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06/02/2003 | FRANCE | N°02/189

France | France, Cour d'appel de Douai, 06 février 2003, 02/189


COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 1 ARRÊT DU 06/02/2003 [* APPELANTS Madame Jacqueline X... veuve Henri Y... Z... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assistée de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS Monsieur Vincent Y... A... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assisté de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS Monsieur B... C... A... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assisté de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS Madame Nathalie

Y... Epouse B... C... Z... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-...

COUR D'APPEL DE DOUAI CHAMBRE 2 SECTION 1 ARRÊT DU 06/02/2003 [* APPELANTS Madame Jacqueline X... veuve Henri Y... Z... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assistée de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS Monsieur Vincent Y... A... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assisté de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS Monsieur B... C... A... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assisté de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS Madame Nathalie Y... Epouse B... C... Z... par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT, avoués à la Cour Assistée de Me MARCHADIER (SCP LAFARGE etamp; ASS), avocat au barreau de PARIS INTIMÉES D... V. prise en la personne de ses représentants légaux Z... par Me QUIGNON, avoué à la Cour Assistée de Me Ph. JOOS, avocat au barreau de SAINT-OMER S.A. C. agissant en la personne de SES REPRESENTANTS LEGAUX ayant son siège social Z... par Me QUIGNON, avoué à la Cour Assistée de Me Ph. JOOS, avocat au barreau de SAINT-OMER COMPOSITION DE LA COUR LORS DES E... ET DU DELIBÉRÉ Mme GEERSSEN, Président de chambre M. F..., M.ROSSI, Conseillers

--------------------- GREFFIER LORS DES E... : Mme G... E... à l'audience publique du 05 Décembre 2002, ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique du 06 Février 2003, date indiquée à l'issue des débats par Mme GEERSSEN, Président, qui a signé la minute avec Mme G..., Greffier, présents à l'audience lors du prononcé de l'arrêt. ORDONNANCE DE CLÈTURE DU 12 novembre 2002

*]

Vu l'ordonnance de référé du 26 décembre 2001 du Président du tribunal de commerce de CALAIS ayant débouté les consorts Y... de leur demande en ajournement de l'A.G.E. des actionnaires de la société C., prévue le 28 décembre 2001 et condamne ceux-ci à payer 10.000 X... au

titre des frais irrépétibles aux sociétés V. et C.;

Vu l'appel interjeté le 27 décembre 2001 par Mme Jacqueline X... veuve Y..., M.Vincent Y..., M.Bernard C..., Mme Nathalie Y... ( les consorts H...) ;

Vu les conclusions déposées le 31 octobre 2002 pour ceux-ci ;

Vu les conclusions déposées le 10 septembre 2002 pour la D... V. et la SA C. devenue SA X... ;

Vu l'ordonnance de clôture du 12 novembre 2002.

Attendu que Mme Veuve Henri Y..., son fils M.Vincent Y..., sa fille Mme Nathalie Y... et son gendre M.Bernard C... ( à l'exclusion de son autre fils M.Max Y...) ont interjeté appel aux fins de suspension des effets des décisions prises par l'A.G.E. de la SA C. (C.) convoquée pour le 28 décembre 2001 relatives à l'ordre du jour porté dans l'avis de convocation, d'interdiction de toute mesure de mise en application, d'interdiction de toute mesure de publicité, enregistrement comptable d'opérations d'apport jusqu'au prononcé d'une décision définitive du juge du fond sur la régularité de ces opérations d'apport, d'interdiction de toute convocation ou tenue d'assemblée générale d'actionnaires de la société X... (ex-société C.) tendant aux mêmes fins, de publication, dans un journal d'annonces légales de la décision, à la charge de la société X... ;

Ils font valoir que leur demande n'est pas nouvelle mais procède de celle formulée devant le premier juge adaptée à la circonstance que l'Assemblée générale extraordinaire s'est tenue en dépit de leur opposition ; que l'opération dont s'agit est une fusion acquisition par apport de la totalité de l'activité de la SA C. à la société anonyme D..., y compris la propriété du foncier par l'effet de baux emphytéotiques ; qu'une telle opération suppose la mise à la disposition des actionnaires de la société C. du rapport du commissaire aux apports déposé au greffe du tribunal de commerce et

non la seule communication aux actionnaires de la société D... ; que le projet de traité d'apport du 7 décembre 2001 et le rapport du commissaire auraient dû être mis à la disposition des actionnaires de la société C. au moins un mois avant la date de l'Assemblée générale extraordinaire (article 258 Décret 23 mars 1967 d'ordre public) dont ils rappellent qu'ils représentent 49 % ; que le commissaire aux apports vise l'article L 236-10 du Code de commerce et non l'article L 225-147 du code de commerce (augmentation du capital et droit de communication aux seuls actionnaires de la société bénéficiaire de l'apport en nature); que si les dirigeants peuvent ne pas opter pour le régime des fusions scissions, il est inconcevable que les actionnaires de la société C. n'aient pas un droit d'information égal à celui prévu en cas d'apport placé sous le régime de la fusion scission ; que le rapport du commissaire aux apports et le directoire de la société C. indiquent que l'opération sera rétroactive au 1er janvier 2001, or une augmentation de capital ne peut avoir d'effet rétroactif sauf en cas de fusion scission (article L 136-4 du code de commerce) ; qu'il s'agit donc d'une opération soumise au régime des fusions scissions n'ayant pas respecté le droit de communication aux actionnaires et l'Assemblée générale extraordinaire de la société C. est nulle, le juge des référés compétent pour ajourner une telle assemblée risquant de statuer dans des conditions irrégulières et la Cour pour suspendre tous les effets de cette assemblée dans l'attente de la décision des juges du fond ;

Attendu que les consorts Y... font valoir le péril de l'intérêt social, l'activité d'exploitation de carrières étant transférée à la société D... , la société C. devenant une sous-holding de la société V. (éloignement, de la filiale opérationnelle, du pouvoir de contrôle des minoritaires de la société mère); que la société V. doit donc être consultée or son conseil de surveillance n'est plus

régulièrement constitué et les gérants commandités, MM.Max et Hippolyte Y... se refusent à convoquer l'Assemblée générale extraordinaire des actionnaires de la société V. ; qu'il est inconcevable que seuls les gérants commandités de la société V. représentant 67 % des droits de vote participent seuls à l'Assemblée générale extraordinaire de la société C. ; qu'il y aurait violation du principe de séparation des organes de gestion et des organes de contrôle ; que par sa nature et sa portée, l'opération touche au coeur de l'objet social des deux sociétés concernées (C. et V.) ; que l'opération d'apport n'est pas une opération courante de gestion mais un acte de disposition susceptible d'appauvrir les sociétés concernées ;

Attendu que la société à commandite par action V. et la SA C. devenue SA X... concluent à la confirmation et à l'allocation de 3.050 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; elles exposent que la société C. a décidé d'apporter le droit d'exploiter le fonds d'industrie et de commerce d'extraction de matériaux et calcaires, granulats et marbres, outre le matériel d'exploitation, à une filiale créée spécialement, la société D..., contre échange de titres émis par la société bénéficiaire de l'apport dissociant ainsi les actifs immobiliers et patrimoniaux de l'activité d'exploitation ; Qu'il ne peut être tiré argument d'une erreur de visa de texte opérée par le commissaire aux apports dans son rapport ; elles soutiennent qu'il s'agit d'une cession du droit par la société D... d'exploiter des carrières, demeurant la propriété de la société C., proche de la convention de fortage voire de la vente de meubles par anticipation, et en aucun cas de l'apport d'un ensemble d'éléments d'actif et de passif d'une division de société constituant une exploitation autonome c'est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses

propres moyens ; que la conclusion de baux emphytéotiques a pour seul objectif de garantir à la société D... une durée d'exploitation des carrières suffisante ; que s'agissant d'un apport pur et simple, le rapport du commissaire n'avait pas à être communiqué aux actionnaires de la société C. mais à ceux de la société D..., conformément à la réglementation relative aux augmentations de capital ; qu'il ne faut pas confondre la date d'entrée en jouissance des éléments apportés qui peut être rétroactive avec la date de la réalisation juridique de l'apport, effective au jour de la décision de l'Assemblée générale extraordinaire le 28 décembre 2001 ; que si Mme Veuve Henri Y... a été exclue du conseil de surveillance de la société C. en juin 2000 c'est parce que les actionnaires du groupe B ne respectaient pas le pacte d'actionnaires du 2 mai 1991 ; que ladite exclusion résulte d'une décision collective intervenue dans le cadre du fonctionnement des sociétés C. et V ;

Sur la fin de non recevoir

Attendu que la demande de suspension des effets de la délibération d'Assemblée générale extraordinaire du 28 décembre 2001 de la société C. (devenue SA X...) n'est pas nouvelle par rapport à celle effectuée devant le juge des référés d'ajournement de cette Assemblée générale extraordinaire mais procède de la décision du juge des référés de laisser se tenir ladite Assemblée générale extraordinaire contestée par partie du groupe B d'actionnaires et de la décision qui y a été prise ;

Que la demande des consorts Y... est recevable ;

Sur l'abus de majorité

Attendu qu'avec la défection de Max Y..., fils de Mme Veuve Henri Y..., le groupe B d'actionnaires de la société C., de majoritaire, (70 % des actions) est devenu minoritaire (49 % des actions) ; qu'il lui appartient de démontrer que la transformation de la société d'exploitation de carrières SA C.. en société holding SA X... par apport de l'exploitation des carrières à une société D... ( qui se transformera en SAS C.) est contraire à son intérêt et réalisé dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité ;

Attendu qu'il sera rappelé que les héritiers des fondateurs Francis et Henri Y... ont apporté leurs actions de la société C. V. ayant pour objet l'exploitation de carrières à une société en commandite par actions la D... V. (ayant pour objet l'achat et la détention majoritaire d'actions de la SA C.) ; que le pacte d'actionnaires du 2 mai 1991 et le pacte social de la D... prévoyaient un directoire constitué par les deux chefs de file de chacun des groupes d'actionnaires, Hippolyte et Max Y..., et un Conseil de Surveillance faisant la part aux membres des deux groupes ; qu'une sentence arbitrale du 6 décembre 1996 a désigné Me W. pour voter au nom du groupe B à l'élection comme membres du Conseil de Surveillance de M. Philippe Y... et de Mme Véronique I... (groupe A) ; que le 23 juin 2000, Mme Veuve Henri Y... et M.et Mme B... et Nathalie E.-H. ont été révoqués de leur mandat de représentation au conseil de surveillance de la société D... ;

Attendu que le fait de filialiser la société C. en distinguant l'immobilier de l'exploitation ne peut être considéré en soi, hors l'examen au fond, comme l'expression de la volonté de la majorité d'appauvrir la minorité ; que si, devenir actionnaire d'une holding (X...) fait craindre une appréciation moindre que de rester actionnaire d'une société d'exploitation, la distinction actif

immobilier/exploitation a une logique économique et n'entraîne pas transmission universelle ; que le fait que le Conseil de Surveillance de la S.V. ne soit plus régulièrement constitué résulte de l'attitude des membres révoqués (M.et Mme C..., Mme Veuve Henri Y...) ; que le pacte d'actionnaires a prévu que les gérants commandités représentent les actionnaires aux assemblées générales de la société C.V. ; que d'éventuelles collaborations imposées par les autorités réglementaires ne sont pas la conséquence de la décision d'assemblée générale extraordinaire en cause ; que l'intérêt social de la société C. et de sa holding V. peut être aussi de créer une structure permettant, comme invoqué, l'intéressement et la participation des salariés ; que le risque de dilution du capital détenu par les minoritaires du fait de cette sous filialisation est hypothétique ; que la preuve d'une filialisation sans utilité sociale, et donc abusive, par le directoire de la D... V. n'est pas rapportée ;

Sur le défaut d'information des actionnaires de la société C.

Attendu que l'opération de filialisation par transfert de l'exploitation des carrières (objet social de C.V.H.) à une société D... contre augmentation de capital de celle-ci et prise de participation financière pour la société C. devenant SA X... n'est pas une opération de fusion ni une opération de scission, ni l'apport d'une branche autonome d'activité ; que la société apporteuse reste propriétaire de la trésorerie et de l'immobilier et ne transfère que l'exploitation, ce qui entraîne convention de bail emphytéotique et droit de fortage ; qu'il n'y a pas transmission universelle de patrimoine ; que le fait que le commissaire aux apports ait visé par erreur l'article relatif aux opérations de fusion scission au lieu de l'article relatif aux apports en nature, contrairement à l'ordonnance présidentielle le désignant, ne peut être retenu comme le signe d'une volonté des dirigeants de la société C. de soumettre l'opération au

régime des fusions scissions ; que, dans le cadre des apports en nature, l'article 169 du Décret du 23 mars 1967 prévoit que le rapport du commissaire aux apports est tenu à la disposition des actionnaires au siège social huit jours au moins avant la date de l'Assemblée générale extraordinaire ; qu'il n'est pas contesté que c'est ce qui a été fait ; que les critiques sur le non respect des dispositions de l'article 258 du même décret sont inopérantes s'agissant d'un texte visant l'information des actionnaires en cas de fusion ou de scission ; que s'agissant d'un apport de biens corporels ou incorporels sans transmission universelle de patrimoine alors que la faculté de soumission au régime des fusions scissions n'a pas été choisie par les sociétés apporteuse et bénéficiaire, seul l'accord individuel des créanciers est nécessaire ce qui fut fait par le recueil de l'accord des crédits bailleurs pour le matériel et la non transmission des emprunts et comptes fournisseurs ; que le fait que l'entrée en jouissance des éléments apportés soit rétroactive au 1er janvier 2001 n'est pas assimilable à une rétroactivité de l'augmentation de capital, possible uniquement en cas de fusion ou de scission ; que les dispositions de l'article L 225-147 du code de commerce, seules applicables, ont été respectées ;

Attendu qu'il n'est rapporté la preuve de la nécessité de faire cesser aucun trouble manifestement illicite ou de prévenir un dommage imminent (entrée en vigueur de la délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 28 décembre 2001) par les consorts Y... (partie du groupe B d'actionnaires) ; qu'il n'y a lieu d'ordonner la suspension des effets de la décision prise par l'Assemblée générale extraordinaire de la SA C.. le 28 décembre 2001 ;

Sur la demande en article 700 du nouveau code de procédure civile

Attendu qu'il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.

P A R C C... D... M O T I X... D...

Statuant publiquement, contradictoirement et en appel de référé,

DECLARE l'appel principal recevable ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise ;

REJETTE la demande en article 700 du nouveau code de procédure civile ;

CONDAMNE les consorts H... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Le Greffier

Le Président

J.DORGUIN

I.GEERSSEN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 02/189
Date de la décision : 06/02/2003

Analyses

SOCIETE ANONYME - Assemblée générale - Décision

Le fait de filialiser une société anonyme, en distinguant l'immobilier de l'exploitation, ne peut être considéré en soi, hors examen au fond, comme l'expression de la volonté de la majorité d'appauvrir la minorité. En l'espèce la preuve d'une filialisation sans utilité sociale, et donc abusive, n'est pas rapportée


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2003-02-06;02.189 ?
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