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17/11/2022 | FRANCE | N°20/00539

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 17 novembre 2022, 20/00539


MINUTE N° 22/863



















NOTIFICATION :







Copie aux parties











Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées



















Le







Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 17 Novembre 2022
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Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/00539 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HJCE



Décision déférée à la Cour : 27 Décembre 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de MULHOUSE





APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 2]

[Localité 4]



Compara...

MINUTE N° 22/863

NOTIFICATION :

Copie aux parties

Clause exécutoire aux :

- avocats

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB

ARRET DU 17 Novembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/00539 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HJCE

Décision déférée à la Cour : 27 Décembre 2019 par le pôle social du Tribunal de Grande Instance de MULHOUSE

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 2]

[Localité 4]

Comparante en la personne de Mme [M] [I], munie d'un pouvoir

INTIMEE :

Société [5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me PUTANIER, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Juillet 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

Mme ARNOUX, Conseiller

Mme HERY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCEDURE

Le 13 décembre 2016, la société [5] a complété une déclaration d'accident du travail concernant sa salariée, Mme [U] [K], indiquant que l'accident était survenu le même jour à 15h45, et que la salariée soulevait un carton quand elle a ressenti des douleurs à l'épaule droite.

Le certificat médical initial, rédigé en date du 13 décembre 2016 par le pôle urgences des hôpitaux civils de [Localité 4], mentionnait « névralgie cervico brachiale droite après port d'une charge lourde ».

La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a reconnu l'accident de travail par décision en date du 07 février 2017 notifiée à l'employeur.

Le 06 avril 2017, la société [5] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, puis elle a saisi le 22 janvier 2019 le tribunal de grande instance de Mulhouse-pôle social en contestation de la décision implicite de rejet de la commission.

Par jugement du 27 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Mulhouse a :

- déclaré recevable le recours,

- déclaré la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin inopposable à la société [5],

- condamné la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin aux dépens.

La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a interjeté appel du jugement par lettre recommandée postée le 27 janvier 2020.

L'affaire a été fixée à l'audience du 07 juillet 2022.

La caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin reprend oralement ses conclusions reçues le 04 novembre 2021, et demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

- constater qu'elle a respecté le caractère contradictoire de la procédure,

- dire que c'est à bon droit qu'elle a reconnu le caractère professionnel de l'accident survenu le 13 décembre 2016,

- dire que la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle, l'accident survenu le 13 décembre 2016 à Mme [U] [K] est opposable à la société [5],

- dire et juger que la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, les soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident survenu le 13 décembre 2016 est opposable à la société [5] jusqu'à la date de consolidation de l'état de santé de l'assurée fixée au 30 novembre 2017,

- débouter la société [5] de sa demande d'expertise,

- débouter la société [5] de l'ensemble de ses prétentions.

La société [5] reprend oralement ses conclusions parvenues au greffe le 08 février 2021 et demande de :

- confirmer le jugement,

- lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de la maladie,

- annuler la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin,

- à titre subsidiaire ordonner avant dire droit une expertise et la transmission des pièces au docteur [W] [R].

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux dernières conclusions précédemment visées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Interjeté dans les forme et délai légaux, l'appel est recevable.

Sur le respect du principe du contradictoire

Par application des dispositions de l'article R441-10 du code de sécurité sociale, l'organisme social dispose d'un délai de 30 jours à compter de la réception de la déclaration de l'accident du travail et du certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident.

L'article R441-11 du même code, dans sa version applicable au litige, énonce qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou procède à une enquête auprès des intéressés.

Selon l'article R441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, la caisse peut recourir à un délai complémentaire d'instruction, de deux mois maximum, lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire. Dans ce cas, il lui appartient de communiquer à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R441-13 du même code.

En l'espèce, la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin a notifié à la société [5] sa décision de prendre en charge au titre du risque professionnel l'accident survenu le 13 décembre 2016 à Mme [U] [K] en précisant qu'elle était consécutive à une instruction contradictoire.

Considérant que la caisse reconnaissait ne pas avoir diligenté d'instruction mais n'en justifiait pas, le premier juge, suivant en cela l'argumentaire de la société [5], en a déduit que la caisse n'avait pas respecté le principe du contradictoire et a déclaré la décision de la caisse de prise en charge de l'accident au titre du risque professionnel inopposable à la société [5].

Il y a lieu d'observer que devant la cour, la société [5] ne reprend pas ce moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire en réplique à l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin.

Ainsi il n'est plus discuté que nonobstant une erreur dans le formulaire de notification, la caisse, en l'absence de réserves de l'employeur, a reconnu d'emblée le caractère professionnel de l'accident sans recourir à une mesure d'instruction eu égard à la concordance entre la déclaration d'accident du travail et le certificat médical initial.

Sur la matérialité de l'accident

Aux termes de l'article L411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Il est de principe que l'accident du travail est un événement ou une série d'événements, survenus soudainement, à date certaine, par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion physique ou psychique constatée médicalement.

Le caractère soudain, c'est à dire l'élément imprévu, instantané ou brusque peut s'attacher soit à la lésion, soit à l'événement.

Pour que joue la présomption d'imputabilité de l'accident au travail posée par le texte susvisé, la caisse dans ses rapports avec l'employeur, doit rapporter la preuve par tous moyens, mais par d'autres éléments que les seules affirmations du salarié, de la matérialité de l'accident et de la survenance dudit accident au temps et lieu du travail.

Selon la société [5], la matérialité de l'accident n'est pas établie. La caisse ne dispose que des déclarations de l'assurée ; elle ne rapporte pas la preuve du caractère traumatique de la lésion ; une douleur ne constitue pas un fait accidentel tout au plus le symptôme d'une lésion.

Or il ressort de la déclaration d'accident du travail que l'accident est survenu dans l'entreprise [5] le 13 décembre 2016 à 15h45, les horaires de travail de la salariée étant de 12h59 à 21h08 ; qu'en soulevant un carton Mme [U] [K] a ressenti une douleur à l'épaule droite ; que l'employeur en a été informé immédiatement (en l'occurrence le 13/12/2016 à 15h45), l'accident étant décrit par la victime et rapporté par « ses préposés » ; que l'accident a eu un témoin Mme [D] [F].

La société employeur n'a émis aucune réserve quant à ces éléments matériels.

Par ailleurs, le certificat médical initial a été établi le jour même par le centre hospitalier de [Localité 4] et fait état d'une « névralgie cervico brachiale droite après port d'une charge lourde » en cohérence avec la description des faits et le siège et la nature des lésions rapportés par la salariée. Il y a bien eu brusque survenance d'une lésion physique au temps et au lieu du travail, et l'employeur n'apporte aucun élément propre à démontrer que la lésion serait de nature totalement étrangère au travail.

Il s'ensuit que Mme [U] [K] a été victime d'un accident au temps et au lieu du travail que la caisse était fondée à prendre en charge d'emblée au titre de la législation professionnelle.

Sur l'imputabilité des soins et arrêts de travail

En application de l'article L411-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail/d'une maladie professionnelle s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur, dans ses rapports avec la caisse, dès lors que le caractère professionnel de l'accident/de la maladie est établi de prouver que les lésions invoquées/les soins prodigués ont une cause totalement étrangère au travail.

La présomption d'imputabilité édictée par l'article L411-1 du code de la sécurité sociale couvre l'ensemble des prestations servies jusqu'à la consolidation ou guérison.

A l'appui de sa contestation du caractère professionnel des soins et arrêts pris en charge par la caisse et de sa demande subsidiaire d'expertise médicale, la société [5] relève que Mme [K] a bénéficié de la prise en charge de 279 jours d'arrêt de travail au titre d'une névralgie cervico-brachiale et qu'une nouvelle lésion (une tendinite) est apparue, que le docteur [T], médecin consultant commis par le tribunal dans l'instance en contestation du taux d'incapacité attribué à Mme [K] (cf jugement du 16 décembre 2020 du tribunal judiciaire de Strasbourg) a observé qu'il « ne persiste aucune lésion visible en imagerie » de l'accident du 13 décembre 2016, tandis que le docteur [R] son conseil dans une note du 27 janvier 2021 indique que « L'évolution médicale attendue d'une telle pathologie [les douleurs cervicobrachiales droites], en l'absence d'état antérieur ou de complication, est une guérison à échéance de 30 à 60 jours, à l'issue d'un traitement médical simple et d'une courte période de repos adapté. ' Il y avait lieu de prononcer la consolidation des lésions imputables à échéance maximale de 60 jours post-traumatiques, soit le 10/02/2017 ».

Or la caisse produit l'ensemble des certificats d'arrêt de travail et de prolongation dont a bénéficié Mme [K] depuis le 13 décembre 2016 jusqu'au 30 novembre 2017, lesquels font tous état de douleurs épaule droite-cervicalgies brachiales droites ' cervicoscapulalgie-tendinopathie épaule D, en corrélation avec le certificat médical initial constatant une « névralgie cervico brachiale droite après port d'une charge lourde », ce qui démontre la continuité des symptômes et des soins.

Le médecin conseil près la caisse, relève que les diagnostics de névralgie cervicobrachiale, tendinopathie de l'épaule droite sont dès le début de l'arrêt évoqués, ajoutant que si « Le service médical n'est pas en mesure d'expliquer de façon certaine et différenciée l'origine des douleurs présentées par l'assurée durant la période du 13 décembre 2016 au 30 novembre 2017 » « Il demeure que l'assurée s'est trouvée, dans les suites de son accident, dans l'incapacité de reprendre son poste de travail avant septembre 2017 à temps partiel, avant décembre 2017 à temps complet ».

La caisse justifie aussi de ce qu'elle a versé à Mme [K] des indemnités journalières au titre de son accident du travail, de façon continue du 14 décembre 2016 au 30 novembre 2017.

Etant observé que le docteur [T] dans le cadre du contentieux technique a noté, après examen du dossier médical de Mme [K] le 13 juillet 2020, qu'il existe une maladie professionnelle antérieure du 18 février 2008 (une tendinite du poignet droit) mais pas d'état antérieur interférent, et qu'il existe des éléments cliniques en faveur d'une atteinte de la coiffe des rotateurs non encore objectivée mais qui n'est en tout état de cause pas imputable à l'accident du travail du 13 décembre 2016, que par ailleurs la société [5] n'établit pas que les arrêts de travail litigieux auraient une cause totalement étrangère à l'accident, et n'a pas cru nécessaire de faire faire à sa salariée une visite médicale pour s'assurer en son temps que l'arrêt était médicalement justifié, il s'impose d'infirmer le jugement rendu et de déclarer opposable à la société [5] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu à Mme [U] [K] le 13 décembre 2016 et les arrêts de travail et soins consécutifs à l'accident jusqu'à la consolidation de l'état de santé de l'assurée fixée au 30 novembre 2017.

Sur les frais et dépens

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin aux dépens.

la société [5] succombant, supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe dans les limites de l'appel, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DECLARE l'appel interjeté par la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin recevable ;

INFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Mulhouse le 27 décembre 2019 en ce qu'il déclare inopposable à la société [5] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu à Mme [U] [K] le 13 décembre 2016, ainsi que sur les dépens ;

statuant à nouveau et ajoutant,

REJETTE la demande d'expertise formulée par la société [5] ;

DECLARE opposable à la société [5] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'accident survenu à Mme [U] [K] le 13 décembre 2016 et les arrêts de travail et soins consécutifs à l'accident jusqu'à la consolidation de l'état de santé de Mme [U] [K] fixée au 30 novembre 2017 ;

REJETTE la demande d'expertise formulée par la société [5] ;

CONDAMNE la société [5] aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 sb
Numéro d'arrêt : 20/00539
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;20.00539 ?
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