La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950511

France | France, Cour d'appel de Douai, Ct0094, 22 juin 2006, JURITEXT000006950511


COUR D'APPEL DE DOUAI TROISIÈME CHAMBRE ARRÊT DU 22/06/2006 * * * No RG : 05/05027 Tribunal de Grande Instance de LILLE du 30 Juin 2005 REF : EM/VD APPELANTE Société GAN ASSURANCES IARD Ayant son siège social 8/10 Rue d'Astorg 75383 PARIS CEDEX 08 représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour assistée de Me Alain DEMARCQ de la SCP LEBAS-BARBRY et Associés, avocats au barreau de LILLE INTIMÉE Madame Marguerite X... Demeurant ... 59710 MERIGNIES représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me VERCAIGNE substituant Me Ghislain

HANICOTTE, avocat au barreau de LILLE COMPOSITION DE LA COUR LO...

COUR D'APPEL DE DOUAI TROISIÈME CHAMBRE ARRÊT DU 22/06/2006 * * * No RG : 05/05027 Tribunal de Grande Instance de LILLE du 30 Juin 2005 REF : EM/VD APPELANTE Société GAN ASSURANCES IARD Ayant son siège social 8/10 Rue d'Astorg 75383 PARIS CEDEX 08 représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour assistée de Me Alain DEMARCQ de la SCP LEBAS-BARBRY et Associés, avocats au barreau de LILLE INTIMÉE Madame Marguerite X... Demeurant ... 59710 MERIGNIES représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour assistée de Me VERCAIGNE substituant Me Ghislain HANICOTTE, avocat au barreau de LILLE COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ Madame MERFELD, Président de chambre Madame CONVAIN, Conseiller Madame BERTHIER, Conseiller --------------------- GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame AMBROZIEWICZ DÉBATS à l'audience publique du 03 Mai 2006, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2006 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Madame MERFELD, Président, et Madame AMBROZIEWICZ, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. ORDONNANCE DE CLÈTURE DU : 16 mars 2006 Sur le rapport de Madame MERFELD, Président de Chambre.

Madame Marguerite X... est propriétaire d'une maison d'habitation située à MERIGNIES ... pour laquelle elle a souscrit une police d'assurance multirisque habitation auprès du GAN. Un arrêté portant constatation de l'état de catastrophe naturelle a été pris pour la commune le 26 mai 1998 à la suite des mouvements de terrain différentiels de janvier 1995 à septembre 1997, consécutifs à la sécheresse puis à la réhydratation des sols. Il a

été publié au journal officiel du 11 juin 1998.

Madame X... a effectué une déclaration de sinistre auprès du GAN le 16 juin 1998, soutenant que son immeuble présente des désordres liés à l'état de catastrophe naturelle.

Étant en désaccord avec l'expert mandaté par le GAN sur les conséquences de la sécheresse sur son immeuble, Madame X... a saisi le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de LILLE qui, par ordonnance du 18 septembre 2001, a commis Monsieur Y... en qualité d'expert.

Au vu du rapport d'expertise déposé le 18 août 2003 le Tribunal de Grande Instance de LILLE, par jugement du 30 juin 2005 a : - condamné le GAN à indemniser Madame X... du sinistre survenu dans son habitation, lié à l'état de catastrophe naturelle en lui versant les sommes de :

* 68.291,99 ç pour la réparation de l'habitation,

* 2.122,10 ç pour frais de garde-meubles,

* 4.395 ç pour frais de relogement provisoire,

* 1.271 ç pour frais de géomètre,

* 3.730,98 ç pour frais de mission de bureau d'études, - dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 11 juin 1998, - débouté le GAN de l'ensemble de ses demandes, - condamné le GAN à payer à Madame X... la somme de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et celle de 2.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société GAN Assurances IARD a relevé appel de ce jugement le 11 août 2005.

Par conclusions du 12 décembre 2005 elle soutient que la reprise des fondations préconisée par l'expert a un caractère préventif et n'entre donc pas dans le cadre de la garantie catastrophe naturelle. Elle ajoute que les frais de mission du bureau d'études de sol et de géomètre qui sont directement liés à la reprise des fondations doivent également être exclus de même que les frais de garde meubles, de relogement et le préjudice moral qui ne constituent pas des dommages matériels directs au sens de l'article L 125-1 du code des assurances.

En conséquence elle demande à la Cour d'infirmer le jugement, de lui donner acte de ce qu'elle offre de payer à Madame X... pour la réparation des fissures et réfection des embellissements la somme de 13.044 ç avant travaux et celle de 1.074 ç après travaux sur présentation de la facture, de déclarer cette offre satisfactoire et de débouter Madame X... de ses autres demandes en la condamnant en tous les dépens.

Madame X... a conclu le 19 janvier 2006 à la confirmation du jugement et à la condamnation du GAN à lui payer la somme de 5.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour ses frais irrépétibles d'appel. Elle demande qu'il soit précisé que les frais de l'instance de référé et les frais d'expertise judiciaire sont à la charge du GAN.

En réplique aux contestations du GAN elle soutient que pour l'expert judiciaire la réparation des désordres passe inévitablement par la reprise des fondations, sauf à exposer l'immeuble à des sinistres à répétition. Elle estime que les travaux de reprise en sous oeuvre

répondent à la notion de traitement curatif et qu'il s'agit donc de la reprise de dommages directs consécutifs au sinistre. Elle déclare que l'expert judiciaire a techniquement mis en exergue le fait que les désordres touchaient aux fondations de l'immeuble. Elle soutient qu'à partir du moment où l'agent naturel, la sécheresse, a pu être défini par l'expert comme la cause déterminante des désordres résultant des mouvements dus à la sensibilité des sols de fondation à la dessiccation, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que l'ensemble des désordres affectant l'immeuble entrait dans le cadre de la garantie au titre de l'état de catastrophe naturelle. SUR CE :

Attendu que Madame X... a effectué une déclaration de sinistre auprès du GAN au titre de la garantie due à l'état de catastrophe naturelle et a fait appel à Monsieur Z... expert qui, le 6 avril 1999, a établi un rapport évaluant le coût des travaux de réfection à 45.927,38 ç ;

Que l'expert mandaté par l'assureur a exclu que la sécheresse puisse être la cause des désordres constatés ; qu'il n'a émis une réserve que pour les désordres relatifs aux fissures en pignon sud pour lesquelles il a préconisé des vérifications complémentaires et pour le surplus a considéré que les dommages résultaient d'un mouvement intrinsèque au bâtiment, exclu de la garantie lié à l'état de catastrophe naturelle ;

Attendu que l'expert judiciaire qui s'est adjoint le concours de deux sapiteurs, le bureau d'études Sols Etudes Fondations et Monsieur A... géomètre, a conclu que les désordres suivants étaient imputables à la sécheresse puis à la réhydratation :

fissures sur les

carreaux en plâtre en séjour, fissures sur les revêtements carrelés et fissures en façades et pignons et a indiqué qu'il fallait affranchir les fondations de la maison du sol sensible, susceptible de provoquer ultérieurement des dommages du même ordre ; qu'il a chiffré le coût des travaux nécessaires comme suit :

- compte prorata (bureau d'études compris)

5.141,51 ç

- fondations

38.267,62 ç

- reprises des abords détruits par les travaux

du sous-oeuvre

7.211,80 ç

- déblais

3.324,85 ç

- reprise des fissures

8.944,88 ç

- embellissements

6.137,88 ç

69.028,54 ç à déduire : vétusté sur embellissements 12 %

- 736,55 ç

68.291,99 ç

Attendu que le litige porte principalement sur les frais de reprise des fondations ;

Attendu que selon l'article L 125-1 du code des assurances, sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ;

Attendu que contrairement à ce que tente de soutenir Madame X... l'expert n'a pas relevé de désordres affectant les fondations elles- mêmes ; que selon le bureau d'études Sols Etudes les fondations en elles-mêmes ne sont pas en cause et que les travaux de reprises préconisés pour un montant de 38.267,62 ç consistant en la réalisation de puits jointifs effectués par passes alternées ont pour objet de reporter les charges sous les horizons argileux pour "s'affranchir de toute évolution dans le cas d'un retour d'une

période exceptionnelle de sécheresse" ;

Attendu que l'expert Y... indique dans son rapport que la maison de Madame X... est implantée sur des terrains très argileux où le recouvrement limoneux est peu représenté, que ces sols sont de faible puissance alors que le descriptif de l'entrepreneur qui a construit la maison prévoyait "pour un bon terrain résistant : béton armé des fondations en rigoles de 50 cm de largeur sur 80 cm de profondeur, dalle béton de 20 cm d'épaisseur" ; que l'expert précise qu'il est regrettable qu'il n'y ait pas eu d'étude de sol avant les travaux de construction et explique que les fissures constatées dans l'immeuble affectant le pignon et les éléments qui lui sont associés sont dues aux phénomènes de retrait gonflement liés aux capacités d'absorption des sols, les sols argileux étant plus sensibles à la dessiccation ; qu'il estime qu'il est nécessaire, pour éviter le renouvellement des désordres, d'affranchir les fondations du sol argileux en les descendant dans les sols inertes par exécution de puits jointifs ; qu'il s'agit donc de travaux à caractère préventif ; Que les travaux de reprise des fondations qui n'ont pas pour objet de remédier à un dommage matériel occasionné aux fondations par la sécheresse n'entrent pas dans la garantie "catastrophe naturelle" ; que c'est à tort que le Tribunal a accueilli la demande de Madame X... au titre de la reprise des fondations au motif que "les désordres touchant aux fondations doivent être considérés comme un préjudice actuel en ce que la fragilisation de l'habitation est en soit préjudiciable et que les réparations nécessaires à la suite de la catastrophe naturelle induisent la reprise en sous-oeuvre des fondations" ; que la fragilisation des fondations ne résulte pas de

la sécheresse et n'a pas été aggravée par elle ; qu'il s'agit d'un état qui existait dès la construction de l'immeuble et qui aurait pu être évité si l'entrepreneur avait fait procéder à une étude des sols afin d'adapter les fondations à la nature du sous-sol ;

Que l'absence d'étude de sols ne peut certes pas être reprochée à Madame X..., ainsi que celle-ci le soutient mais que l'assurance des risques de catastrophe naturelle n'étant pas une assurance de responsabilité le GAN ne peut prendre en charge les travaux de reprises des fondations puisque le défaut de conception des fondations n'est pas une conséquence de la sécheresse et que ce défaut aurait aisément pu être évité si une étude des sols (mesure habituelle au sens de l'article L 125-1 du code des assurances) avait été demandée par le constructeur du pavillon ;

Qu'il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné le GAN au paiement de la somme de 38.267,62 ç coût de la reprise des fondations ainsi que celle de 7.211,80 ç coût de la reprise des abords détruits par les travaux en sous-oeuvre et de débouter Madame X... de ces chefs de demande ;

Attendu que le compte prorata comptabilisé par l'expert pour 5.141,51 ç comporte des frais d'installation de chantier, container à matériaux, réfectoire, vestiaire et WC chimique, frais de bureau d'étude qui n'étaient nécessaires qu'en raison de l'importance des travaux de fondation ; que de même les frais de déblais comptabilisés pour 3.324,85 ç ne se justifient plus en l'absence de condamnation au titre des travaux de fondation ; que ces deux chefs de demande seront également rejetés ;

Attendu que les seuls travaux entrant dans la garantie de l'assurance des risques de catastrophe naturelle sont ceux relatifs à la reprise des fissures et la réfection des embellissements qui ne rendent pas nécessaires le relogement de Madame X..., ni l'enlèvement de son mobilier ; que ces frais ne peuvent être admis puisqu'ils sont essentiellement liés à l'ampleur des travaux de fondation ; qu'au demeurant ils constituent des dommages immatériels qui en toute hypothèse ne relèvent pas de la garantie catastrophe naturelle ; que contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal l'article L 125-1 du code des assurances ne met pas à la charge de l'assureur l'indemnisation des "préjudices collatéraux" ;

Attendu que le GAN ne peut donc être condamné qu'au paiement du coût de la reprise des fissures, soit 8.945 ç et de la réfection des embellissements, vétusté de 12 % déduite, soit 5.401,33 ç ;

Qu'il n'est pas fondé à retarder partie de l'indemnisation au titre de la reprise des fissures à la présentation des factures, cette faculté ne lui étant donnée par l'article 14 des conditions générales du contrat que dans l'hypothèse où il est procédé à la reconstruction de l'ouvrage (article 7 des conventions spéciales) ;

Attendu que selon l'annexe I de l'article A 125-1 du code des assurances l'assureur doit verser l'indemnité due au titre de sa garantie dans les trois mois à compter de la date de remise par l'assuré de l'état estimatif des biens endommagés ou de la date de publication de l'arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle lorsque celle-ci est postérieure ;

Que l'expert de Madame X... a établi l'état estimatif des

dommages le 6 avril 1999 ; qu'il convient de faire courir les intérêts à compter du 15 avril 1999 ;

Attendu que les frais de géomètre pour 1.271 ç et de bureau d'études pour 3.730,98 ç représentent les honoraires des deux sapiteurs auxquels l'expert judiciaire a fait appel ; qu'ils n'ont pas été exposés uniquement pour déterminer le coût de la reprise des fondations comme le soutient le GAN et doivent suivre le sort des dépens qui seront partagés par moitié entre les parties ; que certes la demande de Madame X... était excessive mais l'action a été rendue nécessaire par l'attitude de l'assureur qui n'avait procédé à aucune indemnisation lors de la saisine du juge des référés, trois ans après la déclaration de sinistre ;

Attendu que les conséquences du retard dans les paiements ont été réparés par les intérêts à compter du 15 avril 1999 ; que Madame X... ne peut être indemnisée d'un préjudice complémentaire, le litige résultant principalement du caractère excessif de ses prétentions ; qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

Attendu que le GAN sera condamné à verser à Madame X... une somme de 1.500 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS :

La Cour, Statuant en audience publique et contradictoirement, Infirme le jugement et statuant à nouveau, Condamne la société GAN Assurances IARD à verser à Madame Marguerite X... la somme de 8.945 Euros pour la reprise des fissures et celle de 5.401,33 Euros pour la réfection des embellissements, avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 1999, La condamne en outre La condamne en outre à

lui verser la moitié des frais de géomètre et de bureau d'études, soit 2.500,99 Euros, Déboute Madame X... du surplus de ses demandes, Fait masse des dépens de première instance et d'appel, y compris les dépens de référé et les frais d'expertise judiciaire et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties avec, pour les dépens d'appel, droit de recouvrement direct au profit des avoués conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile, Condamne le GAN à verser à Madame X... une somme de 1.500 Euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Le Greffier,

S. AMBROZIEWICZ

Le Président,

E. MERFELD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Ct0094
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950511
Date de la décision : 22/06/2006

Analyses

ASSURANCE DOMMAGES - Garantie - Dommages résultant d'une catastrophe naturelle - Article L. 125-1 du Code des assurances - /

Infirme le jugement et statuant à nouveau, Condamne la société GAN Assurances IARD à verser à Madame Marguerite DUCROQUET la somme de 8.945 Euros pour la reprise des fissures et celle de 5.401,33 Euros pour la réfection des embellissements, avec intérêts au taux légal à compter du 15 avril 1999, La condamne en outre à lui verser la moitié des frais de géomètre et de bureau d'études, soit 2.500,99 Euros, Déboute Madame DUCROQUET du surplus de ses demandes, Fait masse des dépens de première instance et d'appel, y compris les dépens de référé et les frais d'expertise judiciaire et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties avec, pour les dépens d'appel, droit de recouvrement direct au profit des avoués conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile, Condamne le GAN à verser à Madame DUCROQUET une somme de 1.500 Euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Mme Merfeld, Président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2006-06-22;juritext000006950511 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award