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08/07/2024 | FRANCE | N°24/02407

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 6 (etrangers), 08 juillet 2024, 24/02407


COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)





N° RG 24/02407 - N° Portalis DBVW-V-B7I-IKRD

N° de minute : 249/2024





ORDONNANCE





Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Iman SOUFIAN, greffière placée ;





Dans l'affaire concernant :



M. [M] [V]

de nationalité russe



Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 4]





VU les articles L

.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1,R743-12 et suivantts R.744-16, R...

COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)

N° RG 24/02407 - N° Portalis DBVW-V-B7I-IKRD

N° de minute : 249/2024

ORDONNANCE

Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Iman SOUFIAN, greffière placée ;

Dans l'affaire concernant :

M. [M] [V]

de nationalité russe

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 4]

VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1,R743-12 et suivantts R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;

VU l'arrêté pris le 4 juillet 2024 par le préfet du Bas-Rhin faisant obligation à M. [M] [V] de quitter le territoire français ;

VU la décision de placement en rétention administrative prise le 4 juillet 2024 par Mme la préfète du Bas-Rhin à l'encontre de M. [M] [V], notifiée à l'intéressé le même jour à 14h50 ;

VU le recours de M. [M] [V] daté du 06 juillet 2024, reçu et enregistré le même jour à 10h42 au greffe du tribunal, par lequel il demande au tribunal d'annuler la décision de placement en rétention administrative pris à son encontre ;

VU la requête de M. le Préfet du Bas-Rhin  datée du 05 juillet 2024, reçue et enregistrée le même jour à 15h39 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 28 jours de M. [M] [V] ;

VU l'ordonnance rendue le 07 Juillet 2024 à 11h45 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarant le recours de M. [M] [V] recevable et la procédure régulière, faisant droit au recours de M. [M] [V] et ordonnant la main-levée de la mesure de placement en rétention administrative, déclarant la requête de M. le Préfet du Bas-Rhin recevable, disant n'y avoir lieu à statuer sur la demande de prolongation de la rétention de M. [M] [V] au centre de rétention de [Localité 4], ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 28 jours ;

VU l'appel de cette ordonnance interjeté par M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 07 Juillet 2024 à 16h05 et la demande aux fins de déclarer cet appel suspensif conformément à l'article L743-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA)

VU l'ordonnance rendue le 07 juillet 2024 à 20h08 faisant droit à la demande de monsieur le Procureur de la République de Strasbourg aux fins de voir déclarer son appel suspensif ;

VU les avis d'audience délivrés le 07 juillet 2024 à l'intéressé [M] [V], à Me Charline LHOTE, avocat de permanence, à M. le préfet du Bas-Rhin, à M. Le Procureur Général et l'avis délivré le 8 juillet 2024 à [Y] [R], interprète en langue russe assermenté ;

VU l'appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 07 juillet 2024 interjeté par M. le préfet du Bas-Rhin par l'intermédiaire de son conseil par voie électronique réceptionné au greffe de la Cour le 08 juillet 2024 à 07h08 ;

Le représentant de M. LE PREFET DU BAS-RHIN, intimé, dûment informé de l'heure de l'audience par courrier électronique du 07 juillet 2024 a comparu.

Après avoir entendu M. [M] [V] en ses déclarations par visioconférence et par l'intermédiaire de [Y] [R], interprète en langue russe assermenté, Maître Charline LHOTE, avocat au barreau de COLMAR, commis d'office, en ses observations pour le retenu, puis Maître MOREL, avocat au barreau de Paris, en ses observations pour la SELARL CENTAURE, conseil de M. le préfet du Bas-Rhin, et à nouveau l'appelant qui a eu la parole en dernier.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le 4 juillet 2024, Monsieur [M] [V], ressortissant russe, a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français , pris par le préfet du Bas Rhin, étant observé que l'intéressé fait également l'objet d'une interdiction du territoire français, pour dix ans, prononcée par le tribunal correctionnel de Mende le 15 juillet 2021.

Par arrêté du même jour, notifié à 14h35, Monsieur [M] [V] a été placé en rétention administrative.

Le 6 juillet 2024, il a exercé un recours contre cette décision.

Par requête du 5 juillet 2024, le préfet du Bas Rhin a sollicité la prolongation pour vingt-huit jours, de la rétention administrative de Monsieur [M] [V].

Par ordonnance du 7 juillet 2024, rendue à 14h45, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg a fait droit au recours de Monsieur [M] [V], rejeté la demande du préfet et ordonné la remise en liberté de l'intéressé.

Pour statuer ainsi, le juge des libertés et de la détention a considéré que la décision contestée était suffisamment motivée mais était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, le préfet ayant considéré à, tort, que Monsieur [M] [V] ne justifiait pas de son domicile en France, n'était pas intégré à la société française et ne démontrait pas être dépourvu d'attache avec la Russie.

Par acte, reçu le 7 juillet 2024 à 16h05, le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg a interjeté appel de cette décision, en demandant au premier président de la cour d'appel de bien vouloir déclarer son appel suspensif.

Par acte, reçu le 8 juillet 2024 à 7h47, le préfet du Bas Rhin a également interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 7 juillet 2024, le premier président de la cour d'appel a conféré effet suspensif à l'appel interjeté par le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg.

A l'appui de son appel, aux fins d'infirmation de l'ordonnance susvisée, et de prolongation de la rétention administrative de l'intéressé, le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg a fait valoir le fait que Monsieur [M] [V] représentait une menace grave pour l'ordre public en ce qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel de Mende cinq fois entre le 26 juin 2020 et le 15 juillet 2021 , notamment à des peines d'emprisonnement et à une interdiction du territoire français pour 10 ans, notamment pour des faits pour des faits d'extorsion par violence, vol accompagné de dégradations, acquisition, détention, offre , cession et transport illicite de stupéfiants; qu'il a fait l'objet d'un placement en garde en vue, le 08 mars 2024, pour des faits d'extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secret, fonds, valeur ou bien ; que cette enquête est toujours en cours a l'heure actuelle ; qu'il a une nouvelle fois été place en garde a vue le 03 juillet 2024, puisqu'il a été retrouvé en possession, sans ordonnance de médicaments soumis à autorisation.

Le procureur de la république a ajouté que l'intéressé, au surplus, ne présente pas de garanties de représentation suffisantes sur le territoire français ; qu'il déclare en effet être célibataire, sans emploi, sans charge de famille et vivre au domicile de ses parents, [Adresse 1] ; que quand bien même il a été produit une attestation d'hébergement pour justifier de son adresse, force est de constater que l''attestation d'hébergement du 05 juillet 2024 n'est, de toute évidence, pas rédigée par la même personne que celle du 11 mars 2024.

A l'appui de son appel, aux fins d'infirmation de l'ordonnance susvisée, et de prolongation de la rétention administrative de l'intéressé, le préfet du Bas Rhin a fait valoir que l'intéressé avait été placé en rétention administrative sur le fondement de l'article L741-1 in fine, c'est à dire au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.

Il a rappelé que le placement en rétention a pour but d'assurer l'effectivité d'une mesure de reconduite à la frontière ou d'éloignement du territoire français, que la motivation d'un tel acte ne s'apprécie pas seulement par rapport à des garanties de représentation formelles à un domicile quelconque mais aussi par rapport à l'évaluation de la volonté de l'étranger de se conformer aux décision administratives le concernant, autrement dit concrètement celle d'obtempérer aux décision administratives quand il est invité à quitter le territoire national français.

Il a souligné que l'intéressé a été reconnu coupable et incarcéré à plusieurs reprises pour des faits d'outrage à une personne dépositaire d'autorité publique, menace de mort ou d'atteinte aux bien dangereuse pour les personnes à l'encontre d'une personne dépositaire d'autorité publique, menace de mort réitérée d'usage, de détention et transport de stupéfiants, d'extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, de promesse, secret, fonds, valeur ou bien, de vol avec destruction ou dégradation, de tentative de vol; qu'il fait actuellement l'objet de poursuites judiciaires pour des faits d'extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secret, fonds, valeur ou bien, faits pour lesquels il a été placé en garde à vue le 8 mars 2024; que son évolution dans la délinquance fait bien état d'une menace réelle et suffisamment grave à l'ordre public.

L'appelante a ajouté que si le le juge des libertés et de la détention lui a reproché une erreur d'appréciation sur les garanties de représentation, il apparaît que l'intéressé n'a pas remis aux autorités un passeport en cours de validité; qu'il s'agit bien d'une opposition à son éloignement; que si la remise d'un passeport n'est pas un préalable obligatoire pour une assignation à résidence par l'autorité administrative, il est légalement constant qu'un étranger qui ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité ne présente pas de garanties de représentation suffisantes au sens de l'article L. 612-3, 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par ailleurs si Monsieur [M] [V] invoque une adresse, tel que soulevé par le parquet dans son acte d'appel, l'intéressé a fourni deux attestations d'hébergements rédigées par deux personnes différentes de sorte que ces documents ne sauraient valablement constituer preuve d'un domicile stable et certaine.

A l'audience, le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg n'a pas comparu.

A l'audience, le préfet du Bas Rhin, représenté a exposé que Monsieur [V] représentait une menace à l'ordre public évidente ; qu'il était dépourvu de ressources ; qu'il avait manifesté un refus catégorique d'exécuter l'OQTF.

Monsieur [M] [V] a comparu et exposé qu'il vivait à [Localité 2] avec ses deux parents et ses deux frères ; qu'il n'avait ni diplôme, ni qualification mais avait travaillé entre 2018 et 2020 comme charpentier. Il a précisé que la famille avait quitté le sud pour s'installer à [Localité 2] afin de l'éloigner de ses mauvaises fréquentations.

Son conseil, a fait valoir que la décision de placement en rétention administrative était entachée d'une erreur de fait puisque Monsieur [V] habitait chez ses parents, tout deux en situation régulière. Elle a ajouté que la dernière condamnation concernait des faits datant de 2021 et que Monsieur [V] ne pouvait être considéré comme représentant une menace à l'ordre public ; que s'il avait été trouvé en possession de médicaments, c'était pour traiter des douleurs et non pour les revendre.

Sur quoi

Sur la recevabilité des appels

Le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg a formé appel de l'ordonnance entreprise, rendue le 7 juillet 2024, à 14h45, par déclaration motivée reçue le 7 juillet 2024 à 16h05.

Le préfet du Bas Rhin a formé appel de l'ordonnance entreprise, rendue le 7 juillet 2024, à 14h45 par déclaration motivée reçue le 8 juillet 2024 à 7h47.

Il sera donc considéré qu'il a été satisfait aux dispositions de l' article R. 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que les appels sont ainsi réguliers et recevables.

Sur la régularité du placement en rétention administrative

Aux termes de l'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L.612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.

Il ressort donc de ce texte que le risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement est apprécié d'une part, au regard du fait que l'étranger ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations d'autre part au regard de la menace pour l'ordre public, que l'étranger représente.

L'article L741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile in fine, prévoit donc qu'un des critères de placement en rétention administrative d'un étranger est que , en raison de la menace à l'ordre public qu'il représente, il présenterait un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement.

L'arrêté portant placement en rétention administrative, en date du 4 juillet 2024, est motivé par le fait que Monsieur [M] [V] a été condamné à plusieurs reprises pour des faits d'atteinte aux personnes, que sa présence sur le territoire national constitue une menace à l'ordre public et qu'il y a urgence à l'éloigner; qu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives, propres à prévenir le risque qu'il se soustrait à la mesure d'éloignement, qu'en effet il ne justifie pas de l'adresse qu'il déclare, qu'il se déclare sans emploi et sans ressource , que l'étude de son dossier ne révèle pas d'intégration notable au sein de la société française; qu'ainsi il ne présente pas de garanties de représentations suffisantes.

***

Il ressort du bulletin n°1 du casier judiciaire de Monsieur [M] [V] que celui-ci a été condamné pour des délits à cinq reprises :

-par le tribunal correctionnel de MENDE le 26 juin 2020 : à 6 mois d'emprisonnement dont 3 mois avec sursis probatoire pendant 2 ans pour des faits de menace de mort réitérée, outrage a personne depositaire de l|'autorité publique et menace de mort ou d'atteinte aux biens dangereuse pour les personnes a l'encontre d'un dépositaire de l'autorité publique, commis le 25 juin 2020, sursis révoqué en totalité par jugement du tribunal correctionnel de MENDE en date du 15 juillet 2021,

-par le tribunal correctionnel de MENDE le 21 juillet 2020 : à 5 mois d'emprisonnement dont 3 mois avec sursis probatoire pendant 2 ans pour des faits d'extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secret, fonds, valeur ou bien, sursis révoqué en totalité par jugement du tribunal correctionnel de MENDE,en date du 15 juillet 2021,

-par le tribunal correctionnel de MENDE le 15 avril 2021 : à 10 mois d'emprisonnement pour des faits de vol avec destruction ou dégradation et tentative de vol avec destruction ou dégradation ;

-par le tribunal correctionnel de MENDE le 03 juin 2021 : à 2 mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de vol par ruse, effraction, escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggrave par une autre circonstance,

-par le tribunal correctionnel de MENDE le 15 juillet 2021 : à 1 an d'emprisonnement et interdiction du territoire français pendant 10 ans pour des faits d'acquisition, détention, offre ou cession et transport non autorises de stupéfiants et usage illicite de stupéfiants.

L'examen du parcours judiciaire de l'intéressé montre que la plupart des condamnations dont il a fait l'objet concernent des faits d'atteinte aux personnes ou des faits mettant en danger la santé des personnes, tels la cession de stupéfiants.

Il sera relevé que l'intéressé a été interpellé le 4 juillet 2024 à nouveau en possession de substances illicites ou nécessitant une autorisation.

La dernière condamnation n'est pas ancienne, Monsieur [M] [V] est sorti de prison en 2023, ayant au surplus bénéficié d'une libération conditionnelle et il s'est à nouveau fait connaître défavorablement, pour les faits précités mais aussi pour des faits d'extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secret, fonds, valeur ou bien commis en mars 2024, l'enquête étant en cours.

Il est donc constant que Monsieur [M] [V] représente bien une menace, grave, certaine et actuelle à l'ordre public et le risque de soustraction à la mesure d'éloignement est avéré, s'agissant d'un sujet jeune, sans emploi, sans charge de famille qui a déclaré expressement ne pas vouloir exécuter l'OQTF étant souligné au surplus qu'il fait l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire national.

S'agissant des garanties de représentation, les attestations d'hébergement produites appparaissent bien toutes les deux signées de la main du père de Monsieur [V] et sont accompagnées d'un justificatif de domicile, de sorte qu'il ne peut être sérieusement remis en cause le fait que l'intimé est bien domicilié à cette adresse.

Monsieur [M] [V] est bien titulaire d'un passeport russe en cours de validité, même si celui-ci n'a pas été remis aux autorités, de sorte qu'il ne peut être considéré qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité.

S'agissant de l'intégration dans la société française la cour ne peut qu'observer que l'intéressé admet ne pas travailler depuis 2020, et qu'il n'a obtenu aucune qualification.

Le sujet de l'existence ou non d'attaches avec la Russie n'a aucun rapport avec les garanties de représentation, de sorte que le le juge des libertés et de la détention n'aurait pas dû l'évoquer.

Le préfet n'a donc commis aucune erreur de fait en considérant que Monsieur [M] [V] était dépourvu de garanties de représentation

En tout état de cause, dans l'hypothèse où le préfet aurait mal apprécié certains points des garanties de représentation de l'intéressé, il convient de souligner que sa décision est parfaitement fondée, en droit, au visa de la menace à l'ordre public que l'étranger représente et au risque conséquent de soustraction à la mesure d'éloignement, de sorte qu'elle ne pouvait faire l'objet d'une annulation.

La décision déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a accueilli le recours de Monsieur [M] [V].

Sur la prolongation de la rétention administrative

Aux termes de l'article L742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, pour une durée de vingt-huit jours par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative.

Le texte n'impose aucune condition à cette prolongation, si ce n'est que, conformément à l'article L. 741-3 du code susvisé, l'administration effectue toutes les diligences nécessaires à l'éloignement de l'intéressé, en temps utile, la rétention administrative de l'étranger devant être limitée au temps strictement nécessaire à l'organisation de son départ.

Il est constant que l'éloignement n'a pu être mis en oeuvre dans les premières 48 heures et il n'est émis aucune critique à l'encontre des diligences de l'administration, laquelle a effectué le 5 juillet 2024 une demande de réadmission auprès de la Russie.

Par ailleurs Monsieur [M] [V], qui n'a pas remis son passeport aux autorités de police ou gendarmerie, ne peut bénéficier d'une assignation à résidence.

Il n'apparaît donc pas que Monsieur [M] [V] soit retenu pour une durée excessive, la prolongation de la rétention administrative ayant pour objet de le maintenir à disposition pour s'assurer de sa personne, le temps strictement nécessaire à l'organisation de son éloignement.

Il sera par ailleurs rappelé qu'aux termes, notamment des paragraphes 93 et 95 de l'arrêt rendu le 8 novembre 2022 par la cour de justice des communautés européennes l'obligation, pour les autorités judiciaires chargées du contrôle de la légalité des mesures de rétention, de relever d'office, la méconnaissance d'une condition de légalité ne s'impose que pour celles qui découlent du droit de l'Union.

En l'espèce, il ne ressort de l'examen rigoureux du dossier aucune méconnaissance, par l'administration, d'une condition de légalité découlant du droit de l'Union et devant être dès lors, soulevée d'office, par le juge chargé de contrôler la mesure de rétention administrative.

Il convient dès lors d'ordonner la prolongation, pour vingt-huit jours de la rétention administrative de Monsieur [M] [V].

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARONS les appels de Monsieur le procureur de la république du tribunal judiciaire de Strasbourg et de Madame la préfète du Bas Rhin recevables en la forme,

Y faisant droit,

INFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 7 juillet 2024,

Statuant à nouveau,

REJETONS le recours de Monsieur [M] [V],

ORDONNONS la prolongation pour vingt-huit jours de la rétention administrative de Monsieur [M] [V] à compter du 6 juillet 2024 à 14h35,

RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont renconnus pendant la rétention :

- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin

- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix

DISONS avoir informé M. [M] [V] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.

Prononcé à [Localité 3], en audience publique, le 08 Juillet 2024 à 16h10, en présence de

- l'intéressé par visio-conférence

- Maître Charline LHOTE, conseil de M. [M] [V]

- Maître MOREL pour la SELARL CENTAURE AVOCATS, conseil de M. LE PREFET DU BAS-RHIN

- de l'interprète, lequel a traduit la présente décision à l'intéressé lors son prononcé.

Le greffier, Le président,

reçu notification et copie de la présente,

le 08 Juillet 2024 à 16h10

l'avocat de l'intéressé

Maître Charline LHOTE

comparante

l'intéressé

M.[V]

comparant par visio-conférence

l'interprète

M. [R]

comparant

l'avocat de la préfecture

Me MOREL

comparante

EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,

- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,

- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,

- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,

- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,

- ledit pourvoi n'est pas suspensif.

La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :

- au CRA de [Localité 4] pour notification à M. [M] [V]

- à Maître Charline LHOTE

- à M. PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE STRASBOURG

- à M. le Préfet du Bas-Rhin

- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.

Le Greffier

M. [M] [V] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance

le À heures

Signature de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 6 (etrangers)
Numéro d'arrêt : 24/02407
Date de la décision : 08/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-08;24.02407 ?
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