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16/03/2023 | FRANCE | N°21/00023

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 16 mars 2023, 21/00023


MINUTE N° 23/245

















NOTIFICATION :







Copie aux parties



- DRASS







Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées











Le







Le Greffier



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 16 Mars 2023





Numéro d'

inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 21/00023 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HOS3



Décision déférée à la Cour : 03 Décembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE





APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 1]

[Localité 4]



Dispensée de comparuti...

MINUTE N° 23/245

NOTIFICATION :

Copie aux parties

- DRASS

Clause exécutoire aux :

- avocats

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 16 Mars 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 21/00023 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HOS3

Décision déférée à la Cour : 03 Décembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 1]

[Localité 4]

Dispensée de comparution

INTIMEE :

Société [5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne SCHEFFER, avocat au barreau de STRASBOURG, dispensée de comparution

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme GREWEY, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

Mme GREWEY, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme DONATH, Adjoint administratif, faisant fonction de Greffier

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme GREWEY, Conseiller, en remplacement du Président empêché,

- signé par Mme GREWEY, Conseiller, en remplacement du Président empêché, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSE DES FAITS ET PROCÉDURE

En date du 23 février 2018, la société de travail temporaire [5] a complété une déclaration d'accident de travail concernant M. [V] [G] qui était alors envoyé en mission temporaire chez [7], entreprise utilisatrice. Il y était précisé qu'en «redressant une pièce à l'aide d'une presse, celle-ci a cassé et a été propulsée sur la main de la victime ». Il était également mentionné : « Siège des lésions : poignet gauche » ; « nature des lésions : douleurs » ; « la victime a été transportée au centre hospitalier de [Localité 6] ». Cet accident a eu lieu le 20 février 2018 à 23h30, étant précisé que ce jour-là M. [V] [G] avait débuté sa mission à 20H30.

Il y a lieu de préciser qu'aucune réserve de l'employeur n'est mentionnée sur cette déclaration d'accident du travail.

Le certificat médical initial a été rédigé le 21 février 2018 par le centre hospitalier de [Localité 6] qui faisait état d'une « hyperextension du poignet gauche et d'une impotence fonctionnelle majeure causée par la douleur ». Il y a lieu de préciser que par erreur, le Pôle Samu Smur dudit centre a mentionné comme date de l'accident, le 21 février 2018 et non le 20 février 2018. Une absence de lésion radiologique était également relevée. Le 26 mars 2018, le médecin traitant de la victime établissait un certificat médical de prolongation mentionnant des nouvelles lésions, à savoir « entorse poignet gauche ».

La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a reconnu cet accident du travail par décision du 27 février 2018.

Pour une meilleure compréhension de la globalité du litige, il convient de préciser que :

- par courrier du 12 avril 2018, la caisse a ensuite notifié à la société [5] la prise en charge de nouvelles lésions en date du 26 mars 2018 se rapportant audit accident ;

- le 23 avril 2018 le médecin traitant établissait un nouveau certificat médical de prolongation mentionnant de nouvelles lésions, à savoir « algodystrophie du poignet ».

- par courrier du 30 avril 2018, la société [5] a contesté devant la commission de recours amiable de la caisse d'une part l'opposabilité de la prise en charge de l'accident du travail du 20 février 2018 pour non-respect de l'obligation d'information envers l'employeur et d'autre part la décision du 12 avril 2018 sur la prise en charge des lésions du 26 mars 2018.

- le 1er juin 2018, la caisse reconnaissait l'imputabilité des lésions nouvelles du 23 avril 2018 et décrites au sinistre survenu le 20 février 2018, après avis de son médecin conseil. Le 20 juillet 2018, la société [5] contestait également cette décision auprès de la Commission de recours amiable de la caisse. Suite à ce recours, la Commission de recours amiable ne lui a adressé aucun accusé de réception de sorte qu'aucune décision de rejet n'a été rendue.

Dans ce contexte, la société [5] a saisi le 29 novembre 2018, le tribunal des affaires de la sécurité sociale du Haut-Rhin aux fins de contester la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable suite à sa requête du 30 avril 2018, ci-dessus rappelée.

Par jugement du 3 décembre 2020 (sous RG 20/717), le pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse, succédant au tribunal de grande instance lui-même succédant au tribunal des affaires de la sécurité sociale du Haut-Rhin, a statué comme suit :

- déclaré recevable le recours introduit par la société [5] ;

- déclaré la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 27 février 2018 concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail survenu à M. [V] [G] le 20 février 2018 inopposable à la société [5] ;

- dit que chaque partie supportera ses propres dépens.

Ce jugement a été notifié aux parties le 3 décembre 2020.

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 21 décembre 2020, la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a interjeté appel contre le jugement précité.

Par ordonnance du 3 mars 2022, l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du magistrat rapporteur du 19 janvier 2023.

L'affaire a été mise en délibéré au 16 mars 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions du 9 janvier 2023 (prises identiquement pour les procédures sous RG n°21/20, 21/21, 21/23) aux termes desquelles la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, dispensée de comparaître lors des débats, demande à la cour de :

- infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu le 20 février 2018 à M. [V] [G] est opposable à la société [5] ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions décrites sur le certificat médical de prolongation du 26 mars 2018 est opposable à la société [5] ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions décrites sur le certificat médical de prolongation du 23 avril 2018 est opposable à la société [5] ;

- dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle et soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident du travail survenu le 20 février 2018 à M. [V] [G] est opposable à la société [5] sur l'ensemble de la période considérée, soit du 21 février 2018 au 17 juillet 2018 ;

- débouter la société [5] de l'ensemble de ses prétentions.

Vu les conclusions récapitulatives du 13 janvier 2023, aux termes desquelles la société [5], dispensée de comparaître, sollicite de la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle conteste l'ensemble des allégations de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, en tant qu'elles ne sont pas expressément reconnues dans ses écrits ;

Avant dire droit :

- écarter des débats les conclusions récapitulatives de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin datées du 9 janvier 2023, réceptionnées par la société [5] le 10 janvier 2023 ainsi que sa nouvelle pièce ;

Au fond :

* à titre principal, confirmer le jugement du 3 décembre 2020 en ce qu'il a : (')

En conséquence :

- juger que la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a manqué à son obligation d'information à son égard ;

- déclarer la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 27 février 2018 concernant la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail survenu à Monsieur [V] [G] le 20 février 2018 inopposable à la société [5] ;

A titre subsidiaire :

- juger que les 50 jours d'arrêt de travail prescrits par les certificats médicaux du 21 février 2018, 27 février 2018, 26 mars 2018 et du 18 juin 2018 ne peuvent être imputés sur son compte individuel relatif aux accidents du travail/maladies professionnelles ;

En conséquence :

- lui déclarer inopposable les 50 jours d'arrêts de travail prescrits par les certificats médicaux du 21 février 2018, 27 février 2018, 26 mars 2018 et du 18 juin 2018.

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties, auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Interjeté dans les forme et délais légaux, l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin est recevable.

Sur la demande avant dire droit tendant à écarter les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin du 9 janvier 2023 :

Conformément à l'article 446-2 alinéa 4 du code de procédure civile, applicable à la procédure orale, le juge peut écarter des débats les prétentions, moyens et pièces communiquées sans motif légitime après la date fixée pour les échanges et dont la tardiveté porte atteinte aux droits de la défense.

En l'espèce, la société [5] soutient que la tardiveté de la notification des conclusions de la caisse alors même qu'elle devait conclure pour le 1er octobre 2022 contrevient aux instructions de la cour qui avait d'une part prononcé une injonction de conclure et que d'autre part l'appelante n'a pas respecté le délai minimum de quinze jours avant l'audience pour déposer son dossier de plaidoirie. L'intimée estime qu'en conséquence, le défaut de respect de transmission des écritures alors même que la caisse disposait de sept mois pour ce faire, constitue une atteinte au principe de la contradiction et doit être sanctionné en écartant ces nouvelles écritures et pièce des débats.

Cependant, la cour relève que, s'il est exact que la caisse primaire a conclu tardivement, le 9 janvier 2023, soit dix jours avant la date de la plaidoirie, étant rappelé que la procédure est orale, la société [5] a pu y répliquer sans difficulté le 13 janvier 2023. Par message RPVA du 18 janvier 2023, le conseil de la société a indiqué qu' « en accord avec la caisse, nous vous informons que nous mettons en délibéré le dossier référencé en objet lors de l'audience de demain ».

Le simple fait de déposer de nouvelles conclusions, qui ne contiennent aucun nouveau moyen ou de nouvelle prétention par rapport aux conclusions précédentes, ainsi qu'une seule pièce dix jours avant l'audience de plaidoirie ne caractérise pas un manquement au principe de la contradiction.

La société [5] ne justifie pas en quoi elle serait lésée d'autant plus qu'elle a été en mesure de répondre auxdites écritures et à la pièce supplémentaire, et n'a de surcroît formulé aucune demande de renvoi pour le cas où elle souhaitait disposer d'un délai supplémentaire pour y répondre.

Dès lors que ces conclusions et cette pièce ont été déposées dans un laps de temps raisonnable avant les plaidoiries, que l'intimée a pu y répliquer sans qu'il soit démontré qu'elles aient conduit à priver la société [5] du principe de la contradiction, sa demande sera rejetée.

Sur le respect du caractère contradictoire de la procédure et l'opposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge de l'accident du 20 février 2018  :

La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin soutient qu'elle n'a procédé à aucune instruction et qu'elle a pris une décision de prise en charge de l'accident du travail au titre de la législation professionnelle d'emblée dès lors qu'en l'absence de réserves de l'employeur l'instruction n'était pas obligatoire et que les mentions supplémentaires à la prise en charge de l'accident par ses soins dans son courrier de notification du 27 février 2018 résultent d'une erreur de formulaire, soit une erreur purement matérielle qui ne peut en aucun cas entraîner l'inopposabilité de la décision de prise en charge à l'employeur.

La société [5] indique que l'accident du travail de M. [V] [G] lui avait été imputé sur son compte employeur sans avoir réceptionné par lettre recommandée la notification de la décision de prise en charge du sinistre du 20 février 2018 et qu'elle a demandé à la caisse de lui communiquer la décision de prise en charge de cet accident du travail. Elle indique avoir ainsi réceptionné une copie de la notification de prise en charge le 26 mars 2018 alors qu'elle était datée du 27 février 2018. Elle soutient comme l'a retenu le pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse qu'elle a été informée qu'une instruction du dossier était en cours par mention spécifique dans le courrier et que la procédure dans ce cas de figure n'a pas été respectée. Elle estime qu'en l'absence de respect du principe du contradictoire, la décision de prise en charge ne lui est pas opposable.

S'agissant du respect du principe du contradictoire :

L'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au présent litige, dispose, en son dernier alinéa, qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès. Dans les cas prévus par les dispositions susvisées, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13 (art. R.441-14, alinéa 3).

La présente procédure a pour objet principal de déterminer les conséquences d'une éventuelle erreur matérielle commise par la caisse lors de la notification de la décision de prise en charge du 27 février 2018 où elle évoque une instruction contradictoire et les conséquences sur l'opposabilité de la prise en charge de la décision sur l'employeur.

En l'espèce, à la suite de la déclaration de l'accident du travail par le salarié le 20 février 2018 et de la déclaration de la société [5] établie le 23 février 2018, la caisse primaire d'assurance maladie a notifié le 27 février 2018 à l'employeur sa décision de reconnaissance du caractère professionnel du sinistre, tout en précisant dans son courrier « En effet, vous avez été informé du fait qu'une instruction contradictoire avait été menée par questionnaire et/ou enquête. Les éléments recueillis permettent d'établir que l'accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail conformément aux conditions posées par l'article L411-1 du code de la sécurité sociale ». Y étaient également précisées, les voies de recours ouvertes à la société [5].

En premier lieu, la cour rappelle que l'obligation d'information de l'employeur incombant à la caisse, et issue des dispositions de l'article R441-14 du code de la sécurité sociale est applicable uniquement dans les cas prévus au premier alinéa de l'article R 441-11 ancien à savoir en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle estime nécessaire de procéder à une enquête étant précisé que l'enquête est obligatoire en cas de décès.

Il est constant qu'en l'espèce, l'employeur n'avait formulé aucune réserve lors de l'établissement de sa déclaration d'accident du travail, le 23 février 2018.

Il en résulte au regard des textes précités, que la caisse n'avait donc aucune obligation de procéder a une enquête.

En second, lieu, force est de constater au regard des pièces versées de part et d'autre aux débats que la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a bien rendu sa décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle avant l'expiration du délai de trente jours à l'issu duquel, à défaut de toute précision sollicitée ou enquête supplémentaire, le caractère de l'accident est reconnu.

A ce titre il sera rappelé que dans ses conclusions, la société [5] indique bien qu'elle a sollicité la communication de la décision incriminée, sans pour autant préciser la date à laquelle elle a saisi l'organisme de sécurité sociale et que celle-ci ne lui est parvenue que le 26 mars 2018, mettant ainsi en doute le respect du délai de 30 jours imposé à la caisse.

La cour relève que la société [5] ne démontre par aucune pièce que la caisse aurait, ultérieurement à la notification litigieuse, procédé à une instruction ou à l'envoi du questionnaire habituel, ni même qu'elle se serait fondée sur tout autre élément hors déclaration d'accident du travail et certificat médical initial pour statuer sur la prise en charge de l'accident.

Il en résulte que si la caisse a bien commis une erreur dans le choix de son formulaire de notification, celle-ci fût-t-elle regrettable, pour autant, cette erreur purement matérielle n'a eu aucune conséquence préjudiciable pour la société [5].

Il s'ensuit que la société [5] ne saurait valablement se prévaloir de l'inopposabilité de la prise en charge de l'accident pour violation du contradictoire, dès lors qu'en réalité, aucune mesure d'instruction n'a été diligentée par la caisse et ce malgré l'information erronée mentionnée dans sa notification du 27 février 2018 et qu'elle échoue à démontrer que cette erreur lui aurait porté grief.

La caisse n'a donc pas manqué à son obligation d'information à l'égard de la société [5].

La décision de prise en charge de l'accident dont M. [V] [G] a été victime le 20 février 2018 à 23h30 est donc opposable à la société [5]. Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé de ce chef.

S'agissant de l'imputabilité des arrêts de travail de M. [V] [G] au sinistre du 20 février 2018 :

A titre subsidiaire si le jugement du 3 décembre 2020 devait être infirmé quant à l'inopposabilité de la décision de prise en charge du sinistre du 20 février 2018, la societé [5] demande à ce que certains arrêts de travail de son salarié ne soient pas imputés sur son compte employeur. Elle fait valoir qu'il existe des incohérences dans les dates du sinistre et que cinquante jours d'arrêts de travail sur un total de 145 jours ne peuvent de ce fait lui être imputés. Elle estime les explications de la caisse à ce sujet sont totalement hypothétiques et que cette dernière n'établit aucunement la preuve que les dates erronées concernant l'accident du travail sont des erreurs de plume et que les médecins prescripteurs voulaient faire référence à l'accident du 20 février 2018.

La caisse soutient à ce sujet que la présomption d'imputabilité des lésions au travail couvre l'ensemble des prestations servies jusqu'à la date de guérison ou de consolidation. Elle rappelle que la victime a bénéficié d'arrêts de travail du 21 février au 15 juillet 2018, date à laquelle l'intéressé a été déclaré guéri. Elle indique verser aux débats le relevé des indemnités journalières démontrant que les arrêts de travail observés par son assuré à la suite de son accident ont été prolongés de manière continue jusqu'à la date de consolidation. Elle rappelle que les seules incohérences liées à une erreur de date du sinistre ne saurait emporter la conviction de la cour aux fins de déclarer non imputable l'ensemble des soins et arrêts de travail sur le compte employeur de l'intimée.

***

Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Ce texte établit une présomption d'imputabilité au travail d'un accident à la condition que soit établie l'existence d'un événement survenu au lieu et au temps du travail et dont il est résulté une lésion corporelle.

Par ailleurs, il résulte d'une jurisprudence bien établie que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de la victime et s'applique également aux lésions nouvelles apparues dans les suites de l'accident, dès lors qu'il existe une continuité des symptômes et des soins.

Il appartient à l'employeur de renverser cette présomption et de rapporter la preuve contraire en démontrant que les lésions, soins et arrêts de travail litigieux ont, en totalité ou pour partie, une cause totalement étrangère au travail.

Les divers certificats médicaux de prolongation d'arrêt de travail ou de prescription de soins ont mentionné des lésions au poignet de la victime.

Pour rapporter la preuve qui lui incombe de ce que les lésions, soins et arrêts de travail litigieux ont, en totalité ou pour partie, une cause totalement étrangère au travail, la société [5] fait état de ce que quatre certificats médicaux comportent une erreur de date à savoir, celui du 21 février 2018, du 27 février 2018, du 26 mars 2018, et enfin du 18 juin 2018 s'agissant plus précisément de la date du sinistre, tantôt indiquée comme étant du 21 février 2018 ou du 22 février 2018.

Il est constant que l'accident a eu lieu le 20 février 2018 à 23h30 et que la victime a été transportée par le Smur à l'hôpital. Il est donc admis que les premières constatations médicales et documents qui ont été établis n'ont pu l'être que dans la nuit, soit le lendemain 21 février 2018.

Il n'en demeure pas moins que les lésions décrites dans ces certificats sont cohérentes avec le sinistre déclaré le 20 février 2018. De plus, la cour observe que la caisse a produit une copie d'écran du dossier informatique de M. [V] [G] qui montre bien qu'il n'existe aucun autre accident du travail au cours de la période considérée, de sorte qu'aucune confusion ne s'avère être possible quant à l'imputabilité des arrêts de travail prescrits au titre du sinistre du 20 février 2018.

Les éléments ainsi avancés par la société [5] sont à eux seuls insuffisants à rapporter la preuve ou à tout le moins un commencement de preuve, d'une cause totalement étrangère au travail de tout ou partie des lésions, soins et arrêts de travail présumés imputés à l'accident de travail du 20 février 2018.

En conséquence, c'est à bon droit que la caisse a pris en charge ces arrêts maladie qui devront être intégralement imputés au compte employeur pour l'ensemble de la période considérée soit du 21 février 2018 au 17 juillet 2018. La société [5] sera en conséquence déboutée de sa demande.

Sur le surplus :

Succombant en ses prétentions, la société [5] sera condamnée aux dépens engagés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DÉCLARE l'appel recevable ;

DIT n'y avoir lieu à écarter les conclusions de la caisse datées du 9 janvier 2023 et sa pièce 8 ;

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 3 décembre 2020 enregistré au pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse sous RG 20/717 sauf en ce qu'il a déclaré le recours introduit par la société [5] recevable ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

DÉCLARE la décision du 27 février 2018 de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu le 20 février 2018 à M. [V] [G] et des arrêts de travail et soins qui en sont la suite pour la période du 21 février 2018 au 17 juillet 2018 opposable à la société [5]  ;

CONDAMNE la société [5] au paiement des dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier Pour le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 sb
Numéro d'arrêt : 21/00023
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-16;21.00023 ?
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