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31/05/2001 | FRANCE | N°98/8069

France | France, Cour d'appel de Douai, 31 mai 2001, 98/8069


COUR D'APPEL DE DOUAI DEUXIEME CHAMBRE ARRET DU 31/05/2001 1998/07557 et 1998/8069 JONCTION TRIBUNAL DE COMMERCE BOULOGNE SUR MER du 23/06/1998 APPELANT/INTIME RG 8069 : CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE, ayant son siège social à BOULOGNE SUR MER, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP CONGOS VANDENDAELE avoués Assistée de Maître RICHER (avocat au Barreau de PARIS) INTIME : SA P. E. , ayant son siège social à BOULOGNE SUR MER, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par Maître NORMAND avoué Assistée dé Maître MARGUEZ (avocat au Barreau du HA

VRE) INTIME : SARL A. REMORQUAGE ET SAUVETAGE, ayant son siège soci...

COUR D'APPEL DE DOUAI DEUXIEME CHAMBRE ARRET DU 31/05/2001 1998/07557 et 1998/8069 JONCTION TRIBUNAL DE COMMERCE BOULOGNE SUR MER du 23/06/1998 APPELANT/INTIME RG 8069 : CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE, ayant son siège social à BOULOGNE SUR MER, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP CONGOS VANDENDAELE avoués Assistée de Maître RICHER (avocat au Barreau de PARIS) INTIME : SA P. E. , ayant son siège social à BOULOGNE SUR MER, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par Maître NORMAND avoué Assistée dé Maître MARGUEZ (avocat au Barreau du HAVRE) INTIME : SARL A. REMORQUAGE ET SAUVETAGE, ayant son siège social à BOULOGNE SUR MER représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP COCHEME-KRAUT-REISENTHEL avoués Assistée de Maître J.C.CARLIER (avocat au Barreau de DUNKERQUE) INTIME/APPELANT RG 98/8069 : SA G. NAVIGATION ET TRANSPORTS ayant son siège social à LE HAVRE, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT avoués Assistée de Maître FAUCQUEZ (avocat au barreau de BOULOGNE) INTERVENANT : CIE D'ASSURANCES C., ayant son siège social à PARIS Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT avoués Assistée de Maître FAUCQUEZ (avocat au Barreau de BOULOGNE) INTERVENANT : CIE D'ASSURANCES L. REPRESENTEE PAR LA CIE L. OF LONDON, ayant son siège social à LONDRFS et en FRANCE, à PARIS, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT avoués Assistée de Maître FAUCQUEZ (avocat au Barreau de BOULOGNE) INTERVENANT : CIE D'ASSURANCES M.M.A. IARD ayant son siège social à LE MANS Représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT avoués Assistée de Maître FAUCQUEZ (avocat au Barreau de BOULOGNE) INTERVENANT : CIE D'ASSURANCES A. A. SA, ayant son siège social à CHARENTON LE PONT, représentée par SES DIRIGEANTS LEGAUX Représentée par la SCP LEVASSEUR-CASTILLE-LAMBERT

avoués Assistée de Maître FAUCQUEZ (avocat au Barreau de BOULOGNE) COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Madame Geerssen, président de chambre Madame X... et Monsieur Michel, conseillers ---------------------------- Madame Dorguin, greffier présent lors des débats DEBATS à l'audience publique du QUINZE MARS DEUX MILLE UN ARRET CONTRADICTOIRE, prononcé à l'audience publique du TRENTE ET UN MAI DEUX MILLE UN, date indiquée à l'issue des débats. Mme GEERSSEN, président du chambre, a signé la minute avec Mme DORGUIN, greffier, présentes à l'audience lors du prononcé de l'arrêt. ORDONNANCE DE CLOTURE en date du 09/03/2001 Vu le jugement rendu le 23 juin 1998 par le tribunal de commerce de BOULOGNE SUR MER ; Vu les appels formés les 27 août 1998 par la Chambre de Commerce et d'industrie de B. et le 18 septembre 1998 par la SA G. N. et T., enrôlés sous les n'98/4817 et 98/5070 ; Vu l'ordonnance de jonction du 9 novembre 2000 ; Vu les conclusions récapitulatives déposées par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE le 2 février 2001 ; Vu celles déposées le 8 novembre 2000 par la SA G. T. (appelante et intimée), la Compagnie d'assurances C., la Compagnie L., les M.M.A., la SA A. A. (intervenantes volontaires) ; Vu les conclusions déposées le 9 mars 2001 par la SARL LES A.; Vu les conclusions récapitulatives déposées par la SA P. E. le 26 février 2001 ; Vu !'ordonnance de clôture du 9 mars 2001 ; FAITS ET PROCEDURE : Le 26 juin 1995, le remorqueur R. de la société LES A. a pris en remorque le chalutier M. de l'armement P. E., du Bassin Napoléon jusqu'à l'entrée du slip-way n°2 exploité par la Chambre de Commerce et d'Industrie de B. A la suite d'un choc avec le chalutier la passerelle bâbord d'accorage du slip-way a été endommagée et déformée. Le Commandant B. a été désigné par ordonnance de référé du 11 juillet 1995 pour déterminer l'origine de la collision et décrire les dommages. Par le jugement déféré, le tribunal de commerce a reçu l'action de la CHAMBRE DE COMMERCE et

D'INDUSTRIE en responsabilité quasi-délictueuse à l'encontre de la société de remorquage LES A., a dit mal fondée l'action de la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE au titre des dommages matériels subis par ses installations, a condamné la société LES A. à payer à la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE la somme de 300.000 F pour ses dommages immatériels, a condamné la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE à payer à la Compagnie N. et T. la somme de 5.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, a partagé les dépens. Le 27 août 1998, la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE a interjeté appel à l'encontre de la SA P. E., de la SARL LES A. et de la SA G. N. T. (anciennement A.N.T.). Le 18 septembre 1998, ladite SA G. a interjeté appel à l'encontre de ces trois autres organisme et sociétés. Dans des conclusions communes du 8 novembre 2000, se sont jointes à elle les quatre autres sociétés d'assurances. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES : La CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE demande à la Cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a dit mal fondée en son action en réparation des dommages matériels et en ce qu'il a fait application du contrat d'assurance souscrit pour le compte des usagers-pêche, de l'infirmer en ce qu'il n'a pas intégralement réparé ses dommages immatériels, de statuer à nouveau, de lui donner acte de sa déclaration de sinistre, de dire les sociétés LES A. et P. E. responsables du dommage cause au slip-way, en conséquence de les condamner solidairement toutes les deux à lui payer 894.589,35 F pour ses dommages matériels ainsi que 638.615,68 F pour ses dommages immatériels, outre ses intérêts, et ainsi que 30.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle reproche au tribunal de s'être contredit en jugeant que l'accident avait eu lieu au cours des opérations de remorquage tout en faisant application du contrat d'assurance souscrit par elle pour les opérations d'assèchement et de lui avoir de ce fait refusé la

qualité de tiers par rapport à P. E., alors que les responsabilités encourues dans le cadre d'une opération de remorquage portuaire sont spécifiques et exclusives de tout autre régime de responsabilité et ne peuvent concerner que les seules relations existantes entre le remorqueur et le navire remorqué. Elle soutient qu'à partir du moment où il était reconnu que la période contractuelle en cours au moment du dommage était celle du remorquage (régi par la loi n° 69/8 du 3 janvier 1969) le tribunal ne pouvait en même temps juger que le contrat d'assèchement la liant au "M." avait déjà reçu exécution. Elle fait valoir que l'opération de remorquage en l'espèce n'était pas encore terminée puisque le navire n'est jamais arrivé dans l'enceinte du slip-way, qu'il n'avait pas encore atteint les passerelles d'accorage, qu'aucune amarre du personnel de la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE n'avait encore été lancée et que le navire a heurté l'engin de carénage par l'extérieur. Elle reproche encore au tribunal d'avoir écarté sa qualité de tiers en considérant que l'existence d'une réservation du slip-way par P. E. et le fait pour elle d'avoir positionné sa ligne de tins selon les spécificités du navire avaient eu pour effet de rendre applicable le contrat d'assèchement et donc le contrat d'assurance. Elle lui fait aussi grief d'avoir rejeté son action au titre des dommages matériels à l'encontre de P. E. au motif que le contrat d'assurance devait recevoir application, d'avoir considéré qu'elle n'avait pas demandé réparation auprès de son assureur et enfin de lui avoir opposé l'article L 114-1 du Code des Assurances. Elle explique que le point de départ de sa relation contractuelle avec l'usager-pêche commence à compter de la seule entrée matérielle du navire dans l'engin de carénage, à compter du centrage entre les passerelles d'accorage au-dessus de la ligne de tins centrale, de la mise en place des tins latéraux pour caler le navire et enfin du halage ; que la phase

d'approche est en dehors de sa période contractuelle qu'il ne faut pas la confondre avec la phase de présentation au slip-way qu'en application de l'article 17 bis - 1 2 du D 2.12.66 la responsabilité des usagers-pêche nedébute qu'à partir du halage (à la montée ou à la descente d'un slip) qui est effectué à la diligence de l'armement. Elle expose qu'au moment de l'accident le remorqueur était responsable car seul maître de la manoeuvre, avec un navire remorqué totalement passif ; que la société LES A. ne peut échapper à cette responsabilité en invoquant l'action contractuelle de la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE à l'encontre de la société P. E. ; qu'en tout état de cause l'existence d'un contrat d'assurance souscrit pour le compte d'un tiers ne fait pas obstacle à ce que le souscripteur choisisse l'action directe contre le tiers. Elle soutient d'une part que la société P. E., armateur du navire, était gardien du navire qui a causé le dommage et donc est responsable à son égard en application de l'article 1384 al 1 du code civil, d'autre part, que P. E. a commis une faute relevant de l'article 1382 du code civil. La SA G. T. et les autres assureurs, intervenants volontaires (ci-après "les assureurs"), demandent à la Cour de leur donner acte de leurs nouvelle dénomination et interventions, de constater que la police d'assurance souscrite par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE auprès d'eux est une assurance de responsabilité et non une assurance de chose, de constater qu'aucune garantie n'a été souscrite pour l'indemnisation des préjudices immatériels, d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré les dommages matériels causés au slip-way couverts par eux alors qu'il a en même temps écarté la responsabilité de P. E., de constater qu'aucune partie ne réclame sa condamnation, en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de la société LES A. et l'a condamnée à indemniser la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE . Ils font valoir

que leur police couvre les dommages matériels causés aux installations et engins d'assèchement du fait de leur utilisation, lorsque la responsabilité de l'usager est engagée ; que les réclamations de la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE sont sans commune mesure avec les évaluations de l'expert ; qu'il appartient à la société LES A., jugée responsable de l'accident, d'indemniser tous les préjudices ; que le contrat liant cette société à P.E. est bien un contrat de transport et pas un contrat de remorquage, puisqu'il y avait déhalage d'un navire inerte, sans barre, sans moteur, sans équipage, d'un poste à quai à un autre poste ; qu'à supposer qu'il s'agisse d'un remorquage portuaire la faute simple visée par l'article 28 de la loi est établie. Ils ajoutent que les mêmes réflexions sont valables pour l'examen de la responsabilité quasi-délictuelle de la société LES A. La SA P. E. conclut à la confirmation du jugement, en ce qu'il l'a laissée hors de cause, à la recevabilité de son appel incident, à la condamnation de la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE de B. à lui payer 60.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et, le cas échéant, à la condamnation de la société LES A. à la garantir de toute condamnation éventuellement prononcée contre elle, au rejet de toutes les demandes formées par LES A. contre elle. Elle expose qu'au moment des manoeuvres d'approche et de l'accident les seuls à bord étaient des personnels terrestres ayant pour tâche de manipuler les amarres dès l'entrée du chalutier à l'intérieur du slip-way; que l'accident a eu lieu le 26 juin 1995 et que la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE ne l'a assignée que le 9 juin 1997 ; que s'agissant d'un contrat de transport passé entre elle-même et LES A. ou alors d'un contrat assimilable à un remorquage en haute mer- elle a dû appeler celle-ci en garantie ; que les demandes formées contre elle sont irrecevables. Elle soutient qu'au moment de l'événement elle n'était

pas un tiers par rapport à la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE mais liée contractuellement avec elle, que des prestations avaient déjà été assurées par celle-ci en exécution de la prestation commandée, que le navire était entré de 20 % de sa longueur dans le slip-way lorsqu'il l'a heurté, qu'en vertu du bon de commande du 23 juin 1995 et de la police G. la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE a renoncé à tout recours contre son usager pour les dommages ainsi causés, qu'il lui appartenait d'agir en temps utile contre son assureur. Elle considère queue est liée à la société LES A. par un contrat de transport ou un contrat de remorquage en haute mer ; que C'est bien le capitaine du "R." qui avait l'entière maîtrise de l'exécution de l'opération ; que les conditions générales de remorquage et de l'A. ne lui sont pas opposables. La SARL "LES A." demande à la Cour de réformer le jugement, de déclarer la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE irrecevable et mal fondée en ses prétentions dirigées contre elle, de dire que le responsable est nécessairement la société P. U., en tout état de cause de condamner cette dernière à la garantir de toute éventuelle condamnation, de condamner les parties succombantes à lui payer 50.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle explique que le cahier des charges résultant du Décret de concession du 2 décembre 1966 définit juridiquement les opérations techniques et leur séquence ; qu'il en résulte que le contrat de mise à disposition du slip way débute nécessairement par l'immersion de celui-ci, par la préparation de l'entrée du navire et par sa présentation ; que la collaboration entre l'armateur et la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE est prévue par l'article 17 bis ; que la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE peut exercer une action en responsabilité contractuelle contre P. E. et devait demander la garantie de G. T. Elle ajoute que le contrat de remorquage la société liant P. E. et la société LES A. est soumis à

la loi du 3 janvier 1969 et au Décret du 2 décembre 1966 qui régit la concession de service public consentie par l'Etat à la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE (article 21 relatif au remorquage) que cette activité est exercée par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE et "sous-concédée" aux A. que les conditions générales de remorquage édictées par l'A. s'appliquent dans tous les ports français. Elle soutient que le principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle interdit à la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE d'invoquer l'article 1382 du code civil à l'égard de l'armateur du M. ou du remorqueur ; que l'armateur du navire remorqué étant seul responsable des avaries P. E. ne peut agit contre la société de remorquage LES A. ; qu'elle n'est pas la conceptrice des manoeuvres d'assèchement, qui émanent d'un accord entre la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE et les armateurs de pêche ; Elle approuve les premiers juges d'avoir refusé à la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE le remboursement des travaux de remise en état du slip-way par d'autres parties que les assureurs, ayant laissé prescrire son action contre ceux-ci ; elle discute enfin les postes de réparation réclamés par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE; MOTIFS : 1.

Les pièces communiquées le 8 mars 2001 par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE , soit la veille seulement de l'ordonnance de clôture, seront, ainsi que l'a sollicité la SA P. E., écartées des débats, comme n'ayant pu être examinées en temps utile par les parties. Quant aux conclusions déposées le 9 mars 2001 par la SARL LES A., dont rien au dossier ne prouve qu'elles l'aient été postérieurement à l'ordonnance de clôture et pour lesquelles aucune demande de rejet n'a été présentée, elles sont recevables, car elles ont été prises en réplique aux conclusions de la SA P. E. du 26 février 2001 et ne soulèvent ni prétentions ni moyens nouveaux. 2.

Lorsque l'accident du 26 juin 1995 est survenu, l'opération de

"remorquage" n'était pas encore achevée et la phase relative au slip way n'était pas encore entamée. En effet le navire remorqué était encore sous la direction du remorqueur, les amarres n'avaient pas encore été toutes lâchées, et le fait qu'en s'apercevant de la mauvaise direction prise par "le M." le capitaine du remorqueur ait pu (selon ses propres dires) " donner un coup de boutoir" pour tenter de la corriger (voire comme la première fois de repartir pour une autre tentative) prouve de manière significative que la société "LES A." avait encore au moment du choc le navire remorqué sous son contrôle. Indéniablement le sinistre est lié aux manoeuvres de remorquage et aucunement à l'utilisation des installations et engins d'assèchement. 3.

En conséquence, d'une part la police souscrite par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE auprès du G. "pour le compte des usagers pêche" n'a pas lieu de jouer, et d'autre part la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE , tiers auxdites opérations de remorquage, ne pourrait agir sur un fondement contractuel. Cet assureur sera mis hors de cause. 4.

L'opération par laquelle un remorqueur dirige un navire, privé de force motrice et d'équipage, à l'intérieur d'un port, n'est pas un contrat de transport et constitue une opération de remorquage soumise aux dispositions des articles 26 et suivants de la loi du 3 janvier 1969. 5.

Aux termes de ces dispositions, les opérations de remorquage portuaire s'effectuent sous la direction du capitaine du navire remorqué et les dommages de tous ordres survenus au cours des opérations de remorquage sont à la charge du navire remorqué, à moins qu'il n'établisse la faute du remorqueur. Les parties toutefois peuvent, par convention expresse et écrite, confier au capitaine du remorqueur la direction des opérations ; en ce cas les dommages sont

à la charge du remorqueur, à moins qu'il n'établisse la faute du navire remorqué. Des principes identiques avaient déjà été posés par l'article 21 du Décret du 2 décembre 1966 "sur la concession d'outillage public au port de BOULOGNE , qui précisait que le capitaine du navire remorque assume la direction entière et le contrôle de toutes les opérations de remorquage. 6.

En l'espèce, aucune convention renversant cette présomption légale n'a été signée entre les sociétés "LES A." et "P. E." Dès lors, pour s'en exonérer, cette dernière est tenue de prouver une faute commise par la première. Or, il résulte de l'expertise que le mauvais axe pris par le chalutier, lancé sur son erre, pouvait être imputable soit à une mauvaise manoeuvre initiale du remorqueur soit au fait que la barre du remorqué n'était pas "complètement à 0", et les témoignages des salariés de la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE ou de "P. E.", présents sur les pontons, ne permettent pas de choisir avec certitude entre les deux hypothèses. Au demeurant, le capitaine du chalutier, légalement responsable, devait veiller à ce que le bâtiment ne se comporte pas de façon anormale ou dangereuse et ainsi soit a commis une faute, soit a au moins pris un risque, en n'étant pas présent à bord pour parer à toute difficulté. En conséquence, la société "P. E." devra réparer les dommages subis par la CHAMBRE DE COMMERCE et D'INDUSTRIE à la suite de ce sinistre survenu au cours desdites opérations de remorquage et sera déboutée de sa demande de garantie présentée à l'encontre de la société "LES A.". Faute de pouvoir imputer l'accident avec certitude au remorqueur les demandes présentées par la chambre de commerce et d'insdustrie à l'encontre de la société "LES A." sur le fondement de l'article 1382 du code civil seront également rejetées. 7.

Il résulte du rapport d'expertise, non critiqué sur ce point, que les parties et -leurs experts ont dûment et contradictoirement constaté

de nombreux dommages sur le slip way, et notamment les suivants : - les 15 traverses en profilé HN 600 ont subi des déformations permanentes par torsion, - les poteaux fixés par des platines sur les extrémités des traverses sont inclinés vers l'avant du slip way - le poteau n'O en IPE 600 est tordu, vrillé sur toute sa longueur les poteaux n' 2 et 3 sont déformés sur 2 ou 2,5 m de hauteur, le poteau n' 1 est déformé et fléchi sur 2,5 m de hauteur, les poteaux n' 4 à 14 sont tous déformés sur un mètre de hauteur, - les contreventements ne sont plus en place , les barres comprimées ont fléchi, comme les cornières de rive des passerelles ; - les tins latéraux fixés sur les semelles supérieures des traverses du radier sont inclinés de 24 cm ; Il y a lieu de souligner que pour l'appréciation des dégâts et des réparations nécessaires l'expert a bénéficié des avis du constructeur, qui ont d'ailleurs permis de réduire sensiblement les premières évaluations. Les factures des sociétés R. D., S.M.B.C KALDEN, ASSCAPROS, C., C.C.I.B. concernant les travaux de remise en état, de démontage, l'intervention des plongeurs pour inspecter la partie immergée du chariot, le dragage de la partie inférieure du rail, l'expertise du mécanisme des chaînes, l'intervention du constructeur, pour un montant global de 699.910,29 F HT, n'ont pas été critiquées par les parties et sont dûment justifiées par les pièces du dossier et les explications de l'expert. Outre ces dommages matériels, la Chambre de Commerce et d'industrie invoque l'existence de préjudices financiers ou économiques, au titre de l'impossibilité d'assurer les réservations du slip way déjà enregistrées (193.741,18 F HT) et de son indisponibilité du 26 juin 1995 au 7 février 1996, ayant généré une perte d'exploitation (445.000 F HT). La société "LES A." et la société "P. E." ont judicieusement relevé qu'il s'agissait pour l'un d'un chiffre d'affaires escompté - et non d'un bénéfice - et pour l'autre d'une simple perte de chance de recettes, d'autant

plus aléatoire que l'installation était vétuste et qu'une formule de substitution a peut-être été trouvée. Compte tenu de ces observations et des renseignements fournis par la Chambre du- Commerce et d'industrie , de l'imputation logique du premier poste (réservations déjà enregistrées) sur la période totale d'indisponibilité, la Cour dispose des éléments suffisants pour fixer à 200.000 F les dommages-intérêts dus globalement pour cette perte d'exploitation. S'agissant d'une action en responsabilité, de l'évaluation des préjudices et de la fixation des dommages-intérêts, les intérêts de retard ne sauraient courir à compter de l'ordonnance de référé et devront être calculés à compter de la date de la présente décision. Enfin, au regard de la situation des parties et des circonstances de la cause, la Chambre du Commerce et d'Industrie percevra une somme de 20.000 F pour ses frais irrépétibles et les autres demandes fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile seront rejetées. PAR CES MOTIFS INFIRME le jugement rendu le 23 juin 1998 par le tribunal de commerce de BOULOGNE SUR MER Statuant à nouveau, CONDAMNE, P. E. à payer à la Chambre du Commerce et d'Industrie de B. la somme de 699.910,29 F (HT) pour son préjudice matériel et celle de 200.000 F pour son préjudice économique, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, ainsi que 20.000 F en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; RFJETTE les demandes dirigées contre "LES A." REJETTE les demandes dirigées contre " G." REJETTE les autres demandes fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile CONDAMNE P. E. aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Le Greffier Le Président J.DORGUIN I.GEERSSEN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 98/8069
Date de la décision : 31/05/2001
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2001-05-31;98.8069 ?
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