Chambre 5 A
N° RG 22/02797
N° Portalis DBVW-V-B7G-H4JK
MINUTE N°
Copie exécutoire à
- Me Anne CROVISIER
- la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI
Le
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CINQUIEME CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 24 Janvier 2023
Décision déférée à la Cour : 19 Avril 2022 par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE MULHOUSE
APPELANTE :
Madame [K] [P]
née le 14 Novembre 1959 à [Localité 3]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Aide juridictionnelle Totale numéro 2022/2420 du 30/08/2022
Représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la cour,
INTIMÉ :
Monsieur [B] [Y]
né le 02 Décembre 1958 à [Localité 3]
de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI, avocat à la cour,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en Chambre du Conseil, devant la Cour composée de :
Mme LEHN, Président de chambre
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme KERIHUEL, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme MASSON,
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Mme Dominique LEHN, président et Mme Lorine FLEURET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Mme [K] [P] et M. [B] [Y] se sont mariés le 3 juin 1983 devant 1'officier de l'état civil de [Localité 3], après avoir préalablement conclu le 26 mai 1983 un contrat de mariage reçu par Me [L], notaire à [Localité 4], les soumettant au régime de la communauté réduite aux acquêts.
Par ordonnance de non-conciliation du 13 mai 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Mulhouse a statué comme suit sur les mesures provisoires :
- attribution à M. [B] [Y] de la jouissance à titre onéreux du logement conjugal et du mobilier du ménage, à charge pour lui d'en supporter les charges afférentes ;
- attribution à M. [B] [Y] de la gestion de la SCI Plum Bay, sous réserve des droits de chacun des époux dans la liquidation du régime matrimonial ;
- attribution à M. [B] [Y] de la jouissance à titre gratuit du véhicule Volvo, et à Mme [K] [P] de la jouissance à titre gratuit du véhicule Mercedes ;
- condamnation de M. [B] [Y] à verser à Mme [K] [P] une pension alimentaire de 1 500 euros mensuels ;
- prise en charge par M. [B] [Y] des échéances mensuelles du prêt souscrit auprès de la BNP (928,93 euros mensuels), ce règlement s'effectuant au titre du devoir de secours ;
- fixation à la somme de 60 000 euros la provision sur part de communauté que M. [B] [Y] doit verser à Mme [K] [P].
Par arrêt du 14 février 2011, la cour d'appel de Colmar a confirmé l'ordonnance de non-conciliation, et a augmenté le montant de la pension alimentaire due à Mme [K] [P] à la somme de 2 200 euros mensuels à compter du ler septembre 2010.
Par jugement du 27 juin 2012, rectifié par jugement du 20 août 2012, le juge aux affaires familiales a prononcé le divorce des époux aux torts partagés, et a :
- fixé les effets du divorce entre les parties au 14 novembre 2006, date à laquelle ils ont cessé de cohabiter ;
- fixé à la somme de 175 000 euros la prestation compensatoire accordée à Mme [K] [P].
Ce jugement a force de chose jugée depuis le 6 octobre 2012.
Par ordonnance du 20 juin 2014, le tribunal d'instance de Mulhouse a ordonné le partage judiciaire, et désigné Me [Z], notaire à [Localité 3], pour y procéder.
Me [Z] a dressé un procès-verbal de difficultés les 12 février et 16 avril 2015.
Parallèlement, Mme [K] [P] a saisi le président du tribunal de grande instance de Mulhouse le 2 mai 2016 aux fins de solliciter une avance en capital sur ses droits dans l'indivision post-communautaire, conformément aux dispositions de l'article 815-11 alinéa 4 du code civil.
Un acte de partage partiel a été reçu, le 13 novembre 2017, par Me [Z], portant sur :
- la valorisation de l'ancien domicile conjugal, situé [Adresse 2] à [Localité 3], ainsi que les droits réciproques des parties dans la liquidation relative à ce bien (notamment valeur locative, remboursement d'éventuels emprunts, taxe foncière, assurance habitation, indemnité d'occupation), les parties ayant déclaré ne plus avoir aucune revendication à formuler à l'égard de cet immeuble, et s'étant réciproquement consenties tous abandonnement et décharges nécessaires ;
- la fixation à titre provisoire des actifs bancaires et assimilés à la somme de 287 174 euros, les parties demeurant en désaccord concernant le montant total de l'actif à partager.
Dans le cadre de ce partage partiel, M. [B] [Y] a payé à Mme [K] [P] la somme de 201 678,73 euros à titre de soulte.
Par ordonnance du 14 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Mulhouse a constaté l'extinction de l'instance par l'effet du désistement d'instance de Mme [K] [P] et de son acceptation par M. [B] [Y].
Me [Z] a dressé un nouveau procès-verbal de difficultés le 24 novembre 2020.
Par acte reçu par voie électronique le 11 mai 2021, M. [B] [Y] a fait assigner Mme [K] [P] devant le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Mulhouse aux fins de voir trancher des difficultés de partage.
Par requête incidente reçue le 25 octobre 2021, Mme [K] [P] a demandé au juge de la mise en état de :
- déclarer sa requête incidente recevable ;
- constater l'acquisition de la prescription quinquennale des demandes formées par M. [B] [Y] ;
- déclarer irrecevables comme prescrites les créances revendiquées par M. [B] [Y] à son encontre au titre de l'imposition sur le revenu de l'année 2006, ainsi que du redressement 'scal au titre des années 2004 et 2005, de l'imposition sur les revenus fonciers liés à la SCI Plum Bay au titre des années 2006 à 2013 et des frais qu'il dit avoir acquittés concernant la société Viking ;
- débouter M. [B] [Y] de sa demande de paiement à son encontre de 23 811,91 euros au titre de sa quote-part sur l'imposition sur les revenus de 2006 et de 3 489,50 euros au titre de sa quote-part sur l'imposition sur les revenus fonciers de la SCI Plum Bay ;
- débouter M. [B] [Y] de sa demande de paiement de 911,50 euros au titre du redressement fiscal sur les années 2004 et 2005 ;
- débouter M. [B] [Y] de l'ensemble de ses fins et prétentions ;
- condamner M. [B] [Y] à lui verser un montant de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions sur incident du 22 décembre 2021, M. [B] [Y] a demandé au juge de la mise en état de :
- déclarer la requête incidente de Mme [K] [P] irrecevable et mal fondée ;
- débouter Mme [K] [P] de l'intégralité de ses fins, moyens et conclusions ;
- renvoyer les débats au fond à une audience de mise en état ;
- dire et juger que les dépens de l'incident suivront le sort de l'instance au fond.
Par ordonnance du 19 avril 2022, la juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Mulhouse statuant comme juge de la mise en état a :
- déclaré la demande de Mme [K] [P] recevable ;
- rejeté la demande de Mme [K] [P] tendant à déclarer irrecevables les demandes formées par M. [B] [Y] au titre des créances qu'il revendique concernant l'imposition sur les revenus de l'année 2006 ainsi qu'au titre du redressement fiscal sur les revenus des années 2004 et 2005 ;
- rejeté la demande de Mme [K] [P] tendant à déclarer irrecevable la demande formée par M. [B] [Y] au titre de la créance qu'il revendique concernant l'imposition sur les revenus fonciers liés à la SCI Plum Bay au titre des années 2006 à 2013 ;
- constaté que M. [B] [Y] abandonne sa prétention relative aux frais de liquidation judiciaire de la SA Viking ;
- constaté en conséquence que la demande de Mme [K] [P] tendant à la déclarer irrecevable est devenue sans objet ;
- dit que la présente décision est assortie de l'exécution provisoire ;
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 8 juillet 2022 à 9 heures ;
- dit que les dépens du présent incident suivront le sort de ceux de la procédure au fond ;
- réservé les dépens et les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration au greffe par voie électronique du 20 juillet 2022, Mme [K] [P] a interjeté appel afin d'obtenir l'annulation, l'infirmation et à tout le moins la réformation de l'ordonnance en toutes ses dispositions.
Par ordonnance du 12 septembre 2022, en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du 5 décembre 2022.
L'affaire a été mise en délibéré au 24 janvier 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 octobre 2022, Mme [K] [P] demande à la cour d'appel de
- la déclarer recevable en son appel ;
- l'y dire bien fondée ;
- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté ses demandes tendant à déclarer irrecevables comme étant prescrites les demandes formées par M. [B] [Y] au titre des créances qu'il revendique concernant l'imposition sur les revenus de l'année 2006, ainsi qu'au titre du redressement fiscal sur les revenus des années 2004 et 2005, et concernant l'imposition sur les revenus fonciers liés à la SCI Plum Bay au titre des années 2006 à 2013 ;
et statuant à nouveau,
- juger acquise la prescription quinquennale des demandes formées par M. [B] [Y] à son encontre au titre de l'imposition sur les revenus de l'année 2006 au titre du redressement fiscal portant sur l'imposition des revenus 2004 et 2005 ainsi qu'au titre des revenus fonciers de la SCI Plum Bay concernant les années 2006 à 2013 ;
- juger irrecevable comme étant prescrite la créance revendiquée par M. [B] [Y] à son encontre au titre de l'imposition sur le revenu de l'année 2006 ainsi que du redressement fiscal au titre des années 2004 et 2005 ;
- juger irrecevable comme étant prescrite la créance revendiquée par M. [B] [Y] à son encontre au titre de l'imposition sur les revenus fonciers liés à la SCI Plum Bay au titre des années 2006 à 2013 ;
- débouter M. [B] [Y] de sa demande de paiement, respectivement de reconnaissance de créances dans le cadre des opérations de partage de :
23 811,91 euros au titre de la quote-part de Mme [K] [P] sur l'imposition sur les revenus de l'année 2006 ;
3 489,50 euros au titre de la quote-part de Mme [K] [P] sur l'imposition sur les revenus fonciers de la SCI Plum Bay ;
911,50 euros au titre du redressement fiscal sur les années 2004 et 2005 ;
- débouter M. [B] [Y] de l'intégralité de ses fins et conclusions ;
- condamner M. [B] [Y] à lui verser la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [B] [Y] aux entiers frais et dépens d'appel et de première instance.
Mme [K] [P] fonde sa demande de prescription sur les dispositions des articles 2224 et 2236 du code civil. Elle soutient que si l'action en partage est imprescriptible, la prescription extinctive de droit commun court relativement aux éléments spécifiques à liquider et partager. Elle considère les arguments de M. [B] [Y] relativement au moment où elle a soulevé cette prescription et sa prétendue volonté de faire traîner les opérations de partage comme des diversions sans intérêt pour la solution du litige. Elle relève qu'il tente habilement d'introduire une confusion entre le droit général et le droit local, alors que les débats sont soumis à la procédure de partage de droit local et de même en invoquant les dispositions des articles 2239 à 2241 du code civil.
Elle fait valoir que l'interruption de la prescription par une demande en justice, conformément à l'article 2241 du code civil, suppose l'introduction d'une procédure contentieuse et que la procédure locale n'entre dans le domaine contentieux que si et à compter du jour où le notaire dresse procès-verbal de difficultés et retourne dans le domaine gracieux dès que la difficulté sur le fond a été tranchée par le tribunal judiciaire. Elle considère donc qu'aucun acte de la procédure de partage judiciaire, mis à part le procès-verbal de difficultés dressé par le notaire n'est interruptif de prescription.
Elle souligne que les deux arrêts de la cour de cassation que M. [B] [Y] invoque pour soutenir que la prescription demeurerait interrompue tant que le partage est en cours sont relatifs à des procédures de partage de droit général et non de droit local.
Elle estime qu'en l'espèce, si des décisions ont pu être prises par le tribunal d'instance notamment pour fixer la rémunération de l'expert, s'agissant de l'expertise acceptée amiablement par les deux parties, celles-ci ne sont évidemment pas interruptives de prescription, de la même manière qu'aucune autre décision du tribunal d'instance intervenant en matière de procédure gracieuse de partage judiciaire.
Mme [K] [P] expose que suite à l'acte de partage partiel du 13 novembre 2017, elle a régularisé un acte de désistement d'instance et M. [B] [Y] a régularisé un acte de désistement de ses demandes alors qu'il avait fait valoir différentes demandes reconventionnelles dans le cadre de cette procédure listées par les procès-verbaux de difficultés des 12 février et 16 avril 2015, et notamment sur les revenus fonciers liés à la SCI Plum Bay, sur l'imposition au titre des revenus 2006 et sur le redressement fiscal au titre des années 2004 et 2005.
Elle rappelle que le 14 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Mulhouse a rendu une ordonnance constatant l'extinction de l'instance par l'effet du désistement d'instance et de son acceptation par M. [B] [Y].
Elle considère en application des dispositions de l'article 2243 du code civil que le désistement d'instance régularisé par elle et accepté par l'intimé a remis les parties dans la situation où elles étaient avant l'introduction de la procédure et par conséquent, que la prescription est considérée comme n'ayant jamais été interrompue.
Elle explique qu'un troisième procès-verbal de difficultés a été dressé le 24 septembre 2020, soit cinq ans et cinq mois après le précédent procès-verbal de difficultés du 16 avril 2015. Elle considère que si nouveau procès-verbal de difficultés est interruptif, il n'a pas pu faire revivre le délai de prescription précédent, qui était acquis lorsqu'il a été établi, de même que n'a pu le faire l'assignation délivrée le 11 mai 2021.
Elle critique l'ordonnance du juge de la mise en état et estime que l'introduction d'une procédure de partage judiciaire n'a pas pour effet d'interrompre le cours de la prescription.
Elle soutient que la créance réclamée par M. [B] [Y] au titre de la SA Viking n'a été évoquée que dans le procès-verbal de difficulté du 24 septembre 2020 et rappelle que M. [B] [Y] a déclaré renoncer à sa demande.
Elle estime qu'il serait particulièrement inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer afin de faire valoir ses droits en justice, et ce d'autant plus qu'elle dispose de revenus particulièrement modestes qui lui sont versés par Pôle emploi.
Elle s'indigne de la demande d'indemnité formée par M. [B] [Y] pour procédure abusive alors qu'elle n'a fait qu'exercer un droit de recours légitime et que lui-même n'a pas hésité, dans le cadre de ses écritures, à tenter de tromper la religion de la cour d'appel en opérant volontairement une confusion entre le droit général et le droit local.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 septembre 2022, M. [B] [Y] demande à la cour d'appel de :
- rejeter l'appel ;
- débouter Mme [K] [P] de l'intégralité de ses fins, moyens et conclusions ;
- confirmer l'ordonnance ;
sur demande additionnelle,
- condamner Mme [K] [P] au paiement d'une indemnité de 1 000 euros pour procédure abusive ;
sur appel incident,
- condamner Mme [K] [P] au paiement d'une indemnité de procédure pour la première instance à hauteur de 1 000 euros ainsi qu'aux dépens ;
- la condamner à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'appel ainsi qu'aux dépens.
M. [B] [Y] revient sur les différents actes de procédures et explique que les parties s'étaient entendues pour la mise en 'uvre d'une expertise comptable de la SCI Plum Bay mais qu'étant en désaccord sur la prise en charge de l'avance des frais, une ordonnance d'expertise a été prononcée par le tribunal d'instance de Mulhouse le 5 octobre 2015 et une seconde le 1er mars 2018 a ordonné un complément de provision.
Il relève que Mme [K] [P] a soulevé la première fois l'argument de la prescription de certaines de ses demandes lors de la réunion de partage du 24 septembre 2020, qui selon lui ne tient pas et démontre la volonté de l'appelante de faire traîner les opérations de partage.
Il fonde son argumentation sur les dispositions des articles 2236, 2239, 2240 et 2241 du code civil et sur le fait que le procès-verbal de difficultés interrompt le délai de prescription, dès lors qu'il fait état de réclamations concernant une créance entre époux. Il ajoute qu'en application des dispositions de l'article 232 de la loi du 1er juin 1924, le notaire commis à la procédure de partage judiciaire intervient non pas comme mandataire des parties mais comme un délégué de justice faisant fonction sinon de juge, du moins étant investi d'un rôle juridictionnel ou d'une mission de juridiction gracieuse.
Il soutient qu'entre le 16 avril 2015 et le 6 mai 2021, ont été prononcées dans le cadre de la procédure de partage judiciaire, l'ordonnance d'expertise du 5 décembre 2015 désignant un expert comptable, les ordonnances du tribunal d'instance de Mulhouse du 9 novembre 2017 fixant l'avance des frais et du 1er mars 2018 sur recours de celle du 9 novembre 2017, l'ordonnance de la cour d'appel du 7 juin 2018 suite à son désistement de recours contre l'ordonnance du 9 novembre 2017, un acte authentique de partage partiel du 13 novembre 2017, une ordonnance constatant un désistement d'instance a été prononcé par la première chambre civile du tribunal de grande instance de Mulhouse le 14 novembre 2017 et un rapport d'expertise judiciaire comptable du 15 novembre 2018.
Il fait valoir qu'il ressort de la jurisprudence que, dès que la demande est consignée dans un procès-verbal de difficultés et que le partage est toujours en cours, la prescription demeure interrompue, et que le jugement qui ouvre les opérations de liquidation-partage et renvoie les parties devant le notaire ne dessaisit pas le tribunal, de sorte que la prescription demeure interrompue.
Il considère que le fait qu'il y ait eu désistement d'instance est sans conséquence sur le fait que le partage judiciaire était toujours en cours.
Il estime donc qu'aucune prescription n'est encourue.
Il confirme qu'il renonce à sa prétention relative aux frais de liquidation judiciaire de la SA Viking.
Compte tenu de l'acharnement de Mme [K] [P], il sollicite à titre de demande additionnelle, une indemnité de 1 000 euros pour procédure abusive.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.
MOTIVATION
1. Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription :
L'article 2441 alinéa 1 du code civil énonce que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
Le procès-verbal de difficultés établi par le notaire commis au partage interrompt le délai de prescription de l'article 2224 du code civil dès lors qu'il fait état de réclamation dans le cadre des opérations de liquidation et partage. Il est ainsi assimilé à la demande en justice de l'article 2441 du code civil.
L'article 2242 du code civil dispose que l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.
En l'espèce, les demandes de M. [B] [Y] relèvent de la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, prescription dont les effets ont été suspendus, en application des dispositions de l'article 2236 du même code jusqu'au 6 octobre 2012 date à laquelle le jugement de divorce est devenu définitif.
Les parties avaient donc jusqu'au 6 octobre 2017 pour faire falloir leurs demandes au titre de la liquidation et le partage de leur régime matrimonial.
Les opérations de liquidation et partage de ce régime ont été ouvertes par décision du 20 juin 2014.
Dans ce procès-verbal de difficultés du 12 février 2015, M. [B] [Y] a sollicité la restitution par Mme [K] [P] de la moitié des sommes qu'il a payées au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2006 et des redressements fiscaux relativement à l'impôt sur le revenu des années 2004 et 2005, ce à quoi celle-ci s'est opposée.
Il a repris ces demandes au procès-verbal de difficultés du 16 avril 2015, sollicitant également la restitution de la moitié des sommes versées au titre des impôts fonciers et de la CSG CRD de la SCI Plum Bay qui représentent des montants de 14 577 et 1 999 euros.
Il en résulte que la prescription a bien été interrompue par les procès-verbaux de difficultés des 12 février 2015 et 16 avril 2015 relativement aux demandes litigieuses présentées par M. [B] [Y].
L'article 2243 du code civil énonce que l'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.
En l'espèce, suite à l'établissement des procès-verbaux de difficultés, Mme [K] [P] a saisi le tribunal de grande instance de Mulhouse.
Par conclusions du 20 septembre 2017, M. [B] [Y] a notamment demandé au tribunal dans le cadre de cette instance de condamner Mme [K] [P] à lui verser la somme de 48 290,82 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2006, la somme de 1 823 euros au titre du redressement fiscal pour l'impôt sur le revenu 2004 et 2005 et la somme de 6 654,98 euros au titre de l'impôt sur les revenus fonciers relatifs à la SCI Plum Bay.
Par acte authentique de partage partiel du 13 novembre 2017, les parties ont déclaré expressément ne pas vouloir régler dans le présent partage qui n'est que partiel le sort des éventuelles récompenses qui seraient dues par eux à la communauté ou qui seraient dues à eux par la communauté.
Par acte du 13 novembre 2017, Mme [K] [P] s'est désistée de son instance au titre de l'indemnité d'occupation. Par acte du 13 novembre 2017, M. [B] [Y] a accepté le désistement d'instance et a lui-même établi un acte de désistement d'instance concernant sa demande reconventionnelle. Ce désistement a été constaté par le tribunal de grande instance par ordonnance d'extinction par l'effet du désistement du 14 novembre 2017.
Cependant ce désistement n'a pas mis fin à la procédure de partage judiciaire comme en attestent les ordonnances du tribunal d'instance de Mulhouse des 9 novembre 2017 et 1er mars 2018 ainsi que l'établissement d'un nouveau procès-verbal de difficultés le 24 septembre 2020 et dès lors que le partage établi le 13 novembre 2017 n'est que partiel.
La prescription de l'article 2224 du code civil ayant été interrompue par le procès-verbal de difficultés établi par le notaire commis au partage et cette interruption du délai n'ayant pas pris fin, même par l'ordonnance d'extinction par l'effet du désistement du 14 novembre 2017, dès lors que l'instance en partage se poursuivait, aucun partage définitif n'ayant été établi, l'ordonnance de la juge aux affaires familiales statuant comme juge de la mise en état sera confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes de Mme [K] [P] tendant à déclarer irrecevables les demandes formées par M. [B] [Y] au titre des créances qu'il revendique concernant l'imposition sur les revenus de l'année 2006 ainsi qu'au titre du redressement fiscal sur les revenus des années 2004 et 2005 et tendant à déclarer irrecevable la demande formée par M. [B] [Y] au titre de la créance qu'il revendique concernant l'imposition sur les revenus fonciers liés à la SCI Plum Bay au titre des années 2006 à 2013.
2. Sur l'indemnité pour procédure abusive :
L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, ne dégénèrent en abus que s'ils constituent un acte de malice ou de mauvaise foi ou s'il s'agit d'une erreur équipollente au dol.
Il convient de constater que M. [B] [Y] ne démontre ni la mauvaise foi, ni un acte de malice de Mme [K] [P] ou encore une erreur équipollente au dol.
A défaut de démonstration d'une faute de Mme [K] [P], M. [B] [Y] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.
3. Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Il y a lieu de condamner Mme [K] [P] au paiement des entiers dépens.
Il est inéquitable de laisser à la charge de M. [B] [Y] l'intégralité des frais irrépétibles. En conséquence, Mme [K] [P] sera condamnée à verser à celui-ci la somme de 1 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour d'appel,
Dans les limites de l'appel principal de Mme [K] [P] et de l'appel incident de M. [B] [Y],
Confirme l'ordonnance de la juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Mulhouse statuant en qualité de juge de la mise en état du 19 avril 2022 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute M. [B] [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne Mme [K] [P] au paiement des entiers dépens de la procédure d'appel ;
Condamne Mme [K] [P] au paiement au profit de M. [B] [Y] d'une indemnité d'un montant de 1 000 euros (mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,