COUR D'APPEL DE COLMAR
Chambre 6 (Etrangers)
N° RG 23/00497 - N° Portalis DBVW-V-B7H-IAA6
N° de minute : 42/2023
ORDONNANCE
Nous, Catherine DAYRE, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Nadine FRICKERT, greffier ;
Dans l'affaire concernant :
M. [N] [V] [Z]
né le 06 Octobre 1966 à [Localité 2] (REPUBLIQUE POPULAIRE), de nationalité chinoise
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]
VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1, R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;
VU le jugement rendu le 10 novembre 2021 par le tribunal correctionnel de Besançons prononçant à l'encontre de M. [N] [V] [Z] une interdiction définitive du territoire français à titre de peine complémentaire ;
VU la décision de placement en rétention administrative prise le 6 décembre 2022 par LE PREFET DE L'YONNE à l'encontre de M. [N] [V] [Z], notifiée à l'intéressé le même jour à 09 h 05 ;
VU l'ordonnance rendue le 08 décembre 2022 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG prolongeant la rétention administrative de M. [N] [V] [Z] pour une durée de vingt huit jours à compter du 08 décembre 2022 à 09 h 05, décision confirmée par le premier président de la Cour d'Appel de Colmar le 09 décembre 2022 ;
VU l'ordonnance rendue le 05 janvier 2023 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG prolongeant la rétention administrative de M. [N] [V] [Z] pour une durée de trente jours à compter du 05 janvier 2023 à 09 h 05, décision confirmée par le premier président de la Cour d'Appel de Colmar le 06 janvier 2023 ;
VU la requête de M. LE PREFET DE L'YONNE datée du 03 février 2023, reçue et enregistrée le même jour à 11 h 56 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de quinze jours supplémentaires de M. [N] [V] [Z] ;
VU l'ordonnance rendue le 04 Février 2023 à 11 h 10 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarant la requête de M. LE PREFET DE L'YONNE recevable et la procédure régulière, et ordonnant la prolongation de la rétention de M. [N] [V] [Z] au centre de rétention de Geispolsheim, ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de quinze jours supplémentaires à compter du 4 février 2023 à 09 h 05 ;
VU l'appel de cette ordonnance interjeté par M. [N] [V] [Z] par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 04 Février 2023 à 09 h 55 ;
VU la proposition de LE PREFET DE L'YONNE par voie électronique reçue le 06 février 2023 afin que l'audience se tienne par visioconférence ;
VU les avis d'audience délivrés le 6 février 2023 à l'intéressé, à Maître Raphaël REINS, avocat de permanence, à Monsieur [P] [Y], interprète en langue mandarin assermenté, à M. LE PREFET DE L'YONNE et à M. Le Procureur Général ;
Le représentant de M. LE PREFET DE L'YONNE, intimé, dûment informé de l'heure de l'audience par courrier électronique du 06 février 2023, n'a pas comparu, mais a fait parvenir des conclusions en date du 06 février 2023, qui ont été communiquées au conseil de la personne retenue.
Après avoir entendu M. [N] [V] [Z] en ses déclarations par visioconférence et par l'intermédiaire de Monsieur [P] [Y], interprète en langue mandarin assermenté, Maître Raphaël REINS, avocat au barreau de COLMAR, commis d'office, en ses observations pour le retenu, et à nouveau l'appelant qui a eu la parole en dernier.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Le juge des libertés et de la détention de Strasbourg, par ordonnance du 4 février 2023, a ordonné la troisième prolongation de la rétention administrative de Monsieur [N] [V] [Z].
Pour statuer ainsi, le juge des libertés et de la détention a énoncé que Monsieur [N] [V] [Z] avait fait obstruction à son éloignement, qui devait être réalisé le 26 janvier 2023, en refusant de se soumettre au test PCR et que dès lors, la troisième prolongation de sa rétention administrative était justifiée sur le fondement de l'article L742-5 1°.
A l'audience, à laquelle il a comparu assisté de son conseil, Monsieur [N] [V] [Z] a repris oralement ses conclusions visant à l'infirmation de l'ordonnance et à sa remise en liberté.
A l'appui , faisant valoir que les nouveaux moyens soulevés étaient recevables en application des articles 563 et 564 du code de procédure civile, il a soulevé l'irrégularité de la requête en prolongation de sa rétention administrative, rappelant que le juge doit vérifier la compétence du signataire de la requête en prolongation mais également qu'il est effectivement fait mention des éventuels empêchements des délégataires de signature.
Il a ajouté qu'il ne pouvait repartir en Chine où sa vie était menacée par les mafias. Il a précisé avoir régularisé une demande d'asile qui était en cours d'examen. Il a reconnu avoir refusé d'embarquer lors des vols réservés en vue de son éloignement.
Le préfet de l'Yonne a conclu à la confirmation de l'ordonnance déférée.
Il a rappelé que par décision 15-28795 du 13 juillet 2016, la Cour de cassation a pu constater que la présentation des parties est facultative et que le préfet peut utilement faire valoir son argumentation par un jeu d'écritures.
Il fait valoir que les nouveaux moyens ne peuvent être soulevés que dans le délai d'appel et que les exceptions de procédure ne sont recevables qu'en tant qu'elles ont été soulevées in limine litis devant le premier juge.
Sur l'irrégularié, tirée de l'incompétence du signataire de la requête, il a indiqué que ce moyen n'avait pas été soulevé en première instance et était donc irrecevable sur le fondement de l'article L 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'au surplus la délégation de signature a pourtant été produite devant le juge des libertés et de la détention et permettait d'établir que le signataire avait compétence pour saisir le le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la rétention; que la question de l'empêchement du Préfet et des personnes placées sous son autorité était inopérante ; que la signature du délégataire emporte preuve d'indisponibilité des signataires de premier rang.
Sur quoi
Sur la recevabilité de l'appel
L'appel de Monsieur [N] [V] [Z], à l'encontre de l'ordonnance rendue le 4 février 2023 à 11h10 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, interjeté le 6 février 2023 à 9h44, est recevable pour avoir été formé dans le délai prévu a l'article R 743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, régulièrement prorogé en application de l'article 642 du code de procédure civile
.
Sur la régularité de la requête
Aux termes de l' article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l'acte le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice et, en vertu de l'article 118 du même code, elle peut être proposée en tout état de cause, y compris à hauteur d'appel.
Il convient donc d'examiner cette demande, même si elle n'a pas été invoquée devant le premier juge.
En application de l'article R743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le juge a l'obligation de vérifier la compétence du signataire de la requête.
En l'espèce, la requête en prolongation de la rétention administrative a été signée par Madame [E] [K], laquelle est expressément déléguée pour présenter les requêtes en saisine du juge des libertés et de la détention, aux termes de l'arrêté préfectoral portant délégation, en date du 4 avril 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs.
La preuve, par le préfet , de l'indisponibilité des signataires de premier rang n'est pas exigée par le texte et la signature du délégataire emporte preuve de leur empêchement.
Il s'ensuit que l'irrégularité soulevée n'est pas fondée.
Sur le fond
La cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents, qu'il convient d'adopter, que le premier juge a ordonné la troisième prolongation de la rétention administrative sur le fondement de l'article L742-5 1°, sans qu'il soit nécessaire d'apporter quelque observation complémentaire; qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer l'ordonnance querellée.
PAR CES MOTIFS :
DÉCLARONS l'appel de M. [N] [V] [Z] recevable en la forme ;
au fond, le REJETONS ;
CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg le 04 Février 2023 ;
RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention :
- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin,
- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;
DISONS avoir informé M. [N] [V] [Z] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.
Prononcé à Colmar, en audience publique, le 06 Février 2023 à 15 h 03, en présence de
- l'intéressé par visio-conférence
- Maître Raphaël REINS, conseil de M. [N] [V] [Z]
- de l'interprète, lequel a traduit la présente décision à l'intéressé lors de son prononcé.
Le greffier, Le président,
reçu notification et copie de la présente,
le 06 Février 2023 à 15 h 03
l'avocat de l'intéressé
Maître Raphaël REINS
Présent
l'intéressé
M. [N] [V] [Z]
né le 06 Octobre 1966 à [Localité 2] (REPUBLIQUE POPULAIRE)
Comparant par visioconférence
l'interprète
M. [P] [Y]
l'avocat de la préfecture
Non comparant
EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,
- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,
- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,
- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,
- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,
- ledit pourvoi n'est pas suspensif.
La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :
- au CRA de [Localité 1] pour notification à M. [N] [V] [Z]
- à Maître Raphaël REINS
- à M. LE PREFET DE L'YONNE
- à la SELARL CENTAURE AVOCATS
- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.
Le Greffier
M. [N] [V] [Z] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance
le À heures
Signature de l'intéressé