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07/09/2000 | FRANCE | N°99-00574

France | France, Cour d'appel de Dijon, 07 septembre 2000, 99-00574


REPUBLIQUE FRANOEAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE DIJON 1ERE CHAMBRE - SECTION 2 ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2000 N° RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N°99/00574 APPELANTE : S.A. FRANFINANCE CREDIT dont le siège social est situé TOUR GENERALE LA DEFENSE 9 92088 PARIS LA DEFENSE représentée par la SCP ANDRE etamp; GILLIS, avoués à la Cour assistée de Maître BATAILLARD, avocat au barreau de DIJON INTIMES : Monsieur Guy X... domicilié 4, rue du Longpendu 71200 LE CREUSOT Madame Chantal Y... domiciliée 4, rue du Longpendu 71200 LE CREUSOT défaillants COMPOSITION DE LA COUR :

Pr

ésident : Monsieur LITTNER, Conseiller, présidant la Chambre, désigné ...

REPUBLIQUE FRANOEAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS COUR D'APPEL DE DIJON 1ERE CHAMBRE - SECTION 2 ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2000 N° RÉPERTOIRE GÉNÉRAL N°99/00574 APPELANTE : S.A. FRANFINANCE CREDIT dont le siège social est situé TOUR GENERALE LA DEFENSE 9 92088 PARIS LA DEFENSE représentée par la SCP ANDRE etamp; GILLIS, avoués à la Cour assistée de Maître BATAILLARD, avocat au barreau de DIJON INTIMES : Monsieur Guy X... domicilié 4, rue du Longpendu 71200 LE CREUSOT Madame Chantal Y... domiciliée 4, rue du Longpendu 71200 LE CREUSOT défaillants COMPOSITION DE LA COUR :

Président : Monsieur LITTNER, Conseiller, présidant la Chambre, désigné à ces fonctions par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 1er décembre 1999. Assesseurs : - Monsieur JACQUIN, Conseiller - Madame ARNAUD, Conseiller lors des débats et du délibéré. Greffier lors des débats : - Madame Z..., Greffier lors du prononcé : - Madame A..., DEBATS : audience publique du 15 juin 2000 ARRET : réputé contradictoire, Prononcé à l'audience publique de la Cour d'Appel de DIJON le 07 septembre 2000 par Monsieur LITTNER, Conseiller, qui a signé l'arrêt avec le greffier EXPOSE DE L'AFFAIRE Suivant une "offre préalable de crédit utilisable par fractions et assortie d'une carte de crédit" acceptée le 19 septembre 1990, la SA FRANFINANCE CREDIT a accordé un découvert de 10 000,00 F à Monsieur Guy X... et à son épouse Chantal B... moyennant un T.E.G. annuel de 16,68% et le versement de mensualités de 400,00 F. Plusieurs échéances étant restées impayées, l'établissement de crédit a assigné les époux X... en paiement de la somme de 10.376,68 F, outre intérêts au taux conventionnel à compter du 29 janvier 1998, 2 500,00 F à titre de dommages intérêts et la même somme sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par jugement réputé contradictoire du 13 janvier 1999, le Tribunal d'Instance du CREUSOT, considérant que plus de deux années s'étaient

écoulées entre la date de la première mensualité impayée, en juillet 1993, et l'assignation du 3 novembre 1998, a déclaré la demande irrecevable. La SA FRANFINANCE CREDIT a fait appel. Dans ses conclusions récapitulatives du 17 avril 2000, auxquelles il est fait référence par application de l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile, elle indique en premier lieu que les époux X... ont entièrement soldé leurs encours débiteur le 20 février 1996 et elle en conclut que le raisonnement du premier juge ne peut être retenu. Elle invoque ensuite la jurisprudence de la Cour de Cassation résultant de l'arrêt du 9 mars 1999, selon laquelle le point de départ du délai de forclusion se situe, pour un crédit consenti sous la forme d'un découvert en compte reconstituable, à la date à laquelle prend fin l'ouverture de crédit. Elle déclare qu'en l'espèce, le point de départ du délai doit être fixé au 15 juin 1998, date de la sommation de payer. Elle affirme par ailleurs avoir respecté l'obligation d'information mise à sa charge par l'article L.311-9 du Code de la consommation, ainsi que le démontre un constat établi par l'huissier VENEZIA le 26 août 1998 et elle rappelle que la méconnaissance de cette exigence ne peut, selon l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 15 février 2000, être opposée qu'à la demande de la personne que cette disposition a pour objet de protéger. Elle fixe le montant de sa créance à 10 376,68 F, sollicite la condamnation des emprunteurs à lui payer cette somme, outre intérêts, 2 500,00 F à titre de dommages intérêts et 4 000,00 F sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Régulièrement assignés à personne, Monsieur Guy X... et son épouse Chantal B... n'ont pas comparu. L'arrêt doit être réputé contradictoire par application de l'article 474 du Nouveau Code de Procédure Civile. MOTIFS DE LA DECISION 1. Sur le point de départ du délai de forclusion. Attendu que, selon l'article 27 de la loi du 10 janvier

1978 "relative à l'information et à la protection des consommateurs dans le domaine de certaines opérations de crédit", devenu l'article L.311-37 du Code de la consommation, les actions engagées devant le tribunal d'instance doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ; Attendu que la Cour de Cassation a défini depuis le 9 décembre 1986 le point de départ de ce délai comme étant la date de la première échéance impayée ; qu'elle a par la suite précisé, ce que le Tribunal d'Instance paraît avoir encore oublié, qu'il s'agissait du premier incident de paiement non régularisé (Civ. 1 - 15 février 2000 - G.P. 28 avril 2000 notamment) ; Attendu que cette règle, inscrite dans une loi d'ordre public, doit s'appliquer à toutes les formes de crédit, y compris à celle qui est la plus dangereuse pour l'emprunteur, et qui est de plus en plus utilisée, l'ouverture de crédit consentie sous forme d'un découvert en compte reconstituable ; Que l'on comprendrait mal, en effet, que le législateur n'ait entendu protéger que les emprunteurs qui courent le moins de risques ; Attendu que l'ouverture de crédit sous forme de découvert en compte reconstituable est la plus dangereuse pour l'emprunteur en raison des facilités de son octroi, de la modestie des versements initiaux mais surtout de l'impossibilité pour l'emprunteur de connaître à tout moment le montant de sa dette, qui varie constamment et qui ne peut être déterminée qu'après mise en oeuvre de formules inaccessibles au consommateur moyen ; Attendu au surplus que l'examen de l'offre préalable de crédit présentée aux époux X... démontre qu'il s'agit non pas d'une forme de compte courant mais d'un prêt impliquant des remboursements réguliers dont le montant est précisé (400,00 F), une périodicité mensuelle et la possibilité de résiliation "huit jours après constatation d'une échéance impayée" ; que chaque mensualité comprend, comme le remboursement de tout crédit classique, un

amortissement du capital, une part d'intérêts ainsi que le coût éventuel des assurances facultatives ; qu'enfin la durée du crédit est limitée (1 an), même si elle peut faire l'objet d'une tacite reconduction selon des modalités qui sont précisées par la loi ; Attendu que le décompte des sommes réclamées détaille, comme dans le cadre d'un prêt classique, les mensualités impayées (4 600,00 F), le capital restant dû sur les mensualités à échoir (5 008,04 F) et l'indemnité légale de 8 % (768,64 F), ce qui n'est évidemment jamais le cas en matière de compte courant ; que la sommation de payer du 15 juin 1998 faisait d'ailleurs état de mensualités impayées du 5 avril 1997 au 5 février 1998 et d'un capital restant dû ; Qu'en outre le fonctionnement d'un compte permanent s'accommode mal de la règle de l'indivisibilité du compte courant, selon laquelle il n'y a ni créance ni dette mais seulement des articles de crédit et de débit tant que le compte fonctionne ; que cette règle exclut au surplus le jeu des dispositions de l'article 1254 du Code civil relatives à l'imputation des paiements, que la société appelante invoque par ailleurs ; qu'enfin l'article L.311- du Code de la consommation permettant un remboursement échelonné des sommes restant dues dans le cas où le débiteur ne souhaite plus bénéficier de l'ouverture de crédit apparaît également peu compatible avec les règles du compte courant ; Attendu qu'il est d'ailleurs maintenant admis que pour un découvert en compte dont le montant est limité, le point de départ du délai biennal de forclusion est non pas la clôture du compte, mais la date de dépassement du découvert, qui "doit être tenu pour une échéance impayée" (Civ. 1 - 23 mai 2000 - G.P. 6 août 2000) ; Attendu que la protection des consommateurs, voulue par le législateur dans une loi d'ordre public, dont la violation de certaines dispositions est sanctionnée pénalement et que la Cour de Cassation qualifie de loi de police (Civ. 1 - 19 octobre 1999 - n°1700 P), impose de fixer

le point de départ du délai de forclusion, pour le crédit permanent comme pour les autres crédits, à la date du premier incident de paiement non régularisé.

2. Sur l'accomplissement du délai de forclusion. Attendu que l'examen de l'historique du compte démontre que, s'il est vrai que des incidents de paiements sont survenus depuis le mois de juillet 1993, ceux-ci ont été intégralement régularisés le 20 février 1996, date à laquelle les emprunteurs avaient soldé leur encours débiteur ; Que par application de la règle d'imputation des paiements ultérieurs, la date du premier incident de paiement non régularisé doit être fixé au mois d'avril 1997 ; Attendu que l'assignation ayant été délivrée le 3 novembre 1998, le délai de forclusion de deux ans n'était pas accompli ; Qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement et de déclarer l'action recevable. 3. Sur le montant de la réclamation. Attendu que, pour 11 mensualités de 400,00 F, la somme due ne peut, à défaut d'explications, s'élever à une somme autre que 4 400,00 F (et non 4 600,00 F comme demandé) ; Que les sommes réclamées au titre du capital restant dû et de l'indemnité de 8 % sont calculées conformément aux dispositions contractuelles, le montant de cette indemnité devant cependant tenir compte de la réduction de la somme due au titre des échéances ; Que la somme de 10 160,68 F doit en définitive être accordée à la société appelante ; Attendu qu'à défaut de résistance abusive ou de toute autre faute, il n'y a pas lieu à dommages intérêts ; Que l'équité ne commande pas de faire application à la SA FRANFINANCE CREDIT des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Décision :

Par ces Motifs, La Cour, Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

Déclare recevable l'action engagée par la SA FRANFINANCE CREDIT, Condamne Monsieur Guy X... et Madame Chantal B..., épouse X... solidairement à payer à la SA FRANFINANCE CREDIT la somme de 10 160,68 F (soit 1 548,99 Euros), avec intérêts au taux conventionnel de 14, 64 % sur la somme de 9 408,04 F (soit 1 434,25 Euros) à compter du 29 février 1998, au taux légal sur la somme de 752,64 F (soit 114,74 Euros) à compter du 3 novembre 1998, Rejette les demandes de dommages intérêts et d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamne les époux X... solidairement aux dépens d'instance et d'appel et dit que ces derniers pourront être recouvrés directement par la SCP ANDRE GILLIS, avoué, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Dijon
Numéro d'arrêt : 99-00574
Date de la décision : 07/09/2000

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Défaillance de l'emprunteur - Action - Délai de forclusion - Point de départ - Ouverture de crédit reconstituable - Date de la première échéance impayée non régularisée.

La règle, selon laquelle le point de départ du délai biennal de forclusion opposable au prêteur est, en application de l'article L.311-37 du Code de la consommation, la date de la première échéance impayée, doit s'appliquer à toutes les formes de crédit, y compris à celle qui est la plus dangereuse pour l'emprunteur, l'ouverture consentie sous forme d'un découvert en compte reconstituable visée par l'article L.311-9 du Code de la consommation. On comprendrait mal, en effet, que le législateur n'ait entendu protéger que les emprunteurs qui courent le moins de risques, alors qu'il s'agit non d'une forme de compte courant mais d'un prêt impliquant des remboursements réguliers dont le montant est précisé, une périodicité mensuelle et la possibilité d'une résiliation "huit jours après la constatation d'une échéance impayée", que chaque mensualité comprend, comme le remboursement de tout crédit classique, un amortissement du capital, et une part d'intérêts, ce qui n'est jamais le cas en matière de compte courant ; qu'enfin la durée du crédit est limitée, même si elle peut faire l'objet d'une tacite reconduction ; qu'en outre le fonctionnement d'un compte permanent s'accommode mal de la règle de l'indivisibilité du compte courant selon laquelle il n'y a ni créance ni dette mais seulement des articles de crédit et de débit tant que le compte fonctionne ; que cette règle exclut au surplus le jeu des dispositions de l'article 1254 du Code civil relatives à l'imputation des paiements, que la société appelante invoque par ailleurs ; qu'enfin l'article L.311-9 du Code de la consommation permettant un remboursement échelonné des sommes restant dues dans le cas où le débiteur ne souhaite plus bénéficier de l'ouverture de crédit apparaît également peu compatible avec les règles du compte courant ; qu'en outre il est maintenant admis que pour un découvert en compte dont le montant est limité, le point de départ du délai biennal de forclusion est non pas la clôture du compte, mais la date

de dépassement du découvert, qui "doit être tenu pour une échéance impayée"


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.dijon;arret;2000-09-07;99.00574 ?
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