MINUTE N° 303/23
Copie exécutoire à
- Me Loïc RENAUD
Copie à M. le PG
Arrêt notifié aux parties
Le 28.06.2023
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 28 Juin 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 22/01720 - N° Portalis DBVW-V-B7G-H2OK
Décision déférée à la Cour : 04 Mars 2022 par le Juge commissaire du Tribunal judiciaire de MULHOUSE - Chambre commerciale
APPELANT :
Monsieur [I] [V] ayant exploité la S.À.R.L. BON PLAN AUTO
[Adresse 1]
[Localité 3]
non comparant, représenté par Me BEN AISSA ELCHINGER, substituant Me Loïc RENAUD, avocats à la Cour
INTIMES :
S.E.L.À.R.L. [O] & CHARLIER, prise en la personne de Me [B] [O], liquidateur judiciaire de la S.À.R.L. BON PLAN AUTO [Adresse 2]
CENTRE DES FINANCES PUBLIQUES
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
non comparants, non représentés
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mai 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
Ministère Public :
représenté lors des débats par M. JAEG, avocat général, qui a fait connaître son avis et dont les réquisitions écrites ont été communiquées aux parties.
ARRET :
- réputé contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :
Par ordonnance du 4 mars 2022, le juge commissaire de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse a, dans la procédure de faillite personnelle de M. [V], et vu les dispositions de l'article L.663-1 du code de commerce, dit que le Trésor Public fera l'avance desdits frais et débours et sera remboursé par privilège, conformément aux dispositions de l'alinéa IV de l'article L.663-1 du code de commerce.
M. [V] a, par un recours daté du 27 avril 2022 et reçu au greffe le 28 avril 2022, interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 2 avril 2022.
Par ordonnance du 24 mai 2022, l'affaire a été fixée à l'audience du 20 juin 2022.
Cette ordonnance, ainsi que la convocation à cette audience, ont été adressées par lettre recommandée avec accusé de réception au Centre des Finances Publiques et à la Selarl [O] et Charlier, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Bon Plan Auto, qui ont reçu notification selon les accusés de réception signés le 30 mai 2022. M. [V], avisé, n'a pas réclamé cette lettre recommandée.
Le 14 juin 2022, le ministère public a transmis ses conclusions par voie électronique, par lesquelles il demande à la cour d'annuler l'ordonnance, et d'évoquer à nouveau, et de dire que les fonds disponibles du débiteur ne peuvent suffire immédiatement à faire face aux frais et débours, que le Trésor public fera l'avance des frais et débours et sera remboursé par privilège.
En substance, il soutient que, sur requête du ministère public en prononcé d'une mesure de faillite personnelle et subsidiairement d'interdiction de gérer, le jugement du 24 janvier 2022, n°RG 21/319, de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse, a prononcé une interdiction de gérer pour une durée de 12 ans à l'encontre de M. [V], qui en a interjeté appel.
Il indique qu'il est constant que M. [V] n'a pas fait l'objet d'une procédure de faillite personnelle lorsque le juge commissaire a statué, de sorte que son ordonnance comporte une erreur la viciant et doit être annulée. Il ajoute que cette erreur est cependant matérielle, en ce que le juge commissaire entendait bien statuer sur une mesure de sanction prise à l'encontre de M. [V], tel que confirmé par la concordance du n°RG et la nature du jugement portant sur une procédure de sanction, conformément à la requête.
A l'audience du 20 juin 2022, le conseil de M. [V] a comparu ainsi que le ministère public. L'affaire a été renvoyée à l'audience du 3 octobre 2022.
Le 30 septembre 2022, M. [V] a transmis ses conclusions par voie électronique, par lesquelles il demande à la cour de déclarer son recours recevable, d'infirmer l'ordonnance, et, statuant à nouveau, de juger que l'avance des frais et débours par le Trésor Public ne sera pas remboursée ni garantie par le privilège des frais de justice en application de l'alinéa IV de l'article L.663-1 du code de commerce, et de condamner le Trésor Public aux dépens.
Il soutient que l'ordonnance a été rendue 'dans la procédure de faillite personnelle' de M. [V], alors qu'il n'a fait l'objet d'aucune procédure de faillite personnelle, précisant avoir interjeté appel d'un jugement du 24 janvier 2022 ayant prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de diriger, de gérer, d'administrer, de contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole pour
une durée de 12 ans. Il ajoute que la thèse du ministère public est inexacte. Il précise que cette mesure d'interdiction est prévue par l'article L.653-8 du code de commerce, alors que l'article L.663-1 du code de commerce s'applique uniquement dans les cas prévus et en particulier dans le cadre des actions visées par les articles L.653-3 à L.653-6 du code de commerce.
A l'audience du 3 octobre 2022, l'affaire a été renvoyée, en présence du conseil de M. [V], à l'audience du 6 mars 2023. A cette audience, le conseil de M. [V] et le ministère public ont comparu. L'affaire a été renvoyée afin de convoquer les autres parties.
La Selarl [O] et Charlier, en sa qualité de liquidateur de la SARL Bon Plan Auto, le Centre des Finances Publiques et M. [V] ont été convoqués pour l'audience du 15 mai 2023, par lettre recommandée avec accusé de réception qu'ils ont signé, le 8 mars 2023 pour les deux premiers et à une date inconnue pour le troisième.
L'affaire a été appelée à l'audience du 15 mai 2023.
L'avocat de M. [V] a développé ses demandes et moyens en se référant à ses dernières conclusions écrites.
Le ministère public s'en est rapporté à ses conclusions écrites.
MOTIFS DE LA DECISION :
Aux termes de l'article L.663-1 du code de commerce :
'I.- Lorsque les fonds disponibles du débiteur n'y peuvent suffire immédiatement, le Trésor Public, sur ordonnance motivée du juge-commissaire, fait l'avance des droits, taxes, redevances ou émoluments perçus par les greffes des juridictions, des rémunérations des avocats dans la mesure où elles sont réglementées, des frais de signification et de publicité et de la rémunération des techniciens désignés par la juridiction après accord du ministère public, afférents :
(...)
3° Et à l'exercice des actions visées aux articles L. 653-3 à L. 653-6.
(...)
II. (...)
III.- Ces dispositions sont applicables aux procédures d'appel ou de cassation de toutes les décisions mentionnées ci-dessus.
IV.- Pour le remboursement de ses avances, le Trésor public est garanti par le privilège des frais de justice.
V.(...)'
En l'espèce, suite à la requête en vue du prononcé d'une faillite personnelle, M. [V] a été condamné à une mesure d'interdiction prévue par l'article L.653-8 du code de commerce.
Dès lors qu'une action aux fins de prononcé d'une faillite personnelle avait été introduite à son égard, le juge commissaire pouvait statuer comme il a fait, s'agissant de l'avance des droits listés par l'article L.663-1 du code de commerce et afférents à l'exercice des actions visées aux articles L. 653-3 à L. 653-6, qui concernent la faillite personnelle.
Il importe peu que, dans le cadre de cette action, une mesure de faillite personnelle n'ait pas été prononcée et que M. [V] ait été sanctionné par une mesure d'interdiction qui ne relève pas des articles L.653- 3 à L.653-6 du code de commerce.
Il convient, en conséquence, de rejeter la demande d'annulation de la décision entreprise et de la confirmer.
M. [V] sera condamné à supporter les dépens de la présente instance.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Rejette la demande du ministère public tendant à annuler l'ordonnance du juge commissaire de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Mulhouse du 4 mars 2022,
Confirme l'ordonnance de ce juge commissaire du 4 mars 2022,
Condamne M. [V] à supporter les dépens de la présente instance.
La Greffière : la Présidente :