COUR D'APPEL DE DOUAI SEPTIEME CHAMBRE ARRET DU 29/03/2001 No RG :
1999/07699 et 2000/00447 (jonction) TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DUNKERQUE du 16/06/1999 SH/EM APPELANTE Madame O. X..., Demeurant Ville de Ouled Ballaouchet Poste du Bellâa El Eulma SETIF (ALGERIE), AIDE JURIDICTIONNBLLE TOTALE du 10/12/1999 BAJ No 591780029908569 Représentée par Me QUIGNON Avoué Assistée de Maître CHAUDON, avocat au barreau de DOUAI INTIME Monsieur Y... .Abderrahmane, Demeurant 234 rue André Bouloche 59279 LOON PLAGE, AIDE JURlDICTIONNELLE TOTALE du 07/0 1/2000 BAJ No 59 178 2000/60 Représenté par Mes COCHEME-KRAUT-REISENTHEL Avoués Assisté de Maître CHOLET, avocat au barreau de DUNKERQUE COMPOSITION DE LA COUR LORS DES Z... ET DU DELIBERE : Madame HANNECART, président. Messieurs A... etamp; HENRY, conseillers. GREFFIER AUX Z... : Madame CHIROLA Z... à l'audience en chambre du conseil du VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE UN. ARRET CONTRADICTOIRE, prononcé à l'audience publique du VINGT NEUF MARS DEUX MILLE UN, date indiquée à l'issue des débats. Madame HANNECART, président, a signé la minute avec Madame CHIROLA, greffier, présent à l'audience lors du prononcé de l'arrêt. ORDONNANCE DE CLOTURE en date du 20/12/2000. LA COUR, Abderrahmane Y... et X... O. S. se sont mariés le 15 avril 1959 à BIR-EL-ARCHE (Algérie). De cette union sont issus deux enfants : - CHABANE, né le 7 janvier 1960 à BIR-EL-ARCHE, -
BRAHIM, né le 14 août 1962 à BIR-EL-ARCHE. Le 22 septembre 1997, le mari a déposé une requête en divorce pour rupture de la vie commune. Par acte du 16 janvier 1998, il a fait citer son épouse, résidant en Algérie, d'avoir à comparaître devant le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Dunkerque pour l'audience de tentative de conciliation du 26 mars 1998. L'ordonnance de non-conciliation a été rendue le 26 mars 1998 en l'absence de la femme, non comparante ni représentée. Cette décision a, pour seules
dispositions, autorisé les époux à résider séparément et à poursuivre la procédure.
Elle a été notifiée à l'épouse par acte du 28 mai 1998 portant assignation en divorce pour rupture de la vie commune, délivrée dans les formes prescrites par les articles 683 à 688 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par jugement réputé contradictoire rendu le 16 juin 1999, le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Dunkerque a, sans que l'épouse ait constitué avocat, - prononcé le divorce, - dit n'y avoir lieu de fixer une contribution alimentaire, - débouté le mari du surplus de ses demandes, - laissé les dépens à la charge du mari qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière d'aide juridictionnelle. L'épouse a interjeté appel de cette décision le 10 décembre 1999. Par ordonnance de référé du 20 janvier 2000, le Premier Président de cette Cour a accueilli la demande de relevé de forclusion présentée par X... O. S. qui, le 21 janvier 2000 a déposé au secrétariat greffe de la Cour une seconde déclaration d'appel.
Les instances enrôlées sous les numéros 99/07699 et 00/00447 seront jointes pour être statué par une même décision. Par conclusions signifiées le 22 mai 2000, X... O. S. demande à la Cour de : - déclarer nulle la procédure engagée par le mari, - renvoyer en conséquence les parties à mieux se pourvoir, subsidiairement : - dire que les juridictions françaises sont incompétentes au profit des juridictions algériennes, très subsidiairement : - rejeter la demande formée par Abderrahmane Y... à l'encontre de l'épouse aux motifs que si le divorce était prononcé il aurait des conséquences pour elle, matérielles et morales, d'une exceptionnelle dureté, -
condamner le mari aux dépens qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
Au soutien de son appel, X... O. S. expose que Abderrahmane Y... ne
s'est jamais inquiété de sa femme ni de ses enfants restés seuls en Algérie, la laissant dans le dénuement le plus complet ; qu'elle a très mal vécu cette séparation ; que dans ces conditions le divorce s'il était prononcé présenterait tous les caractères d'une répudiation. Elle invoque à la fois l'irrégularité de la procédure, l'incompétence des juridictions françaises et l'exceptionnelle dureté d'un divorce prononcé dans ces circonstances. Par conclusions signifiées le 28 avril 2000, Abderrahmane Y... a demandé à la Cour de : - confirmer le jugement déféré ayant prononcé le divorce pour rupture de la vie commune, - lui donner acte, vu ses ressources, de son offre de verser une pension alimentaire mensuelle de 1 franc à son épouse sauf à dire n'y avoir lieu à contribution alimentaire en faveur de l'épouse.
Le mari objecte que la rupture de la vie commune remonte à l'année 1968, qu'il a refait sa vie avec Madame Mauricette B..., demandeur d'emploi non indemnisée par les ASSEDIC avec laquelle il a eu six enfants dont quatre encore à sa charge ; qu'il perçoit une rente d'invalidité d'environ 6.000 F par mois à la suite d'un grave accident du travail.
Il rappelle les termes de sa requête en divorce dans laquelle il indiquait que venu s'installer en France en 1962, il était retourné au pays en 1966 pour chercher son épouse et ses deux enfants mais que celle-ci avait refusé de le suivre ; que depuis lors aucun rapprochement ni aucune réconciliation n'était intervenue, l'épouse ayant elle-même refait sa vie. MOTIFS : 1 Sur la nullité de la procédure : Attendu que le préliminaire de tentative de conciliation est obligatoire en matière de divorce, que la nullité de cette phase préparatoire entraîne la nullité des décisions et actes subséquents. Attendu que X... O. S. résidant en Algérie, a été assignée le 16
janvier 1998 à comparaître pour la tentative de conciliation le 26 mars 1998.
Attendu qu'à cette date le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Dunkerque a rendu l'ordonnance de non-conciliation le mari ayant seul comparu à l'audience. Attendu que tant l'acte d'assignation que l'ordonnance de non-conciliation ont méconnu les dispositions des articles 1108 et 643 du Nouveau Code de Procédure Civile aux termes desquels le délai de comparution se trouvait prorogé jusqu'au vendredi 10 avril 1998 inclus.
Attendu que constitue un vice de forme l'inobservation dans l'assignation du délai de distance ; qu'il s'agit d'une formalité substantielle affectant les droits de la défense susceptible d'entraîner la nullité de l'acte en présence d'un grief démontré par celui qui l'invoque.
Attendu que l'épouse soulève l'irrégularité de la procédure de conciliation qui s'est déroulée dans des conditions ne lui ayant pas permis de comparaître à l'audience de tentative de conciliation et de faire valoir ses droits.
Attendu que l'irrégularité formelle est d'autant source de grief pour la femme contre laquelle était déposée une requête en divorce pour rupture de la vie commune qu'en application des dispositions des articles 237 et suivants du Code Civil le mari devait, à peine d'irrecevabilité pouvant être présentée en tout état de cause, préciser les moyens par lesquels il exécutera ses obligations à l'égard de son conjoint ; qu'en l'espèce Abderrahmane Y... avait offert 1 franc à X... O. S., qu'aucune pension alimentaire n'a été mise à la charge du mari pour le cours de la procédure au profit de l'épouse résidant toujours en Algérie et ayant élevé seule les deux enfants issus du mariage.
Attendu par suite qu'il convient de dire nul et de nul effet l'acte
d'assignation délivré le 16 janvier 1998 en violation des dispositions des articles 1108 et 643 du Nouveau Code de Procédure Civile et par voie de conséquence de déclarer nulle l'ordonnance de non-conciliation en date du 26 mars 1998 et le jugement rendu le 16 juin 1999. Attendu que le mari qui succombe supportera les dépens. PAR CES MOTIFS :
Ordonne la jonction des procédures inscrites au répertoire général de la Cour sous les numéros 99/07699 et 00/00447.
Déclare nul et de nul effet l'acte d'assignation en date du 16 janvier 1998.
En conséquence annule l'ordonnance de non-conciliation rendue le 26 mars 1998 et le jugement rendu le 16 juin 1999.
Condamne Abderrahmane Y... aux dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle. LE GREFFIER
LE PRESIDENT G. CHIROLA
S. HANNECART