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22/08/2024 | FRANCE | N°24/02884

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 6 (etrangers), 22 août 2024, 24/02884


COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)





N° RG 24/02884 - N° Portalis DBVW-V-B7I-ILKA

N° de minute : 298/24





ORDONNANCE





Nous, Catherine DAYRE, Conseillère à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Iman SOUFIAN, greffière placée ;





Dans l'affaire concernant :



M. [V] [U]



né le 07 Janvier 1976 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité algérienne



Actuellement retenu au centre

de rétention de [Localité 2]





VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.7...

COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)

N° RG 24/02884 - N° Portalis DBVW-V-B7I-ILKA

N° de minute : 298/24

ORDONNANCE

Nous, Catherine DAYRE, Conseillère à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Iman SOUFIAN, greffière placée ;

Dans l'affaire concernant :

M. [V] [U]

né le 07 Janvier 1976 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1, R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;

VU l'arrêté pris le 02/05/2024 par LE PREFET DU HAUT-RHIN faisant obligation à M. [V] [U] de quitter le territoire français ;

VU la décision de placement en rétention administrative prise le 21/06/2024 par M. LE PREFET DU HAUT-RHIN à l'encontre de M. [V] [U], notifiée à l'intéressé le même jour à 9h55 ;

Vu l'ordonnance rendue le 24/06/2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg prolongeant la rétention administrative de M. [V] [U] pour une durée de vingt-huit jours à compter du 23/06/2024, décision confirmée par le premier président de la cour d'appel de Colmar le 26/06/2024 ;

Vu l'ordonnance rendue le 21/07/2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal Judiciaire de Strasbourg prolongeant la rétention administrative de M. [V] [U] pour une durée de trente jours à compter du 21/07/2024 ;

Vu la requête de M. LE PRÉFET DU HAUT-RHIN datée du 19/08/2024, reçue le 19 Août 2024 à 15h20 au greffe ou tribunal, tendant à la prolongation pour une durée de quinze jours supplémentaires, à compter du 20/08/2024, la rétention de M. [V] [U] ;

VU l'ordonnance rendue le 20/08/2024 à 12h09 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarant la requête de M. LE PREFET DU HAUT-RHIN recevable et la procédure régulière, et ordonnant une troisième prolongation de la rétention de M. [V] [U] pendant une durée maximale de quinze jours supplémentaires dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, à compter du 20/08/2024 ;

VU l'appel de cette ordonnance interjeté par M. [V] [U] par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 21 Août 2024 à 11h12 ;

VU les avis d'audience délivrés le 21/08/2024 à l'intéressé, à Maître Mathilde MESSAGEOT, avocat de permanence, à M. LE PREFET DU HAUT-RHIN et à M. Le Procureur Général ;

Le représentant de M. LE PREFET DU HAUT-RHIN, intimé, dûment informé de l'heure de l'audience par courrier électronique du 21/08/2024, n'a pas comparu, mais a fait parvenir des conclusions en date du 22/08/2024, qui ont été communiquées au conseil de la personne retenue.

Après avoir entendu M. [V] [U] en ses déclarations par visioconférence, Maître Mathilde MESSAGEOT, avocat au barreau de COLMAR, commise d'office, en ses observations pour le retenu et à nouveau l'appelant qui a eu la parole en dernier.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, par ordonnance du 20 août 2024, dont appel, a ordonné, à la demande du préfet du Haut Rhin, une troisième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [V] [U].

Pour ordonner la prolongation de la rétention, le premier juge a constaté que la multiplicité des condamnations pénales dont Monsieur [V] [U]. avait fait l'objet caractérisait la menace à l'ordre public qu'il représentait et que par ailleurs la préfecture accomplissait régulièrement les diligences en vue de son éloignement.

A l'appui de son appel, Monsieur [V] [U]. qui sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et sa remise en liberté, faisant valoir que les nouveaux moyens soulevés étaient recevables en application des articles 563 et 564 du code de procédure civile, a soulevé l'irrégularité de la requête en prolongation de sa rétention administrative, rappelant que le juge doit vérifier la compétence du signataire de la requête en prolongation mais également qu'il est effectivement fait mention des éventuels empêchements des délégataires de signature.

Il a également soutenu qu'il ne constituait plus une menace à l'ordre public dans la mesure où il avait purgé les peines qui lui étaient infligées.

A l'audience, assisté de son conseil, il a indiqué pouvoir être hébergé chez sa concubine. Il a expliqué que depuis son placement en rétention administrative, il ne recevait plus ses injections d'Haldol.

Il a expliqué son parcours délinquant par des décès survenus dans sa famille, observant qu'il se tenait tranquille depuis deux ans et qu'il n'avait tué personne.

Son conseil a repris oralement les moyens développés dans la déclaration d'appel et a observé que l'administration caractérisait la menace à l'ordre public au moyen de condamnations anciennes, elle a précisé que Monsieur [U] ne recevait plus le traitement injectable pour son épilepsie.

Le préfet du Haut Rhin, non représenté, a sollicité la confirmation de l'ordonnance déférée par des écritures transmises ce jour.

Il a rappelé que par décision n°15-28795 du 13 juillet 2016, la Cour de cassation a pu constater que la présentation des parties est facultative et que le préfet peut utilement faire valoir son argumentation par un jeu d'écritures.

Il a fait valoir que les nouveaux moyens ne peuvent être soulevés que dans le délai d'appel et que les exceptions de procédure ne sont recevables qu'en tant qu'elles ont été soulevées in limine litis devant le premier juge.

Sur l'irrégularité, tirée de l'incompétence du signataire de la requête, il a indiqué que ce moyen n'a pas été soulevé devant le premier juge; qu'en application des articles 74 et 117 du Code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, aucune exception de nullité de fond (pouvoir du signataire) ne peut être soulevée après toute défense au fond ou fin de non-recevoir; que le moyen est donc irrecevable en appel ; qu'au surplus la délégation de signature était produite et permettait d'établir que le signataire avait compétence pour saisir le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la rétention; que la question de l'empêchement du Préfet et des personnes placées sous son autorité était inopérante ; que la signature du délégataire emporte preuve d'indisponibilité des signataires de premier rang.

Sur le fond, il a rappelé que le le juge des libertés et de la détention peut également être saisi en vue d' ordonner une 3ème prolongation de la rétention administrative, en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public ; qu'en l'espèce, le le juge des libertés et de la détention a constaté à juste titre, d'une part, que la présence du retenu présentait une menace à l'ordre public au regard de ses 28 condamnations au pénal principalement pour des faits en lien avec les stupéfiants, que , d'autre part, l'Administration avait effectué toute diligence pour obtenir un laissez-passer consulaire, les autorités algériennes ayant été saisies avec diligence dès le placement de l'intéressé en rétention administrative, qu'elles ont été relancées et que la procédure était en cours.

Sur quoi

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Monsieur [V] [U], à l'encontre de l'ordonnance rendue le 20 août 2024 à 12h09 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, interjeté le 21 août 2024 à 11h12, est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu a l'article R 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la régularité de la requête en prolongation de la rétention administrative

Aux termes de l' article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice et, en vertu de l'article 118 du même code, elle peut être proposée en tout état de cause, y compris à hauteur d'appel.

En application de l'article R743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge a l'obligation de vérifier la compétence du signataire de la requête.

En l'espèce, il ressort de l'arrêté préfectoral portant délégation produit par l'intimé, que le signataire de la requête en prolongation de la rétention administrative, Monsieur [P] [F] est régulièrement délégué ;

La preuve, par le préfet, de l'indisponibilité des signataires de premier rang n'est pas exigée par le texte et la signature du délégataire emporte preuve de leur empêchement.

Il s'ensuit que l'irrégularité soulevée n'est pas fondée.

Sur le bien fondé de la troisième prolongation de la rétention administrative

Aux termes de l'article L. 742-5 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version modifiée par la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024 à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

Aux termes de l'article L741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.

La cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge a statué sur les moyens de fond soulevés devant lui et repris à la cour, sans qu'il soit nécessaire d'apporter quelque observation complémentaire.

Enfin, il ne ressort de l'examen rigoureux du dossier aucune méconnaissance, par l'administration, d'une condition de légalité découlant du droit de l'Union et devant être dès lors, soulevée d'office, par le juge chargé de contrôler la mesure de rétention administrative.

La décision déférée sera donc confirmée.

***

La personne placée en rétention administrative est en droit de recevoir à tout moment le traitement approprié à son état de santé.

En l'espèce, Monsieur [U] a déclaré ne plus recevoir depuis deux mois, les injections de Haldol qui seraient prescrites pour une épilepsie.

Quel que soit la pathologie pour laquelle ce traitement avait été prescrit, son absence ne peut qu'entraîner des effets graves pour la santé de l'intéressé.

Il convient donc d'ordonner que Monsieur [U] soit soumis dans les 48 heures à un examen par un médecin généraliste ou spécialiste, afin que celui-ci détermine grâce à un interrogatoire et un examen médical, la ou les pathologies dont souffre l'intéressé et prescrive les traitements nécessaires.

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARONS l'appel de M. [V] [U] recevable en la forme ;

au fond, le REJETONS ;

CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg le 20 Août 2024 ;

RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention :

- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin,

- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;

DISONS avoir informé M. [V] [U] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.

ORDONNONS que Monsieur [U] soit soumis dans les quarante-huit heures à un examen médical par un médecin généraliste ou spécialiste qui devra prescrire tout traitement nécessitépar les pathologies dont souffre l'intéressé.

Prononcé à Colmar, en audience publique, le 22 Août 2024 à 16h08, en présence de

- l'intéressé par visio-conférence

- Maître Mathilde MESSAGEOT, conseil de M. [V] [U]

Le greffier, Le président,

reçu notification et copie de la présente,

le 22 Août 2024 à 16h08

l'avocat de l'intéressé

Maître Mathilde MESSAGEOT

comparante

l'intéressé

M. [V] [U]

comparant par visio-conférence

l'avocat de la préfecture

La SELARL CENTAURE

non représentée

EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,

- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,

- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,

- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,

- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,

- ledit pourvoi n'est pas suspensif.

La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :

- au CRA de [Localité 2] pour notification à M. [V] [U]

- à Maître Mathilde MESSAGEOT

- à M. LE PREFET DU HAUT-RHIN

- à la SELARL CENTAURE AVOCATS

- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.

Le Greffier

M. [V] [U] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance

le À heures

Signature de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 6 (etrangers)
Numéro d'arrêt : 24/02884
Date de la décision : 22/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-22;24.02884 ?
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