COUR D'APPEL DE DOUAICHAMBRE 7 SECTION 2ARRÊT DU 09/03/2006
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No RG : 04/04252Tribunal de Grande Instance de LILLEdu 16 Avril 2004REF : PC/AM
APPELANTMonsieur Amar X...demeurant ...59000 LILLEreprésenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Courassisté de Me Stéphane BULTEAU, avocat au barreau de LILLEbénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle 15 % numéro 591780020408807 du 09/11/2004
INTIMÉEMadame Hakima Z...demeurant ...69008 LYONreprésentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Courassistée de Me Philip REISENTHEL, avocat au barreau de LILLE
DÉBATS à l'audience en chambre du Conseil du 14 Décembre 2005, tenue par M. CHARBONNIER magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC).
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme M. MERLIN
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉM. CHARBONNIER, Président de chambreM. ANSSENS, ConseillerMme REGENT, Conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 09 Mars 2006, (date indiquée à l'issue des débats) par M. CHARBONNIER, Président, qui a signé la minute avec Mme M. MERLIN, greffier, présents à l'audience lors du prononcé de l'arrêt.
LA COUR
Attendu qu'Amar X... a interjeté appel de l'ordonnance de non-conciliation rendue entre lui et son épouse Hakima Z... le 16 avril 2004 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de LILLE qui l'a condamné à verser à celle-ci, au titre du devoir de secours entre époux, une pension alimentaire mensuelle de 150 Euros ;
Attendu qu'Amar X... qui était non comparant en première instance se prévaut de la nullité de l'ordonnance entreprise au motif que celle-ci contreviendrait à l'autorité de la chose jugée attachée à un jugement du Tribunal de BATNA (Algérie) qui a prononcé en dernier ressort, le 24 avril 2004, la dissolution de son mariage avec Hakima Z... ; qu'à titre subsidiaire il demande que la pension alimentaire mise à sa charge au profit d'Hakima Z... soit réduite à 50 Euros par mois ; qu'il sollicite la condamnation d'Hakima Z... à lui verser une somme de 1 000 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Attendu qu'Hakima Z... invoque l'inopposabilité du jugement de Tribunal de BATNA du 24 avril 2004 ; qu'elle demande la condamnation d'Amar X... à lui payer une indemnité de 1 000 Euros pour avoir intentionnellement tardé à soulever son moyen de défense ; qu'elle réclame l'augmentation, au taux de 450 Euros par mois, de la pension dont Amar X... lui est redevable ; qu'elle conclut pour le surplus à la confirmation de l'ordonnance entreprise ;
Attendu qu'il résulte des pièces du dossier qu'Amar X... et Hakima Z..., tous deux de nationalité algérienne, se sont mariés le 20 janvier 2000 à CHEMORA, en Algérie ; que par requête du 27 avril 2003 Amar X... saisissait le Tribunal de BATNA d'une demande en divorce ; que par jugement du 24 avril 2004, le Tribunal de BATNA, statuant contradictoirement en présence d'Hakima Z..., a prononcé en dernier ressort «la dissolution du lien du mariage entre les deux parties» et, en premier ressort, a condamné Amar X... à régler à Hakima Z... «le montant de 70 000 DA au titre de divorce abusif, le montant de 10 000 DA au titre d'indemnité de viduité, le montant mensuel de 1 500 DA au titre d'indemnité d'abandon à partir de la date d'introduction de l'instance jusqu'au prononcé du présent jugement» ;
Attendu que ce n'est que postérieurement à la requête déposée par son mari devant le juge algérien, qu'Hakima Z... a elle-même présenté le 19 février 2004 sa requête au Juge aux Affaires Familiales français ; que l'assignation en divorce délivrée ensuite par Hakima Z... à Amar X... le 14 juin 2004 pour l'inviter à comparaître devant le juge français a été effectuée après que la juridiction algérienne, au mois d'avril précédent, eut prononcé définitivement le divorce des deux intéressés ;
Attendu que contrairement à ses allégations, Hakima Z... ne prouve pas que le jugement du Tribunal de BATNA ait été obtenu par fraude ; qu'aux termes de cette décision, elle demeurait à OULED FADEL, WILAYA DE BATNA, lors de l'introduction de la procédure algérienne diligentée par son mari ; qu'elle a été citée le 27 avril 2003 suivant un procès-verbal de notification de citation à comparaître devant le Tribunal de BATNA, sur lequel elle a apposé sa signature ; qu'elle était représentée à l'instance par un avocat, Maître Mohamed FADEL, qui a déposé un mémoire en son nom le 25 juin 2003 ; que selon ses écritures elle demandait à être réintégrée au domicile conjugal «dans un logement séparé» et à toucher des dommages et intérêts pour abandon et une pension alimentaire ; que subsidiairement, au cas où son mari maintiendrait sa demande en divorce, elle réclamait sa condamnation «à lui verser les dédommagements suivants : le montant de 150 000 DA au titre de divorce abusif, le montant de 20 000 DA au titre d'indemnité de viduité, le montant mensuel de 3 000 DA au titre d'indemnité d'abandon à partir de la date de son renvoi du domicile conjugal jusqu'au prononcé du présent jugement» ;
Attendu qu'Hakima Z..., si dans une «déclaration sur l'honneur» elle soutient avoir signé le procès-verbal de notification de citation à comparaître «sans savoir de quoi il s'agissait exactement» en sorte qu'elle ne serait jamais intervenue ensuite à la procédure engagée par son mari, produit néanmoins une attestation émanée de son père, Abdellah Z..., qui relate qu'elle avait, en réponse à l'action en divorce d'Amar X... et conformément aux énonciations du jugement du Tribunal de BATNA, «demandé d'être intégrée au domicile conjugal dans un logement séparé en lui payant sa pension alimentaire d'abandon» ;
Attendu qu'Hakima Z... a reçu notification de la citation la concernant alors qu'elle résidait effectivement à OULED FADEL WILAYA DE BATNA ; que la circonstance, mentionnée en page 9 de son passeport, qu'elle soit retournée en France à la date du 29 avril 2003 ne démontre pas, à défaut de la production des pages subséquentes de ce document, qu'elle ait été seulement de passage en Algérie à l'époque où son mari l'a attraite devant le tribunal ; qu'elle n'explique pas comment, n'étant pas sur place, elle se serait concertée avec son avocat sur la conduite du procès et la défense de ses intérêts ;
Attendu que le Tribunal de BATNA a dissous les liens du mariage des époux X.../Z... aux torts du mari «et sous sa seule responsabilité» ; que si cette décision a été rendue en dernier ressort en ce qu'elle prononce le divorce, en revanche les dispositions pécuniaires prises accessoirement en faveur de la femme sont, elles, susceptibles de recours ; que les dédommagements alloués à Hakima Z..., loin de se limiter à une réparation de principe dépourvue de valeur tangible, représentent approximativement la moitié du quantum des dommages et intérêts demandés par l'épouse ;
Attendu qu'il suit de ce qui précède que le tribunal de BATNA dans le ressort duquel Hakima Z... résidait depuis le 1er avril 2003 ainsi que l'atteste un timbre apposé sur son passeport, était, au regard des articles 1070 et 1071 du Nouveau Code de Procédure Civile, compétent pour connaître du divorce des époux X.../Z... à la date où le mari, le 27 avril 2003, a présenté sa requête initiale ; que pour le surplus le jugement algérien ne contient aucune disposition qui enfreigne l'ordre public international français ;
Attendu que l'ordonnance de non-conciliation du Juge aux Affaires Familiales français, rendue alors que les époux X.../Z... étaient régulièrement divorcés par la juridiction algérienne, doit être, partant, annulée ;
Attendu qu'il n'est pas démontré qu'Amar X... se soit, dans une intention dilatoire, abstenu de comparaître devant le premier juge ; que la demande d'indemnité formée de ce chef par Hakima Z... doit être écartée ;Attendu qu'il apparaît équitable de mettre à la charge d'Hakima Z..., au titre des frais exposés par Amar X... en cause d'appel et non compris dans les dépens, la somme de 500 Euros ;
PAR CES MOTIFS ;
Statuant publiquement et contradictoirement ;
Déclare nulle et de nul effet l'ordonnance entreprise ;
Déboute Hakima Z..., comme non fondée, de sa demande en dommages et intérêts formée contre Amar X... ;
Condamne Hakima Z... à payer à Amar X... une somme de 500 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne Hakima Z... aux dépens de première instance et d'appel ; dit que ces derniers seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.