MINUTE N° 23/83
NOTIFICATION :
Copie aux parties
Clause exécutoire aux :
- avocats
- parties non représentées
Le
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB
ARRET DU 26 Janvier 2023
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/03524 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HOBS
Décision déférée à la Cour : 29 Octobre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE
APPELANTE :
URSSAF D'ALSACE
[Adresse 6]
[Localité 2]
Comparante en la personne de Mme [X] [C], munie d'un pouvoir
INTIMEE :
S.A.S. [3]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Grégory KUZMA, avocat au barreau de LYON, substitué par Me BELKORCHIA, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme GREWEY, Conseiller
M. LAETHIER, Vice-Président placé
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
FAITS ET PROCÉDURE
Par courrier du 15 février 2018, la SAS [3], entreprise spécialisée dans les activités des agences de travail temporaire, a adressé à l'URSSAF une demande d'avis de crédit relatif aux cotisations suite au décompte de ses effectifs au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017.
L'URSSAF a procédé aux remboursements sollicités en précisant qu'elle se réservait le droit de procéder à tout contrôle afin de vérifier les éléments déclarés.
À la suite d'un contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance-chômage et de garantie des salaires ayant porté sur la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018 pour ses établissements de personnel permanent et de personnel temporaire de [Localité 4] et de [Localité 5], l'URSSAF d'Alsace a adressé à la société par actions simplifiée [3] une lettre d'observations du 25 février 2019 portant sur plusieurs chefs de redressement, duquel est résulté un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance-chômage et d'AGS d'un montant total de 14.874 euros pour son établissement de [Localité 5] et 6.936 euros pour son établissement de [Localité 4].
Par lettre du 25 mars 2019, la société [3] a fait valoir ses observations.
L'URSSAF d'Alsace a maintenu les redressements opérés selon un courrier du 9 avril 2019, puis a réclamé le paiement des cotisations sociales et contributions de sécurité sociale par deux mises en demeure du 7 juin 2019 pour la somme totale de 16.420 euros, majorations de retard incluses, s'agissant de l'établissement de [Localité 5] et pour un montant total de 7.657 euros, majorations de retard incluses, s'agissant de l'établissement de [Localité 4].
Par courrier du 31 juillet 2019, la société a saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF d'Alsace qui, par deux décisions du 7 octobre 2019 notifiées par courrier en date du 16 octobre 2019, a rejeté la requête de la société et a confirmé le redressement au titre de la réduction forfaitaire patronale TEPA.
Le 6 décembre 2019, la société [3] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Mulhouse d'un recours à l'encontre des deux décisions explicites de rejet de la commission de recours amiable.
Vu l'appel interjeté par l'URSSAF d'Alsace le 19 novembre 2020 à l'encontre du jugement du 29 octobre 2020 rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse, auquel le contentieux a été transféré qui, dans l'instance l'opposant à la société [3], a déclaré le recours de la SAS [3] contre les deux décisions de la commission de recours amiable du 7 octobre 2019 recevable, a annulé le redressement opéré par l'URSSAF d'Alsace notifié à la société selon lettre d'observations du 25 février 2019 et mises en demeure du 7 juin 2019 pour un montant de 16.420 euros pour son établissement de Mulhouse et un montant de 7.657 euros pour son établissement de Colmar et a condamné l'URSSAF d'Alsace aux dépens ;
Vu les conclusions visées le 23 décembre 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles l'URSSAF d'Alsace demande à la cour de :
. confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté l'absence d'accord tacite,
. infirmer ledit jugement en ce qu'il a annulé le redressement opéré par l'URSSAF d'Alsace et notifié à la SAS [3] selon lettre d'observations du 25 février 2019 et mises en demeure du 7 juin 2019,
. à titre principal, constater que la procédure de contrôle et les mises en demeure du 7 juin 2019 sont régulières,
. constater l'absence d'accord tacite,
. confirmer le bien fondé des redressements opérés au titre de la déduction forfaitaire patronale TEPA, à hauteur de 14.874 euros en cotisations pour l'établissement de [Localité 5] et 6.936 euros en cotisations pour l'établissement de [Localité 4],
. rejeter la demande de constat de l'opposabilité de la circulaire du 1er octobre 2007,
. rejeter la demande de remboursement pour un montant total de 21.810 euros en cotisations,
. valider les mises en demeure du 7 juin 2019 pour l'établissement de [Localité 5] pour un montant total de 16.420 euros soit 14.874 euros en cotisations et 1.546 euros en majorations de retard et pour l'établissement de [Localité 4] pour un montant total de 7.657 euros soit 6.936 euros en cotisations et 721 euros en majorations de retard,
. confirmer les décisions de la commission de recours amiable du 16 février 2019 (en réalité du 7 octobre 2019),
. constater que la société [3] s'est acquittée des montants en cotisations, ainsi que d'une partie des majorations de retard réclamées par le biais des mises en demeure du 7 juin 2019 et a bénéficié d'une remise partielle des majorations de retard, de sorte que les mises en demeure du 7 juin 2019 sont désormais soldées,
. rejeter toute autre demande comme mal fondée ;
Vu les conclusions visées le 10 août 2021, reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la SAS [3] demande à la cour de :
. confirmer en toutes ses dispositions le jugement querellé,
A titre principal,
. juger le recours formé par la société recevable,
. constater que la procédure de redressement diligentée par l'URSSAF est affectée d'irrégularités,
. juger en conséquence que la procédure de recouvrement et les redressements y afférents sont nuls,
A titre subsidiaire,
. constater que la circulaire du 1er octobre 2007 apporte une précision indispensable à l'application de l'article D241-26 du code de la sécurité sociale pour rendre possible le décompte des effectifs en matière de réduction générale et de déduction forfaitaire TEPA et dire et juger que cet article doit nécessairement s'interpréter à la lumière de cette circulaire de sorte que seuls les salariés sous contrat de travail le dernier jour de chaque mois doivent être pris en compte pour la détermination de l'effectif mensuel,
. constater que l'URSSAF a procédé à une application erronée des règles de décompte des effectifs,
. dire et juger que le redressement notifié par l'URSSAF est infondé,
. condamner l'URSSAF au versement de la somme de 21.810 euros à titre de remboursement des cotisations sociales TEPA,
A titre subsidiaire sur l'opposabilité de la circulaire du 1er octobre 2007,
. constater que la société est fondée à se prévaloir de l'interprétation de la circulaire du 1er octobre 2007 pour faire échec aux redressements notifiés par mises en demeure du 7 juin 2019,
En tout état de cause,
. constater que l'article L243-6-2 du code de la sécurité sociale est applicable à l'instance en cours de sorte que la circulaire du 1er octobre 2007 est pleinement opposable à l'administration,
. en conséquence, dire et juger que la société est parfaitement fondée à se prévaloir d'une circulaire opposable pour faire échec au redressement notifié par l'URSSAF.
Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions ;
MOTIFS
Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.
A titre liminaire, la cour constate que la société intimée a renoncé dans ses dernières conclusions à contester le jugement dont appel en ce qu'il a considéré que la SAS [3] ne peut se prévaloir de l'existence d'un accord tacite pour s'opposer au redressement objet du litige.
Sur la régularité de la procédure de contrôle
Aux termes de l'article R243-59, I, du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la date du contrôle litigieux, tout contrôle effectué en application de l'article L243-7 du même code est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l'agent chargé du contrôle, de l'envoi par l'organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d'un avis de contrôle.
Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l'avis de contrôle est adressé à l'attention de son représentant légal et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou le cas échéant à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Lorsque la personne contrôlée est une personne physique, il est adressé à son domicile ou à défaut à son adresse professionnelle, telles que ces informations ont été préalablement déclarées.
Sauf précision contraire, cet avis vaut pour l'ensemble des établissements de la personne contrôlée.
Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé « Charte du cotisant contrôlé » présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle.
Selon l'article R243-59, III, du même code, à l'issue du contrôle ou lorsqu'un constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L8271-6-4 du code du travail afin qu'il soit procédé à un redressement des cotisations et contributions dues, les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux ou par d'autres agents mentionnés à l'article L8271-1-2 du code du travail, le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci.
Sur la communication de la Charte du cotisant contrôlé
La société [3] reproche à l'URSSAF d'avoir indiqué dans son avis de contrôle un lien 'URL' d'accès à la charte du cotisant contrôlé depuis le site d'accueil de l'URSSAF (http://www.urssaf.fr) et non de lui avoir communiqué une adresse électronique précise qui lui aurait permis de consulter cette Charte de manière directe en s'évitant de « fastidieuses recherches ».
L'URSSAF fait grief au jugement entrepris d'avoir considéré que l'adresse électronique mentionnée sur l'avis de contrôle ne permet pas l'accès direct, ni même indirect, à la Charte du cotisant contrôlé.
Elle considère que l'obligation de remise de cette Charte est interprétée de manière souple par la Cour de cassation comme étant une obligation devant permettre son accès au cotisant.
La cour constate que l'avis de contrôle du 27 novembre 2018 adressé à la société indique : « Je vous informe qu'un document intitulé ''Charte du cotisant contrôlé'', dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable sur le site http://www.urssaf.fr. A votre demande, cette charte peut vous être adressée. Ce document vous présente la procédure de contrôle et les droits dont vous disposez pendant son déroulement, tels qu'ils sont définis par le code de la sécurité sociale » (pièce n°6 de l'appelante).
Il est dès lors justifié par l'URSSAF que l'avis de contrôle fait état de l'existence d'un document intitulé « Charte du cotisant contrôlé », de la disponibilité de sa consultation sur le site internet de l'URSSAF et de la possibilité pour la cotisante de se faire adresser ce document sur demande.
Contrairement aux considérations des premiers juges, la cour estime que l'adresse électronique valide communiquée par l'URSSAF permet à la cotisante de consulter effectivement ce document, fût-ce de manière indirecte en entrant les mots clés « charte du cotisant contrôlé » dans le moteur de recherche interne du site internet de l'URSSAF.
Au surplus, la société ne conteste pas qu'elle dispose d'un équipement informatique qui lui permet de consulter cette charte sur la page internet de l'URSSAF, étant encore observé que celle-ci n'a jamais fait part d'une quelconque difficulté de consultation de la Charte jusqu'à la clôture de la procédure de contrôle.
Dès lors, la société appelante ne saurait se prévaloir d'une irrégularité du contrôle à ce titre.
Par voie de conséquence, le jugement contesté sera infirmé.
Sur la motivation des mises en demeure
L'article L244-2 du code de la sécurité sociale dispose que toute action ou poursuite effectuée en application des articles L244-1, L244-6 et L244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'Etat invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée ou par tout moyen donnant date certaine à sa réception par l'employeur ou le travailleur indépendant.
Le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure mentionnés au premier alinéa doit être précis et motivé, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
L'article R244-1 du même code énonce en ses deux premiers alinéas que l'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée.
En l'espèce, l'intimée considère qu'en se contentant d'indiquer « régime général », sans détailler la nature des cotisations réclamées d'une part, et en omettant de viser les redressements en matière de FNAL et de CSG et de CRDS d'autre part, l'URSSAF a non seulement porté des mentions insuffisantes sur les deux mises en demeure mais encore a manqué à son obligation de faire connaître précisément la nature des sommes mises en recouvrement.
Elle estime que la Cour de cassation exige désormais une interprétation stricte de l'article R244-1 du code de la sécurité sociale qui impose aux URSSAF de préciser la nature exacte de l'ensemble des cotisations redressées afin d'assurer une information loyale et contradictoire du cotisant.
L'URSSAF rétorque que les mises en demeure adressées à la SAS [3] précisent en premier lieu la nature des cotisations réclamées en indiquant qu'elles sont dues au titre du régime général, en deuxième lieu le montant des cotisations et majorations de retard ainsi que la période à laquelle elles se rapportent et se réfèrent en dernier lieu expressément aux chefs de redressement communiqués à l'issue du contrôle par la lettre d'observations détaillée du 25 février 2019. L'appelante considère que, dans ces conditions, la notion de régime général mentionnée sur les mises en demeure est suffisante.
De jurisprudence constante, la mise en demeure doit permettre au destinataire de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation.
Au cas d'espèce, la cour considère que la mention « Contrôle. Chefs de redressement notifiés par lettre d'observations du 25/02/19. Article R243.59 du code de la sécurité sociale » indiquée dans les deux mises en demeure litigieuses renseigne suffisamment le cotisant sur la cause de son obligation.
S'agissant de la nature de l'obligation, chaque mise en demeure mentionne que les cotisations sont réclamées au titre du « régime général », ce qui apporte avec la lecture de la lettre d'observations afférente une indication suffisante de la nature des cotisations réclamées.
Il n'est pas exigé le détail des montants en fonction des différentes cotisations et contributions réclamées, les dispositions de l'article R244-1 du code de la sécurité sociale précité ne reprenant pas intégralement celles exigées par l'article R243-59 du même code applicable à la lettre d'observations à laquelle les deux mises en demeure litigieuses du 7 juin 2019 font expressément référence et dont elle constitue le support avant que les parties n'aient échangées des observations réciproques durant la phase contradictoire.
Concernant l'étendue de l'obligation, les mises en demeure précisent le montant des cotisations réclamées (14.874 euros de cotisations et 1.546 € euros de majorations de retard concernant l'établissement de [Localité 5] et 6.936 euros de cotisations et 721 euros de majorations de retard concernant l'établissement de [Localité 4]) ainsi que la période (010116/311216) à laquelle elles se rapportent.
Il résulte de ces éléments que les deux mises en demeure litigieuses ont permis au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation, de sorte que le moyen développé par la société appelante n'est pas fondé.
Sur le respect du principe du contradictoire
La société appelante reproche à l'URSSAF l'absence de précision quant au contenu des documents consultés par l'inspecteur, ce qu'elle estime contraire au principe du contradictoire. Elle considère qu'elle n'était pas en mesure de connaître les liens entre ces documents et les redressements prononcés.
Elle indique en outre que l'URSSAF a fait référence dans ses constatations à un audit réalisé en interne en 2017 alors que ce document n'apparaît pas dans la liste des documents consultés. Elle indique que l'organisme s'est exclusivement appuyé sur ce document pour fonder son redressement sans en informer le cotisant au cours et après le contrôle.
En réplique, l'URSSAF soutient que les dispositions de l'article R243-59 du code de la sécurité sociale n'exigent pas que la liste des documents consultés soit détaillée par chef de redressement dès lors qu'elle figure en début de la lettre d'observations.
Selon elle, la société avait une connaissance exacte des causes des redressements opérés.
Elle soutient que l'intimée dénature les termes de la lettre d'observations, l'appelante faisant valoir que les régularisations opérées sont le résultat d'une analyse exhaustive des documents comptables et sociaux communiqués par la société lors des opérations de contrôle.
Pour l'URSSAF, la référence à l'audit réalisé en 2017 n'a vocation qu'à rappeler l'existence d'une demande de remboursement formulée par la société.
Il résulte des différentes pièces versées aux débats que l'URSSAF n'a pas pris connaissance de l'audit réalisé en 2017 lors du contrôle engagé à compter du 18 décembre 2018, mais selon un courrier qui lui a été adressé par la SAS en date du 15 février 2018, soit antérieurement à l'avis de contrôle qui a été envoyé le 27 novembre 2018.
De plus, cet audit ne fait pas partie des éléments contrôlés par l'inspecteur du recouvrement, au contraire des documents sociaux de l'entreprise dont l'analyse a fait apparaître un décompte des effectifs supérieur à celui retenu par l'audit à l'origine du remboursement opéré par l'URSSAF.
Dans ces conditions, la société [3] ne saurait faire grief à l'URSSAF de ne pas avoir renseigné l'audit dans la liste des documents consultés.
Le moyen soulevé par l'intimée est dès lors inopérant.
Sur la loi TEPA : déduction forfaitaire patronale ' majorations liées à l'effectif (points n°1 et 2 de la lettre d'observations)
Aux termes de l'article D241-26 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, pour l'application de la déduction forfaitaire des cotisations patronales, l'effectif de l'entreprise est apprécié au 31 décembre, tous établissements confondus, en fonction de la moyenne, au cours de l'année civile, des effectifs déterminés chaque mois conformément aux dispositions des articles L1111-2, L1111-3 et L1251-54 du code du travail.
L'article L1251-54 du code du travail prévoit spécifiquement que, pour calculer les effectifs d'une entreprise de travail temporaire, il est tenu compte, des salariés permanents de cette entreprise, déterminés conformément à l'article L1111-2, et des salariés temporaires qui ont été liés à cette entreprise par des contrats de mission pendant une durée totale d'au moins trois mois au cours de la dernière année civile.
L'article L1111-2 du code du travail précise que les effectifs de l'entreprise sont calculés conformément aux dispositions suivantes :
1° Les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et les travailleurs à domicile sont pris intégralement en compte dans l'effectif de l'entreprise ;
2° Les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, les salariés titulaires d'un contrat de travail intermittent, les salariés mis à la disposition de l'entreprise par une entreprise extérieure qui sont présents dans les locaux de l'entreprise utilisatrice et y travaillent depuis au moins un an, ainsi que les salariés temporaires, sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise à due proportion de leur temps de présence au cours des douze mois précédents. Toutefois, les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée et les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure, y compris les salariés temporaires, sont exclus du décompte des effectifs lorsqu'ils remplacent un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu, notamment du fait d'un congé de maternité, d'un congé d'adoption ou d'un congé parental d'éducation ;
3° Les salariés à temps partiel, quelle que soit la nature de leur contrat de travail, sont pris en compte en divisant la somme totale des horaires inscrits dans leurs contrats de travail par la durée légale ou la durée conventionnelle du travail.
La circulaire DSS/5B n°2010-38 du 1er février 2010 relative aux nouvelles modalités de décompte des effectifs précise que les décrets du 23 juin 2009 simplifient et harmonisent les règles de décompte des effectifs pour l'application de la réduction Fillon, de la déduction forfaitaire des cotisations patronales pour heures supplémentaires, de l'exonération applicable aux contrats d'apprentissage, de l'assujettissement au versement transport, au FNAL supplémentaire et à la participation formation.
Elle ajoute que désormais, pour l'ensemble de ces dispositifs (avec quelques spécificités propres au versement transport), l'effectif, calculé au 31 décembre, tous établissements confondus, est égal à la moyenne des effectifs déterminés chaque mois de l'année civile. Les mois au cours desquels aucun salarié n'est employé ne sont pas pris en compte pour la détermination de cette moyenne.
Elle indique enfin que pour chacun de ces dispositifs, le calcul de l'effectif mensuel est uniformisé en se fondant sur la définition donnée par le code du travail (art. L1111-2, L1111-3 et L1251-24) et non plus sur celle donnée par le code de la sécurité sociale (art. L311-2 et L311-3).
En l'espèce, il résulte des constatations de l'inspecteur du recouvrement que l'effectif des travailleurs temporaires de la société est toujours supérieur à 20 salariés en tenant compte des salariés présents au cours d'un mois, que leur contrat soit ou non rompu le dernier jour du mois, ce qui a conduit l'URSSAF à lui refuser le bénéfice de la déduction forfaitaire TEPA sur les heures supplémentaires effectuées au cours de l'année 2016 et, en conséquence, à opérer l'annulation des déductions accordées à ce titre sur la base plafonnée.
L'URSSAF a procédé au décompte des effectifs pour l'application de la déduction forfaitaire TEPA sur la définition de l'effectif au sens du code du travail et non de la sécurité sociale, en le calculant au 31 décembre, tous établissements confondus, selon la moyenne des effectifs déterminés chaque mois de l'année civile.
La SAS [3] conteste la méthode retenue par l'URSSAF.
Elle soutient que l'article D241-26 du code de la sécurité sociale ne donnant pas de précisions quant à la détermination de l'effectif mensuel, il convient de se référer aux dispositions de la circulaire DSS/5B/2007/358 du 1er octobre 2007 selon laquelle les effectifs du mois sont déterminés compte-tenu des salariés sous contrat le dernier jour de chaque mois.
La cour constate cependant qu'aucun des textes du code du travail auxquels l'article D241-26 du code de la sécurité sociale renvoie, quelle que soit la date de la rédaction de cet article, ni les propres dispositions de cet article, ne posent la condition de ne prendre en compte dans le calcul des effectifs que les salariés sous contrat de travail au dernier jour du mois.
De plus, les règles issues du décret n°2007-1380 du 24 septembre 2007 ont été modifiées par les décrets n°2009-775 et 2009-776 du 23 juin 2009.
La société ne saurait entretenir de confusion entre, d'une part l'uniformisation réglementaire découlant des décrets du 23 juin 2009 qui se fondent sur la définition de l'effectif donnée par le code du travail et non celle donnée par le code de la sécurité sociale et, d'autre part, les modalités de décompte de l'effectif propres à chaque dispositif, entraînent-elles une complexification de leur application qui ne ressort ni de l'office de l'URSSAF, ni de celui du juge.
En effet, les deux décrets de 2009 ont eu pour effet de modifier le mode de calcul des effectifs en distinguant, d'une part celui applicable à la réduction Fillon et à la déduction forfaitaire de la loi TEPA et, d'autre part celui applicable aux autres dispositifs.
La circulaire ministérielle d'application du 1er février 2010, seule applicable au regard de la période en cause et de la nouvelle rédaction de l'article D241-26 du code de la sécurité sociale, issue du décret n°2009-776 du 23 juin 2009, au demeurant dépourvue d'effet normatif, n'évoque pas la nécessité de ne prendre en compte que les contrats existant au dernier jour du mois pour calculer la déduction de cotisations sociales au titre de la loi TEPA.
Contrairement à l'article R834-1-1 du code de la sécurité sociale relatif à l'effectif à retenir pour la cotisation FNAL, il ne résulte d'aucune disposition réglementaire du code de la sécurité sociale, ni des dispositions du code du travail susvisées, applicables au litige, que seuls les salariés sous contrat de travail au dernier jour du mois doivent être pris en compte dans le calcul des effectifs au titre de la déduction forfaitaire des cotisations patronales.
L'intimée n'est donc pas fondée à se prévaloir de l'opposabilité de la circulaire n°DSS/5B/2007/358 du 1er octobre 2007 relative à la mise en 'uvre de l'article 1er de la loi n°2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.
Enfin la société [3] entend se prévaloir des dispositions de l'article L243-6-2 du code de la sécurité sociale dans sa nouvelle version en vigueur, selon elle applicable aux instances en cours, pour en déduire que la circulaire du 1er octobre 2007 est pleinement opposable à l'administration.
L'article L243-6-2 (I) du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la loi n°2018-1203 du 22 décembre 2018, énonce que :
« I Lorsqu'un cotisant a appliqué la législation relative aux cotisations et contributions sociales selon l'interprétation admise par une circulaire ou une instruction du ministre chargé de la sécurité sociale, publiées ('), les organismes mentionnés aux articles L213-1, L225-1 et L752-4 ne peuvent demander à réaliser une rectification ou, lors d'un contrôle, procéder à aucun redressement de cotisations et contributions sociales, pour la période pendant laquelle le cotisant a appliqué l'interprétation alors en vigueur, en soutenant une interprétation différente de celle admise par l'administration ».
C'est néanmoins vainement que la société [3] se réfère à ce texte dès lors qu'elle l'invoque à l'appui d'une demande de restitution d'indu et de rectification de ses cotisations qu'elle a elle-même initiée par courrier du 15 février 2018, ce qui n'entre pas dans les prévisions du texte qui ne vise que les cas de rectification ou de redressement initié par l'organisme de recouvrement des cotisations et contributions sociales, la société ayant elle-même spontanément calculé les cotisations sociales selon les règles posées par l'article D241-26 du code de la sécurité sociale, étant encore ajouté que l'article 9 V de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 prévoit explicitement que ces dispositions s'appliquent aux cotisations et contributions dues pour les périodes courant à compter du 1er janvier 2019.
Il résulte des développements qui précèdent que pour l'application de la déduction forfaitaire TEPA au titre de l'année 2016, sont pris en compte, pour déterminer l'effectif moyen annuel de l'entreprise, les salariés employés par l'entreprise au cours du mois même s'ils n'étaient pas liés à l'entreprise par un contrat de travail au dernier jour du mois.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions. Les décisions de la commission de recours amiable du 7 octobre 2019 rejetant la requête de la SAS [3] seront confirmées et les mises en demeure du 7 juin 2019 validées pour leur entier montant en l'absence de contestation du calcul et du chiffrage du redressement opéré.
La cour constate que la SAS [3] s'est acquittée des montants en cotisations ainsi que d'une partie des majorations de retard réclamées par les mises en demeure du 7 juin 2019 et a bénéficié d'une remise partielle des majorations de retard, de sorte que les mises en demeure du 7 juin 2019 sont soldées.
Partie qui succombe totalement, la SAS [3] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel conformément à l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,
DECLARE l'appel interjeté recevable ;
INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
DECLARE la procédure de contrôle et les mises en demeure du 7 juin 2019 régulières ;
CONFIRME les décisions de la commission de recours amiable du 7 octobre 2019 notifiées le 16 octobre 2019 ;
VALIDE les mises en demeure du 7 juin 2019 :
. pour l'établissement de [Localité 5], pour un montant total de 16.420 euros dont 14.874 euros en cotisations et 1.546 euros en majorations de retard ;
. pour l'établissement de [Localité 4], pour un montant total de 7.657 euros, dont 6.936 euros en cotisations et 721 € en majorations de retard ;
CONSTATE que la SAS [3] s'est acquittée des montants en cotisations ainsi que d'une partie des majorations de retard réclamées par les mises en demeure du 7 juin 2019 et a bénéficié d'une remise partielle des majorations de retard, de sorte que les mises en demeure du 7 juin 2019 sont soldées ;
CONDAMNE la SAS [3] aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier, Le Président,