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10/06/2024 | FRANCE | N°24/02045

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 6 (etrangers), 10 juin 2024, 24/02045


COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)





N° RG 24/02045 - N° Portalis DBVW-V-B7I-IJ6P

N° de minute : 206/2024





ORDONNANCE





Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assisté de Laura BONEF, greffier ;





Dans l'affaire concernant :



M. X se disant [G] [C]

né le 14 Septembre 1995 à [Localité 1] (NIGERIA)

de nationalité nigériane



Actuellement retenu au centre de rét

ention de [Localité 2]



VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.7...

COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)

N° RG 24/02045 - N° Portalis DBVW-V-B7I-IJ6P

N° de minute : 206/2024

ORDONNANCE

Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assisté de Laura BONEF, greffier ;

Dans l'affaire concernant :

M. X se disant [G] [C]

né le 14 Septembre 1995 à [Localité 1] (NIGERIA)

de nationalité nigériane

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1, R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;

VU le jugement rendu le 05 décembre 2023 par la chambre correctionnelle du Tribunal Judiciaire de Strasbourg prononçant à l'encontre de M. X se disant [G] [C] une interdiction définitive du territoire français, à titre de peine complémentaire ;

VU la décision de placement en rétention administrative prise le 05 juin 2024 par Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN à l'encontre de M. X se disant [G] [C], notifiée à l'intéressé le même jour à 09h50 ;

VU la requête de Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN datée du 06 juin 2024, reçue et enregistrée le même jour à 13h08 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 28 jours de M. X se disant [G] [C] ;

VU l'ordonnance rendue le 07 Juin 2024 à 10h05 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarant la requête de Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN recevable et la procédure régulière, et ordonnant la prolongation de la rétention de M. X se disant [G] [C] au centre de rétention de [Localité 2], ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 28 jours à compter du 07 juin 2024 ;

VU l'appel de cette ordonnance interjeté par M. X se disant [G] [C] par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 10 Juin 2024 à 09h11 ;

VU la proposition de Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN par voie électronique reçue le 10 juin 2024 afin que l'audience se tienne par visioconférence,

VU les avis d'audience délivrés le 10 juin 2024 à l'intéressé, à Maître Karima MIMOUNI, avocat de permanence, à [N] [K], interprète en langue anglaise assermentée à Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN et à M. Le Procureur Général ;

Le représentant de Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN, intimé, dûment informé de l'heure de l'audience par courrier électronique du 10 juin 2024, n'a pas comparu, mais a fait parvenir des conclusions en date du 10 juin 2024, qui ont été communiquées au conseil de la personne retenue.

Après avoir entendu M. X se disant [G] [C] en ses déclarations par visioconférence et par l'intermédiaire de [N] [K], interprète en langue anglaise assermentée, Maître Karima MIMOUNI, avocat au barreau de COLMAR, commis d'office, en ses observations pour le retenu.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le juge des libertés et de la détention de Strasbourg, par ordonnance du 7 juin 2024, dont appel, a ordonné, à la demande du préfet du Bas Rhin, la prolongation de la rétention administrative de Monsieur X se disant [G] [C].

Pour statuer ainsi, le premier juge a constaté que l'éloignement n'avait pu être mis en oeuvre dans les 48 heures ,qu'aucune critique n'était formulée à l'encontre des diligences de l'administration et que l'intéressé ne remplissait pas les conditions d'une assignation à résidence.

A l'appui de son appel, visant à l'infirmation de l'ordonnance, Monsieur X se disant [G] [C] a soulevé l'irrégularité de la requête en prolongation de sa rétention administrative, pour le motif de défaut de qualité du signataire de celle-ci.

Il a également fait état du caractère disproportionné de la prolongation de rétention administrative compte tenu de sa situation personnelle invoquant des problèmes de santé et le fait que l'unité médicale du centre de rétention administrative ne peut communiquer avec lui dans une langue qu'il comprend.

Il a ensuite invoqué l'absence de perspective d'éloignement dans la mesure où il risquerait de subir dans son pays le Nigéria un traitement inhumain ou dégradant ou des atteintes graves à sa personne.

A l'audience, Monsieur X se disant [G] [C] assisté de son conseil a indiqué qu'il ne voulait pas rester au centre de rétention administrative en raison de ses problèmes de santé. Il a dit vouloir partir en Italie. Il a soutenu être menacé au Nigéria en raison de son orientation sexuelle.

Son conseil a repris oralement les moyens développés dans la déclaration d'appel.

Le préfet du Bas Rhin, représenté, a conclu, à la confirmation de l'ordonnance déférée.

Il a rappelé que par décision n°15-28795 du 13 juillet 2016, la Cour de cassation a pu constater que la présentation des parties est facultative et que le préfet peut utilement faire valoir son argumentation par un jeu d'écritures.

Il a fait valoir que les nouveaux moyens ne peuvent être soulevés que dans le délai d'appel et que les exceptions de procédure ne sont recevables qu'en tant qu'elles ont été soulevées in limine litis devant le premier juge.

Sur l'irrégularité, tirée de l'incompétence du signataire de la requête, il a indiqué que ce moyen n'a pas été soulevé devant le premier juge ; qu'en application des articles 74 et 117 du Code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, aucune exception de nullité de fond (pouvoir du signataire) ne peut être soulevée après toute défense au fond ou fin de non-recevoir; que le moyen est donc irrecevable en appel; qu'au surplus la délégation de signature était produite et permettait d'établir que le signataire avait compétence pour saisir le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la rétention; que la question de l'empêchement du Préfet et des personnes placées sous son autorité était inopérante ; que la signature du délégataire emporte preuve d'indisponibilité des signataires de premier rang.

S'agissant de la disproportionné avec son état de santé, invoquée par l'appelant le préfet souligne que l'intéressé n'a pas contesté l'arrêté de placement en rétention, raison pour laquelle le moyen tiré du prétendu caractère disproportionné de la rétention avec son état de santé est effet irrecevable à hauteur d'appel ; que, d'autre part, les pièces médicales de l'intéressé ne concluent pas à une incompatibilité de son état de santé avec la rétention.

S'agissant de son éloignement vers son pays d'origine, le préfet a rappelé qu'il revenait à Monsieur X se disant [G] [C] de contester devant le juge administratif le bien-fondé de son éloignement vers son pays d'origine, le juge judiciaire n'étant pas compétent pour connaître de ce sujet.

Sur quoi

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Monsieur X se disant [G] [C], à l'encontre de l'ordonnance rendue le 7 juin 2024 à 10h05 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, interjeté le 10 juin 2024 à 9h05, par déclaration motivée, est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu à l'article R 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la régularité de la requête en prolongation de la rétention administrative

Aux termes de l' article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice et, en vertu de l'article 118 du même code, elle peut être proposée en tout état de cause, y compris à hauteur d'appel.

En application de l'article R743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge a l'obligation de vérifier la compétence du signataire de la requête.

En l'espèce, il ressort de l'arrêté préfectoral portant délégation produit par l'intimé, que le signataire de la requête en prolongation de la rétention administrative est expressément délégué à l'effet de présenter les requêtes en prolongation de rétention administrative.

La preuve, par le préfet, de l'indisponibilité des signataires de premier rang n'est pas exigée par le texte et la signature du délégataire emporte preuve de leur empêchement.

Il s'ensuit que l'irrégularité soulevée n'est pas fondée.

Sur le bien fondé de la prolongation

Aux termes de l'article L742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, pour une durée de vingt-huit jours par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative.

Le texte n'impose aucune condition à cette prolongation, si ce n'est que, conformément à l'article L. 741-3 du code susvisé, l'administration effectue toutes les diligences nécessaires à l'éloignement de l'intéressé, en temps utile, la rétention administrative de l'étranger devant être limitée au temps strictement nécessaire à l'organisation de son départ.

S'agissant des moyens invoqués par l'intéressé à l'encontre de la décision de prolongation de sa rétention administrative, la cour ne peut que constater que l'appelant ne justifie d'aucun problème de santé rendant la prolongation de la rétention administrative disproportionnée avec sa situation personnelle, étant souligné qu'il est absurde de soutenir que l'unité médicale ne pourrait communiquer avec lui dans une langue qu'il comprend alors que, d'une part cette unité est coutumière des étrangers non francophones, que d'autre part l'intéressé est anglophone et donc dans la situation de trouver très facilement un interlocuteur.

Par ailleurs , il sera rappelé que Monsieur X se disant [G] [C] fait l'objet d'une interdiction définitive du territoire national et qu'il ne fait état d'aucun élément concret pouvant penser qu'il risquerait dans son pays un traitement inhumain ou dégradant ou des atteintes graves. Interrogé sur ce point l'intéressé a affirmé être menacé dans son pays en raison de son homosexualité. La Cour ne peut que constaté que cet élément n'a pas été retenu par l'OFPRA et apparaît peu compatible avec les faits d'agression sexuelle sur trois jeunes femmes pour lesquelles l'appelant a été condamné, de sorte que cette affirmation est peu crédible à ce stade.

Par ailleurs, comme le fait justement remarquer le préfet le juge judiciaire n'est pas compétent pour se prononcer sur le bien fondé du choix, par l'administration, du pays d'éloignement, cette appréciation relevant de la seule compétence du tribunal administratif.

Enfin il résulte de l'examen attentif du dossier qu'aucun défaut de diligence ne peut être reproché à l'administration.

Il n'apparaît donc pas que Monsieur X se disant [G] [C] soit retenu pour une durée excessive, la prolongation de la rétention administrative ayant pour objet de le maintenir à disposition pour s'assurer de sa personne, le temps strictement nécessaire à l'organisation de son éloignement.

Pour le surplus, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge a considéré que Monsieur X se disant [G] [C] ne remplissait pas les conditions d'une assignation à résidence, l'intéressé ne justifiant ni d'une adresse stable ni de la possession d'une pièce d'identité lui permettant de voyager.

C'est donc à bon droit, que le premier juge a prolongé sa rétention administrative.

Pour le surplus, il ne ressort de l'examen rigoureux du dossier aucune méconnaissance, par l'administration, d'une condition de légalité découlant du droit de l'Union et devant être dès lors, soulevée d'office, par le juge chargé de contrôler la mesure de rétention administrative.

L'ordonnance déférée sera par conséquent confirmée.

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARONS l'appel de M. X se disant [G] [C] recevable en la forme ;

au fond, le REJETONS ;

CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg le 07 Juin 2024 ;

RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention :

- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin,

- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;

DISONS avoir informé M. X se disant [G] [C] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.

Prononcé à Colmar, en audience publique, le 10 Juin 2024 à 15h03, en présence de :

- l'intéressé par visio-conférence

- Maître Karima MIMOUNI, conseil de M. X se disant [G] [C]

- de l'interprète, lequel a traduit la présente décision à l'intéressé lors de son prononcé.

Le greffier, Le président,

reçu notification et copie de la présente,

le 10 Juin 2024 à 15h03

l'avocat de l'intéressé

Maître Karima MIMOUNI

Comparante

l'intéressé

M. X se disant [G] [C]

Comparant par visioconférence

l'interprète

Mme [N] [K]

Comparante

l'avocat de la préfecture

SELARL CENTAURE AVOCATS

Non comparante

EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,

- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,

- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,

- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,

- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,

- ledit pourvoi n'est pas suspensif.

La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :

- au CRA de [Localité 2] pour notification à M. X se disant [G] [C]

- à Maître Karima MIMOUNI

- à Mme LA PREFETE DU BAS-RHIN

- à la SELARL CENTAURE AVOCATS

- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.

Le Greffier

M. X se disant [G] [C] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance

le À heures

Signature de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 6 (etrangers)
Numéro d'arrêt : 24/02045
Date de la décision : 10/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-10;24.02045 ?
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