COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 1 SECTION 1 ARRÊT DU 19/09/2005 * * * No RG : 04/02674 Tribunal de Grande Instance de HAZEBROUCK JUGEMENT du 07 Janvier 2004 REF : BR/VR APPELANTE S.A. AUTOMOBILES PEUGEOT ayant son siège social 75 Avenue de la Grande Armée 75016 PARIS Représentée par ses dirigeants légaux représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LEVASSEUR, avoués associés à la Cour assistée de Maître Thierry COURQUIN, avocat au barreau de HAZEBROUCK INTIMÉS Monsieur Frédéric X... né le 18 avril 1968 à ARMENTIERES demeurant 6 Hameau de Tas de Bois 59181 STEENWERCK représenté par la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, avoués associés à la Cour assisté de Maître Sylvain SPETEBROOT, avocat au barreau de LILLE S.A.R.L. VERSTRAETE MULTI MECANIQUE ayant son siège social Zone Industrielle de Kirlem Rue du Mortier 59181 STEENWERCK Représentée par son Gérant représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués associés à la Cour assistée de Maître Anne-Sophie ODOU, avocat au barreau de HAZEBROUCK DÉBATS à l'audience publique du 06 Juin 2005, tenue par Madame ROUSSEL magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 NCPC). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe. GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame HERMANT
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Madame ROUSSEL, Président de chambre Madame HIRIGOYEN, Conseiller Madame GUIEU, Conseiller ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2005 (date indiquée à l'issue des débats) par Madame ROUSSEL, Président, et Madame HERMANT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. ORDONNANCE DE CLÈTURE DU :
10 mai 2005
*****
Par jugement rendu le 07 janvier 2004, le Tribunal de Grande Instance d'HAZEBROUCK a :
- déclaré la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et la société Automobiles PEUGEOT responsables des dommages subis par Monsieur Frédéric X...,
- condamné la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE à payer à Monsieur Frédéric X... la somme de 8 761,70 euros,
- condamné la société Automobiles PEUGEOT à garantir la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE des condamnations mises à sa charge,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE à payer à Monsieur Frédéric X... la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- condamné la société VERSTRAETE MULTIMÉCANIQUE aux dépens.
La SA Automobiles PEUGEOT a relevé appel de cette décision.
Il est fait référence pour l'exposé des moyens et prétentions des parties devant la Cour à leurs dernières conclusions déposées le :
- 29 novembre 2004 par Monsieur Frédéric X... ;
- 01 décembre 2004 par la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE ;
- 14 mars 2005 par la SA Automobiles PEUGEOT.
Rappel des données du litige
Le 20 décembre 1997, Monsieur Frédéric X... a acquis auprès de la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE un véhicule neuf de marque Peugeot de type 306 XS DT au prix de 89 000 francs.
Suite à une panne intervenue sur autoroute, le 06 avril 2000, en raison d'une rupture de bielle ayant entraîné l'éventration du bloc moteur, Monsieur Frédéric X... a obtenu par ordonnance de référé rendue le 08 juin 2000 la désignation de Monsieur Y... en qualité d'expert.
Celui-ci a déposé son rapport le 21 mai 2001.
Par exploit en date du 1er août 2001, Monsieur Frédéric X... a fait assigner devant le Tribunal de Grande Instance la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE afin de voir prononcer la résolution de la vente par application de l'article 1641 du Code Civil et d'obtenir des dommages et intérêts.
Par exploit en date du 19 janvier 2002, la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE a appelé en garantie la SA Automobiles PEUGEOT.
La décision déféré a été rendue dans ces conditions. Sur les demandes de Monsieur Frédéric X...
Monsieur Frédéric X... sollicite à titre principal la résolution de la vente à lui consentie par la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et la condamnation in solidum de la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et de la SA Automobiles PEUGEOT à leur payer 7 950,73 euros à titre de dommages et intérêts.
Subsidiairement, si la Cour écartait l'action rédhibitoire, il demande de fixer à 7 870,55 euros le coût des réfections.
La société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et la SA Automobiles PEUGEOT s'opposent à ces demandes en exposant que la preuve de l'existence d'un vice caché au moment de la vente n'est pas rapportée. [* *] [* *]
Il ressort des éléments de la cause et notamment du rapport d'expertise judiciaire que le véhicule acheté neuf le 20 décembre 1997 par Monsieur Frédéric X... a fait l'objet le 06 avril 2000 d'une brusque rupture de bielle, avec éventration du bloc moteur, alors qu'il ne présentait que 50 000 kilomètres au compteur et qu'il circulait sur l'autoroute en 5ème vitesse, à environ 130 kilomètres heure.
Toute défaillance de Monsieur Frédéric X... en relation avec cette panne est à exclure dès lors que :
- les factures produites attestent que le véhicule avait fait l'objet d'un entretien régulier, avec vidange du carter d'huile et
remplacement du filtre à air,
- le prélèvement d'huile effectué par l'expert a permis d'établir que l'huile moteur avait eu une utilisation de l'ordre de 10 000 kilomètres avec bonne filtration de l'air d'admission, que les traces d'eau relevées provenaient du liquide de refroidissement, tombé dans le carter suite à la rupture du bloc moteur, et qu'en conséquence la qualité de l'huile ne pouvait être à l'origine de la panne,
- aucun rajout trop important d'huile n'est caractérisé,
- aucun autre désordre n'a été relevé suite à la panne.
Au vu de ces considérations, il ne peut qu'être retenu, conformément aux conclusions de l'expert, que la rupture de bielle est due à un défaut de construction, toute autre cause étant exclue.
Ce vice de construction est, de plus, corroboré par plusieurs articles de presse spécialisée, produits par Monsieur Frédéric X..., mentionnant pour des véhicules similaires de 1997 et 1998 des casses de bielles subies par de nombreux propriétaires entre 47 000 et 120 000 kilomètres, nécessitant le remplacement du moteur.
S'agissant d'un vice de construction, celui-ci existait nécessairement tant au moment de la vente par la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE à Monsieur Frédéric X... qu'au moment de la vente par le constructeur au premier acheteur, un garage hollandais.
Il est constant que compte-tenu de l'importance de la panne, l'acheteur ne l'aurait pas acquis en toute connaissance de cause.
En application de l'article 1644 du Code Civil et alors que Monsieur Frédéric X... sollicite à titre principal la résolution de la vente, il convient de faire droit à cette demande, étant relevé que l'importance de la panne rend légitime les doutes de Monsieur Frédéric X... sur la fiabilité future du véhicule.
La société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE devra en conséquence rembourser à Monsieur Frédéric X... le prix de vente soit 89 000 francs soit 13
567,96 euros et Monsieur Frédéric X... restituer le véhicule.
La vente étant effectuée par un vendeur professionnel, celui-ci est présumé connaître les vices l'affectant et est donc tenu à réparer le préjudice subi par l'acquéreur.
Les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice résultant pour Monsieur Frédéric X... du vice de construction, en relation avec le trouble de jouissance (2 000 euros), les frais de dépannage (73,93 euros) et le gardiennage (1 048,70 et 1 828,10 euros) ; Monsieur Frédéric X... ne justifie pas du surplus de ses prétentions de ce chef.
Il convient donc de lui allouer de ce chef la somme de 4 950,73 euros.
Cette somme sera mise à la charge in solidum de la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et de la SA Automobile PEUGEOT, celle-ci étant intervenue comme fabricant et vendeur à un garage hollandais et le sous-acquéreur étant recevable à exercer l'action en garantie des vices cachés contre le vendeur originaire, également professionnel. Sur l'appel en garantie formé par la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE contre la SA Automobile PEUGEOT
L'existence d'un vice de construction est caractérisé par les considérations sus-visées et la SA Automobiles PEUGEOT ne peut valablement invoquer le caractère hypothétique du vice affectant le véhicule neuf lors des ventes successives ;
Peu importe donc la non-application en l'espèce des articles 1386-1 et 5 du Code Civil qui ne concernent pas, en application de l'article 1386-2, la réparation du dommage résultant de l'atteinte au produit défectueux lui-même.
L'expiration du délai de garantie du constructeur d'un an s'avère inopérante en l'espèce alors que, s'agissant d'un défaut caché de la chose vendue, la garantie issue des articles 1641 et suivants est
applicable au professionnel, présumé connaître le vice dès lors que l'action a été engagée dans un bref délai après la découverte du vice et la mise en cause de la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE.
Le fait qu'il n'existe pas de lien contractuel direct entre la SA Automobiles PEUGEOT et la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE ne prive pas cette dernière de son droit d'action directe contre le fabricant vendeur, l'action étant transmise au sous-acquéreur.
Au vu de ces considérations, il convient de faire droit à l'appel en garantie formé par la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et de condamner la SA Automobiles PEUGEOT à la garantir de la condamnation à dommages et intérêts prononcée à son encontre.
En ce qui concerne le remboursement du prix et la restitution du véhicule, conséquence de la résolution de la vente intervenue entre la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et Monsieur Frédéric X..., aucune condamnation ne peut être prononcée contre la SA Automobiles PEUGEOT qui n'a pas bénéficié du prix versé par Monsieur Frédéric X... et à l'encontre de laquelle aucune demande en résolution de vente n'est formée. Sur les autres demandes
Les premiers juges ont fait une juste application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
L'équité ne commande pas de faire une nouvelle application de ce texte en appel.
Les dépens de première instance et d'appel engagés par Monsieur Frédéric X... seront supportés par moitié par les sociétés VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et Automobiles PEUGEOT, lesquelles supporteront, en outre leurs propres dépens et les frais d'expertise. PAR CES MOTIFS Statuant par voie de réformation partielle :
- Prononce la résolution de la vente du véhicule Peugeot 306 XS DT intervenue le 20 décembre 1997 entre la société VERSTRAETE MULTI
MÉCANIQUE et Monsieur Frédéric X... ;
- Condamne, en conséquence, la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE à rembourser à Monsieur Frédéric X... le prix soit 89 000 francs soit 13
- Condamne, en conséquence, la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE à rembourser à Monsieur Frédéric X... le prix soit 89 000 francs soit 13 567,96 euros (treize mille cinq cent soixante sept euros et quatre vingt seize centimes) ;
- Ordonne la restitution par Monsieur Frédéric X... à la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE du véhicule ;
- Condamne in solidum la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et la SA Automobiles PEUGEOT à payer à Monsieur Frédéric X... la somme de 4 950,73 euros (quatre mille neuf cent cinquante euros et soixante treize centimes) à titre de dommages et intérêts ;
- Reçoit l'appel en garantie formé par la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE contre la SA Automobiles PEUGEOT et condamne cette dernière à garantir la société VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE de la condamnation à la somme de 4 950,73 euros (quatre mille neuf cent cinquante euros et soixante treize centimes) ;
- Confirme le jugement déféré en ce qui concerne l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
- Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
- Condamne les sociétés VERSTRAETE MULTI MÉCANIQUE et SA Automobiles PEUGEOT à supporter chacune par moitié les dépens de première instance et d'appel engagés par Monsieur Frédéric X... dont distraction au profit de la SCP MASUREL-THERY-LAURENT, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
- Laisse à la charge de chacune de ces sociétés leurs propres dépens de première instance et d'appel, ainsi que les frais d'expertise.
Le Greffier,
Le Président,
N. HERMANT
B. ROUSSEL