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10/05/2023 | FRANCE | N°23/01716

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 6 (etrangers), 10 mai 2023, 23/01716


COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)





N° RG 23/01716 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IB75

N° de minute : 145/2023





ORDONNANCE





Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assisté de Laura BONEF, greffier ;





Dans l'affaire concernant :



M. X SE DISANT [T] [W]

né le 15 Octobre 1997 à [Localité 4]

de nationalité algérienne



Actuellement retenu au centre de rétention de [

Localité 3]





VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L76...

COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)

N° RG 23/01716 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IB75

N° de minute : 145/2023

ORDONNANCE

Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assisté de Laura BONEF, greffier ;

Dans l'affaire concernant :

M. X SE DISANT [T] [W]

né le 15 Octobre 1997 à [Localité 4]

de nationalité algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 3]

VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1, R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;

VU l'arrêté pris le 05 septembre 2022 par LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS faisant obligation à M. X SE DISANT [T] [W] de quitter le territoire français ;

VU la décision de placement en rétention administrative prise le 03 mai 2023 par LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE à l'encontre de M. X SE DISANT [T] [W], notifiée à l'intéressé le même jour à 20h27 ;

VU la requête du PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE datée du 05 mai 2023, reçue et enregistrée le même jour à 16h48 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 28 jours de M. X SE DISANT [T] [W] ;

VU l'ordonnance rendue le 07 Mai 2023 à 12h00 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarant la requête du PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE recevable et la procédure régulière, et ordonnant la prolongation de la rétention de M. X SE DISANT [T] [W] au centre de rétention de [Localité 3], ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 28 jours à compter du 05 mai 2023 ;

VU l'appel de cette ordonnance interjeté par M. X SE DISANT [T] [W] par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 09 Mai 2023 à 11h51 ;

VU les avis d'audience délivrés le 09 mai 2023 à l'intéressé, à Maître HOSSEINI Pégah, avocat de permanence, à Madame [B] [V], interprète en langue arabe, assermenté, au PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE et à M. Le Procureur Général ;

Le représentant de M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE, intimé, dûment informé de l'heure de l'audience par courrier électronique du 09 mai 2023, n'a pas comparu, mais a fait parvenir des conclusions en date du 10 mai 2023, qui ont été communiquées au conseil de la personne retenue.

Après avoir entendu M. X SE DISANT [T] [W] en ses déclarations par visioconférence et par l'intermédiaire de [B] [V], interprète en langue arabe, assermenté, Maître HOSSEINI Pégah, avocat au barreau de COLMAR, commise d'office, en ses observations pour le retenu, puis Maître Jean-Alexandre CANO, avocat au barreau de Paris, en ses conclusions écrites pour la SELARL CENTAURE & associés, conseil de M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE, et à nouveau l'appelant qui a eu la parole en dernier.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le juge des libertés et de la détention de Strasbourg, par ordonnance du 7 mai 2023, dont appel, a ordonné la prolongation de la rétention administrative de Monsieur X se disant [T] [W].

Pour statuer ainsi , le premier juge a rejeté les moyens tirés du caractère abusif du placement au local de rétention administrative d'[Localité 1], du caractère erroné des mentions de la notice et du caractère incomplet de la requête. Il a, par ailleurs, constaté que l'éloignement n'avait pu être mis à exécution dans le délai de 48 heures et que l'administration avait effectué les diligences utiles dans les délais.

A l'appui de son appel, visant à l'infirmation de l'ordonnance et à sa remise en liberté, Monsieur X se disant [T] [W] a invoqué, in limine litis le caractère abusif de son placement au local de rétention administrative d'[Localité 1]. Il soutient qu'il aurait pu, dès le 4 mai, être transféré dans un centre de rétention administrative. Il considère qu'en le maintenant au placement au local de rétention administrative d'[Localité 1], le préfet a porté une atteinte substantielle à ses droits.

Il a soulevé ensuite le caractère erroné de la mention relative à l'association qui pouvait l'assister, l'Ordre de Malte étant mentionné en lieu et place de l'Assfam.

Faisant valoir que les nouveaux moyens soulevés étaient recevables en application des articles 563 et 564 du code de procédure civile, l'appelant a ensuite soulevé l'irrégularité de la requête en prolongation de sa rétention administrative, rappelant que le juge doit vérifier la compétence du signataire de la requête en prolongation mais également qu'il est effectivement fait mention des éventuels empêchements des délégataires de signature.

Il a également soutenu que l'administration n'avait pas effectué les diligences dans les délais; qu'en effet il avait été placé en rétention administrative le 3 mai 2023 mais que la première diligence n'avait été effectuée que le 5 mai 2023. Il a rappelé que la cour de cassation considère comme tardive, une saisine d'un consulat trois jours après le placement en rétention administrative.

A l'audience, M. X se disant [T] [W], représenté par son conseil a repris les termes de sa déclaration d'appel soulignant qu'aucune circonstance particulière ne justifiait son placement dans le local de rétention d'[Localité 1]. Il a rappelé que les diligences de l'administration doivent être faites dès le placement en rétention administrative et que l'ordonnance déférée n'était pas motivée sur ce point.

Le préfet de la Meurthe et Moselle, non comparant, a conclu à la confirmation de l'ordonnance déférée.

Il a rappelé que par décision n°15-28795 du 13 juillet 2016, la Cour de cassation a pu constater que la présentation des parties est facultative et que le préfet peut utilement faire valoir son argumentation par un jeu d'écritures.

Il a conclu à la confirmation de l'ordonnance déférée.

Il fait valoir que les nouveaux moyens ne peuvent être soulevés que dans le délai d'appel et que les exceptions de procédure ne sont recevables qu'en tant qu'elles ont été soulevées in limine litis devant le premier juge.

Sur l'irrégularité, tirée de l'incompétence du signataire de la requête, il a indiqué que ce moyen n'a pas été soulevé devant le premier juge; qu'en application des articles 74 et 117 du Code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, aucune exception de nullité de fond (pouvoir du signataire) ne peut être soulevée après toute défense au fond ou fin de non-recevoir; que le moyen est donc irrecevable en appel; qu'au surplus la délégation permet d'établir que le signataire avait compétence pour saisir le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la rétention; que la question de l'empêchement du Préfet et des personnes placées sous son autorité était inopérante ; que la signature du délégataire emporte preuve d'indisponibilité des signataires de premier rang.

S'agissant du placement au local de rétention, le préfet a fait observer que les droits du retenu lui avaient été notifiés à son arrivée à ce local de rétention et qu'il n'a pas argué avoir été dans l'impossibilité de joindre un avocat ou une des personnes morales listées sur le procès verbal de notification.

Il a ajouté que le placement en local ou centre de rétention administrative, se fait en fonction des places disponibles, ce qu'il ne maîtrise pas.

Il a remarqué que relativement à la question de l'indication de l'Ordre des maltes au lieu de l'ASSFAM, le numéro de téléphone fixe qui y est indiqué reste inchangé.

Enfin, il a affirmé avoir accompli les diligences dans les délais.

Sur quoi

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel de Monsieur X se disant [T] [W] à l'encontre de l'ordonnance rendue le 7 mai 2023 à 12h par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, interjeté le 9 mai 2023 à 11h51, est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu a l'article R 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, régulièrement prorogé en application de l'article 642 du code de procédure civile.

Sur les moyens soulevés in limine litis

L'article L743-12 précise qu'en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Aux termes de l'article R744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lorsqu'en raison de circonstances particulières, notamment de temps ou de lieu, des étrangers retenus en application du présent titre ne peuvent être placés immédiatement dans un centre de rétention administrative, le préfet peut les placer dans des locaux adaptés à cette fin, dénommés " locaux de rétention administrative "régis par la présente sous-section.

En l'espèce, il ressort du dossier soumis à notre contrôle, que Monsieur X se disant [T] [W], à la suite de la notification de son placement en rétention administrative , a été conduite le 3 mai 2023 au local de rétention administrative d'[Localité 1], puis transféré le 5 mai 2023 au centre de rétention administrative de [2].

L'appelant ne précise pas, en quoi son séjour d'une quarantaine d'heures au local de rétention administrative d'[Localité 1], aurait causé une atteinte à ses droits.

En l'absence de cette précision, et au vu de l'article R744-11 du code précité, qui décrit les équipements obligatoires, dont doit être doté un local de rétention administrative, il apparaît qu'en réalité l'appelant ne justifie d'aucune atteinte à ses droits du fait de son séjour dans le local de rétention administrative.

Par conséquent, ce moyen sera écarté.

S'agissant du caractère erroné de la mention relative à l'association intervenant au centre, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge a rejeté ce moyen, l'ordonnance déférée étant, dès lors confirmée sur ce point.

Sur la régularité de la requête en prolongation de la rétention administrative

Aux termes de l' article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice et, en vertu de l'article 118 du même code, elle peut être proposée en tout état de cause, y compris à hauteur d'appel.

Il sera relevé que, conformément à l'article 74 du code de procédure civile, l'irrégularité a bien été soulevé in limine litis.

Il convient donc d'examiner cette demande, même si elle n'a pas été invoquée devant le premier juge.

En application de l'article R743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge a l'obligation de vérifier la compétence du signataire de la requête.

En l'espèce, la requête en prolongation de la rétention administrative a été signée par Madame [Z] [F], directrice adjointe de l'immigration et de l'intégration, laquelle est expressément déléguée pour présenter les requêtes en prolongation de rétention administrative, aux termes de l'arrêté préfectoral portant délégation, en date du 5 avril 2023.

La preuve, par le préfet, de l'indisponibilité des signataires de premier rang n'est pas exigée par le texte et la signature du délégataire emporte preuve de leur empêchement.

Il s'ensuit que l'irrégularité soulevée n'est pas fondée.

Sur le bien fondé de la prolongation

Aux termes de l'article L742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, pour une durée de vingt-huit jours par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative.

Le texte n'impose aucune condition à cette prolongation, si ce n'est que, conformément à l'article L. 741-3 du code susvisé, l'administration effectue toutes les diligences nécessaires à l'éloignement de l'intéressé, en temps utile.

Il est exact que les diligences de l'administration doivent être effectuées sans délai, la cour de cassation considérant effectivement comme tardive, une saisine de consulat trois jours après le placement en rétention administrative.

En l'espèce, il ressort des pièces soumises à notre contrôle que le placement en rétention administrative a été notifié à Monsieur X se disant [T] [W] le 3 mai 2023 à 20h27, alors que la demande de laissez-passer consulaire a été effectuée le 5 mai 2023 à 14h23, soit 42 heures plus tard.

Un tel délai, très loin des 72 heures considérées comme tardives par la cour de cassation, ne peut être considéré comme excessif, de sorte qu'il convient de considérer que l'administration a effectué les diligences dans les délais utiles.

Pour le surplus, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge a considéré que Monsieur X se disant [T] [W] ne remplissait pas les conditions d'une assignation à résidence.

C'est donc à bon droit, que le premier juge a prolongé sa rétention administrative.

L'ordonnance déférée sera par conséquent confirmée.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARONS l'appel de Monsieur X se disant [T] [W] recevable en la forme ,

Le rejetant,

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 7 mai 2023.

RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention :

- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin,

- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;

DISONS avoir informé M. X SE DISANT [T] [W] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.

Prononcé à Colmar, en audience publique, le 10 Mai 2023 à 15h40, en présence de

- Maître HOSSEINI Pégah, conseil de M. X SE DISANT [T] [W]

- de l'interprète, lequel a traduit la présente décision à l'intéressé lors de son prononcé.

Le greffier, Le président,

reçu notification et copie de la présente,

le 10 Mai 2023 à 15h40

l'avocat de l'intéressé

Maître Pégah HOSSEINI

Comparante

l'intéressé

M. X SE DISANT [T] [W]

né le 15 Octobre 1997 à [Localité 4]

Non comparant

l'interprète

Madame [B] [V]

Comparante

l'avocat de la préfecture

SELARL CENTAURE

Non comparante

EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,

- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,

- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,

- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,

- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,

- ledit pourvoi n'est pas suspensif.

La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :

- au CRA de [Localité 3] pour notification à M. X SE DISANT [T] [W]

- à Maître Pégah HOSSEINI

- à M. LE PREFET DE MEURTHE ET MOSELLE

- à la SELARL CENTAURE AVOCAfaTS

- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.

Le Greffier

M. X SE DISANT [T] [W] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance

le À heures

Signature de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 6 (etrangers)
Numéro d'arrêt : 23/01716
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;23.01716 ?
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