La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/11/2021 | FRANCE | N°19/005756

France | France, Cour d'appel de Dijon, 03, 04 novembre 2021, 19/005756


OM/CH

[K] [B]

C/

Association ODELIA

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2021

MINUTE No

No RG 19/00575 - No Portalis DBVF-V-B7D-FKAQ

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAONE, section ACTIVITÉS DIVERSES, décision attaquée en date du 23 Juillet 2019, enregistrée sous le no F 17/

00230

APPELANTE :

[K] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3] (FRANCE)

représentée par Me Cédric MENDEL de la SCP MENDEL - VOGUE ET ASSOCIES, avocat au ...

OM/CH

[K] [B]

C/

Association ODELIA

Expédition revêtue de la formule exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE DIJON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2021

MINUTE No

No RG 19/00575 - No Portalis DBVF-V-B7D-FKAQ

Décision déférée à la Cour : Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHALON SUR SAONE, section ACTIVITÉS DIVERSES, décision attaquée en date du 23 Juillet 2019, enregistrée sous le no F 17/00230

APPELANTE :

[K] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3] (FRANCE)

représentée par Me Cédric MENDEL de la SCP MENDEL - VOGUE ET ASSOCIES, avocat au barreau de DIJON substitué par Me Inès PAINDAVOINE, avocat au barreau de DIJON

INTIMÉE :

Association ODELIA
[Adresse 4]
[Localité 2]

représentée par Me Cyrille HUMEL, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Septembre 2021 en audience publique devant la Cour composée de :

Olivier MANSION, Président de chambre, Président,
Gérard LAUNOY, Conseiller,
Marie-Aleth TRAPET, Conseiller,

qui en ont délibéré,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Safia BENSOT,

ARRÊT rendu contradictoirement,

PRONONCÉ par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ par Olivier MANSION, Président de chambre, et par Safia BENSOT, Greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [B] (la salariée) a été engagée le 24 avril 2009 par contrat à durée indéterminée en qualité d'auxiliaire de soins par une association, contrat transféré par la suite à l'association Odelia (l'employeur).
Elle a été licenciée le 28 juin 2016 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Estimant ce licenciement abusif, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 23 juillet 2019, a rejeté toutes ses demandes.

La salariée a interjeté appel le 30 juillet 2019.
Elle demande, au regard selon elle, d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le paiement des sommes de :
- 2 217,68 € de reliquat d'indemnité de préavis, ou, à titre subsidiaire, 246,12 €,
- 221,77 € de congés payés afférents, ou, à titre subsidiaire, 24,61 €,
- 55,192 € de reliquat d'indemnité de licenciement,
- 605 € d'indemnité de congés payés,
- 30 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 10 000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- 10 000 € de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
- les intérêts au taux légal,
- 2 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
et réclame la délivrance des documents légaux rectifiés.

L'employeur conclut à la confirmation du jugement et sollicite le paiement de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 13 décembre 2019 et 13 mars 2020.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

1o) La salariée soutient que l'employeur a eu un comportement fautif en ne respectant pas les avis médicaux et qu'il n'a pas exécuté de façon loyale et sérieuse son obligation de reclassement préalable.

Sur le premier point, la salariée se réfère à l'attestation de Mme [G] et à l'avis du médecin du travail pour affirmer que l'employeur n'a pas adapté ses conditions de travail à son handicap, comme il l'aurait dû après son accident du travail de juin 2011 et la rechute du 23 février 2015.
L'employeur démontre que le médecin du travail a reconnu l'aptitude de la salariée à son poste après l'accident du travail en préconisant un travail en binôme pour la manutention des résidents, qu'il a mis en place un mi-temps thérapeutique puis un passage en heure de jour.
Par ailleurs, ce même médecin admet qu'en dépit des reprises avec aménagement de poste, aucune amélioration n'est constatée (pièce no5) en mai 2016.
L'employeur établit qu'un litige prud'homal l'a opposé à Mme [G], de sorte que son attestation susceptible de partialité ne sera pas prise en considération.

Enfin, l'attestation de Mme [S], infirmière, fait état d'un nombre suffisant de matériel médical et il est communiqué un inventaire du matériel médical en janvier 2016 (pièce no17) et des factures d'achat de matériel médical.
Surtout, il sera relevé que la salariée ne prouve pas de lien de causalité entre les manquements allégués et l'inaptitude constatée.

Sur le second point, il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a effectué une recherche loyale et sérieuse de reclassement avant de prononcer le licenciement.
Le 31 mai 2016, le médecin du travail a constaté que l'état de santé de la salariée ne lui permet pas de reprendre son poste, l'inaptitude est qualifiée de définitive avec un poste à rechercher en tenant compte des recommandations et restrictions notées par lettre du 19 mai 2016, soit : "pas de sollicitation des bras avec mouvements de surélévation au-dessus du niveau des épaules, ni des mouvements de poussées, traction, avec contre-indication médicale pour toute manutention de personne et pas de port de charge supérieure à 5 kilos".
L'employeur qui gère quatre EHPAD les a sollicités pour exécuter son obligation de reclassement comme d'autres établissements extérieurs au groupe, les lettres étant accompagnées d'un CV précis et complet.
Il admet avoir communiqué qu'une partie du registre du personnel en raison d'un fichier trop volumineux et difficilement imprimable et que trois postes ont été pourvus en mars et avril 2016.
Il produit la liste des entrées des salariés en contrat à durée indéterminée du 1er juin au 30 juin et les sorties des salariés en contrat à durée indéterminée du 1er janvier au 31 décembre 2016 (pièce no70) ce qui traduit l'absence de postes disponibles correspondant aux préconisations de l'expert et aux capacités de la salariée.
Il en résulte que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

2o) La salariée réclame un reliquat d'indemnité compensatrice de préavis en soutenant qu'elle a la qualité de travailleur handicapé et qu'elle aurait dû percevoir une indemnité de trois mois, et non de deux, au regard des dispositions de l'article L. 5213-9 du code du travail.
Cependant, il est jugé que cette majoration ne s'applique pas en cas d'inaptitude déclarée par le médecin du travail à la suite d'un accident du travail.
Tel est le cas, ici, comme l'indique le médecin du travail dans sa lettre du 19 mai (pièce no5).
La demande de reliquat sera donc rejetée.

La salariée, à titre subsidiaire, indique qu'elle a reçu la somme de 3 696,48 € au lieu de 3 942,96 € soit une différence de 246,12 €.
L'employeur n'apporte pas d'explication sur ce point et ne justifie pas avoir effectué le paiement dû.
La demande sera accueillie.

Sur le reliquat d'indemnité de licenciement, la salariée revendique une ancienneté de 7,25 ans soit une indemnité de 5 717,292 € et non 5 662,10 € comme perçus, d'où le reliquat réclamé.
L'employeur soutient que l'ancienneté est de 7ans et 2 mois et que l'indemnité de préavis n'a pas pour effet de faire reculer la date de cessation du contrat qui intervient à la date de notification du licenciement.
Si le droit à indemnité naît à la date de notification du licenciement, le calcul de l'indemnité s'effectue sur la totalité de l'ancienneté soit jusqu'à la fin du contrat de travail, période de préavis incluse.
La demande de reliquat est donc fondée et le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur le harcèlement moral :

En application des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de la loi. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements indiqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée soutient que l'arrivée, en juin 2014, de Mme [U] est à l'origine du harcèlement moral allégué.
Après refus de la salariée de fournir des informations sur les autres salariés à l'intéressée, celle-ci l'aurait espionnée sur son lieu de travail, la rabaissant et la critiquant devant ses collègues.
Mme [Z] a été informée de la situation et des entretiens ont eu lieu, en mai 2015, sans effet.
La dégradation de l'état de santé est relevée par le médecin du travail (pièces no7 et 8) qui relève un climat dégradé au sein de l'entreprise.
Ces éléments pris dans leur ensemble laissent présumer un harcèlement moral.

L'employeur répond que les mails produits sont imprécis, que la pétition de décembre 2014 porte sur un changement de convention collective et se reporte aux attestations de Mmes [X], [C] et [A] qui font état de bonnes relations entre la salariée et Mme [U], se plaignant plutôt du caractère autoritaire de la salariée.
Par ailleurs, il est justifié (pièces no43 et 43 bis) qu'une politique de prévention des risques psycho-sociaux a été mise en oeuvre en 2015, que de multiples salariés et intervenants attestent de la bonne qualité du travail, d'une absence de maltraitance des résidents ou encore d'une absence d'humiliation des salariés (pièces no40 à 42, 44 à 58).
Les entretiens d'évaluation font état de conditions de travail satisfaisantes.
Ces éléments objectifs emportent conviction et permettent de renverser la présomption de harcèlement moral.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur les autres demandes :

1o) Sur l'exécution de bonne foi du contrat de travail, la salariée reprend les mêmes arguments que pour le harcèlement moral mais sans apporter d'éléments probants convaincants.
Sa demande sera rejetée.

2o) Sur le reliquat d'indemnité de congés payés, la salariée demande une somme de 605 € en renvoyant à la pièce no18 émanant d'une société de conseil en droit social qui fait référence à un contrôle du bulletin de salaire de juin 2016 et des documents correspondant à son solde de tout compte.
L'employeur rappelle qu'il a versé la somme de 3 390,49 €, soit un trop-perçu de 39,02 €.
Cette somme figure sur le solde de tout compte dont le paiement n'est pas contesté.
Toutefois, l'analyse produite par la salariée est suffisamment précise pour que l'employeur puisse y répondre en apportant au besoin ses propres pièces et décomptes, ce qu'il ne fait pas.

La demande sera accueillie et le jugement infirmé.

3o) Les sommes accordées à la salariée produiront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation pour les sommes de nature salariale et à compter du prononcé du présent arrêt pour les sommes de nature indemnitaire.

4o) La demande sur la remise de documents de fin de contrat devient sans objet.

5o) Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'employeur et le condamne à payer à la salariée la somme de 1 500 €.

L'employeur supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Confirme le jugement du 23 juillet 2019, sauf en ce qu'il rejette les demandes de Mme [K] [B] en paiement de reliquats d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de solde d'indemnité de congés payés et en ce qu'il statue sur les dépens ;

Statuant à nouveau sur ces chefs :

- Condamne l'association Odelia à payer à Mme [K] [B] les sommes de :
* 246,12€ de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis,
* 24,61 €€ de congés payés afférents,
* 55,192 € de reliquat d'indemnité de licenciement,
* 605 € de solde de solde d'indemnité compensatrice de congés payés ;

- Dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt s'agissant de sommes de nature indemnitaire ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association Odelia et la condmane à payer à Mme [K] [B] la somme de 1 500 euros ;

- Condamne l'association Odelia aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffierLe président

Safia BENSOTOlivier MANSION


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Formation : 03
Numéro d'arrêt : 19/005756
Date de la décision : 04/11/2021
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône, 23 juillet 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.dijon;arret;2021-11-04;19.005756 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award