelques instants après, une autre personne paraissant "choquée", est venue signaler les mêmes faits, précisant qu'elle avait vu l'accident se produire et que "c'est la voiture de couleur rouge qui est partie à gauche" ;
Attendu qu'il ressort de la procédure établie par les services de gendarmerie que le véhicule VOLKSWAGEN était de couleur bordeaux, le
véhicule conduit par Catherine Y... étant de couleur noire ;
Attendu que Jacques E... n'a pas été entendu par les services enquêteurs ; que son attestation est datée du 21 juin 2000, soit plus de cinq mois après les faits ; que Jacques E... qui n'est pas un témoin direct de l'accident n'étant pas présent lorsque celui-ci s'est produit, se borne à rapporter de façon indirecte les propos d'un autre témoin qui n'a pas été identifié ; que ces éléments en raison de leur caractère tardif, imprécis et indirect ne suffisent pas à remettre en question les déclarations circonstanciées de Jean-Marc C... devant les services enquêteurs le lendemain des faits ;
Attendu que les consorts D... communiquent également un procès-verbal de constat en date du 14 juin 2001, ayant pour objet de décrire les lieux où s'est produit l'accident ; qu'il en résulte que les faits sont survenus sur une partie rectiligne de la RN no 39, entre le pont qui enjambe la Scarpe où d'après la procédure d'enquête, le véhicule VOLKSWAGEN a "terminé sa course", et l'intersection avec la CVO no 13 ; que le procès-verbal de constat mentionne que quarante mètres au delà de cette intersection, la RN no 39 forme une courbe à gauche dans le sens de ST POL/TERNOIS-ARRAS ;
Qu'il convient de relever que cette pièce qui mentionne une trace de peinture rouge sur la chaussée dont il est indiqué qu'elle correspondait au point de choc déterminé par les services de gendarmerie, ne comporte aucune prise de vue de la Scarpe dans laquelle le véhicule VOLKSWAGEN a terminé sa course ; que ni le procès-verbal de renseignement ni le croquis établi par les services enquêteurs ne font par ailleurs état d'une intersection de la RN 39
avec le CVO no3 et d'une courbe à quarante mètres au delà de cette intersection au lieu précis de survenance des faits ;
Attendu s'agissant ensuite de la critique de la relation des circonstances de l'accident par Jean-Marc C..., que celle-ci porte principalement sur le fait que le témoin n'a pu voir la collision parce qu'il était soit entrain d'aborder une courbe, soit ébloui par l'éclairage des feux du véhicule de Catherine Y... perçu par réflexion dans son rétroviseur intérieur ;
Attendu que le témoin ne précise dans le cadre de ses déclarations aucune de ces deux circonstances ; qu'il n'est nullement établi au vu de la procédure d'enquête, que la collision s'est produite alors que Jean-Marc C... était entrain d'aborder une courbe ;
Attendu que Jean-Marc C... ne déclare aucunement avoir été ébloui par la réflexion des feux du véhicule qui le suivait, dans son rétroviseur ; qu'ainsi que le soutient justement la SA MAAF, le déplacement brutal vers la gauche de nuit d'un véhicule qui suit ne peut qu'attirer l'attention pour vérifier si ce déplacement constitue l'amorce d'un dépassement ;
Attendu que contrairement à ce qu'indique le premier juge, l'annexe "renseignement sur les lieux" du procès-verbal de transport mentionne une "bonne visibilité axiale et latérale" ; que le premier juge ne pouvait dès lors préciser : "Les conditions de visibilités au moment des faits étaient mauvaises : il faisait nuit et il n'y avait pas d'éclairage public" ; que le propre des dispositifs d'éclairage des véhicules est d'assurer de nuit, une visibilité correcte, malgré l'absence d'éclairage public ;
Attendu que la présence d'un véhicule de nuit derrière soi, avec ses feux allumés n'est pas de nature à empêcher sauf éblouissement provoqué par les feux de route, de situer les lignes blanches et l'axe de la chaussée ;
Attendu que les calculs de vitesse et de distance effectués par la Caisse des Dépôts et Consignations dans ses écritures ne permettent en rien d'établir que dans la mesure où il ne se serait écoulé qu'une seconde entre le moment où le témoin a croisé le véhicule VOLKSWAGEN, et celui de la collision, Jean-Marc C... n'aurait pas été à même de voir précisément le déroulement de l'accident ;
Attendu que les déclarations du témoin sont corroborées par les circonstances matérielles de l'accident ; qu'il était nécessaire qu'un des véhicules empiète sur la voie de circulation du véhicule arrivant en sens inverse pour que la collision se produise ; qu'aucun élément précis de la procédure d'enquête ni aucune pièce produite ne permet d'en suspecter la teneur ; que dès lors les circonstances de l'accident ne sont pas indéterminées ;
Attendu qu'en s'étant de nuit, brutalement déportée sur la voie de circulation des véhicules venant en sens inverse, en franchissant ou à tout le moins empiétant sur une ligne blanche continue, Catherine Y... a commis une faute grave excluant l'indemnisation des préjudices de ses ayants droit ; que le jugement sera dans ces conditions infirmé, et les intimés déboutés de leurs demandes ;
Attendu qu'il serait contraire à l'équité de condamner les consorts D... au paiement d'une indemnité de procédure ; que la SA
MAAF sera déboutée de sa demande à ce titre ; PAR CES MOTIFS
La Cour statuant en audience publique et par arrêt réputé contradictoire,
Infirme le jugement et statuant à nouveau,
Déboute les consorts D... et la Caisse des Dépôts et Consignation de leurs demandes,
Condamne les consorts D... aux dépens de première instance et d'appel avec pour ceux d'appel droit de recouvrement direct au profit de la SCP CONGOS-VANDENDAELE avoués,
Déboute la SA MAAF de sa demande d'indemnité de procédure. Le Greffier,
Le Président,