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26/04/2002 | FRANCE | N°1996/9738

France | France, Cour d'appel de Douai, 26 avril 2002, 1996/9738


ARRET DU 26 Avril 2002

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale No 599/02

Prud'Hommes - RG R 96/09738 APPELANT : Monsieur Claude X... 62500 ST OUER Représenté par Maître LEGRU Stagiaire Assisté de Maître LEFEVRE substituant Maître DEFFRENNES (Avocat au Barreau de LILLE) INTIMEE : Madame Marie Thérèse Y....

62120 MAMETZ

Comparante en personne Assistée de Z... A... (Délégué Syndical CFDT) régulièrement mandaté DEBATS : l'audience publique du 20 Mars 2002

Tenue par P. ROSSI, magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plai

doiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la ...

ARRET DU 26 Avril 2002

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale No 599/02

Prud'Hommes - RG R 96/09738 APPELANT : Monsieur Claude X... 62500 ST OUER Représenté par Maître LEGRU Stagiaire Assisté de Maître LEFEVRE substituant Maître DEFFRENNES (Avocat au Barreau de LILLE) INTIMEE : Madame Marie Thérèse Y....

62120 MAMETZ

Comparante en personne Assistée de Z... A... (Délégué Syndical CFDT) régulièrement mandaté DEBATS : l'audience publique du 20 Mars 2002

Tenue par P. ROSSI, magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré. GREFFIER: Z... DAIX COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE B... C...

PRESIDENT DE CHAMBRE P. ROSSI

CONSEILLER J. LEBRUN CONSEILLER en service extraordinaire ARRET:

Contradictoire sur le rapport de P. ROSSI

prononcé à l'audience publique du 26 Avril 2002 par B... C..., Président, lequel a signé la minute avec le greffier Z... DAIX D... jugement du 21 octobre 1996, le Conseil de Prud'hommes de SAINT OMER a condamné Monsieur Claude X... à payer à Madame Marie-Thérèse Y...

les sommes de: - 70.000 francs à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, - 1.500 francs au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Monsieur B... a, le 28 octobre 1996, interjeté appel de cette décision et il demande la Cour d'infirmer le jugement, de dire que le licenciement économique de la salariée est fondé sur une cause réelle et sérieuse, de la débouter de ses demandes, et de la condamner à lui verser la somme de 762,25 euros au titre de ses frais irrépétibles ; Il expose qu'il a repris le cabinet d'assurances P.F.A. Agence de SAINT-OMER MORINIE à compter du 1" janvier 1995, ce cabinet ayant connu d'importantes difficultés de gestion, au vu du seul budget prévisionnel établi par le cédant Que, compte tenu de la situation de l'entreprise, il a, en vain, essayé de mettre en place une réduction du temps de travail de Madame Y... grâce à une intervention du F.N.E. ; Qu'il a dû constater une déperdition de clientèle, une chute du chiffre d'affaires ainsi que du rapport sinistres/prime, de sorte qu'il s'est trouvé amené à licencier Madame Y..., en avril 1995, par lettre invoquant un motif conjoncturel ainsi qu'un motif structurel de réorganisation de l'entreprise Il soutient que le poste de l'intéressée a effectivement été supprimé, puisque les tâches qu'elle exécutait l'ont été par la suite, à titre bénévole, par son épouse ; Madame Y... conclut à la confirmation du jugement, sauf à porter le quantum des dommages et intérêts alloués à la somme de 15.244,90 euros, et à lui allouer la somme de 762,25 euros pour les frais hors dépens exposés en première instance et en appel , Elle déclare renoncer à sa demande subsidiaire formée au titre de la requalification de son contrat de travail à durée indéterminée ; Elle fait valoir qu'elle a été embauchée en mars 1977 par Monsieur Z... qui a quitté la direction de l'agence en août 1993, date à partir de laquelle la gestion a été assurée par le G.I.E. GFA AGENCES; Qu'à la suite d'un audit effectué en octobre

1993, le gestionnaire intérimaire a, en mars 1994, mis en oeuvre, dans des conditions favorables pour les intéressés, le licenciement économique de quatre employés sur les six travaillant alors à l'agence Qu'ainsi l'activité de l'entreprise avait été fortement réduite Elle conteste donc la réalité des motifs invoqués à l'appui de son licenciement, indiquant que l'épouse de son employeur a repris l'exécution des tâches qui lui incombaient ; Elle affirme que contrairement à ce qui y est mentionné dans la lettre de rupture, aucun poste ne lui a été proposé SUR CE, LA COUR Attendu que la lettre de licenciement, datée du 14 avril 1995, et notifiée à Madame Y... à la suite de l'entretien préalable à son éventuel licenciement qui avait eu lieu le 7 avril 1995, est ainsi motivée : - raison conjoncturelle pour des raisons de viabilité. En effet, suite à la reprise du cabinet au lerjanvier 1995, il avait été établi un budget prévisionnel dans lequel avait été prévu un développement du chiffre d'affaires nécessaire à la viabilité de l'exploitation commerciale de l'agence, et au maintien des emplois en l'état. Du fait de la faible marge de manoeuvre du budget prévisionnel, nous étions convenu de la mise en place d'une convention FNE avec passage à temps partiel de 39 heures à 31 heures de votre temps de travail, et ce en plein accord avec vous, compte tenu de votre connaissance de la situation afin de pallier à de possible problèmes lors de cette reprise. Début avril, il nous faut faire le constat suivant: le projet de convention FNE n'ayant pas abouti et, face aux montants des remboursements et annulations gommant le développement du chiffre d'affaires, les limites de l'exploitation commerciale de ce cabinet apparaissent et rendent caduques la viabilité de cette agence. La suppression de votre poste de travail est destinée à alléger les charges pesantes sur cette agence et a pour but de favoriser la pérennité du cabinet. - raison structurelle liée au profil de poste quej'aurai souhaité

vous confier et qui ne me semble pas correspondre à vos aspirations Attendu que le coût élevé du travail d'un salarié ne peut constituer un motif économique de licenciement que si des difficultés économiques sérieuses empêchent d'en assurer la charge et si la sauvegarde de l'entreprise justifie la diminution de la masse salariale ; Attendu qu'il ressort de la lettre de licenciement que le motif qualifié de conjoncturel est fondé sur la nécessité de réduire les charges de l'entreprise par une suppression du poste de la salariée Que l'épouse de l'employeur a continué à exécuter les tâches de l'intéressée, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Monsieur B... faisant valoir qu'elle intervenait bénévolement en qualité de conjoint collaborateur, sans cependant apporter de pièces à l'appui de cette affirmation et donc sans établir le caractère bénévole de l'intervention de son épouse ; Attendu, surtout, que la chronologie des faits révèle que les difficultés causées notamment par la gestion d'un précédent agent général avaient justifié un audit effectué en 1993 et que la reprise de cette agence s'était faite en tenant compte de ces circonstances particulières et dans les conditions précisées par un courrier du 2 août 1994 à savoir : - d'une part, en ce qui concerne les opérations TIARD, un achat à hauteur de 60% des droits de créances attachés au portefeuille transmis, pour une valeur estimée à un million de francs, par le versement comptant de la somme de 180.000 francs ainsi que par un financement bancaire remboursable sur dix ans et prévoyant un différé de deux ans, le solde, soit 40%, devant être payé le ler janvier 1998; - d'autre part par un règlement comptant de la valeur des droits de créance attachés au portefeuille VIE; Qu'au cours de la gestion intérimaire de l'agence il avait été procédé au licenciement de quatre salariés et à une nouvelle répartition des tâches ; Attendu que pour établir la réalité des difficultés et la nécessité d'alléger les charges de l'entreprise

l'employeur invoque ses obligations de remboursement, alors qu'un différé de deux ans avait été accordé et que la rupture a été mise en oeuvre dès le troisième mois de l'exploitation de l'agence par Monsieur B... ; Qu'il fait valoir l'existence d'annulations gommant le développement du chiffre d'affaires , sans cependant produire sur ce point d'éléments à l'appui de son allégation; Que les comptes de l'entreprise ne sont pas produits, mais seulement des tableaux de bord d'où il ne ressort pas que la situation financière de l'entreprise était telle que la suppression d'un emploi salarié se soit alors imposée ; Qu'il apparaît que cette suppression avait pour finalité de réduire les charges en maintenant, voire en améliorant, le revenu personnel de l'exploitant lequel ne pouvait ignorer les difficultés de la reprise négociée aux conditions exposées ci-dessus, et qui n'apporte aucun élément permettant d'affirmer que ces conditions n'avaient pas été déterminées en tenant compte de la réalité de la situation économique de l'agence, étant ajouté que la réduction d'effectif mise en oeuvre antérieurement apparaissait, au vu des pièces de la procédure, suffisante pour assurer un équilibre de l'exploitation et un revenu personnel suffisant de l'intéressé, d'autant que la précipitation avec laquelle la suppression de l'emploi salarié a été décidée est plus l'expression d'une anticipation sur des difficultés envisagées ou hypothétiques que la conséquence de l'aggravation d'une situation brutalement révélée, l'employeur ayant, avant même le 1 ' janvier 1995, tenté de mettre en place une réduction aidée du temps de travail de la salariée, alors que la valeur du portefeuille indiquée ci-dessus pouvait encore être déterminée sur la base des quittances émises pendant les douze mois précédant l'entrée en fonction , Que la reprise d'une entreprise en difficulté ne peut à elle seule justifier le licenciement pour motif économique d'un salarié lorsque il apparaît notamment que le

repreneur a pu prendre en compte la situation de celle-ci lors de la négociation des conditions de cette reprise Attendu que le motif structurel invoqué dans la lettre de rupture ne correspond aucunement à une réorganisation de l'entreprise, mais apparaît lié à un motif inhérent à la personne de la salariée Qu'il est au demeurant contesté par celle-ci qu'une offre quelconque lui ait été présentée, cette hypothèse s'avérant en outre peu compatible avec la taille et l'organisation de l'agence, alors que l'employeur n'en établit aucunement la réalité Qu'il soutient, sur ce point, qu'il a été amené à réorganiser l'exploitation du fonds sans qu'il ressorte des éléments de la procédure que cette réorganisation s'avérait incompatible avec un maintien de l'emploi en cause, ni même qu'elle ait été effective, et, compte tenu des réorganisations antérieures évoquées ci-dessus, nécessaire au maintien de la compétitivité de l'agence; Attendu, au contraire, que l'employeur reconnaît ainsi qu'il aurait pu procéder à un reclassement de la salariée, alors que la réalité de l'exécution de cette obligation n'est aucunement établie ; Attendu, en conséquence, qu'il convient de confirmer le jugement en disant le licenciement dépourvu de cause économique réelle et sérieuse ; Attendu que la salariée fait valoir qu'elle a été au chômage pendant un an, alors que l'employeur rétorque qu'elle a suivi une formation professionnelle en mai 1995 dans le cadre de la convention de conversion et retrouvé du travail en avril 1996). Attendu que compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci, la cour estime que le préjudice subi a été équitablement fixé par les premiers juges en application des dispositions de l'article B... 122-14-5 du code du travail Attendu qu'il est

inéquitable de laisser à la charge de la partie intimée les frais exposés pour sa défense et non compris dans les dépens ; Qu'il convient de lui allouer pour l'ensemble de la procédure, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, une indemnité dont le montant sera précisé au dispositif de la présente décision en rejetant la demande formée sur ce fondement par la partie succombante D... CES MOTIFS : Statuant par dispositions nouvelles, tant confirmatives que réformatives et supplétives Dit le licenciement dépourvu de cause économique réelle et sérieuse Condamne l'employeur à payer à la salariée les sommes de : - 10.671,43 euros (dix mille six cent soixante et onze euros et quarante trois centimes) à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, - 770 euros (sept cent soixante dix euros) au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour l'ensemble de la procédure ; Précise que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal : à compter de la décision de première instance pour les sommes de nature indemnitaire confirmées en appel à compter de la présente décision pour l'indemnité allouée au titre de l'Article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile Condamne l'employeur aux dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER LE PRESIDENT Z... DAIX B... C...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 1996/9738
Date de la décision : 26/04/2002

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Défaut - Origines économiques non admises - /

Ne repose pas sur une cause économique réelle et sérieuse le licenciement économique prononcé par l'employeur dès lors que la suppression de l'emploi salarié ayant pour finalité de réduire les charges en maintenant, voire améliorant le revenu personnel de l'exploitant est plus l'expression d'une anticipation sur des difficultés envisagées ou hypothétiques que la conséquecne de l'aggravation d'une situation brutalement révélée ; un tel motif "structurel" ne correspondant pas à une réorganisation de l'entreprise mais apparaissant lié à un motif inhérent à la personne du salarié


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.douai;arret;2002-04-26;1996.9738 ?
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