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07/06/2023 | FRANCE | N°22/00975

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 07 juin 2023, 22/00975


MINUTE N° 273/23

























Copie exécutoire à



- Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA



- Me Anne CROVISIER





Le 07.06.2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 07 Juin 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 22/00975 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HZF2


r>Décision déférée à la Cour : 09 Décembre 2021 par le Tribunal judiciaire de COLMAR - Chambre commerciale



APPELANT :



Monsieur [S] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représenté par Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA, avocat à la Cour



INTIME :



M...

MINUTE N° 273/23

Copie exécutoire à

- Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA

- Me Anne CROVISIER

Le 07.06.2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 07 Juin 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 22/00975 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HZF2

Décision déférée à la Cour : 09 Décembre 2021 par le Tribunal judiciaire de COLMAR - Chambre commerciale

APPELANT :

Monsieur [S] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA, avocat à la Cour

INTIME :

Monsieur [B] [G]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne CROVISIER, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mai 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES :

Depuis le 1er mai 1982 M. [S] [G] exploitait un fonds de commerce de 'taxi et transport express'. Par la suite, il a fait un apport en pleine propriété de son fonds de commerce à la SARL TAXIS TRANSPORTS EXPRESS [S] [G] créée le 31 mai 2001.

Le 13 mai 2013, par acte sous seing privé en date du 13 mai 2013, M. [S] [G] a cédé la totalité des parts de la société à son fils, M. [B] [G], moyennant l'euro symbolique, et selon procès-verbal du 31 mai 2013, ce dernier a été désigné gérant.

Toutefois, le 12 avril 2018 par acte d'huissier, M. [S] [G] a fait assigner M. [B] [G] aux fins de voir prononcer la nullité de la cession de parts sociales de la SARL TAXIS TRANSPORTS EXPRESS [S] [G] ainsi que la nullité du procès-verbal des décisions de l'associé unique en date du 31 mai 2013.

A titre subsidiaire, M. [S] [G] demande la condamnation de M. [B] [G] à lui payer la somme de 41.160 euros au titre de l'indemnité d'occupation des locaux mis à disposition par lui, la somme de 34.201 euros au titre du remboursement des cotisations de RSI, la somme de 100.000 euros pour les quatre licences de taxi, enfin la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, mais également, à supporter les entiers dépens, le tout bénéficiant de l'exécution provisoire.

Par jugement avant de dire droit en date du 03 décembre 2020, le Tribunal judiciaire de Colmar a ordonné une mesure d'expertise confiée aux soins du Dr [M] [K].

L'expert a déposé son rapport le 03 mai 2021.

Par un jugement en date du 09 décembre 2021, le Tribunal judiciaire de Colmar a :

Débouté M. [S] [G] de l'intégralité de ses demandes.

Condamné M. [S] [G] à supporter les entiers dépens, y compris le coût de la mesure d'expertise.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [S] [G].

Condamné M. [S] [G] à payer à M. [B] [G] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejeté la demande d'octroi du bénéfice de l'exécution provisoire.

Par déclaration au greffe en date du 08 mars 2022, M. [S] [G] a interjeté appel de cette décision.

Par une déclaration fait au greffe en date du 24 mars 2022, M. [B] [G] s'est constitué intimé.

Par ses dernières conclusions en date du 7 décembre 2022, transmises par voie électronique le 8 décembre 2022, auxquelles a été joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, M. [S] [G] demande à la Cour :

Déclarer M. [S] [G] recevable et bien fondé en son appel.

En conséquence,

Réformer la décision entreprise.

Et statuant à nouveau :

A titre principal 

Constater que M. [S] [G] a été victime d'un trouble grave ayant entraîné la perte de sa faculté de discernement le mettant dans l'incapacité de comprendre la portée de son acte ;

Dire et juger que l'acte de cession est entaché de nullité en l'absence de consentement de M. [S] [G] et en présence d'un prix dérisoire ;

En conséquence,

Prononcer la nullité de la cession de parts sociales de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G] en date du 13 mai 2013 en faveur de M. [B] [G] ;

Prononcer la nullité du procès-verbal des décisions de l'associé unique du 31 mai 2013 de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G] en faveur de M. [B] [G] ;

En tant que besoin,

Ordonner une expertise comptable afin d'évaluer la valeur des parts sociales cédées au moment de la cession.

A titre subsidiaire,

Condamner M. [B] [G] à verser à M. [S] [G] une somme de 34.201 euros au titre du remboursement des cotisations de RSI ;

Condamner M. [B] [G] à verser M. [S] [G] une somme de 100.000 euros au titre des quatre licences de taxi ;

En tout cas,

Débouter M. [B] [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner M. [B] [G] à verser à M. [S] [G] une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner M. [B] [G] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, sur la demande de nullité de l'acte de cession pour insanité d'esprit en date du 13 mai 2013 :

- sur la demande de nullité de l'acte de cession pour insanité :

M. [S] [G] indique à la Cour que son psychiatre habituel à [Localité 5], Dr [T], a établi un courrier médical le 29 avril 2013, soit 15 jours avant la signature de l'acte de cession du 13 mai 2013 et considère que ce courrier médical justifie de son état de santé précisément à la période de cession. M. [S] [G] se prévaut d'une abondante jurisprudence relative à l'existence d'un trouble mental ayant entraîné l'annulation d'un acte contractuel au motif d'insanité d'esprit.

- sur la demande de nullité de l'acte de cession pour prix dérisoire :

M. [S] [G] fait valoir à la Cour que, les rapports des cabinets COGEST et ANASTASI AUDIT ne reposent que sur des informations soumises et communiquées par M. [B] [G]. Selon M. [S] [G], ces documents n'ont pas été élaborés de manière contradictoire et la méthode de valorisation ne repose que sur deux notions. Il précise que le cabinet comptable a exposé des chiffres sans même justifier des liasses fiscales, bilans ou documents comptables et que certaines données sont erronées. M. [S] [G] affirme que le rapport élaboré par le cabinet comptable ANASTASI AUDIT est contraire au rapport établi et publié par le commissaire à la transformation.

Sur les demandes subsidiaires, M. [S] [G] a formé deux demandes :

- sur la demande subsidiaire de remboursement des cotisations personnelles :

M. [S] [G] affirme à la Cour que son fils, M. [B] [G], a unilatéralement pris la décision, en sa qualité de gérant et d'associé unique de la société, d'interrompre le règlement des périodes où il occupait la gérance de la société. M. [S] [G] indique que M. [B] [G], en lui refusant de délivrer les paiements de ses cotisations durant cette période de gérance, lui a causé un préjudice financier et l'a placé dans une situation financière délicate.

- sur la demande subsidiaire de remboursement de licences de taxi :

M. [S] [G] rappelle à la Cour que les licences lui appartenaient en propre et non à la société. M. [S] [G] affirme que s'il n'avait pas cédé ses licences, M. [B] [G] n'aurait pu exploiter l'entreprise puisqu'il aurait dû s'inscrire sur une liste d'attente en vue de la délivrance de nouvelles autorisations par la mairie de [Localité 3].

Par ses dernières conclusions en date du 15 février 2023, transmises par voie électronique le même jour, auxquelles a été joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, M. [B] [G] demande à la Cour :

Déclarer M. [S] [G] mal fondé en son appel ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions.

En conséquence :

Débouter M. [S] [G] de l'ensemble de ses demandes.

Confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions.

Condamner M. [S] [G] à verser à M. [B] [G] un montant de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Condamner M. [S] [G] aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise judiciaire.

Au soutien de ses prétentions, sur la demande en nullité de cession de parts en ce qu'elle est fondée sur les articles 414-1 et suivants du code civil, M. [B] [G] fait valoir à la Cour qu'aucune des pièces versées aux débats par M. [S] [G], dont le rapport du Docteur [M] [K], expert psychiatrique désigné par le Tribunal, ne démontre qu'il aurait été victime d'une altération de ses facultés mentales, encore moins que ladite altération aurait été assez grave pour supprimer sa faculté de discernement et encore moins qu'il aurait été victime de ladite altération le jour de la signature de l'acte de cession.

A titre subsidiaire, si la Cour retenait que M. [S] [G] a bien perdu sa faculté de discernement au moment de la signature de l'acte de cession de parts, M. [B] [G] demande à la Cour de tout de même confirmer le jugement de première instance.

Sur la demande de nullité de l'acte de la cession de parts en ce qu'elle est fondée sur les dispositions de l'article 1582 du code civil, M. [B] [G] considère que l'attestation du cabinet 'COGEST MULLER' fait état d'une rentabilité faible, voire nulle et justifie selon lui qu'au moment de la cession des parts le prix de cession justifiait qu'il soit fixé à 1 euro.

Sur les demandes subsidiaires de M. [S] [G] :

- Concernant la demande de remboursement de M. [S] [G] au titre de ses cotisations personnelles,

M. [B] [G] se prévaut du fait que les statuts de la société ne comportent aucune stipulation sur la prise en charge des cotisations du dirigeant par elle. Il considère que la société TAXIS [S] [G] était en droit de décider de ne plus prendre à sa charge les cotisations personnelles de l'ancien dirigeant, M. [S] [G] et cette décision était, selon lui, absolument indispensable à la survie de la société.

- Concernant la demande de M. [S] [G] tendant à voir condamner son fils à lui 'rembourser les quatre licences de taxis sur la commune de [Localité 3] d'une valeur de 100.000 euros',

M. [B] [G] soutient auprès de la Cour que M. [S] [G] ne fonde pas en droit ses demandes.

La Cour se référera aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé des faits, de la procédure et de leurs prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civil.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 05 avril 2023.

L'affaire a été appelée et retenue par audience du 10 mai 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

Par un jugement en date du 09 décembre 2021, le Tribunal judiciaire de Colmar a retenu :

Au sujet des demandes de nullité pour insanité d'esprit, que M. [S] [G] ne rapporte pas la preuve de la réalité d'une insanité d'esprit ayant obéré ou altéré son consentement.

Concernant la demande de nullité pour prix dérisoire, qu'il est fait état qu'à la date de la cession des parts sociales, la perspective de continuité d'exploitation était mise en cause. De plus, sans alimentation de son besoin en fonds de roulement la société se dirigeait vers une cessation totale d'activité. En outre, dans le cadre de la cession de parts sociales, M. [B] [G] a repris l'ensemble des contrats crédit-bail liés aux véhicules ainsi que l'ensemble des dettes fiscales et sociales liées à la société. Enfin, la valeur estimée de l'entreprise a pu être valorisée pour un montant négatif. En conséquence, la vente au prix de 1 euro des parts sociales de la SARL TAXIS TRANSPORTS EXPRESS [S] [G], qui s'avéraient sans valeur, n'est pas nulle.

S'agissant de la demande de remboursement des cotisations personnelles, il n'y a aucune stipulation de la prise en charge des cotisations du dirigeant dans les statuts de la société. De plus, M. [S] [G] ne justifie pas davantage de la moindre décision de l'associé unique en ce sens.

A propos de la demande de remboursement des licences de taxi, en l'absence de production du contrat d'apport détaillant la circonstance des biens apportés à la date du 31 mai 2001, M. [S] [G] n'est pas fondé à solliciter le remboursement de ces licences.

En ce qui concerne les dépens et les demandes en application de l'article 700 du code procédure civile, M. [S] [G] supporte les entiers dépens, y compris le coût de la mesure d'expertise, et ne peut prétendre à l'application de l'article 700 du code de procédure pénale à son profit. De surcroît, il serait inéquitable de laisser les frais non compris dans les dépens à M. [B] [G]. Dès lors, M. [S] [G] doit lui verser 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin sur l'exécution provisoire, que celle-ci n'a pas lieu d'être octroyée.

A la suite de ce jugement, M. [S] [G] a interjeté appel.

L'appel a été interjeté dans les formes et dans les délais, le 08 mars 2022.

La Cour entend, au préalable, rappeler que :

- aux termes de l'article 954 du code de procédure civile elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion,

- ne constituent pas des prétentions, au sens de l'article 4 du code de procédure civile, les demandes des parties tendant à 'dire et juger', 'constater' ou 'supprimer', en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la Cour n'y répondra qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif mais dans ses motifs.

La Cour rappelle que l'acte de cession litigieux a été conclu en 2013, c'est-à-dire avant l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant la réforme du droit des obligations. Les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d'ordre public.

I. Au soutien de sa demande de nullité de la cession de parts sociales de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G] en date du 13 mai 2013 en faveur de M. [B] [G], M. [S] [G] invoque :

1) La nullité de l'acte de cession pour insanité : 

Aux termes de l'ancien article 1108 du code civil, dans sa version applicable, 'quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention : le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter, un objet certain qui forme la matière de l'engagement, une cause licite dans l'obligation, une cause dans l'obligation'.

En l'espèce, M. [S] [G] fournit un courrier médical de son psychiatre habituel de [Localité 5], le Dr [T] en date du 29 avril 2013. Il apparaît que ce document a été rédigé 15 jours avant la signature de la cession de parts sociales du 13 mai 2013.

Selon l'article 414-1 du code civil : 'pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte'.

Il ressort du courrier médical établi par le Dr [T] et adressé à son confrère du centre hospitalier de [Localité 4] pour une rechute dépressive, que M. [S] [G] est 'en rupture de suivi depuis janvier 2013 disons plutôt dans l'évitement. C'est le médecin traitant, le Dr [U], qui me fait un courrier (copie suivra) appelé par la famille pour une rechute dépressive. Il note un ralentissement, amaigrissement, négligence, retrait. Convoqué à une consultation en urgence, il évoque des conflits à l'entreprise et dans la famille. Il se sent perdu. Le risque d'un passage à l'acte est présent'.

Par ailleurs, le Dr [T] certifie le 25 janvier 2016 et le 05 juillet 2021 que depuis le 02 avril 2009, M. [S] [G] bénéficie toujours d'un suivi en consultations ambulatoires en centre médico-psychologique. Il a notamment effectué un séjour au Centre hospitalier de [Localité 5], du 02 au 09 avril 2009, comme l'atteste le certificat médical en date 09 avril 2009, après une tentative de suicide grave. Le Dr [T] précise également dans le certificat médical en date du 05 juillet 2021, que M. [S] [G] suit un traitement médicamenteux. Pour autant, ce document ne permet pas de conclure que leur prise soit de nature à vicier le consentement.

La Cour considère que M. [S] [G] n'apporte pas d'éléments suffisants pour constater la réalité d'une insanité d'esprit ayant obéré ou altéré son consentement au moment de la signature de la cession des parts sociales le 13 mai 2013.

2) La nullité de l'acte de cession pour prix dérisoire :

Il convient d'écarter en premier lieu, la nullité de l'acte de cession pour prix dérisoire sur le fondement de l'insanité d'esprit qui aurait privé le contractant de son consentement. En effet, pour la Cour les preuves apportées par M. [S] [G] ne sont pas de nature à soutenir ce moyen.

S'agissant du prix dérisoire de la cession des parts, aux termes de l'article 1591 du code civil, 'le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties'.

En l'espèce, il résulte de l'acte de cession de parts sociales, en date du 13 mai 2013, signé par chacune des parties que le prix de 442 parts a été fixé à un euro. De plus, il y est fait mention que 'M. [B] [G] a payé à l'instant même à M. [S] [G], qui le reconnaît et lui en donne valable et définitive quittance'.

Cependant, depuis 2018, comme l'atteste l'assignation par acte d'huissier à l'encontre de M. [B] [G], son père, M. [S] [G] prétend que le prix de cession des parts sociales à un euro symbolique est dérisoire et l'état financier de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G] était stable au moment de l'acte.

Une vente à vil prix s'apprécie à la date de la cession, comme le rappelle la Cour de cassation (Com., 25 octobre 2017, n° K15-24.219), soit le 13 mai 2013.

Pour prétendre de la vileté de la cession des parts sociales, M. [S] [G] communique un rapport du commissaire à la transformation du 09 décembre 2013. Ce dernier déclare que 'sur la base de mes travaux, j'atteste que le montant des capitaux propres est au moins égal au montant du capital social'. Cette étude prend en compte la période du 1er janvier 2012 au 31 mai 2013. Il en résulte qu'au 31 mai 2013 les capitaux propres s'élèvent à 27.849 euros et sont supérieurs à la moitié du capital social. M. [S] [G] communique également les bilans arrêtés au 31 mai 2013 et au 31 mai 2015. Aucun élément supplémentaire n'a été rapporté par M. [S] [G].

Pour autant, M. [B] [G] produit les observations de la société ANASTASI AUDIT en réponse aux griefs formulés par M. [S] [G] en date du 07 février 2023. Mais également deux études comptables relatives à la présentation des deux méthodes de calcul de la valeur des parts sociales de la société TAXIS TRANSPORTS EXPRESS [S] [G], l'une réalisée le 20 août 2018 par la société COGEST, expert-comptable historique de la société, et l'autre établie le 29 janvier 2020 par une société d'expert-comptable tiers, ANASTASI AUDIT. Ces études se basent sur les bilans de 2012 et 2013, le Grand Livre, les journaux et la balance au 31 mai 2012. Dans les deux études il est fait état qu'au moment de la cession des parts sociales, la société TAXIS TRANSPORTS EXPRESS [S] [G] n'avait plus de valeur.

De plus, la difficulté financière a engendré des retards de paiement auprès des organismes sociaux comme l'URSSAF, le RSI et les fournisseurs qui ont mis en demeure la société de manière répétée depuis 2012.

Par conséquent, il n'y a pas lieu de retenir la nullité de l'acte de cession des parts sociales pour la vileté du prix.

II. Sur la nullité du procès-verbal des décisions de l'associé unique du 31 mai 2012 de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G] en faveur de M. [B] [G] :

M. [S] [G] n'apporte pas d'éléments concernant cette demande.

En conséquence, la Cour ne peut juger la demande sur la nullité du procès-verbal des décisions de l'associé unique du 31 mai 2012 de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G] en faveur de M. [B] [G].

III. Au soutien de ses demandes subsidiaires, M. [S] [G] invoque :

1) La condamnation de M. [B] [G] à verser à son père une somme de 34.201 euros au titre du remboursement des cotisations de RSI :

En principe les cotisations de RSI sont à la charge personnelle du gérant.

Or selon l'article 1835 du code civil, il est possible de prévoir dans les statuts ou par décision spéciale approuvée en assemblée générale des principes dont la société se dote comme par exemple la prise en charge des cotisations RSI.

En l'espèce, les pièces produites ne font pas état de la présence d'une clause statutaire comportant une mention sur la prise en charge des cotisations du dirigeant par la société. M. [S] [G] ne justifie pas davantage de la moindre décision de l'associé unique en ce sens.

La Cour considère en conséquence que M. [S] [G] n'apporte pas suffisamment de preuve.

2) La condamnation de M. [B] [G] à verser à M. [S] [G] une somme de 100.000 euros au titre des quatre licences de taxi :

Conformément aux dispositions de l'article L. 3121-2 al. 2 du code des transports le titulaire d'une autorisation de stationnement délivrée avant la promulgation de la loi n°2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur a la faculté de présenter à titre onéreux un successeur à l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation.

Dans le cas présent, par courrier adressé au Maire de [Localité 3], M. [S] [G] a informé de sa démission et de la cession de son autorisation de stationnement à son fils, M. [B] [G], nouveau gérant de la société.

Par ailleurs, la société COGEST, comptable de la société TAXIS TRANSPORT EXPRESS [S] [G], a remis un document précisant que 'la société pouvait se prévaloir uniquement de son actif incorporel, à savoir, les licences valorisées à 55.000 euros'. En outre, M. [B] [G] a repris l'ensemble des crédits-baux liés aux véhicules.

Par voie de conséquence, pour la Cour il est déduit de ce qui précède que M. [S] [G] n'a pas été privé de la possibilité de céder ces licences à d'autres acquéreurs.

L'appelant, qui succombe pour l'essentiel, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et débouté de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la décision de première instance étant confirmée sur ces points.

Pour le même motif et par équité, il convient de condamner M. [S] [G] au titre des frais irrépétibles d'appel, le jugement étant confirmé en ce qu'il l'a condamné à payer à M. [B] [G] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Colmar le 09 décembre 2021 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [S] [G] à verser à M. [B] [G] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Rejette la demande de M. [S] [G] fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière : la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 22/00975
Date de la décision : 07/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-07;22.00975 ?
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