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12/06/2024 | FRANCE | N°22/03492

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 12 juin 2024, 22/03492


MINUTE N° 301/24

























Copie exécutoire à



- Me Joëlle LITOU-WOLFF



- Me Noémie BRUNNER





Le 12.06.2024



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 12 Juin 2024



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 22/03492 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H5NU



Décision

déférée à la Cour : 07 Juillet 2022 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG - 1ère chambre civile



APPELANTES - INTIMEES INCIDEMMENT :



S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]



S.A. AXA FRANCE VIE prise en la...

MINUTE N° 301/24

Copie exécutoire à

- Me Joëlle LITOU-WOLFF

- Me Noémie BRUNNER

Le 12.06.2024

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 12 Juin 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 22/03492 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H5NU

Décision déférée à la Cour : 07 Juillet 2022 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG - 1ère chambre civile

APPELANTES - INTIMEES INCIDEMMENT :

S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

S.A. AXA FRANCE VIE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

Représentées par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me GENERET, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIME - APPELANT INCIDEMMENT :

Monsieur [O] [V]

[Adresse 2]

Représenté par Me Noémie BRUNNER, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me HECKEL, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. ROUBLOT, Conseiller faisant fonction de Président, et Mme RHODE, Conseillère, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. ROUBLOT, Conseiller faisant fonction de Président

Mme DAYRE, Conseillère

Mme RHODE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par M. Philippe ROUBLOT, conseiller faisant fonction de président et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'assignation délivrée le 10 janvier 2018, par laquelle la SA AXA France IARD, la SA AXA France Vie, la société AXA Assurances IARD Mutuelle et la société AXA Assurances Vie Mutuelle, ci-après également dénommées 'les sociétés AXA', ont fait citer M. [O] [V] devant le tribunal de grande instance, devenu le 1er janvier 2020, par application de l'article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 et de ses décrets d'application n° 2019-965 et 2019-966 du 18 septembre 2019, le tribunal judiciaire de Strasbourg, aux fins d'indemnisation pour non-respect de la clause de non-concurrence à laquelle il était tenu, en vertu du traité de nomination d'agent général,

Vu le jugement rendu le 7 juillet 2022, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal judiciaire de Strasbourg a statué comme suit :

'DEBOUTE la société AXA FRANCE IARD S.A., la société AXA VIE S.A., la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE et la Société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE de leurs demandes d'indemnisation ;

DEBOUTE M. [O] [V] de ses demandes de dommages et intérêts ;

CONDAMNE la société AXA. FRANCE IARD S.A., la société AXA FRANCE VIE S.A., la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE et la société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE à supporter les entiers dépens ;

CONDAMNE la société AXA FRANCE IARD S.A., la société AXA' FRANCE VIE S.A., la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE et la société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE à payer à M. [O] [V] la somme de CINQ MILLE EUROS (5 000 €) au titre des frais irrépétibles ;

DEBOUTE la société AXA FRANCE IARD S.A., la société AXA FRANCE VIE S.A., la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE et la société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE de leur demande au titre des frais irrépétibles ;

PRONONCE l'exécution provisoire.'

Vu la déclaration d'appel formée par la SA AXA France IARD, la SA AXA France Vie, la société AXA Assurances IARD Mutuelle et la société AXA Assurances Vie Mutuelle, contre ce jugement et déposée le 12 septembre 2022,

Vu la constitution d'intimée de M. [O] [V] en date du 18 janvier 2023,

Vu les dernières conclusions en date du 12 février 2024, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SA AXA France IARD, la SA AXA France Vie, la société AXA Assurances IARD Mutuelle et la société AXA Assurances Vie Mutuelle demandent à la cour de :

'Vu les articles 2044 et suivants du Code civil,

Vu le traité de nomination d'agent général AXA composé des conditions particulières, des conditions générales n° A 340045 01 2010, du protocole d'accord du 28 juin 2000.

Vu l'article III-7 des conditions générales du Traité de nomination de l'agent général d'assurance AXA,

Vu le protocole d'accord transactionnel signé par les parties le 10 juillet 2015,

Sur l'appel principal :

DIRE l'appel bien fondé,

Y faisant droit,

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Débouté la SA AXA France IARD, la SA AXA France VIE, la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, la société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE de leurs demandes d'indemnisation ;

- Condamné la SA AXA France IARD, la SA AXA France VIE, la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, la société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE à supporter les entiers dépens ;

- Condamné la SA AXA France IARD, la SA AXA France VIE, la société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, la société AXA ASSURANCES VIE à payer à Monsieur [O] [V] la somme de 5.000€ au titre des frais irrépétibles.

- Débouté les sociétés AXA de leur demande au titre des frais irrépétibles.

et statuant à nouveau

DECLARER les demandes des sociétés AXA France à l'encontre de Monsieur [V] recevables et bien fondées,

CONSTATER que Monsieur [O] [V] n'a pas respecté les termes de la clause de non-concurrence stipulée à l'article III-7 des conditions générales du Traité de nomination de l'agent général d'assurance AXA, en ce qu'il s'est :

* rétabli indirectement via la structure de courtage GECA dans la zone de chalandise de son ancienne agence AXA à [Localité 4], et

* a proposé des contrats d'assurance auprès d'anciens assurés.

* a fait souscrire des contrats d'assurance auprès de ses anciens assurés.

En conséquence,

CONDAMNER Monsieur [V] à payer aux sociétés SA AXA France IARD, SA AXA France VIE, société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE France, la somme de 344.222,00 € en restitution de l'indemnité de fin de mandat versée par elles à l'issue de la relation contractuelle le 31 août 2015, assortie des intérêts au taux légal à compter de cette date, ou à tous le moins à compter de la date de l'assignation initiale.

CONDAMNER Monsieur [V] à payer aux sociétés SA AXA France IARD, SA AXA France VIE, société AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, société AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE France la somme de 263.661,27 € au titre de l'indemnité contractuelle et correspondant aux commissions versées à Monsieur [V] au titre des douze derniers mois de son activité d'agent général d'assurance pour le compte d'AXA France, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation initiale.

CONDAMNER Monsieur [V] aux dépens de première instance et à payer aux sociétés AXA la somme de 10.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de l'instance devant le Tribunal Judiciaire de Strasbourg,

DEBOUTER Monsieur [V] de toutes conclusions contraires et de l'intégralité de ses fins, moyens, demandes et prétentions,

CONFIRMER pour le surplus le jugement entrepris,

Sur l'appel incident :

Le DIRE mal fondé,

En DEBOUTER Monsieur [V] ainsi que de toutes conclusions contraires,

En tout état de cause,

CONDAMNER Monsieur [V] aux entiers frais et dépens de l'instance d'appel ainsi qu'à payer la somme de 10.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile'

et ce, en invoquant, notamment :

- le caractère indissociable du traité de nomination, incluant les conditions générales du mandat d'agent général, les conditions particulières du traité de nomination, en l'espèce signées le 1er octobre 2010, puis le 1er avril 2012, et le protocole d'accord du 28 juin 2000, qui aurait été accepté par l'agent général et qui lui serait opposable, sans besoin de renseigner les conditions générales relevant d'un formulaire type, compte tenu des documents contractuels dont M. [V] aurait eu connaissance, et intégrant les conditions générales dans le champ contractuel,

- l'opposabilité de la clause de non-concurrence, même en l'absence de signature d'une clause la prévoyant, en ce qu'elle est prévue, s'agissant d'une profession réglementée, par la Convention professionnelle FFSA-FNSAGA du 16 avril 1996 homologuée par le décret n° 96-902 du 15 octobre 1996, constituant le statut réglementaire des agents généraux et ayant un caractère d'ordre public, dont les conditions générales ne seraient que la reprise, la légitimité des clauses de non-concurrence étant reconnue par la jurisprudence, et la clause litigieuse étant dans le champ contractuel, et son respect inscrit dans le protocole d'accord transactionnel signé entre les parties, comme une contrepartie en commandant la validité, cette clause s'imposant de manière incontestable pour l'ensemble de ses fonctions au sein de l'ensemble des sociétés AXA parties au litige,

- la validité de la clause de non-concurrence comme limitée dans le temps et l'espace, et proportionnée, interdisant uniquement à l'agent général démissionnaire d'exercer dans son ancienne zone de chalandise et auprès de ses anciens clients, tout en étant assortie d'une contrepartie par le versement d'une indemnité de fin de mandat, qui permet de compenser cette limitation de l'exercice professionnel, et à laquelle il peut être renoncé pour permettre une réinstallation,

- le non-respect, par M. [V], de la clause de non-concurrence, en exerçant, au-delà de sa réinstallation officielle à [Localité 3] dans des conditions respectueuses de la clause, et en lien avec son ancien associé M. [P], une activité parallèle de courtage au sein et pour le compte de la société GECA située à [Localité 4], lui permettant d'offrir des contrats par des compagnies concurrentes, et en réalisant des opérations d'assurance dans la zone de chalandise auprès d'anciens clients AXA ou en proposant des solutions d'assurances à de potentiels clients d'AXA dans la zone de chalandise,

- la contestation de relations d'affaire entre les parties depuis la rupture du contrat, les concluantes réfutant tout acquiescement, par un acte non équivoque, à une novation de l'obligation de M. [V], peu important la souscription de contrats par AXA avec la société GECA, dont l'interlocuteur au sein d'AXA ne connaissait pas la situation de M. [V], qui y reconnaît, lui, un rôle actif, contrevenant, ainsi, par la réalisation d'une activité d'intermédiation, à sa clause de non-concurrence en se réinstallant, tout en proposant des produits d'assurance à ses anciens clients, et ce alors que son obligation aurait un caractère 'intuitu personae' et dont la violation serait automatiquement sanctionnée par la perte du droit à indemnité compensatrice, sans emport de la connaissance éventuelle de la situation par AXA, qui n'aurait pas accepté cette réinstallation,

- une sanction de la violation, en premier lieu, par le remboursement de l'indemnité de fin de mandat, et en second lieu, par le versement d'une indemnité contractuelle correspondant aux commissions qu'il a perçues la dernière année de son activité pour le compte d'AXA, conformément au traité de nomination, s'agissant non pas d'un engagement qui s'ajoute aux obligations prévues par le contrat mais du contrat lui-même, et donc pas d'une clause pénale,

- sur l'appel incident de M. [V], l'absence de fondement juridique et de lien suffisant avec le litige de la demande indemnitaire, au titre des primes perçues pendant ce qu'il qualifie de relation d'affaires, s'agissant d'opérations, au demeurant non prouvées, totalement indépendantes de l'obligation de non-concurrence qui lie les parties ; et concernant la demande tendant à voir reconnaître un prétendu manquement à l'obligation de confidentialité, à défaut pour le protocole de prévoir d'aucune façon une obligation à la charge des parties de diffusion partielle des informations qu'il peut contenir, et la violation de la clause de non-concurrence commise par M. [V] entraînant nécessairement l'obligation de produire le protocole d'accord transactionnel dans son intégralité en vue de voir préservés les droits des sociétés AXA.

Vu les dernières conclusions en date du 26 février 2024, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [O] [V] demande à la cour de :

'SUR APPEL PRINCIPAL

DECLARER l'appel mal fondé,

Le REJETER,

CONFIRMER le Jugement entrepris dans la limite de l'appel incident,

DEBOUTER les sociétés AXA FRANCE IARD, AXA FRANCE VIE, AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, et AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE de l'intégralité de leurs demandes,

SUR APPEL INCIDENT

DECLARER l'appel incident recevable,

DECLARER l'appel incident bien fondé,

INFIRMER le jugement prononcé le 7 juillet 2022 par la 1ère Chambre Civile du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG en ce qu'il a débouté Monsieur [O] [V] de ses demandes indemnitaires,

Et statuant à nouveau sur ce point, si par extraordinaire le Tribunal considérait que l'indemnité de fin de contrat devrait être remboursée au groupe AXA en l'absence de relation d'affaires consentie entre les parties après 2015 :

CONDAMNER solidairement les sociétés AXA FRANCE IARD, SA AXA FRANCE VIE, AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, et AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE à verser à Monsieur [O] [V] une somme de 1 534 440 € à titre de dommages et intérêts, ce montant correspondant au montant des primes touchées en 2017, 2018, 2019 et 2020 par le groupe AXA sur les affaires amenées par le défendeur,

DIRE que les demanderesses ont contrevenu à l'obligation de confidentialité prévue au protocole d'accord transactionnel du 10 juillet 2015,

CONDAMNER solidairement les sociétés AXA FRANCE IARD, SA AXA FRANCE VIE, AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, et AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE au versement d'une indemnité chiffrée à hauteur du montant total des hypothétiques condamnations dont Monsieur [O] [V] pourrait faire l'objet, à titre de dommages-intérêts,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER solidairement les sociétés AXA FRANCE IARD, SA AXA FRANCE VIE, AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, et AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE à payer à Monsieur [O] [V] un montant de 8 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER solidairement les sociétés AXA FRANCE IARD, SA AXA FRANCE VIE, AXA ASSURANCES IARD MUTUELLE, et AXA ASSURANCES VIE MUTUELLE aux entiers dépens de la procédure d'appel'

et ce, en invoquant, notamment :

- la signature du protocole d'accord transactionnel avec les seules sociétés AXA France IARD et AXA France Vie, et partant le mal fondé de toute demande de condamnation formée par AXA Assurances IARD Mutuelle et AXA Assurances Vie Mutuelle, sur la base du non-respect de ce protocole,

- l'inopposabilité au concluant de la clause de non-concurrence formalisée dans le traité de nomination d'agent général qui n'a pas été signé, seul l'ayant été un document intitulé 'Conditions Particulières' du 1er avril 2012, sans viser les conditions générales qui n'entraient pas dans le champ contractuel, en l'absence, de surcroît, de clause d'indivisibilité, qui ne saurait se présumer, ou de tout avenant ayant valeur juridique à défaut de signature du traité de nomination ni du protocole d'accord du 28 juin 2000, ou encore de renvoi valable du protocole d'accord de 2015 à un document non contractuel, aucune acceptation, directe ou indirecte, claire et non équivoque de la clause litigieuse n'étant ainsi établie,

- à titre subsidiaire, la nullité de la clause de non-concurrence, qui formalise une interdiction absolue de présentation d'opérations d'assurance ou de contrats dans la zone de chalandise de l'ancienne agence principale et des points de vente secondaires, et interdirait purement et simplement à son débiteur personne physique d'exercer son activité professionnelle, outre qu'elle apparaîtrait, de par son étendue géographique, de 25 kilomètres autour de l'agence, ou de chacun des points de vente secondaires s'ils existent, si l'agence principale se situe dans une ville ou une communauté urbaine de plus de 45 000 habitants (dernier recensement connu), disproportionnée aux intérêts légitimes à protéger, en l'absence de cession, par le concluant, de son portefeuille de clients, et alors que les clauses de non-concurrence ou de non-rétablissement font l'objet d'une interprétation stricte par le juge,

- plus subsidiairement, l'absence de violation de l'obligation de non-concurrence, qui ne porte que sur la présentation d'opération d'assurance au public et la souscription de contrats d'assurance à d'anciens clients, et ce au regard de l'étendue de l'activité du concluant, qui n'était pas interdit de s'établir ou de s'installer, et en l'absence de justification 'de manière objective et certaine' par des 'éléments matériels' de ladite violation, la partie adverse se voyant reprocher une confusion avec des activités distinctes de l'assurance,

- s'agissant de l'obligation de non-concurrence 'conventionnelle', qui serait issue des dispositions d'ordre public de la convention FFSA-FNSAGA du 16 avril 1996 homologuée par le décret 96-902 du 15 octobre 1996, l'absence de justification par les appelantes de l'intégration au droit positif de la convention, ou des conditions de son opposabilité au concluant,

- sur 'l'indemnité contractuelle', l'inopposabilité de la clause la prévoyant, figurant dans le traité de nomination lui-même inopposable, et subsidiairement, la réduction du montant, manifestement excessif, de cette clause pénale, ainsi qualifiée comme sanctionnant, dans un but contraignant, par le paiement d'un montant supplémentaire une inexécution contractuelle, cette limitation s'imposant d'autant plus qu'AXA aurait noué une relation d'affaires approfondie grâce à laquelle elle aurait pu réaliser un chiffre d'affaires substantiel,

- en tout état de cause, à titre subsidiaire, une analyse des relations d'affaires existant entre les parties depuis la rupture du mandat mettant en exergue une volonté de remplacer une prétendue 'relation de non-concurrence' par une relation d'affaires établie, relevant d'une intention, fût-elle tacite, de novation des relations entre les parties, dont la preuve serait celle d'un fait juridique, dès lors que le concluant aurait jusqu'au 19 octobre 2017, directement ou indirectement, via les sociétés Rhin Courtage ou Générale européenne de Courtage d'assurances (GECA), travaillé comme courtier pour le compte du groupe AXA, renégociant en toute loyauté à son égard de nouveaux contrats au bénéfice de celui-ci ou de ses propres structures, et la relation d'affaires, expressément consentie et acceptée par le groupe, à la fois dans son principe et quant à ses modalités financières, restant active au cours de la présente procédure, permettant à AXA d'encaisser près de 500 000 euros par an de primes sur les nouvelles relations nouées grâce au concluant, avec pour conséquence que la question de la légitimité de la clause de non-concurrence invoquée par la partie adverse ne se poserait pas, l'argumentation adverse distinguant entre deux entités AXA France et AXA Courtage étant réfutée, au regard des circonstances et des conditions de conclusion du contrat de courtage,

- l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes reconventionnelles du concluant, la demande indemnitaire correspondant au montant des primes d'assurance grâce aux opérations de courtage effectuées via les sociétés Rhin Courtage et GECA se justifiant, si les parties adverses étaient en droit de prétendre au remboursement de l'indemnité de fin de mandat, par la fraude qui serait alors à l'origine des rémunérations touchées en exécution de la relation d'affaires nouée après 2015, tandis que la production à la procédure du protocole d'accord de 2015, au-delà de ce qui serait nécessaire et en l'absence d'exigence du juge ou de l'accord de l'autre partie, relèverait d'une violation de l'obligation de confidentialité appelant également indemnisation.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 6 mars 2024,

Vu les débats à l'audience du 11 mars 2024,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Sur la demande indemnitaire principale :

Selon l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise et doivent être exécutées de bonne foi.

En l'espèce, les appelantes font grief à la partie intimée de ne pas avoir respecté les termes de la clause de non-concurrence stipulée à l'article III-7 des conditions générales du Traité de nomination de l'agent général d'assurance AXA.

Or, ainsi que cela a été rappelé par le juge de première instance, la clause de non-concurrence doit être écrite dans le contrat de travail ou le contrat liant l'intéressé à la société, mais encore avoir été acceptée de façon claire et non équivoque par l'intéressé (voir, p. ex., Soc., 1er avril 2020, pourvoi n° 18-24.472). Elle doit viser à protéger des intérêts légitimes, en particulier de clientèle, de la société sans pour autant porter une atteinte

excessive aux droits de l'autre partie en le privant de l'exercice de toute activité, ce qui implique, en particulier, une proportionnalité dans le temps et dans l'espace, et un lien avec une activité spécifiquement visée. Elle doit, enfin, comporter une contrepartie financière (Soc. 10 juillet 2002, pourvoi n° 00-45.387, Bull. 2002, V, n° 239).

À cet égard, la cour relève que la clause litigieuse figure, non pas in extenso, mais par référence, dans le protocole d'accord signé le 10 juillet 2015 entre les deux parties, par lequel M. [V] s'engage à respecter les termes de ladite clause, sous peine d'application des sanctions qu'elle prévoit.

Il n'en demeure pas moins que le renvoi effectué dans ce protocole au 'traité de nomination' de l'agent vise en réalité les conditions générales dudit traité, et ce alors que M. [V] n'est signataire que des conditions particulières du mandat d'agent général d'abord en date du 1er octobre 2010, puis en date du 1er avril 2012, auquel est joint un 'protocole CSE modulaire' en date du 19 juillet 2011', également paraphé et signé, ce qui n'est pas le cas des conditions générales du traité de nomination ou du protocole d'accord du 28 juin 2000, quand bien même elles sont présentées, en tout cas devant la cour, sous forme d'un document à spirales rassemblant tous les documents présentés comme les éléments contractuels originaux. Il n'en reste pas moins que les seuls documents paraphés et signés par M. [V] ne font que référence aux conditions générales, sans mention de leur contenu, et ne font état d'aucune acceptation desdites conditions générales, ou du protocole d'accord, par l'intéressé, qui ne peut donc passer comme ayant accepté, encore moins sans équivoque des obligations dont il n'a pas été mis à même d'approuver formellement ou même de connaître le contenu, et partant d'appréhender l'étendue de ses droits et obligations à ce titre.

Les parties appelantes ne sauraient, à ce titre, invoquer l'existence d'un 'ensemble contractuel' indissociable, alors même que les seuls documents signés ne contiennent aucune clause précisant que les conditions générales ont été portées à la connaissance de l'intéressé qui les accepte, et ne font, par ailleurs, aucune référence à la clause de non-concurrence dont elles entendent réclamer l'application. Il est sans incidence, dans ces conditions, que M. [V] ait, ultérieurement, signé un protocole d'accord faisant référence, non d'ailleurs aux conditions générales mais directement à la clause de non-concurrence, sans, du reste, en rappeler le contenu, ce dont il ne saurait s'évincer une acceptation claire et non équivoque par l'intéressé de la clause litigieuse telle qu'elle est invoquée par les parties appelantes.

Ces dernières entendent encore invoquer l'application de la convention FNSAGA-FFSA, signée le 16 avril 1996 et homologuée par le décret n° 96-902 du 15 octobre 1996, 'portant approbation du statut des Agents Généraux d'Assurances', versée aux débats à hauteur de cour, et qui dispose, notamment, que 'l'agent qui cède son agence de gré à gré ou qui perçoit l'indemnité s'engage à ne pas se rétablir pendant 3 ans dans la circonscription de son ancienne agence et à ne pas faire souscrire des contrats d'assurance auprès de ses anciens assurés. S'il renonce à l'indemnité, ce délai est de 6 mois'.

Pour autant, l'application de cette convention, fût-elle d'ordre public, ce qui signifie qu'il n'est pas possible d'y déroger conventionnellement, sauf dans un sens favorable à l'agent général et qu'elle peut s'appliquer de plein droit même en l'absence de clause particulière dans le contrat de travail (Soc. 9 juillet 1976, pourvoi n° 75-40.662, Bull. 1976, V, n° 451), ne saurait, pour autant, être opposable à l'agent, en l'absence de mention dans le contrat lui-même, que s'il a été informé de son existence au moment de la conclusion du traité de nomination et mis en mesure d'en prendre connaissance (voir, Soc., 8 janvier 1997, pourvoi n° 93-44.009, Bull. 1997, V, n° 8), ce qui n'est pas le cas en l'espèce, puisqu'aucune mention à cette convention, dont seules les conditions générales précisent qu'elle régit le traité de nomination, ni encore moins à l'obligation de non-concurrence qu'elle contient n'apparaît dans les documents contractuels seuls signés par M. [V], dont il n'est pas établi par les appelantes, sur lesquelles pèse, comme rappelé par le premier juge, la charge de la preuve de l'obligation dont elles réclament l'exécution, qu'il aurait reçu une information suffisante quant au principe et à l'étendue de cette obligation.

En conséquence, la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que la clause de non-concurrence litigieuse ne saurait trouver application en l'espèce et partant, rejeté les demandes formées par les sociétés AXA.

Sur les demandes indemnitaires reconventionnelles :

C'est à bon droit que le tribunal a retenu que le débouté des parties désormais appelantes de leurs demandes, tendant à l'application de la clause de non-concurrence, privait d'objet les demandes de M. [V], d'une part tendant à obtenir 1 310 747 euros au titre du remboursement des primes touchées par AXA de 2017 à 2019, au titre des affaires nouvelles qu'il lui aurait apportées, d'autre part du fait d'un manquement à l'obligation de confidentialité, où il avait demandé une somme équivalente aux sommes qu'il serait appelé le cas échéant à verser, M. [V] indiquant d'ailleurs lui-même, dans son appel incident, que la demande indemnitaire correspondant au montant des primes d'assurance grâce aux opérations de courtage effectuées via les sociétés Rhin Courtage et GECA, se justifierait, si les parties adverses étaient en droit de prétendre au remboursement de l'indemnité de fin de mandat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Le jugement entrepris sera donc, également, confirmé en ce qu'il a débouté M. [V] de ses demandes de dommages et intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Les appelantes, succombant pour l'essentiel, seront tenus solidairement des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.

L'équité commande en outre de mettre à la charge des appelantes, in solidum, une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 5 000 euros au profit de l'intimé, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de ce dernier, et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Strasbourg,

Y ajoutant,

Condamne in solidum la SA AXA France IARD, la SA AXA France Vie, la société AXA Assurances IARD Mutuelle et la société AXA Assurances Vie Mutuelle aux dépens de l'appel,

Condamne in solidum la SA AXA France IARD, la SA AXA France Vie, la société AXA Assurances IARD Mutuelle et la société AXA Assurances Vie Mutuelle à payer à M. [O] [V] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SA AXA France IARD, la SA AXA France Vie, la société AXA Assurances IARD Mutuelle et la société AXA Assurances Vie Mutuelle.

La Greffière : Le Conseiller :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 22/03492
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;22.03492 ?
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