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02/02/2023 | FRANCE | N°23/00449

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 6 (etrangers), 02 février 2023, 23/00449


COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)





N° RG 23/00449 - N° Portalis DBVW-V-B7H-H76I

N° de minute : 39/2023





ORDONNANCE





Nous, Anne GALLIATH, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Nadine FRICKERT, greffier ;





Dans l'affaire concernant :



M. X se disant [E] [O], né le 25 mai 2003 à [Localité 2] (TUNISIE), de nationalité tunisienne



Actuellement retenu au centre de rétention de [Local

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VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.75...

COUR D'APPEL DE COLMAR

Chambre 6 (Etrangers)

N° RG 23/00449 - N° Portalis DBVW-V-B7H-H76I

N° de minute : 39/2023

ORDONNANCE

Nous, Anne GALLIATH, Conseiller à la Cour d'Appel de Colmar, agissant par délégation de la première présidente, assistée de Nadine FRICKERT, greffier ;

Dans l'affaire concernant :

M. X se disant [E] [O], né le 25 mai 2003 à [Localité 2] (TUNISIE), de nationalité tunisienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]

VU les articles L.141-2 et L.141-3, L.251-1 à L.261-1, L.611-1 à L.614-19, L.711-2, L.721-3 à L.722-8, L.732-8 à L.733-16, L.741-1 à L.744-17, L.751-9 à L.754-1, L761-8, R.741-1,R743-12 et suivantts R.744-16, R.761-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile (CESEDA) ;

VU le jugement rendu le 8 novembre 2021 par le tribunal correctionnel de STRASBOURG prononçant à l'encontre de M. X se disant [E] [O] une interdiction du territoire français pour une durée de cinq ans, à titre de peine complémentaire ;

VU la décision de placement en rétention administrative prise le 02 décembre 2022 par la Préfète du Bas-Rhin à l'encontre de M. X se disant [E] [O], notifiée à l'intéressé le même jour à 09 h 59 ;

VU l'ordonnance rendue le 04 décembre 2022 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG prolongeant la rétention administrative de M. X se disant [E] [O] pour une durée de vingt huit jours à compter du 04 décembre 2022 à 09 h 59, décision confirmée par le premier président de la Cour d'Appel de Colmar le 06 décembre 2022 ;

VU l'ordonnance rendue le 02 janvier 2023 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG prolongeant la rétention administrative de M. X se disant [E] [O] pour une durée de trente jours à compter du 1er janvier 2023 à 09 h 59, décision confirmée par le premier président de la Cour d'Appel de Colmar le 04 janvier 2023 ;

VU la requête de Madame La Préfète du Bas-Rhin datée du 31 janvier 2023, reçue et enregistrée le même jour à 08 h 37 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de quinze jours supplémentaires, à compter du 31 janvier 2023 à 09 h 59 de M. X se disant [E] [O] ;

VU l'ordonnance rendue le 1er février 2023 à 10 h 46 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg, déclarant la requête de Madame LA PREFETE DU BAS-RHIN recevable et la procédure régulière, rejetant la demande de troisième prolongation du maintien de M. X se disant [E] [O] en rétention et ordonnant sa remise en liberté à l'issue des formalités administratives au centre de rétention de Geispolsheim permettant à l'intéressé de récupérer ses affaires personnelles et à l'expiration du délai de dix heures à compter de la notification de la décision au procureur de la République par application de l'article L.743-19 du CESEDA ;

VU l'appel de cette ordonnance interjeté par MME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE DE STRASBOURG par voie électronique reçue au greffe de la Cour le 1er février 2023 à 13 h 14 et la demande aux fins de déclarer cet appel suspensif conformément à l'article L552-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

ATTENDU qu'aucune des parties n'a fait d'observations dans le délai imparti ;

VU l'ordonnance rendue le 1er février 2023 à 15 h 40 faisant droit à la demande de Madame la Procureure de la République de Strasbourg aux fins de voir déclarer son appel suspensif et notifiée régulièrement aux parties ;

VU la déclaration d'appel de la préfecture du Bas-Rhin en date du 1er février 2023 à 19 h 01 ;

VU la proposition de la préfecture de la Préfète du Bas-Rhin par voie électronique reçue le 2 février 2023 afin que l'audience se tienne par visioconférence ;

Le représentant de Madame LA PREFETE DU BAS-RHIN, appelante, dûment informé de l'heure de l'audience, n'a pas comparu mais maintient les termes de sa déclaration d'appel confirmé par voie électronique en date du 2 février 2023.

Après avoir entendu M. X se disant [E] [O] en ses déclarations par visioconférence et Maître Valérie PRIEUR, avocat au barreau de COLMAR, commise d'office, en ses observations pour le retenu.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel suspensif interjeté par le procureur de la République le 1er février 2023 (à 12h42), par déclaration écrite et motivée, à l'encontre de l'ordonnance rendue le même jour (à 10h46) par le juge des libertés et de la détention de Strasbourg, dans le délai prévu à l'article R. 743-10 du CESEDA, est recevable.

L'appel interjeté par la préfecture le 1er février 2023 (à 19h01), par déclaration écrite et motivée, à l'encontre de l'ordonnance rendue le même jour (à 10h46) par le juge des libertés et de la détention de Strasbourg, dans le délai prévu à l'article R. 743-10 du CESEDA, est recevable.

Sur l'appel

Le procureur de la République et la préfecture ont interjeté appel de l'ordonnance du 1er février 2023 du juge des libertés et de la détention de Strasbourg rejetant la requête en troisième prolongation de la rétention de Monsieur X se disant [E] [O] pour une durée de 15 jours.

Par ordonnance du 1er février 2023, la cour d'appel a ordonné la suspension des effets de l'ordonnance rendue le 1er février 2023 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg jusqu'à l'audience au fond.

Le Procureur de la République fait valoir que les mensonges de l'étranger sur son identité constituent le comportement d'obstruction visé à l'article L.742-5 du CESEDA. Il estime que le juge des libertés et de la détention, qui a relevé le comportement d'obstruction de l'intéressé, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ne pouvait pas supposer qu'il n'existait pas de perspective d'éloignement alors qu'à l'audience la préfecture avait indiqué solliciter rapidement les autorités algériennes.

La préfecture soutient que l'utilisation frauduleuse d'une fausse identité à de nombreuses reprises et de manière constante s'analyse comme une obstruction continue à la mesure d'éloignement et que l'article L.742-5 du CESEDA n'exige pas de l'administration d'apporter la preuve de dilligences complémentaires accomplies pour justifier une troisième prolongation.

En application des dispositions de l'article L.742-5 du CESEDA, 'à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes 'apparaît' dans les quinze derniers jours :

1°L'étranger a fait obstruction d'office à la décision d'éloignement ;

2°L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L.611-3 ou du 5° de l'article L.631-3 ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pas pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.'

Selon un arrêt de la cour de cassation du 13 octobre 2022 (n°22/00585), il appartient au juge judiciaire d'apprécier concrètement au regard des données de chaque situation à la date où il statue, si la mesure de rétention et sa poursuite sont justifiées par des perspectives raisonnables de mise à exécution de la mesure d'éloignement, étant précisé que ces perspectives doivent s'entendre comme celles qui peuvent être réalisées dans le délai maximal de la rétention, soit 90 jours.

Par ailleurs, en application de l'article L.741-3 du CESEDA, un étranger ne peut être placé en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ et l'administration doit exercer toute dilligence à cet effet.

En l'espèce, Monsieur X se disant M. [E] [O] a été placé en rétention administrative le 2 décembre 2022 en exécution d'une interdiction du territoire français pour une une durée de 5 ans prononcée à titre de peine complémentaire par le tribunal correctionnel de Strasbourg le 8 novembre 2021.

Sa rétention administrative a régulièrement été prolongée par deux ordonnances du juge des libertés et de la détention de Strasbourg du 4 décembre 2022 et du 2 janvier 2023 confirmées par des ordonnances de la cour d'appel de Colmar des 5 décembre 2022 et 4 janvier 2023.

Monsieur X se disant M. [E] [O] est démuni de tout document d'identité.

S'il a déclaré à tous les stades de la procédure être de nationalité tunisienne, les autorités tunisiennes ont informé l'administration le 27 janvier 2023 qu'elles ne le reconnaissaient pas comme l'un de leurs ressortissants.

Il revendique donc frauduleusement la nationalité tunisienne, et ce, encore à l'audience du juge des libertés et de la détention, afin de ralentir les opérations de reconnaissance consulaire et la procédure d'éloignement.

La réponse des autorités tunisiennes étant très récente, la préfecture a indiqué à l'audience qu'elle saisira rapidement les autorités algériennes.

Dès lors, il convient de relever une obstruction volontaire de la part de Monsieur X se disant M. [E] [O] à l'exécution de la mesure d'éloignement, y compris dans les 15 derniers jours, en persistant à déclarer à ses divers interlocuteurs une nationalité qui n'est manifestement pas la bonne, dans le dessin de rendre inopérantes ou retarder les démarches administratives, ce qui est un des critères visés à l'article L 742-5 du CESEDA permettant une nouvelle prolongation.

Par ailleurs, la préfecture a indiqué à l'audience du juge des libertés et de la détention qu'elle saisira rapidement les autorités consulaires algériennes. Il ne peut être présumé des décisions à venir des autorités consulaires algériennes pour considérer une absence de perspective d'éloignement, un éloignement dans un délai compatible avec le seuil maximum de rétention de 90 jours, étant encore possible.

Dans ces conditions, il y a lieu de d'infirmer l'ordonnance déférée, de faire droit à la requête en troisième prolongation de la préfecture et d'ordonner la prolongation de la rétention de Monsieur X se disant M. [E] [O] pour une durée de 15 jours à compter du 31 janvier 2023 à 9h59.

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARONS l'appel de MME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE DE STRASBOURG recevable en la forme ;

DÉCLARONS l'appel de MME LA PREFETE DU BAS-RHIN recevable en la forme ;

au fond, y faisant droit ;

INFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge de la liberté et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg le 1er février 2023 ;

et statuant à nouveau,

ORDONNONS la prolongation de la rétention de M. X se disant [E] [O] au centre de rétention administrative de [Localité 1], ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de quinze jours supplémentaires à compter du 31 janvier 2023 à 09 h 59 ;

RAPPELONS à l'intéressé les droits qui lui sont renconnus pendant la rétention :

- il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil ainsi que d'un médecin

- il peut communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix

DISONS avoir informé M. X se disant [E] [O] des possibilités et délais de recours contre les décisions le concernant.

Prononcé à Colmar, en audience publique, le 02 Février 2023 à 14 h 55, en présence de

- l'intéressé par visio-conférence

- Maître Valérie PRIEUR, conseil de M. X se disant [E] [O]

Le greffier, Le président,

reçu notification et copie de la présente,

le 02 Février 2023 à 14 h 55

l'avocat de l'intéressé

Maître Valérie PRIEUR

Présente

l'intéressé

M. X se disant [E] [O]

né le 25 mai 2003 à [Localité 2] (TUNISIE)

Comparant par visioconférence

l'interprète

./.

l'avocat de la préfecture

Non comparant

EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

- pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition,

- le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou en rétention et au ministère public,

- le délai du pourvoi en cassation est de deux mois à compter du jour de la notification de la décision, ce délai étant augmenté de deux mois lorsque l'auteur du pourvoi demeure à l'étranger,

- le pourvoi en cassation doit être formé par déclaration au Greffe de la Cour de cassation qui doit être obligatoirement faite par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation,

- l'auteur d'un pourvoi abusif ou dilatoire peut être condamné à une amende civile,

- ledit pourvoi n'est pas suspensif.

La présente ordonnance a été, ce jour, communiquée :

- au CRA de [Localité 1] pour notification à M. X se disant [E] [O]

- à Maître Valérie PRIEUR, conseil de M. X se disant [E] [O]

- à MME LA PREFETE DU BAS-RHIN

- à MME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE DE STRASBOURG

- à M. Le Procureur Général près la Cour de ce siège.

Le Greffier

M. X se disant [E] [O] reconnaît avoir reçu notification de la présente ordonnance

le À heures

Signature de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 6 (etrangers)
Numéro d'arrêt : 23/00449
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;23.00449 ?
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