Cie d'assurances AGF VIE
Cie d'assurances AGF IART
C /
Luc X...
LA CAISSE DE GARANTIE DES PROFESSIONNELS DE L'ASSURANCE-CGPA-
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avoués le 22 Février 2007RÉPUBLIQUE FRANÇAISE-AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE DIJON
CHAMBRE CIVILE B
RENVOI DE CASSATION
ARRÊT DU 22 FEVRIER 2007
RÉPERTOIRE GÉNÉRAL No 06 / 00503
Décision déférée à la Cour : AU FOND du 30 AVRIL 1999, rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VILLEFRANCHE SUR SAONE
RG 1ère instance : 96 / 00040
APPELANTES :
Compagnie d'assurances AGF VIE venant aux droits de la compagnie PFA VIE
ayant son siège social 87 rue de Richelieu
75002 PARIS
Compagnie d'assurances AGF IART venant aux droits de la compagnie PFA IART
ayant son siège social 87 rue de Richelieu
75002 PARIS
représentées par la SCP ANDRE-GILLIS, avoués à la Cour
assistées de Me H. B. & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Monsieur Luc X...
né le 13 avril 1960 à OULINS (69)
demeurant...
69280 MARCY L ETOILE
représenté par Me Philippe GERBAY, avoué à la Cour
assisté de la SCP CHAVRIER-MOUISSET-THOURET, avocats au barreau de LYON
LA CAISSE DE GARANTIE DES PROFESSIONNELS DE L'ASSURANCE-CGPA-
ayant son siège social 28 rue Rennequin
75017 PARIS
représentée par la SCP FONTAINE-TRANCHAND & SOULARD, avoués à la Cour
assistée de la Selafa d'avocats BLAMOUTIER-SALPHATI et associés, avocats au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 Janvier 2007 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur MUNIER, Président de Chambre, Président,
Monsieur RICHARD, Conseiller, assesseur, ayant fait le rapport sur désignation du Président,
Madame VIEILLARD, Conseiller, assesseur,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme GARNAVAULT,
MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public,
ARRET rendu contradictoirement,
PRONONCE publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,
SIGNE par Monsieur MUNIER, Président de Chambre, et par Madame GARNAVAULT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DE L'AFFAIRE
Le 1er juillet 1991 la SA PRESERVATRICE FONCIERE IARD (PFA) a nommé M. Luc X... en qualité d'agent général pour l'agence de VILLEFRANCHE SUR SAONE-Les Marais.
Début juillet 1995 M. X... lors d'un contrôle s'est aperçu que Mme Françoise Z..., sa secrétaire, avait en utilisant son code confidentiel pour déclarer de faux sinistres, procédé à des détournements s'élevant en définitive à 189 858,22 € (1 245 388,39 F).
M. X... a déclaré ce sinistre à la société mutuelle d'assurance Caisse de Garantie des Professionnels de l'Assurance (C. G. P. A), son assureur, puis a démissionné de ses fonctions le 31 août 1995.
La SA PRESERVATRICE FONCIERE IARD et VIE a assigné devant le tribunal de grande instance de VILLEFRANCHE SUR SAONE M. Luc X... en paiement de 265 438,69 € (1 741 163,75 F), M. Roger X..., son père, caution à hauteur de 38 112,29 € (250 000,00 F) et le C. G. P. A en paiement de 189 858,22 €.
MM. X... ont appelé en garantie Mme Z..., Mme Solange A... épouse B..., buraliste, qui avait encaissé des virements provenant de l'agence, et la SA CREDIT LYONNAIS.
Par jugement du 30 avril 1999 ce tribunal a mis hors de cause la
C. G. P. A, Mme B... et la SA CREDIT LYONNAIS, constaté que Mme Z... avait été condamnée à payer à la SA PFA une somme de 189 858,22 € par un jugement définitif du tribunal correctionnel de VILLEFRANCHE SUR SAONE du 1er octobre 1996, condamné M. Luc X..., qui a concouru au dommage subi par la SA PFA à hauteur de 5 %, à lui payer 9 492,91 € (62 269,40 F), constaté que la créance de la SA PFA sur Mme Z... s'élève à 170 872,40 € (1 120 349,50 F) et condamné solidairement MM. Luc et Roger X..., à concurrence de 38 112,25 € pour ce dernier, à payer à la SA PFA la somme de 44 350,58 € (290 920,74 F).
La Cour d'Appel de LYON, sur appel des SA AGF VIE et AGF IART, qui viennent aux droits de la SA PFA VIE et IART, a par arrêt du 18 octobre 2000 :
-infirmé le jugement sauf en ce qu'il a mis hors de cause la C. G. P. A, Mme B... ainsi que la SA CREDIT LYONNAIS et constaté que Mme Z... avait été condamnée le 1er octobre 1996 par le tribunal correctionnel à payer à la SA PFA 170 872,40 €,
-débouté les SA AGF VIE et AGF IART de leurs demandes dirigées contre M. Luc X... en qualité de commettant de Mme Z...,
-condamné solidairement MM. X... à payer après compensation aux SA AGF VIE et AGF IART un solde de 12 172,12 € (79 843,89 F) outre intérêts,
-condamné les SA AGF VIE et AGF IART à payer une somme de 3 811,23 € (25 000,00 F) au titre des frais irrépétibles aux consorts X....
La seconde Chambre de la Cour de Cassation, par arrêt du 19 juin 2003, a censuré cette décision excepté en ce qui concerne la mise hors de cause de Mme B... et de la SA CREDIT LYONNAIS. La Cour suprême reproche à la Cour d'Appel d'une part d'avoir violé l'article 1384 alinéa 5 du Code civil en estimant que Mme Z... avait agi en dehors de ses fonctions et d'autre part d'avoir considéré que le remboursement des avances sur commissions constituait une clause pénale.
Sur renvoi la Cour d'Appel de DIJON, par arrêt du 29 juin 2004, a réformé le jugement entrepris, dit que Mme Z... a agi dans l'exercice de ses fonctions, condamné M. Luc X... à payer à la SA AGF IART la somme de 189 828,29 € outre intérêts et capitalisation, rejeté la demande de garantie de M.
X...
à l'encontre de la C. G. P. A, condamné Mme Z... à garantir M. Luc X... pour cette condamnation et condamné solidairement MM. Luc et Roger X... à payer aux AGF IART et AGF VIE la somme de 35 494,95 € outre intérêts et capitalisation.
Par arrêt du 8 mars 2006, la deuxième Chambre de la Cour de Cassation a censuré cette décision seulement en ce qu'elle a rejeté la demande de garantie dirigée par M. X... et la SA AGF contre la C. G. P. A.
Par conclusions du 20 novembre 2006, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, les SA AGF IART et AGF VIE exposent que l'exception d'irrecevabilité soulevée par la C. G. P. A sera rejetée, leur demande déjà présentée en première instance n'étant pas nouvelle, que la Cour de DIJON dans son arrêt de juin 2004 a définitivement jugé que Mme Z... avait commis des détournements dans le cadre de ses fonctions de salariée de M. X..., dont la responsabilité devait être retenue sur le fondement de l'article 1384 alinéa 5 du Code civil, que la clause d'exclusion n'a pas été portée à la connaissance de M. X... et qu'enfin la clause d'exclusion invoquée par la C. G. P. A leur est inopposable car contraire aux dispositions d'ordre public de l'article
L 121-2 du Code des Assurances.
Elles concluent à la condamnation de la C. G. P. A à payer à la SA AGF IART la somme de 189 858,29 € outre intérêts et capitalisation plus celle de 1 500,00 € au titre des frais irrépétibles.
M. Luc X..., par des écritures du 30 novembre 2006, auxquelles il est de même référé, indique que l'action directe des sociétés AGF est recevable car la SA PFA a toujours demandé la condamnation de la C. G. P. A à lui payer une somme de 189 828,29 €, que son action est également recevable car l'arrêt de la Cour de Dijon a été cassé en ce qu'il a rejeté la demande de garantie dirigée par M. X... et les SA AGF contre la C. G. P. A, la saisine de la Cour de renvoi n'étant pas limitée au moyen, qui a fondé la cassation, que la clause d'exclusion lui est inopposable car non portée à sa connaissance et subsidiairement qu'elle est inapplicable et nulle au regard des articles L 113-1 et L 121-2 du Code des assurances.
Il conclut à sa garantie par la C. G. P. A de la condamnation au paiement de 189 828,29 € outre intérêts et capitalisation prononcée le 29 juin 2004 au profit de la SA AGT IART et à la condamnation de la C. G. P. A à lui verser une somme de 20 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour refus fautif de garantie plus celle de 30 000,00 € au titre des frais irrépétibles.
La Caisse de Garantie des Professionnels de l'Assurance, par des conclusions du 2 octobre 2006, auxquelles il est pareillement référé, répond que la demande présentée par la SA AGF est nouvelle et donc irrecevable, que celles présentées par M. Luc X... sont également irrecevables car son pourvoi tendant à la cassation de l'arrêt le déboutant de son action en garantie a été rejeté, que les SA AGF n'ayant pas plus de droit que l'assuré, elles ne peuvent obtenir la condamnation de la société intimée, subsidiairement qu'elle n'a jamais entendu garantir les détournements de fonds et que cette garantie n'a existé qu'à compter du 1er janvier 1997, soit postérieurement aux faits de l'espèce.
Elle conclut à l'irrecevabilité ou subsidiairement au débouté des demandes présentées par les SA AGF ainsi que M. Luc X... et à leur condamnation à lui payer une somme de 30 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La procédure a été communiquée le 8 décembre 2006 au Ministère Public.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la recevabilité des demandes présentées par les SA AGF IART et AGF VIE
Attendu que la SA PRESERVATRICE FONCIERE, aux droits de laquelle se trouvent la SA AGF IART et AGF VIE, a par acte du 13 décembre 1995 notamment demandé au tribunal de grande instance de VILLEFRANCHE SUR SAONE de condamner la C. G. P. A solidairement avec M. Luc X... à lui payer la somme de 189 858,30 € (1 245 388,84 F) outre intérêts plus celle de 3 048,98 € (20 000,00 F) au titre des frais irrépétibles ;
Attendu qu'ainsi cette demande, qui avait été renouvelée devant la Cour de DIJON en 2004, n'est pas nouvelle ; qu'en conséquence ce moyen d'irrecevabilité ne peut qu'être rejeté ;
Sur la recevabilité des demandes présentées par M. Luc X...
Attendu que si dans son arrêt la deuxième Chambre de la Cour de Cassation a dit que le pourvoi des consorts X... était non admis mais non pas rejeté, cette juridiction a cassé l'arrêt rendu le 29 juin 2004 par la Cour de DIJON en ce qu'il a rejeté la demande de garantie dirigée par M. X... et la SA AGF contre la C. G. P. A ;
Attendu que si la Cour de Cassation a dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur un pourvoi, la cassation prononcée sur un second pourvoi s'étend nécessairement aux dispositions critiquées par le premier pourvoi (Cass. Soc. 3 juillet 2001) ; que cette fin de non recevoir sera en conséquence rejetée ;
Attendu en outre que les demandes présentées par M. X... étant déclarées recevables, l'argumentation de la C. G. P. A selon laquelle l'action directe des SA AGF ne serait pas fondée, faute pour elles de n'avoir pas plus de droit que l'assuré, devient sans objet ;
Sur l'opposabilité de la clause O2C
Attendu que M. Luc X... a souscrit le 18 juillet 1991 auprès de la Caisse de Garantie des Professionnels de l'Assurance une police " Multirisque professionnelle des Agents Généraux et Courtiers d'assurances ", dont il a signé les conditions particulières, qui mentionnent que " l'adhérent déclare avoir reçu un exemplaire des statuts et un exemplaire de la police composée des conditions générales modèle 90001 et des conventions spéciales 90002 et 90003... " ;
Attendu qu'ainsi la clause litigieuse, qui figure parmi les conventions spéciales 90002, est opposable à M. Luc X... ;
Au fond
Attendu que par le contrat signé le 18 juillet 1991 M. X... est garanti contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages causés aux tiers du fait des activités professionnelles suivantes : présentation d'opérations d'assurances, gestion des contrats d'assurances et gestion des sinistres ;
Attendu qu'il a été définitivement jugé le 19 juin 2004 par la Cour de DIJON que les manoeuvres frauduleuses de Mme Z..., secrétaire de M. X..., ont été effectuées dans le cadre et à l'occasion de ses fonctions de préposée de cet agent d'assurance, notamment la gestion des sinistres ; qu'ainsi la faute commise entre bien dans le champ des garanties données par l'assureur ;
Attendu enfin que l'exclusion prévue par l'article O2C des conventions spéciales est contraire aux dispositions d'ordre public de l'article L 121-2 du Code des assurances, qui dispose que l'assurance est garant des pertes et dommages causés par des personnes, dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du Code civil quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes ; qu'en conséquence cette exclusion est inopposable aux appelants et la C. G. P. A devra indemniser la SA AGF IART de son préjudice et en tant que de besoin garantir M. Luc X... de la condamnation prononcée contre lui par l'arrêt du 29 juin 2004, à savoir le paiement à la SA AGF IART la somme de 189 828,29 € avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 1995 et capitalisation conformément à l'article 1154 du Code civil ;
Attendu que M. X... ne démontre pas que la C. G. P. A ait fait preuve de résistance abusive en contestant sa garantie à cet assuré ; qu'il n'y a pas lieu à dommages et intérêts ;
Attendu qu'une somme de 7 000,00 € sera allouée à M. X... au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et celle de 3 500,00 € accordée à la SA AGF IART de ce même chef ; que la C. G. P. A, qui succombe, ne peut bénéficier de ce texte et sera condamnée aux entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant dans les limites de la Cassation,
Réforme le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
Condamne la société C. G. P. A solidairement avec M. Luc X..., déjà condamné, à payer à la SA AGF la somme de 189 858,29 € avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 13 décembre 1995 et en tant que de besoin à garantir M. X... de cette condamnation,
Condamne la société C. G. P. A à verser à M. Luc X... une somme de 7 000,00 € et à la SA AGF IART celle de 3 500,00 € au titre des frais irrépétibles,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne le même aux dépens d'instance et d'appel et autorise la SCP ANDRE / GILLIS et Me GERBAY à se prévaloir des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.