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17/11/2005 | FRANCE | N°04/00868

France | France, Cour d'appel de Douai, 17 novembre 2005, 04/00868


COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 17/11/2005 * * * No RG : 04/00868 Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE statuant commercialement le 14 Janvier 2004 REF : TF/CP Inscription au RCS APPELANTE ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU D'HAZEBROUCK représenté par son Bâtonnier en exercice, Maître Hugues FEBVAY, dûment autorisé par délibérations du Conseil de l'ordre des Avocats du Barreau d'HAZEBROUCK des 26 novembre 2003 et 05 février 2004. ayant son siège social 16 Rue A Biébuyck 59190 HAZEBROUCK Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assisté de Ma

ître FEBVAY Hugues, Avocat au Barreau d'HAZEBROUCK INTIMÉS Maître...

COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 2 ARRÊT DU 17/11/2005 * * * No RG : 04/00868 Tribunal de Grande Instance de BÉTHUNE statuant commercialement le 14 Janvier 2004 REF : TF/CP Inscription au RCS APPELANTE ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU D'HAZEBROUCK représenté par son Bâtonnier en exercice, Maître Hugues FEBVAY, dûment autorisé par délibérations du Conseil de l'ordre des Avocats du Barreau d'HAZEBROUCK des 26 novembre 2003 et 05 février 2004. ayant son siège social 16 Rue A Biébuyck 59190 HAZEBROUCK Représentée par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués à la Cour Assisté de Maître FEBVAY Hugues, Avocat au Barreau d'HAZEBROUCK INTIMÉS Maître Sophie DEBAISIEUX LATOUR né le 02 Avril 1954 à CASABLANCA (MAROC) demeurant 20 rue Nationale - B.P. 71 - 59522 HAZEBROUCK CEDEX Représenté par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour Assistée de Maître MATHOT Philippe, Avocat au Barreau de DOUAI Maître Caroline BELVAL né le 17 Juin 1974 à LILLE (59000) demeurant 20 Rue Nationale BP 71 - 59522 HAZEBROUCK CEDEX Représenté par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour Assistée de maître MATHOT Philippe, Avocat au Barreau de DOUAI S.C.P. DEBAISIEUX-LATOUR-BELVAL prise en la personne de ses représentants légaux ayant son siège social 20 Rue Nationale - BP 71 - 59522 HAZEBROUCK CEDEX Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués à la Cour Assistée de Maître MATHOT Philippe, Avocat au Barreau de DOUAI COMPOSITION DE LA COUR LORS DES X... ET DU DÉLIBÉRÉ M. FOSSIER, Président de chambre M. ROSSI, Conseiller M. ZANATTA, Conseiller --------------------- GREFFIER LORS DES X... : Mme Y...
X... à l'audience publique du 06 Octobre 2005, Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2005 (date indiquée à l'issue des débats) par Monsieur FOSSIER,

Président, et Mme Y..., Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. OBSERVATIONS ÉCRITES DU MINISTÈRE PUBLIC : Cf réquisitions du 23 septembre 2005 ORDONNANCE DE CLÈTURE DU : 14 septembre 2005

[*****] Mme le Bâtonnier DEBAISIEUX LATOUR et Maître BELVAL, du Barreau d'Hazebrouck, ont fondé, par acte du 20 mars 2003, dûment enregistré à sa date d'effet du 1o avril 2003, une société civile professionnelle.

Elles ont sollicité du greffe de la juridiction commerciale d'Hazebrouck, selon requête enregistrée le 11 avril 2003, l'inscription de la société au registre de commerce et des sociétés. Elles ont déposé à cette fin les statuts de la S.C.P. et ont obtenu l'immatriculation sans réserve ni mention d'attente, le 28 avril 2003, soit au-delà du délai réglementaire d'un jour franc laissé au greffier par l'art. 31 du décret no 84-406 du 30 mai 1984.

Elles avaient, dès le 5 avril 2003, saisi le conseil de leur ordre l'inscription de la société civile professionnelle au tableau du barreau d'Hazebrouck. A l'issue de trois réunions des 28 avril, 6 mai et 4 juin 2003, cette inscription a été refusée par décision du 27 juin 2003 notifiée tant aux intéressées qu'à Monsieur le Procureur Général.

Madame le Bâtonnier DEBAISIEUX LATOUR et Maître BELVAL n'ont pas relevé appel. Elles ont complété ou modifié les statuts de leur société et ont à nouveau saisi le conseil de l'ordre à fin d'inscription de la S.C.P. au tableau. Elles ont obtenu finalement satisfaction par décision du 13 août 2003.

Ayant observé, selon un extrait K-bis levé au greffe commercial, que la S.C.P. avait conservé auprès de cet organisme l'immatriculation du 28 avril 2003, au vu des statuts de cette époque, l'Ordre des avocats du Barreau d'Hazebrouck a assigné les deux fondatrices de la S.C.P.

L'Ordre a fait valoir qu'une S.C.P. d'avocats n'est toujours constituée que sous la condition suspensive de l'inscription au barreau ; que l'immatriculation au R.C.S. ne peut donc être requise qu'après cette inscription et même, selon la lettre des textes, qu'au vu d'une ampliation de la décision du conseil de l'ordre ; que le greffier détenteur du R.C.S. doit refuser d'immatriculer les sociétés qui ne sont pas valablement constituées ; que les textes régissent précisément la forme et les délais de ce refus éventuel.

En la forme, l'Ordre, usant de l'exception territoriale de l'article 47 du nouveau code de procédure civile, a saisi le "vice-président du Tribunal de grande instance de Béthune, chargé de la surveillance du R.C.S., en référé", aux fins d'annulation et retrait de l'immatriculation du 28 avril 2003.

En cours d'instance au premier degré, le 5 décembre 2003 précisément, Mme le Bâtonnier DEBAISIEUX LATOUR et Maître BELVAL ont demandé et obtenu une régularisation de l'immatriculation de leur S.C.P. au registre de commerce et des sociétés, au vu des statuts tels qu'inscrits au tableau du barreau d'Hazebrouck sur décision de son ordre le 13 août 2003.

Le premier juge a, par ordonnance du 14 janvier 2004, dit "n'y avoir lieu à statuer sur la demande visant à faire constater l'irrégularité et la nullité de l'inscription" litigieuse ; et a par surcroît relevé son incompétence pour "interpréter les textes réglementaires, dire si le dépôt de pièces (du 5 décembre 2003) équivaut à une inscription rétroactive", et pour allouer des dommages et intérêts.

L'Ordre des avocats du Barreau d'Hazebrouck, en la personne de son

Bâtonnier qui avait été autorisé à agir par délibération du conseil de son ordre en date du 26-11-2003, en tout cas pour assigner en première instance, a d'initiative interjeté appel de l'ordonnance susdite. Devant la Cour, il reprend ses demandes d'annulation et de retrait et son argumentation de première instance.

Maîtres DEBAISIEUX LATOUR, BELVAL et la S.C.P. DEBAISIEUX LATOUR BELVAL concluent à la validation de l'inscription au R.C.S. et réclament une indemnisation pour procédure abusive (1.500 ç) et une somme pour leurs frais de procédure (3.000 ç), solidairement entre elles trois. En fait, elles font valoir que le conseil de l'Ordre a multiplié les demandes de renseignements, baptisées "ratiocinations ordinales", alors que la haute autorité du Bâtonnier Leleu consacrait l'exactitude des statuts de la S.C.P. ; qu'ayant enfin dû procéder à l'inscription le 13 août 2003, l'Ordre s'était alors livré à "la chicane", au point de dénier tout effet à la régularisation du 5 décembre 2003. En droit, les intimées affirment qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés d'annuler une immatriculation au R.C.S. ; qu'en effet, une telle annulation a des effets considérables, notamment sur le plan fiscal ; qu'en outre, une société existe à sa constitution, l'inscription au barreau d'une SCPA étant une simple condition suspensive ; que l'article 1179 s'applique par conséquent et donne valeur --au 13 août 2003 mais avec effet rétroactif au 20 mars 2003, date de signature des statutsû à la constitution de la société ; que les statuts agréés le 13 août 2003 sont eux-mêmes une simple régularisation des statuts d'origine, selon ce que prescrit l'article 1839 du Code civil ; que l'immatriculation au R.C.S. peut être faite avant l'inscription au Barreau puisque l'ampliation de cette inscription doit, selon la lettre du texte, être déposée "au greffe où a été faite la demande d'immatriculation" ; que si l'immatriculation a, en l'espèce, été faite prématurément,

l'inscription intervenue le 13 août 2003 a permis la régularisation de l'immatriculation, selon ce qu'admet l'article L 123-5-1 du Code de commerce.

Par ordonnance du 18.01.2005, le conseiller de la mise en état a refusé la communication forcée des délibérations du conseil de l'ordre à propos d'autres S.C.P. SUR QUOI, LA COUR

Attendu que les assignations du 28 novembre 2003 délivrées contre chacune des deux associées et contre la S.C.P.A. dont l'immatriculation est litigieuse, ont été faites "à la demande de l'Ordre des avocats au barreau d'Hazebrouck représenté par son bâtonnier en exercice, dûment autorisé par délibération du conseil de l'Ordre le 26.11.2003" ;

Attendu que la délibération du 26.11.2003 a porté sur cinq points d'ordre du jour, à savoir l'approbation du procès-verbal de la précédente réunion, sur les modalités d'une assurance "Représentation des fonds", sur le tableau de permanence pénale et de consultations gratuites, sur la rencontre avec les chefs du T.G.I. à propos de la mise en état et sur l'autorisation à donner au Bâtonnier d'ester en justice contre Madame le Bâtonnier Debaisieux-Latour, Maître Belval et leur S.C.P.A. ;

Attendu que les trois premières questions avaient été annoncées en toutes lettres à l'ordre du jour par courrier de convocation du 20 novembre 2003, tandis que la rencontre avec les chefs du T.G.I. et l'autorisation à donner au Bâtonnier d'ester en justice ont été abordées par le conseil de l'Ordre au titre de "questions diverses" ; Attendu que pour délibérer valablement, le conseil de l'Ordre doit être convoqué sur un ordre du jour explicite ; que cette exigence découle de ce que les barreaux sont les dépositaires d'une tradition démocratique aussi ancienne qu'originale, selon laquelle le président

de l'ordre et du conseil est indépendant de ce dernier et ne doit jamais surprendre sa religion, non plus qu'il ne pourrait se réclamer d'une confiance aveugle;

Que par suite, s'il est admis, comme dans d'autres groupements comportant des assemblées, que les convocations prévoient l'examen de "questions diverses", sans autre précision, une telle pratique est d'interprétation stricte s'agissant d'un conseil de l'ordre d'un barreau ;

Qu'elle doit être rigoureusement cantonnée aux débats qui ne nécessitent pas de votes, aux informations données par les uns aux autres, aux prolongements imprévus mais nécessaires des discussions annoncées à l'ordre du jour préalablement diffusé ou, en cas d'absolue nécessité et d'extrême urgence, aux questions nées de faits survenus entre la convocation du conseil et sa réunion ;

Qu'inversement, il n'est pas licite d'inclure dans des "questions diverses" l'un des attributs fondamentaux que confère aux conseils des ordres l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, singulièrement l'article 17-7o relatif aux actions en justice, plus encore lorsqu'il s'agit d'assigner un des membres du barreau, ancien bâtonnier et engageant par conséquent l'image de la compagnie judiciaire locale toute entière ;

Qu'en considération de ces principes, les membres du conseil de l'ordre peuvent décider d'être présents ou au contraire de privilégier d'autres engagements ; que de même, la précision de l'ordre du jour peut déterminer l'abondance des pièces préalablement envoyées aux membres de ce conseil ;

Attendu qu'il faut encore souligner que l'article 1-5 du Règlement intérieur du Barreau d'Hazebrouck, en vigueur à l'époque des faits et avant l'introduction du R.I.U., ne saurait guider la décision de la Cour en ce qu'il autorise le conseil de l'ordre à délibérer "sur un

ordre du jour complémentaire à la demande de plus de la moitié de ses membres", formulation qui n'est manifestement pas conforme aux principes et règles énoncés plus haut ;

Attendu qu'en l'espèce, désireux d'assigner en justice deux de ses confrères, en ce compris son prédécesseur dans les hautes fonctions du bâtonnat, ainsi que la société que ces deux avocates avaient formée, le Bâtonnier en exercice ne pouvait pas faire délibérer le conseil de l'ordre sur ce problème dramatique uniquement au titre des questions diverses ;

Que le Bâtonnier ne pouvait ni considérer qu'il prolongeait ainsi les autres points d'ordre du jour, sans aucun rapport avec l'immatriculation ou l'inscription au tableau des sociétés ou des avocats ; ni oeuvrer comme si la question -en réalité, connue depuis plusieurs mois- était née de faits survenu entre la convocation du conseil et sa réunion;

Qu'il en était d'autant plus ainsi que deux membres du conseil de l'ordre avaient décidé d'être absents représentés, selon les énonciations du procès-verbal du 26.11.2003, et auraient peut-être pris une autre position si le projet d'action en justice contre leurs consoeurs avaient été clairement annoncé dans la convocation ; qu'enfin, le Bâtonnier, s'il avait annoncé ses intentions, aurait pu aussi voir un intérêt à envoyer diverses pièces préalablement à la réunion du conseil pour éclairer la délibération, telles que l'immatriculation litigieuse ou des courriers échangés ;

Attendu que du tout il résulte que Monsieur le Bâtonnier Febvay n'a pas été autorisé valablement à agir en justice contre Madame le Bâtonnier Debaisieux-Latour, Maître Belval et la S.C.P. d'avocats Debaisieux-Latour-Belval ;

Qu'il s'est donc présenté devant ses juges sans qualité ;

Que son assignation étant nulle, la décision rendue à la suite l'est

aussi ; et que s'agissant d'un vice affectant l'acte introductif de l'instance, la Cour n'évoquera pas ;

Attendu, s'agissant des demandes reconventionnelles articulées sur les fondements des articles 1382 du Code Civil et 700 du nouveau code de procédure civile, que le Bâtonnier n'a agi que dans l'exercice de ses attributions, pour faire cesser une situation manifestement anormale ;

Qu'en conséquence, il n'existe pas de faute dont il faille assurer la sanction, non plus que de motifs de ne pas laisser à chacun la charge de ses dépens et frais irrépétibles; PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, en dernier ressort, Déclare nulles et de nul effet les assignations faites par le Bâtonnier du Barreau d'Hazebrouck contre Mes Debaisieux-Latour et Belval et la S.C.P.A. Debaisieux-Latour-Belval, le 28.11.2003 ainsi que l'ordonnance de référé qui a fait suite à Béthune le 14.01.2004 ; Laisse à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel, et dit n'a avoir lieu à l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en première instance non plus qu'en appel ; Accorde aux avoués constitués le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

C. Y...

T. Fossier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 04/00868
Date de la décision : 17/11/2005
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2005-11-17;04.00868 ?
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