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10/05/2023 | FRANCE | N°20/01946

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 10 mai 2023, 20/01946


MINUTE N° 221/23

























Copie exécutoire à



- Me Sophie BEN AISSA -ELCHINGER



- Me Laurence FRICK





Le 10.05.2023



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 10 Mai 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/01946 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HLNG



cision déférée à la Cour : 25 Mai 2020 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE - Chambre commerciale



APPELANTS :



Madame [O] [B]

[Adresse 1]



Monsieur [J] [N]

[Adresse 2]



Représentés par Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER, avocat à la Cour



INTIM...

MINUTE N° 221/23

Copie exécutoire à

- Me Sophie BEN AISSA -ELCHINGER

- Me Laurence FRICK

Le 10.05.2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 10 Mai 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/01946 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HLNG

Décision déférée à la Cour : 25 Mai 2020 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE - Chambre commerciale

APPELANTS :

Madame [O] [B]

[Adresse 1]

Monsieur [J] [N]

[Adresse 2]

Représentés par Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER, avocat à la Cour

INTIMEE :

S.A. BANQUE CIC EST

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Vu le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 25 mai 2020,

Vu la déclaration d'appel effectuée le 13 juillet 2020 par M. [N] et Mme [B] par voie électronique,

Vu la constitution d'intimée effectuée le 29 juillet 2020 par la Banque CIC Est par voie électronique,

Vu les conclusions de M. [N] et Mme [B] du 8 décembre 2021, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le 9 décembre 2021, ainsi que le bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation qui a été transmis par voie électronique le 27 décembre 2021,

Vu les conclusions de la société Banque CIC Est du 27 janvier 2022, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le même jour,

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 7 septembre 2022,

Vu l'audience du 23 janvier 2023 à laquelle l'affaire a été appelée,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION :

Selon contrat du 20 avril 2011, la société Banque CIC EST (la banque) a consenti à la société Sud Alsace, ultérieurement dénommée EURL l'Alchimiste, un prêt professionnel de 120 000 euros, garanti par le cautionnement de Mme [B], alors gérante de la société, dans la limite de 24 000 euros et pour une durée de 108 mois.

Selon contrat du 13 octobre 2011, la banque a consenti à ladite société un prêt de 25 000 euros, garanti par le cautionnement de Mme [B], dans la limite de 15 000 euros et pour une durée de 7 ans.

Le 30 juin 2012, M. [N] s'est porté caution de l'ensemble des engagements de ladite société dans la limite de 50 000 euros et pour une durée de 5 ans.

Suite à la défaillance de la société, la banque lui a notifié l'exigibilité des deux prêts, l'a mise en demeure, ainsi que les cautions, de rembourser les sommes dues, puis a assigné les cautions et la société en paiement.

La société a ensuite été mise en redressement le 9 septembre 2015, puis en liquidation judiciaire le 25 janvier 2017.

Selon avis d'admission du 25 octobre 2016, la banque a été admise au passif de la société à hauteur de 66 848,01 euros outre intérêts au taux contractuel et à hauteur de 8 772,15 euros outre intérêts au taux contractuel.

La banque n'a repris l'instance qu'à l'égard des cautions, lesquelles ont opposé la prescription de la demande, la nullité sur le fondement des articles L.341-2 et suivants du code de la consommation et l'inopposabilité pour disproportion de leurs engagements sur le fondement de l'article L.341-4 du code de la consommation, ainsi que la déchéance du droit aux intérêts, tout en recherchant la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde.

Le jugement attaqué a fait droit aux demandes de la banque et rejeté la fin de non-recevoir et les demandes des cautions.

Sur le chef du jugement ayant rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par les cautions :

Si les cautions demandent, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, l'infirmation du jugement, elles ne présentent aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription à hauteur de cour. Dès lors, la cour n'est pas saisie d'une telle prétention et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes tendant à juger nuls les cautionnements :

Les cautions soutiennent qu'en application des articles L.341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, est nul le cautionnement dès lors que la mention manuscrite n'est pas suivie de la signature de la caution, et ce même si la mention est suivie de son paraphe.

Sur l'engagement de caution de Mme [B] du 13 octobre 2011 :

Est conforme aux exigences de l'article L. 341-2 du code de la consommation la mention manuscrite qui, figurant sous la signature de la caution, est immédiatement suivie du paraphe de celle-ci, de sorte que ni le sens, ni la portée, ni, en conséquence, la validité de cette mention ne s'en trouvent affectés (1ère Civ., 22 septembre 2016, pourvoi n° 15-19.543, Bull. 2016, I, n° 172).

En l'espèce, comme le soutiennent les cautions, la signature de Mme [B] précède les mentions manuscrites. Cependant, comme le soutient la banque, ces mentions manuscrites sont suivies du paraphe de Mme [B], celle-ci ne contestant pas que le paraphe 'A.M.' apposé, sur la même page, à la suite des mentions manuscrites, soit le sien. Il en résulte, et aucune autre circonstance ne permet de conclure en sens contraire, que le sens et la portée de ces mentions n'en sont pas affectés.

Dès lors, son engagement de caution est valable.

Sur l'engagement de caution de M. [N] :

Les cautions soutiennent que sa signature n'a pas été apposée immédiatement à la suite des mentions manuscrites, mais sur le côté gauche, et alors que la retranscription des mentions du côté droit, outre d'être incomplète, était toujours en cours.

La banque réplique que la signature est apposée à gauche, juste à côté de la fin de la mention manuscrite, et qu'il l'a aussi paraphée. Elle ajoute que la jurisprudence invoquée par les cautions n'est pas applicable et que la mention manuscrite est conforme aux exigences de la Cour de cassation, ajoutant que la jurisprudence retient la validité d'une telle mention lorsque la manière dont elle a été apposée permet à la caution de comprendre la portée de son engagement, ce qui est le cas en l'espèce.

En l'espèce, M. [N] a apposé les mentions manuscrites dans l'espace laissé libre entre les mots dactylographiés 'LA CAUTION' et 'LE CONJOINT DE LA CAUTION', et, cet espace ne suffisant manifestement pas, à droite des mots dactylographiés 'LE CONJOINT DE LA CAUTION'. Il a apposé son nom et sa signature à la gauche de ses quatre dernières demi-lignes manuscrites.

Il n'est pas établi qu'il a apposé cette signature alors que la retranscription des mentions manuscrites était toujours en cours.

Compte tenu de la place laissée sur le document pour reproduire les mentions légales, de l'endroit où elles ont apposé les mentions manuscrites et la signature, il en résulte que cette signature, qui n'a pas à suivre immédiatement les mentions, a été apposée à la suite de ces mentions, et en tous les cas, de manière valable.

Enfin, outre que M. [N] ne dit pas en quoi les mentions manuscrites sont incomplètes, leur lecture montre qu'elles reproduisent les formules légales.

Son engagement de caution est dès lors valable.

Sur l'engagement de caution de Mme [B] du 20 avril 2011 :

Les cautions soutiennent que les mentions ont été interrompues et ultérieurement reprises, après et en-dessous du texte pré-imprimé reprenant les dispositions des articles précités, pour se terminer en bas de page et l'apposition de la signature, alors que les dispositions légales précitées imposent la reproduction sans discontinuité des mentions. Elles font ainsi valoir que l'interposition d'un élément ou d'une clause pré-imprimée entre la mention manuscrite et la signature contrevient aux exigences légales.

La banque réplique que Mme [B] a reproduit très exactement la mention manuscrite et y a apposé à sa suite sa signature, tout en admettant que la mention est interrompue par un texte pré-imprimé, ce qu'elle considère comme ne préjudiciant pas à la validité du cautionnement, aucune disposition n'imposant une mention manuscrite ininterrompue et la jurisprudence ayant déjà admis la validité d'une telle mention lorsque la manière dont elle a été apposée permet à la caution de comprendre la portée de son engagement, ce qui est le cas en l'espèce.

En l'espèce, les mentions manuscrites sont situées, d'une part, entre les mots dactylographiés 'CAUTION MME [B] [O]' et la formule légale dactylographiée à recopier, et se poursuivent, en ce qui concerne les derniers mots manuscrits 'sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement SARL SUD-ALSACE', lesquels sont suivis du nom et de la signature de Mme [B].

Les mentions manuscrites ont ainsi été interrompues par la formule dactylographiée à recopier.

Eu égard à la place laissée sur ce document pré-imprimé, à la caution pour recopier la formule manuscrite, place qui est insuffisante pour permettre une rédaction en continu, la mention manuscrite, figurant pour l'essentiel au-dessus de la mention dactylographiée, n'a pu, compte tenu de ces conditions matérielles, être achevée qu'au-dessous de ce texte, tout en bas de page, au seul endroit disponible pour en achever la rédaction. Compte tenu de ces conditions matérielles de rédaction, la signature de la caution n'a pu être apposée qu'à la suite de la mention manuscrite, ainsi reprise après avoir été interrompue par ces formules dactylographiées.

Dans ces circonstances, et de surcroît alors que la mention manuscrite n'a été interrompue que par la formule dactylographiée qu'il appartenait à la caution de recopier, le sens et la portée de l'engagement de la caution n'ont pu être altérés par ces conditions matérielles et cette interruption.

L'engagement de caution est dès lors valable.

Sur les demandes tendant à juger inopposables les cautionnements :

Selon l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au présent litige, (devenu L.332-1 dudit code créé par l'ordonnance du 14 mars 2016 et abrogée par celle du 15 septembre 2021), un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Il appartient à la caution, qui l'invoque, de démontrer l'existence de la disproportion manifeste de son engagement, au moment de la conclusion de celui-ci.

Sur les engagements de caution de Mme [B] :

Mme [B] fait état de sa situation financière au jour de son engagement de caution à hauteur de 24 000 euros consenti le 20 avril 2011.

Il n'est pas contesté qu'elle s'était déjà portée caution solidaire à hauteur de la somme de 252 000 euros, dont le reliquat s'élevait à 186 055,08 euros. Elle fait en outre valoir qu'elle restait tenue des termes à échoir d'un prêt immobilier à hauteur de 247 663,05 euros.

Cependant, si elle justifie qu'elle se trouvait en instance de divorce et qu'elle était propriétaire avec son mari d'une résidence familiale à [Localité 5], l'ordonnance de non-conciliation en date du 3 décembre 2010 en attribuant la jouissance à son mari, elle ne démontre pas quelle était, au jour de son engagement de caution, la valeur de cet immeuble, et de la part lui revenant à cet égard.

Alors qu'elle soutient qu'elle ne disposait d'aucune économie, la banque justifie, en pièce 36, qu'elle possédait alors d'une épargne de l'ordre de 4 800 francs suisses, et que selon son avis d'imposition 2012 au titre des revenus perçus en 2011, elle percevait, outre des revenus de l'ordre de 2 200 euros par mois, des revenus de capitaux mobiliers imposables, qui, même faibles, montrent la possession d'une épargne.

En outre, la banque démontre, selon sa pièce 42, que Mme [B] était associée unique de la SARL Sud Alsace qui détenait un capital de 6 000 euros. La banque soutient que cette société était propriétaire d'un fonds de commerce d'une valeur minimum correspondant au montant de l'opération de 120 000 euros, qui avait été financée par le prêt du 20 avril 2011, et qui était garanti par le cautionnement de Mme [B]. Alors que la banque en déduit que les parts sociales avaient une valeur supérieure au capital social, Mme [B] ne produit aucun élément permettant de connaître la valeur des parts sociales qu'elle possédait dans cette société.

Dès lors, Mme [B] ne démontre pas que son engagement de caution du 20 avril 2011 était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

S'agissant de son engagement de caution de 15 000 euros souscrit le 13 octobre 2011, elle ne démontre pas plus, compte tenu des motifs qui précèdent tenant notamment, et surtout, à l'absence d'élément permettant de connaître la valeur de son immeuble, et de la part lui revenant à cet égard au jour de son engagement, mais aussi la valeur de ses parts sociales dans ladite SARL à ladite date, outre à la possession de l'épargne précitée, que celui-ci soit, même en tenant compte du précédent engagement de caution de 24 000 euros, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Sur l'engagement de caution de M. [N] :

M. [N] fait état de sa situation au jour de son engagement du 30 juin 2012, mais ne produit aucun élément pour justifier quels étaient, lors de la conclusion de son engagement de caution, ses revenus, ses charges ou état d'endettement et son patrimoine, voire l'absence de son patrimoine au-delà de l'important avoir vieillesse qu'il possédait alors comme en justifie la banque et que M. [N] dit, sans de surcroît le démontrer, ne pouvoir être débloqué pour faire face à un engagement de caution.

Il sera précisé que la pièce 38 indiquant des soldes de comptes de M. [N] ne comprend aucune date et que la pièce 29 relatif à un relevé de situation Cetelem date d'avril 2021 et mentionne que la date d'ouverture du crédit est le 18 décembre 2017.

Il ne démontre dès lors pas que son engagement de caution du 20 avril 2011 était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Dès lors, les demandes tendant à déclarer inopposables les cautionnements seront rejetées, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur la demande tendant à prononcer la déchéance du droit aux intérêts et pénalités :

Les cautions soutiennent que la banque ne justifie pas avoir satisfait à l'obligation d'information annuelle des cautions, la seule production des lettres ne saurait suffire à rapporter la preuve de leur envoi.

La banque réplique verser aux débats les informations annuelles adressées aux cautions et qu'elle ne demande paiement que des intérêts au taux légal, de sorte que la demande de déchéance des intérêts au taux conventionnel est sans objet.

Sur ce, selon l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, alors applicable, lorsqu'un établissement de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, ne fait pas connaître à la caution au plus tard avant le 31 mars de chaque année le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement, il est déchu, dans ses rapports avec la caution, des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information.

La seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi.

En l'espèce, la banque produit en pièce 31 des copies de lettre portant l'adresse de Mme [B], mais sans aucun élément permettant de démontrer qu'elles ont été envoyées à cette dernière.

Avec la pièce 32, la banque produit de la même manière des documents qui ne sont pas probants de l'envoi des copies des lettres produites, à l'exception toutefois d'un seul envoi, qui est établi par la production, outre de la copie de la lettre du 17 février 2017 au nom de Mme [B] contenant l'information annuelle requise, de la copie d'une enveloppe mentionnant l'adresse de Mme [B] et la référence 10/03/2017 ainsi que le nom de L'Alchimiste, et comportant un bout de cachet de poste et, par-dessus, le talon destiné à la distribution de la lettre sur lequel est cochée la case 'destinataire inconnu à l'adresse.

Pour le surplus, ne sont produites avec cette pièce que des copies d'autres lettres, une page contenant la reproduction de talons destinés à des lettres recommandées, mais sans élément permettant de montrer qu'ils ont été utilisés, ainsi que deux pages relatives à des bordereaux de dépôt des 17 mars 2016 et 10 mars 2017, avec d'ailleurs la mention 'attention ce document n'est ni une preuve d'envoi, ni un avis de réception', mais sans aucune signature ni cachet. Ainsi, pour le surplus, cette pièce 32 ne permet pas de démontrer que d'autres informations annuelles ont été adressées à Mme [B].

S'agissant de M. [N], la banque produit en pièce 33, de la même manière, des documents similaires, qui ne sont pas probants de l'envoi des copies des lettres produites, à l'exception toutefois d'un seul envoi, qui est établi par la production, outre de la copie de la lettre du 17 février 2017 au nom de M. [N] contenant l'information annuelle requise, de la copie d'une enveloppe mentionnant l'adresse de M. [N] et comportant sur le talon destiné à la distribution de la lettre, la date du 11 mars 2017, et sur lequel est cochée la case 'pli avisé et non réclamé'.

Dès lors, il convient de prononcer la déchéance de la banque à son droit à intérêts jusqu'au 31 mars 2017, puis à compter du 31 mars 2018, le jugement étant infirmé en ce qu'il a rejeté la demande sur une telle période.

Il convient cependant de constater que la banque conclut à la confirmation de la décision qui a condamné les cautions au paiement de sommes, qui sont inférieures au capital restant dû au titre des deux prêts, outre intérêts au taux légal à compter du 4 août 2015, et ne demande pas paiement des intérêts au taux conventionnel sur la période 2017/2018 sur laquelle elle n'a pas été déchue de son droit aux intérêts. De même, les cautions ne demandent pas que soit imputé sur leur dette le montant des intérêts payés par le débiteur principal.

Sur la demande reconventionnelle en responsabilité pour manquement de la banque à son obligation de vigilance et de mise en garde et la demande de compensation des créances respectives des parties :

Sur la prescription :

La banque invoque la prescription de l'action en responsabilité de Mme [B], soutenant que le point de départ du délai est la date de l'engagement de caution.

Les cautions répliquent que le point de départ est fixé au jour où elles ont su que leurs obligations résultant de leur engagement allaient être mises à exécution en raison de la défaillance du débiteur principal, soit à la date de la mise en demeure adressée à la caution, et que leur action n'est donc pas prescrite.

Sur ce, le point de départ de l'action en responsabilité de la caution à l'encontre de la banque est fixé au jour où elle a su que les obligations résultant de son engagement allaient être mises à exécution du fait de la défaillance du débiteur principal, soit à compter de la mise en demeure qui lui a été adressée.

En l'espèce, la banque ne soutient pas avoir mis en demeure Mme [B] avant la mise en demeure du 3 août 2015. Dès lors, l'action en responsabilité qu'elle a engagée par conclusions du 20 décembre 2017 comme l'indique la banque n'est pas prescrite.

Sur le fond :

Il résulte de ce qui précède que Mme [B] ne démontre pas que ses engagements de caution n'étaient pas adaptés à ses capacités financières, et ce peu important que la banque n'ait pas, comme elle le soutient, vérifié sa situation financière lors de son engagement.

S'agissant de M. [N], il résulte de ce qui précède qu'il ne démontre pas que son engagement de caution n'était pas adapté à sa situation financière.

Les cautions ne démontrent pas non plus que le prêt était inadapté à la situation financière de la société et créait, de ce fait, un risque d'endettement né de l'octroi du prêt. En effet, si elles soutiennent qu'il était évident que dès l'octroi des concours bancaires, les opérations financées par la société n'étaient pas viables, dès lors que la société se trouvait dans une situation plus que compromise du moins fortement obérée, dès lors que la banque avait laissé fonctionner le compte bancaire de la société en position gravement déficitaire durant de nombreux mois et avant les opérations garanties, elle ne produit pas d'éléments concernant la société en 2011, ni d'éléments montrant que celle-ci se trouvait, en avril et octobre 2011, ou encore en juin 2012, dans une situation financière délicate comme les cautions le soutiennent, les relevés de commissions d'intervention et de frais de prélèvements impayés à compter de décembre 2012, ou plus tard de rejet de chèques, produits en pièce 15 et 16, étant insuffisants à cet égard. En outre, comme le soutient la banque, les crédits contractés en 2011 ont été remboursés jusqu'en 2015, selon les décomptes produits par la banque qui ne sont contredits par aucun élément produit par les cautions.

Dès lors, Mme [B] et M. [N], en dépit de leur caractère de caution non avertie, ne justifient pas que la banque était tenue d'un devoir de mise en garde ou de vigilance à leur égard.

De surcroît, et à titre surabondant, Mme [B] ne démontre pas, comme le soutient la banque, qu'en présence d'informations complémentaires, il existait une chance qu'elle ne s'engage pas en qualité de caution de la SARL Sud Alsace, dès lors qu'elle était associée et gérante de cette société, et que, comme le soutient la banque et il résulte de son curriculum vitae figurant sur un site internet produit par la banque, le développement d'un fonds de commerce de restauration s'inscrit dans son parcours professionnel, outre le fait que ses engagements de caution qu'elle a souscrits sont limités par rapport à la valeur du fonds de commerce acquis par la société.

Dès lors, leur moyen de défense sera rejeté.

Sur le chef de jugement ayant condamné les cautions :

Les cautions ne soulevant aucun autre moyen de défense que ceux précités, il convient de confirmer le jugement, qui a condamné Mme [B] à payer à la banque les sommes de 24 000 euros et 4 556,90 euros, et M. [N] à payer à la banque la somme de 50 000 euros, et ce, outre intérêts au taux légal à compter du 4 août 2015.

Sur les frais et dépens :

Mme [B] et M. [N] succombant, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés in solidum à payer les dépens et à payer la somme de 1 500 euros à la banque au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils seront également condamnés in solidum à supporter les dépens d'appel et à payer à la banque la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, leur demande de ce chef étant rejetée.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 25 mai 2020, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de déchéance du droit de la société Banque CIC Est aux intérêts pour la période du 31 mars 2017 au 31 mars 2018,

L'infirme de ce seul chef,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Prononce la déchéance du droit de la société Banque CIC Est aux intérêts pour la période du 31 mars 2017 au 31 mars 2018 au titre des prêts des 20 avril et 13 octobre 2011,

Y ajoutant,

Condamne in solidum Mme [B] et M. [N] aux dépens d'appel,

Condamne in solidum Mme [B] et M. [N] à payer à la société Banque CIC Est la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes de Mme [B] et M. [N] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière : la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 20/01946
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;20.01946 ?
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