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16/11/2022 | FRANCE | N°21/02536

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 16 novembre 2022, 21/02536


MINUTE N° 547/22

























Copie exécutoire à



- Me Joseph WETZEL



- Me Thierry CAHN





Le 16.11.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 16 Novembre 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/02536 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HS4H



Décision déf

érée à la Cour : 31 Mars 2021 par la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de SAVERNE



APPELANT :



Monsieur [S] [B]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Joseph WETZEL, avocat à la Cour

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale num...

MINUTE N° 547/22

Copie exécutoire à

- Me Joseph WETZEL

- Me Thierry CAHN

Le 16.11.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 16 Novembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/02536 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HS4H

Décision déférée à la Cour : 31 Mars 2021 par la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de SAVERNE

APPELANT :

Monsieur [S] [B]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Joseph WETZEL, avocat à la Cour

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021003470 du 13/07/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)

INTIMEE :

S.A. BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. ROUBLOT, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

 

Par une convention de compte courant professionnel du 4 juillet 2014, la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne a accordé son concours à l'EURL KBR Fermetures et Sols Résines.

 

Par acte du 13 octobre 2016, Monsieur [S] [B], gérant de ladite société, s'est porté caution solidaire à hauteur de 65 000 € en principal, frais, intérêts et accessoires.

 

Par jugement du 27 octobre 2020, la liquidation judiciaire de l'EURL KBR Fermetures et Sols Résines a été prononcée.

 

Le 3 novembre 2020, la Banque a déclaré sa créance pour un montant de 30 113,87 €.

 

Par courrier en date du 3 novembre 2020, la Banque a également mis en demeure Monsieur [S] [B] de payer cette somme en sa qualité de caution de la société.

 

Par acte du 22 décembre 2020, la Banque a assigné Monsieur [S] [B] devant la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de Saverne.

 

Par jugement en date du 31 mars 2021, le tribunal judiciaire de Saverne a condamné Monsieur [S] [B] à payer à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 30 606,37 € portant intérêts au taux conventionnel de 14,56 % à compter du 3 décembre 2020, date du dernier décompte, condamné Monsieur [S] [B] au paiement d'une indemnité de 800 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux dépens, et ordonné l'exécution provisoire du jugement.

 

Le tribunal judiciaire de Saverne a jugé que la mise en demeure délivrée à M. [S] [B] le 3 novembre 2020 étant restée vaine, la créance de 30 606, 37 € non contestée, est exigible.

 

Par déclaration faite au greffe le 19 mai 2021, Monsieur [S] [B] a interjeté appel du jugement.

 

Par déclaration faite au greffe le 24 Juin 2021, la S.A. Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne s'est constituée intimée.  

 

Par ses dernières conclusions en date du 9 décembre 2021, auxquelles était joint le bordereau de communication des pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, Monsieur [S] [B] demande à la Cour de déclarer l'appel recevable, le déclarer bien fondé, infirmer le jugement du 31 mars 2021, statuant à nouveau, débouter la SA Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de l'intégralité de ses fins et conclusions, à titre subsidiaire, juger que le cautionnement qu'il a souscrit est disproportionné par rapport à ses biens et revenus et que la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne ne pourra s'en prévaloir, prononcer la déchéance de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de son droit à intérêts à l'égard de la caution, enjoindre à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de verser aux débats un décompte de créance expurgé des intérêts, lui réserver le droit de conclure plus amplement après production de ce document, sur demande reconventionnelle, condamner la SA Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne à lui payer une somme de 30 606,37 euros augmentée des intérêts au taux de 14,56 % l'an à compter du 3 décembre 2020 à titre de dommages et intérêts, ordonner la compensation des créances réciproques, en tout état de cause, condamner la SA Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel et condamner la SA Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700.2 du code de procédure civile.

L'appelant soutient, sur l'extinction du cautionnement, que l'acte de cautionnement prévoit que la caution a la faculté de résilier son engagement par lettre recommandée avec accusé de réception moyennant un préavis de 180 jours, qu'il a dénoncé son engagement de caution suivant courrier en date du 30 juin 2018 reçu par la Banque Populaire le 3 Juillet 2018, qu'ainsi à compter du 31 décembre 2018 il était dégagé de son engagement de caution suite au courrier qu'il a adressé à la Banque Populaire et qu'à la date du 31 décembre 2018, le compte de l'EURL KBR Fermetures et sols résines était créditeur à hauteur de 11 094,59 euros.

 

Sur la disproportion du cautionnement, Monsieur [B] fait valoir que le cautionnement est disproportionné par rapport à sa situation financière, qu'à la signature du cautionnement Monsieur [B] était en arrêt maladie en raison d'un grave accident du travail et n'avait pas eu d'activité entre le mois de mars 2016 et septembre 2016, que pendant cette période il a perçu des indemnités journalières à hauteur de 400 euros par mois, qu'il est certes propriétaire d'un appartement acheté en 2012 mais pour lequel il remboursait un crédit de 170 000 euros qui devait être remboursé jusqu'en octobre 2037, que la Banque Populaire fait valoir un retour à meilleure fortune pour tenter de faire valider l'acte de cautionnement.

 

Sur le non-respect de l'obligation de mise en garde, l'appelant prétend que la Banque Populaire n'a pas respecté son obligation de mise en garde alors que, au moment où la caution s'est engagée soit au mois d'octobre 2016, la situation de la débitrice principale était déjà largement obérée en ce que son bilan au 31 décembre 2016 était déficitaire de plus de 200 000 euros, qu'il existait à cette époque un risque d'endettement pour l'appelant qui s'est engagé pour un montant important alors que ses ressources étaient minimes puisqu'il ne percevait plus aucune rémunération mais seulement des indemnités journalières d'un montant de l'ordre de 400 euros par mois.

 

Sur l'information annuelle de la caution, l'appelant soutient qu'aux termes des dispositions de l'article L 313-22 du Code monétaire et financier, un établissement doit informer la caution au courant du 1er trimestre de l'année des montants dus au 31 décembre précédent par la débitrice principale et ce sous peine de déchéance du droit aux intérêts, qu'il appartient à la Banque Populaire de justifier l'information annuelle faite à la caution et que la seule production de la lettre d'information ne suffit pas à justifier de son envoi et la facturation et le règlement des frais d'information annuelle de la caution sont insuffisants pour prouver la réalisation de l'information annuelle.

 

Par ses dernières conclusions en date du 14 octobre 2021, auxquelles était joint le bordereau de communication des pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, la Banque Populaire demande à la Cour de rejeter l'appel et le dire mal fondé, rejeter l'intégralité des demandes, fins et conclusions de Monsieur [B], confirmer l'entier jugement, en tout état de cause, condamner Monsieur [B] aux entiers frais et dépens et condamner Monsieur [B] à la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 

L'intimée soutient, sur l'extinction du cautionnement invoquée par Monsieur [B], que le courrier du 30 juin 2018 dont se prévaut Monsieur [B] n'est pas revêtu de sa signature, que la Banque a opposé son strict refus à la résiliation du cautionnement dans la mesure où le fonctionnement normal du compte courant garanti l'exigeait, que les frais de caution ont continué à être débités sur le compte de ladite société les 1er avril 2019 et 8 avril 2020, que Monsieur [B] n'a jamais émis la moindre opposition à ces prélèvements, de telle sorte qu'il convient de considérer que le courrier évoqué ci-dessus est totalement caduque, l'appelant ayant tacitement manifesté sa volonté de poursuivre son

engagement de caution, que Monsieur [B] ne peut légitimement prétendre à hauteur de Cour que le cautionnement était résilié alors qu'il a continué à exécuter son engagement, n'a pas plus réagi à la mise en demeure qu'à l'assignation, et enfin n'a pas jugé utile ni de constituer avocat ni de comparaître devant le tribunal judiciaire.

 

Sur le caractère manifestement disproportionné du cautionnement, la Banque fait valoir qu'aux termes de la fiche de renseignements sur la caution, Monsieur [B] a déclaré percevoir un revenu mensuel de 3 500 €, outre 475 € par mois d'allocations familiales et 1 070 € perçu par sa conjointe, Madame [B], que s'agissant du bien immobilier estimé à 170 000 €, Monsieur [B] ne justifie en rien de ses échéances bancaires mensuelles ni du solde du prêt restant. L'intimée soutient qu'il est de jurisprudence constance que la banque est en droit de se fier aux informations contenues dans la fiche de renseignements à défaut d'anomalie apparente, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, qu'en vertu de l'article 343-4 du Code de la consommation si la caution est manifestement disproportionnée au moment de la souscription, l'engagement demeure opposable si au moment où celle-ci est appelée son patrimoine suffit à faire face au solde de la dette garantie.

 

Sur le devoir de mise en garde, la Banque soutient qu'elle y est tenue uniquement dans la mesure où la caution et l'emprunteur sont non-avertis et s'il existe un risque d'endettement excessif né de l'octroi du crédit, que Monsieur [B] ne peut raisonnablement prétendre être non averti, dès lors qu'il était gérant et fondateur de la société KBR Fermetures et sols résines et que le crédit en compte a été accordé en 2014 pour se poursuivre sans difficulté jusqu'en 2020 écartant de facto tout risque d'endettement excessif. Elle fait valoir qu'il convient également de prendre en compte la nature des activités et la diversification du patrimoine d'un emprunteur pour apprécier son caractère averti, que Monsieur [B] est menuisier de formation, en adéquation avec l'objet social de la société dont il était le gérant, qu'il a diversifié son patrimoine en investissant dans l'immobilier à hauteur de 170 000 €, qu'ainsi Monsieur [B] ne peut qu'être considéré comme nécessairement averti à la fois en sa qualité d'emprunteur que de caution.

 

Sur l'information annuelle de la caution, la Banque soutient avoir adressé à Monsieur [B] pour les années 2017 à 2021 les lettres d'information qu'elle verse également aux débats.

 

MOTIFS DE LA DECISION :

 

Sur l'extinction du cautionnement :

 

Il ressort de l'acte de cautionnement versé aux débats par la Banque et par Monsieur [B], en pièce n°1 de leurs annexes respectives, que la caution est valable pour une durée de 10 ans à compter de la signature du cautionnement, à savoir le 13 octobre 2016.

 

Le paragraphe 9 de cet acte précise également :

'La CAUTION aura toutefois la faculté de résilier son engagement par lettre recommandée avec accusé réception, moyennant toutefois un préavis de 180 jours.

Néanmoins, en cas de résiliation anticipée, la CAUTION ne sera déchargée de son engagement que par le paiement à concurrence de la somme globale mentionnée dans la rubrique ci-dessus, de toutes les sommes dues par le DEBITEUR à la date d'effet de la résiliation, à raison d'engagements ou d'opérations dont l'origine serait antérieure au terme indiqué, même si leur dénouement n'intervenait que postérieurement.

La CAUTION renonce par ailleurs expressément à se prévaloir de toutes remises portées postérieurement à la date d'effet de la résiliation sur le compte courant du DEBITEUR, de sorte que ces remises n'impacteront pas le solde provisoire du compte courant qui aura été établi lors de la résiliation anticipée.'

A ce titre, l'appelant verse en pièce annexe n°2 un courrier en date du 30 juin 2018 avec pour objet 'retrait caution personnelle (KBR)' qui indique : 'Par la présente nous vous demandons de retirer notre caution personnelle pour le compte de l'entreprise KBR Fermetures dont je suis le gérant. En effet, la société KBR Fermetures ayant soldé son découvert de 50 000 € (2017) dans les conditions prévues et n'étant aujourd'hui plus débiteur sur ce compte professionnel, nous vous prions de lever la caution personnelle qui nous engageait, ma femme et moi, en cas de non-remboursement de ce découvert. Aussi, la situation régularisée, nous attendons que vous fassiez le nécessaire dans les plus brefs délais. En vous remerciant par avance et dans l'attente d'une confirmation écrite de votre part, nous vous prions d'agréer nos salutations distinguées'.

Les termes de ce courrier, même non signé, constituent une révocation non équivoque de la caution consentie par Monsieur [B] et la non-comparution de Monsieur [B] en première instance n'est pas de nature à remettre en cause ce caractère non équivoque de la révocation.

L'appelant fournit l'accusé de réception signé, adressé à la Banque Populaire, indiquant que le courrier a été distribué le 3 juillet 2018.

Il est constant qu'à la date de la lettre de révocation, le solde du compte courant de la société KBR était créditeur.

Ainsi, la date d'effet de cette révocation, compte tenu du préavis de 180 jours, est le 30 Décembre 2018.

Monsieur [B] verse aux débats en annexe 5, un relevé du compte bancaire arrêté au 31 Décembre 2018 qui mentionne un solde créditeur de 11 094 € et la Banque Populaire pour justifier que la caution n'était pas révoquée verse aux débats des relevés de compte qui concernent des périodes postérieures au mois de mars 2019 et qui ne peuvent pas rapporter la preuve contraire à la révocation de la caution.

Dans ces conditions, la Cour retiendra que la caution a été régulièrement révoquée et que la Banque Populaire doit être déboutée de l'intégralité des demandes présentées à l'encontre de Monsieur [B] en sa qualité de caution de la société KBR.

La décision entreprise sera infirmée en toutes ses dispositions.

Succombant, la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne sera condamnée aux entiers dépens, de première instance et d'appel et ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile présentée en première instance et à hauteur de Cour seront rejetées.

Les dépens seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

En revanche, l'équité commande l'application des dispositions de l'article 700 2° du code de procédure civile au profit de Monsieur [B] à hauteur de Cour.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Saverne le 31 Mars 2021,

Statuant à nouveau,

Déboute la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de l'intégralité des demandes présentées à l'encontre de Monsieur [B] en sa qualité de caution de la société KBR FERMETURES ET SOLS RESINES,

Condamne la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne aux entiers dépens, de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle,

Rejette les demandes de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne fondées sur l'article 700 du code de procédure civile présentées en première instance et à hauteur de Cour,

Condamne la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne à verser à Monsieur [B] [S] la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 2° du code de procédure civile.

La Greffière : la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 21/02536
Date de la décision : 16/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-16;21.02536 ?
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