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20/01/2003 | FRANCE | N°7186

France | France, Cour d'appel de Douai, 20 janvier 2003, 7186


COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRES REUNIES

ARRET DU 20/01/2003 Jugement du TGI de BOBIGNY du 9 juin 1993 Arrêt de la Cour d'Appel d'AMIENS du 18 Janvier 1999 Arrêt de la Cour de Cassation du 31 octobre 2001 REF : IG/CP APPELANT Monsieur Georges X... Y... par la SCP MASUREL-THERY, avoués à la Cour Assisté de Maître BERTHAULT, avocat au barreau de VERSAILLES INTIMES Monsieur Gilbert Z... Y... par Maître LENSEL , avoué à la Cour Assisté de Maître CHEVROT, avocat au barreau de PARIS Madame Evelyne C. A... par Maître LENSEL , avoué à la Cour Assistée de Maître CHEVROT, a

vocat au barreau de PARIS Maître H. ès qualités d'administrateur judiciaire...

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRES REUNIES

ARRET DU 20/01/2003 Jugement du TGI de BOBIGNY du 9 juin 1993 Arrêt de la Cour d'Appel d'AMIENS du 18 Janvier 1999 Arrêt de la Cour de Cassation du 31 octobre 2001 REF : IG/CP APPELANT Monsieur Georges X... Y... par la SCP MASUREL-THERY, avoués à la Cour Assisté de Maître BERTHAULT, avocat au barreau de VERSAILLES INTIMES Monsieur Gilbert Z... Y... par Maître LENSEL , avoué à la Cour Assisté de Maître CHEVROT, avocat au barreau de PARIS Madame Evelyne C. A... par Maître LENSEL , avoué à la Cour Assistée de Maître CHEVROT, avocat au barreau de PARIS Maître H. ès qualités d'administrateur judiciaire de M. Gilbert Z... Y... par Maître LENSEL , avoué à la Cour Assisté de Maître CHEVROT, avocat au barreau de PARIS Maître M. ès qualités de représentant des créanciers au redressement judiciaire de M. Gilbert Z... B... pas constitué avoué COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE Mme GEERSSEN, Président de chambre, faisant fonctions de Premier Président, désigné

par Ordonnance du 12 juillet 2002 pour remplacer le Premier Président empêché Mme LAPLANE, Conseiller M. DEJARDIN, Conseiller M. ANSSENS, Conseiller M. ROSSI, Conseiller GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme HONORE-FERNEZ, greffier en chef DEBATS à l'audience publique et solennelle du 21 Octobre 2002 ARRET CONTRADICTOIRE prononcé à l'audience publique et solennelle du 20 janvier 2003, date indiquée à l'issue des débats par Mme GEERSSEN, Président, qui a signé la minute avec Mme HONORE-FERNEZ, Greffier en chef. ORDONNANCE DE CLOTURE DU :

[*

Sur le rapport de Madame GEERSSEN, président,

Vu la saisine de cette Cour le 20 décembre 2000 par M. Georges X..., propriétaire d'un immeuble depuis le 22 octobre 1991 au RAINCY ayant pour locataires commerciaux M. et Mme Georges C... ;

Vu le jugement contradictoire du 9 juin 1993 du tribunal de grande instance de BOBIGNY;

Vu l'arrêt de la Cour d'appel D'AMIENS du 18 janvier 1999 ( saisie sur renvoi après cassation de la Cour d'appel de PARIS (du 12 janvier 1995) ayant confirmé ce jugement ;

Vu l'arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation du 31 octobre 2000 cassant cet arrêt et renvoyant l'affaire devant cette Cour, condamnant M. et Mme Z... à payer 12.000 F à M. X... au titre de ses frais irrépétibles ;

Vu les conclusions déposées le 8 octobre 2001 pour M. X... ;

Vu les conclusions déposées le 9 janvier 2002 pour M. et Mme Gilbert C..., et les conclusions de reprise d'instance du même jour du nouvel avoué ;

*]

Le 22 octobre 1991, M. X..., nouveau propriétaire de l'immeuble, a

donné congé aux époux Z... locataires du sous-sol, rez-de-chaussée et premier étage, avec offre de renouvellement pour une durée de neuf ans à compter du 1er juillet 1992 au prix de 90.000 F par an en raison des circonstances autorisant le déplafonnement;

Le 31 octobre 1991, M. et Mme Z... ont accepté le renouvellement pour neuf ans à compter du 1er juillet 1992 et offert 32.474 F par an ;

Le 22 décembre 1992, M. X... a donc assigné M. et Mme Z... devant le juge des loyers commerciaux de BOBIGNY, justifiant le déplafonnement par la réalisation de travaux d'amélioration par le locataire en 1981 ne pouvant être pris en compte que lors du second renouvellement et par la modification des facteurs locaux de commercialité ;

Le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de BOBIGNY le 9 juin 1993 a refusé le déplafonnement, ordonné expertise aux fins de dire s'il y avait modification des facteurs locaux de commercialité et déterminer la valeur locative au 1er juillet 1992, en attendant il a ordonné l'exécution provisoire et fixé le loyer provisionnel à la somme offerte par les locataires soit 32.474 F.

L'arrêt de la Cour d'appel de PARIS (12 janvier 1995) saisie par M. X... a été cassé au visa de l'article 455 du nouveau code de procédure civile par arrêt de la 3ème chambre civile du 5 mars 1997 et l'affaire renvoyée devant la Cour d'appel d'AMIENS ;

La Cour d'appel d'Amiens le 18 janvier 1999 a donné tort à M. X..., le loyer ayant déjà été déplafonné lors du premier renouvellement, les améliorations apportées au 1er étage et à la façade ne peuvent être prises en considération lors du deuxième renouvellement ;

Sur pourvoi de M. X..., cette motivation a été cassée par arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation le 31 octobre 2000 au visa des articles 23-3 et 23-6 du décret du 30 septembre 1953, les améliorations apportées aux lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si directement, ou indirectement

par l'acceptation d'un loyer réduit par exemple, le bailleur en a assumé la charge ; la Cour d'appel de DOUAI a été désignée cour de renvoi ;

Le 20 décembre 2000, M. X... a saisi notre Cour ; ***

M. X... expose que le bail d'origine remonte au 26 mars 1956 avec effet au 1er juillet 1956 jusqu'au 30 juin 1965 moyennant 130.000 anciens francs annuels ; qu'il a été renouvelé le 17 novembre 1967 avec effet au 1er juillet 1965 jusqu'au 30 juin 1974 moyennant 5.000 F annuels ; que par renouvellement du 29 janvier 1975 à effet au 1er juillet 1974 jusqu'au 30 juin 1983, le loyer a été porté à 8.664 F (et non 8.864 francs comme indiqué par erreur) annuels ; que par renouvellement à effet du 1er juillet 1983, le loyer s'est établi à 25.000 F soit après des travaux effectués par les époux Z... en 1981; ; que par révision du 3 mars 1987 à effet du 1er juillet 1986, celui-ci est devenu 27.737 F et par révision du 17 août 1989, 29.926 F annuels sans actualisation du dépôt de garantie ;

Il relève que le bail du 29 janvier 1975 décrivait les lieux comme "une boutique d'angle salon de dames sur le boulevard et une petite pièce derrière, sous-sol divisé en caves et cuisine, premier étage au-dessus de la boutique deux chambres communiquant avec le dessous", de telle sorte que seuls les locaux du rez-de-chaussée étaient à usage commercial ; qu'après les travaux réalisés par les preneurs M. et Mme Z... , en 1981, lors du renouvellement signé le 11 octobre 1985, la désignation est devenue "rez-de-chaussée : boutique d'angle, salon de dames sur le boulevard, couloir sur cour, sous-sol, salon de coiffage, lavage, buanderie, chaufferie, premier étage, salon de coiffage, cabine de soins, coin repos, W.C.", de telle sorte que la totalité des locaux est désormais commerciale ; que le rez-de-chaussée a une surface de 28 m2, le sous-sol 29,5 m2 tout

comme le premier étage 29,5 m2, total 87 m2 ; que la surface commerciale a ainsi plus que triplé par rapport au bail d'origine ; que même si on admet la thèse de M. et Mme Z... selon laquelle le sous-sol était déjà à usage commercial, l'augmentation de surface commerciale est alors de 51 %; que ces travaux ne pouvaient constituer un motif de déplafonnement en 1983 lors du renouvellement précédent en raison du principe posé par l'article 23-3 du décret du 30 septembre 1953 selon lequel les améliorations exécutées par le preneur dont le bailleur n'a pas assumé la charge ne peuvent être prises en considération pour la détermination du loyer du bail renouvelé mais constituent un motif valable de déplafonnement à l'occasion du second renouvellement (3ème chambre civile 28 juin 1989- Bull n°151 - 10 juillet 1991 Bull n°206) que le loyer, contractuellement fixé à 25.000 F en 1983 est très proche du loyer résultant de l'application du coefficient à savoir 2,55 soit un loyer de 22.603 F, de telle sorte que le loyer convenu ne peut être considéré comme la prise en compte de la nouvelle affectation des lieux ; que le loyer en raison de la modification des éléments visés à l'article 23-3 du Décret 30 septembre 1953 doit être déplafonné et fixé selon valeur locative déterminée par l'expertise soit 57.000 F annuels à compter du 1er juillet 1992 ; il sollicite 20.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. ***

Attendu que M. et Mme Z..., cessionnaires du fonds le 29 octobre 1971 (et non 1991 comme indiqué par erreur dans les conclusions) font valoir que les travaux de 1981 ont entraîné une modification notable des caractéristiques propres aux locaux justifiant le déplafonnement lors du premier renouvellement en 1985, l'installation du sous-sol existant depuis au moins le 1er juillet 1956 ; ils invoquent à cet égard cinq attestations ; qu'en 1981, ils ont, avec l'accord du bailleur de l'époque, transformé le premier étage en salon de

coiffage, cabine de soins, W.C, coin repos ; que de tels travaux modifient notablement les caractéristiques propres des locaux et ne sont pas des travaux d'amélioration des lieux ; l'adjonction du 1er étage à usage commercial ayant entraîné une modification d'un tiers des locaux affectés à l'activité commerciale , or, (3ème chambre civile 4 novembre 1998 Bull n° 205) si les travaux exécutés par les preneurs modifient notablement les caractéristiques des locaux, le déplafonnement ne peut être demandé qu'au premier renouvellement ; ils invoquent l'article 23-1 du décret et non comme M. X... l'article 23-3 du même décret, l'augmentation d'un tiers de la surface commerciale et la modification de la façade n'étant pas une amélioration mais une modification des caractéristiques du local; subsidiairement, si la Cour juge qu'il s'agit de travaux d'amélioration , ils estiment que le loyer ne pourra être déplafonné puisqu'il l'a déjà été le 1er juillet 1983, les dispositions de l'article 23-3 du Décret n'étant pas d'ordre public et les parties ayant convenu lors du premier renouvellement suivant la réalisation des améliorations, de réévaluer le loyer d'un commun accord en tenant compte des nouvelles caractéristiques des locaux, par dérogation à l'article 23-3 alinéa 2 du décret; ils sollicitent la confirmation du jugement, la fixation du loyer principal annuel à la somme de 5.255,53 euros (34.474,02 F) à compter du 1er juillet 1992, 762,25 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive, 2.286,74 euros au titre de leurs frais irrépétibles..

M. Z... bénéficie d'un plan de continuation après sa mise en redressement judiciaire le 16 juillet 1997, M.H. étant commissaire à l'exécution du plan ;

***

Attendu que les parties disputent du point de savoir si les travaux effectués par M. et Mme Z... en 1981, dix ans après être entrés dans les lieux, constituent des travaux d'amélioration (autorisant le déplafonnement dans les conditions de l'article 23-3 du décret du 30 septembre 1953) ou des travaux ayant entraîné une modification notable des éléments déterminant la valeur locative (article L 145-34 du code de commerce ; ex article 23-6 du décret précité) autorisant le déplafonnement lors du premier renouvellement ;

Attendu que les travaux effectués par M. et Mme Z... ont nécessité un permis de construire (12 novembre 1981) sans création de surface de plancher et ont consisté à moderniser la façade, et à transformer le premier étage (deux chambres) en surface de réception de la clientèle en augmentant ainsi la surface commerciale de 51 % (salon de coiffage - cabine de soins - coins repos - WC (confère les plans d'architecte déposés à l'appui de la demande de permis et les attestations versées par M. et Mme Z... établissant l'usage par la clientèle du sous-sol depuis longtemps ; que de tels travaux n'ont pas modifié notablement les éléments qui déterminent la valeur locative mais amélioré les lieux loués (3ème Civ. 25 avril 1990 - Loyers et Copropriété Nov 90 N° 434 ; 3ème Civ. 21 mars 2001 Dalloz J 2039 - 3ème Civ. 17 juillet 1996 Loyers et Copropriété N° 18) ;

Attendu que ces travaux mentionnés lors du renouvellement du bail le 11 octobre 1985 (à effet au 1er juillet 1983) ont entraîné "la fixation d'un commun accord compte tenu des modifications apportées aux locaux du chef du locataire à 25.000 francs à compter du 1er juillet 1983" alors que selon les dispositions de l'article 23-3 du décret du 30 septembre 1953 ils ne pouvaient donner lieu à déplafonnement que lors du second renouvellement soit le 1er juillet

1992 ; qu'un locataire peut renoncer au bénéfice du plafonnement ; que plafonné le loyer aurait été de 22.603 francs (coefficient 2,55) que fixée à 25.000 francs il ne peut être considéré ni qu'il y a ainsi lieu à fixation d'un loyer déplafonné (au 1er juillet 1992 le loyer plafonné s'établit à 34.457 francs l'an et déplafonné à 57.000 francs par an), ni que les parties ont ainsi entendu déroger conventionnellement à l'article 23-3 du décret ; que d'une différence aussi faible entre le loyer plafonné et le loyer convenu ne peut être déduit une renonciation au bailleur à se prévaloir du déplafonnement lors du second renouvellement, d'autant que le bailleur ne peut exiger un déplafonnement en cas d'amélioration des lieux loués par le seul locataire lors du premier renouvellement;

Attendu que la demande de M. X... en fixation d'un loyer déplafonné à compter du 1er juillet 1992 sur la base de l'expertise Z... effectuée le 3 octobre 1996 et non critiquée, soit 1.100 francs X 52,13 m = 57.000 francs l'an, sera donc accueillie ;

Attendu sur la demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile de M. X..., qu'il est équitable de lui laisser la charge de ses frais irrépétibles ; PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,

Déclare l'appel de M. X... recevable.

Infirme le jugement entrepris mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à déplafonnement du chef des travaux réalisés en 1981 par le locataire.

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que les travaux effectués par le locataire constituaient des travaux d'amélioration des lieux loués (article 23-3) donnant lieu à déplafonnement du second renouvellement (1er juillet 1992) ;

Fixe la valeur locative à compter du 1er juillet 1992 à 57.000 francs

l'an avec intérêts au taux légal sur les compléments de loyers dus à compter de la date d'échéance de chaque terme.

Rejette la demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile de M. X...

Condamne M. et Mme Z... aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER EN CHEF,

LE PRESIDENT,

C. Honoré-Fernez

I. Geerssen


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 7186
Date de la décision : 20/01/2003

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Prix - Fixation du loyer du bail renouvelé - Plafonnement - Exceptions - Modification des éléments de calcul du loyer - Modification intervenue au cours du bail précédant le bail expiré - Amélioration des lieux loués - Prise en compte lors du précédent renouvellement - Absence d'influence - /

En application des articles 23-3 et 23-6 du décret du 30 septembre 1953 ldoit être accueillie la demande d'un bailleur tendant à la fixation du loyer à la valeur locative dès lors que des améliorations ont été réalisées pendant le bail pré- cédant le bail à renouveler même lsi e loyer avaitdéjà été déplafonné lors du premier renouvellement.


Références :

Décret du 30 septembre 1953, article 23-3

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2003-01-20;7186 ?
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