MINUTE N° 505/22
Copie exécutoire à
- Me Joëlle LITOU-WOLFF
- Me Thierry CAHN
Le 26.10.2022
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 26 Octobre 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 19/04674 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HGZK
Décision déférée à la Cour : 24 Septembre 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG - 1ère CHAMBRE CIVILE
APPELANTS - INTIMES INCIDEMMENT :
Monsieur [X] [E]
[Adresse 3]
SARL MGT
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
Représentés par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me CHAN, avocat au barreau de STRASBOURG
INTIMEE - APPELANTE INCIDEMMENT :
SAS [E]
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
Représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me DE HAAS, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Décembre 2021, en audience publique, un rapport ayant été présenté, devant la Cour composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
ARRET :
- Contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu les assignations délivrées le 8 septembre 2016, par lesquelles la SAS [E] a fait citer M. [X] [E] et la SARL MGT devant le tribunal de grande instance de Strasbourg,
Vu le jugement rendu le 24 septembre 2019, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal de grande instance de Strasbourg a :
- déclaré valable la cession des marques '[E]' numéros 1458311 et 1458312 opérées en faveur de la SAS [E],
- débouté la société MGT et [X] [E] de leur demande en déchéance des marques numéros 1458311 et 1458312 appartenant à la SAS [E],
- déclaré nul l'enregistrement de la marque '[E]' numéro 4242041 effectué par [X] [E], en date du 20 janvier 2016,
- déclaré en conséquence sans objet la demande en contrefaçon de marque formée par [X] [E],
- ordonné la transmission, par le greffe de la juridiction, de la décision, à l'INPI de Strasbourg aux fins de son inscription au Registre National des Marques
- débouté la SAS [E] de la demande en contrefaçon de marque qu'elle avait dirigée contre la société MGT et [X] [E]
- dit n'y avoir lieu d'enjoindre à la société MGT et à [X] [E] de communiquer diverses informations relatives aux chiffres d'affaires et aux marges nettes réalisés par la société MGT
- dit que la seule société MGT s'était rendue coupable d'actes de concurrence déloyale au détriment de la SAS [E]
- fait interdiction à la société MGT de poursuivre l'utilisation du nom '[E]' à titre de nom commercial, ou comme partie intégrante d'un tel nom, dans le cadre de son activité de vente de réducteurs, de motoréducteurs et de leurs pièces, ceci, sous astreinte provisoire de 300 euros par infraction dûment constatée, à l'issue d'un délai d'un mois suivant la signification de la décision,
- condamné la seule société MGT à payer à la SAS [E] une somme de 10 000 euros portant intérêts au taux légal à compter de ce jour, à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice moral par elle subi, du fait des actes de concurrence déloyale,
- débouté la SAS [E] de sa demande en concurrence déloyale fondée sur l'utilisation des plans de fabrication,
- débouté la société MGT et [X] [E] de leur demande reconventionnelle en interdiction d'usage, par la SAS [E], du nom commercial '[E]',
- débouté la société MGT et [X] [E] de leurs demandes en concurrence déloyale,
- dit n'y avoir lieu d'ordonner la publication du jugement,
- condamné la société MGT et [X] [E] conjointement à payer à la SAS [E] une indemnité de 5 000 euros, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société MGT et [X] [E] conjointement aux dépens,
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,
aux motifs, notamment, que :
- la SAS [E], qui avait la qualité de propriétaire des marques numéros 1458311 et 1458312, lesquelles lui avaient été valablement cédées au titre des éléments incorporels du fonds de commerce, était recevable à agir en contrefaçon,
- l'usage fait, par la SAS [E], du nom '[E]' à titre de dénomination commerciale et non de marque, destiné à désigner ou distinguer des produits ou services, ne pouvait conduire au prononcé de la déchéance des marques,
- le dépôt de la marque verbale '[E]' numéro 424204 le 20 janvier 2016, par M. [X] [E], était nul, comme portant atteinte aux droits antérieurs de la SAS [E], s'agissant d'un signe qui n'était plus disponible et de l'atteinte portée au nom commercial de la SAS [E], le dépôt étant, en outre, qualifié de frauduleux au regard des circonstances du dépôt,
- si la société MGT ne pouvait prétendre faire un usage honnête du nom '[E]' et bénéficier de la protection de l'article L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle (CPI), les faits qui lui étaient reprochés, à savoir l'usage du nom '[E]' à titre de nom commercial ou la référence au groupe '[E]' sur son site internet, ne pouvaient constituer des actes de contrefaçon de marque, faute d'utilisation du signe litigieux comme marque,
- l'usurpation par la société MGT du nom commercial '[E]' constituait un fait distinct des actes de concurrence déloyale justifiant l'indemnisation de la SAS [E] et l'interdiction d'usage de ce nom faite à la société MGT,
- s'agissant des plans de fabrication, transférés aux droits de la SAS [E], il n'était pas démontré que la société MGT en disposait en toute illégalité, ce qui excluait la commission d'actes de concurrence déloyale de ce chef,
- la demande en contrefaçon de marque formée par M. [E] était sans objet,
- la demande reconventionnelle en interdiction d'usage du nom '[E]' pour abus de nom était non fondée, les demandeurs ayant perdu, en conséquence de ce qui précède, la qualité de titulaires de la marque,
- les demandes reconventionnelles au titre de la concurrence déloyale, n'étaient pas fondées, au vu, notamment, des droits respectifs des parties.
Vu la déclaration d'appel formée par M. [X] [E] et la SARL MGT contre ce jugement, et déposée le 29 octobre 2019,
Vu la constitution d'intimée de la SAS [E] du 11 février 2020, réitérée le 14 février 2020,
Vu les dernières conclusions en date du 29 octobre 2021, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [X] [E] et la SARL MGT demandent à la cour de :
'Sur l'appel principal :
DIRE Monsieur [X] [E] et la société MGT bien fondés en leur appel
en conséquence,
INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Strasbourg le 24 septembre 2019 en ce qu'il a :
- DÉCLARÉ valable la cession des marques '[E]' numéros 1458311 et 1458312 opérées en faveur de la SAS [E],
- DÉBOUTÉ la société MGT et [X] [E] de leur demande en déchéance des marques numéros 1458311 et 1458312 appartenant à la SAS [E],
- DÉCLARÉ nul l'enregistrement de la marque '[E]' numéro 4242041 effectué par [X] [E], en date du 20 janvier 2016,
- DÉCLARÉ en conséquence sans objet la demande en contrefaçon de marque formée par [X] [E],
- ORDONNÉ la transmission, par le greffe de la juridiction, de la présente décision, à l'INPI de STRASBOURG aux fins de son inscription au Registre National des Marques,
- DIT que la SARL MGT s'est rendue coupable d'actes de concurrence déloyale au détriment de la SAS [E],
- FAIT interdiction à la société MGT de poursuivre l'utilisation du nom '[E]' à titre de nom commercial, ou comme partie intégrante d'un tel nom, dans le cadre de son activité de vente de réducteurs, de motoréducteurs et de leurs pièces, ceci, sous astreinte provisoire de 300 € par infraction dûment constatée, à l'issue d'un délai d'un mois suivant la signification de la présente décision,
- CONDAMNÉ la société MGT à payer à la SAS [E] une somme de 10.000 € portant intérêts au taux légal à compter de ce jour, à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice moral par elle subi, du fait des actes de concurrence déloyale,
- DÉBOUTÉ la société MGT et [X] [E] de leur demande reconventionnelle en interdiction d'usage, par la SAS [E], du nom commercial '[E]',
- DÉBOUTÉ la société MGT et [X] [E] de leurs demandes en concurrence déloyale
- CONDAMNÉ la société MGT et [X] [E] conjointement aux dépens et à payer à la SAS [E] une indemnité de 5.000 €, par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- DEBOUTÉ, au moins implicitement, la SARL MGT et Monsieur [E] du surplus de leurs demandes,
et statuant à nouveau,
DIRE nulle et PRONONCER la nullité de l'acte de cession d'éléments d'actifs de fonds de commerce du 30 septembre 2014,
DIRE nulle et PRONONCER la nullité de la cession des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311,
DIRE nulle et PRONONCER la nullité du renouvellement des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 effectué en date du 16 novembre 2017 par la société [E] SAS,
DIRE expirées les marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 à la date du 28 mars 2018,
ORDONNER la radiation des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 du Registre national des marques de l'INPI,
REQUERIR le Greffier aux fins de faire inscrire la nullité de la cession et la radiation des marques au Registre National des Marques tenu à l'Institut National de la Propriété Intellectuelle et, à défaut, ordonner à la société [E] SAS de faire procéder à ladite inscription, dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et, passé ce délai, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par marque,
A titre subsidiaire,
PRONONCER la nullité de la cession des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311, en raison du non-respect des formalités d'inscription de l'article L. 143-17 du Code de commerce,
PRONONCER la nullité du renouvellement des marques nominale et semi-figurative [E] n°1458312 et n° 1458311 effectué en date du 16 novembre 2017 par la société [E] SAS,
DIRE expirées les marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 à la date du 28 mars 2018,
ORDONNER la radiation des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 du Registre national des marques de l'INPI,
REQUERIR le Greffier aux fins de faire inscrire la nullité de la cession et la radiation des marques au Registre National des Marques tenu à l'Institut National de la Propriété Intellectuelle et, à défaut, ordonner à la société [E] SAS de faire procéder à ladite inscription, dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et, passé ce délai, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par marque,
A titre infiniment subsidiaire,
PRONONCER la déchéance des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 pour l'ensemble des classes mentionnées à leurs dépôts,
ORDONNER la radiation des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311 du Registre national des marques de l'INPI,
REQUERIR le Greffier aux fins qu'il soit procédé aux formalités de radiation nécessaires au Registre National des Marques tenu à l'Institut National de la Propriété Intellectuelle et, à défaut, ordonner à la société [E] de faire procéder auxdites formalités, dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et, passé ce délai, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par marque,
A titre reconventionnel,
DIRE et JUGER qu'en reproduisant sans autorisation la marque [E] n° 4242041, la société [E] SAS a commis des actes de contrefaçon de marque au préjudice de Monsieur [X] [E],
INTERDIRE à la société [E] SAS de faire usage à titre de marque du signe [E] enregistré, de quelque manière que ce soit et sur tout support, dans le cadre de la commercialisation de ses produits à compter de la signification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par infraction constatée,
DIRE et JUGER que la société [E] SAS commet un abus de nom dans son utilisation du nom commercial [E],
INTERDIRE à la société [E] SAS d'utiliser le signe [E] à titre de nom commercial, à compter de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par infraction constatée,
DIRE et JUGER que la société [E] SAS, en utilisant sans droit ni autorisation le nom [E] dans sa dénomination sociale, a commis une faute et a porté atteinte aux droits de la société MGT sur sa dénomination sociale et son nom commercial,
INTERDIRE à la société [E] SAS de faire usage de la dénomination sociale [E] et lui enjoindre de faire radier sa dénomination sociale au Registre du Commerce et de Sociétés sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à venir,
DIRE et JUGER que la société [E] SAS, en utilisant sans droit ni autorisation les signes 'merger.fr' et 'merger-gear.com' à titre de nom de domaine a commis un acte d'usurpation de dénomination sociale et de nom commercial au préjudice de la société MGT et de Monsieur [X] [E],
ORDONNER à la société [E] SAS de cesser l'exploitation de son site internet sous les noms de domaine 'merger.fr' et 'merger-gear.com', et de transférer ces noms de domaine à la société MGT sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,
DIRE et JUGER que la société [E] SAS s'est rendue coupable de parasitisme à l'encontre de la société MGT,
DIRE et JUGER que la société [E] SAS s'est rendue coupable de dénigrement à l'encontre de la société MGT,
CONDAMNER la société [E] SAS à payer à la société MGT la somme de 166.440 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre du manque à gagner relatif au contrat à conclure avec la société SULZGITTER AG,
CONDAMNER la société [E] SAS à payer à la société MGT la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d'image subi,
INTERDIRE à la société [E] SAS de tenir des propos dénigrants à l'encontre de la société MGT sous astreinte de 150.000 euros par infraction constatée,
ORDONNER la publication de l'arrêt à intervenir dans deux journaux ou revues, au choix de Monsieur [X] [E] et de la société MGT, et aux frais de la société [E],
En tout état de cause :
DEBOUTER la société [E] SAS de toutes conclusions contraires et de l'intégralité de ses fins, moyens et prétentions,
CONDAMNER la société [E] SAS à payer à la société MGT et à Monsieur [X] [E] la somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et la somme de 20.000 euros au titre de la procédure d'appel,
CONDAMNER la société [E] SAS aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel.
Sur l'appel incident :
Le DIRE mal fondé
En DEBOUTER la société [E] SAS ainsi que de ses fins, moyens et prétentions,
La CONDAMNER aux frais de l'appel incident.'
et ce, en invoquant, notamment :
- à titre principal, la nullité de la cession des marques [E] n° 1458 311 et 312, à défaut d'écrit, de cession implicite, et subsidiairement, dans le cadre d'une demande recevable, d'accomplissement des formalités d'inscription lors des cessions successives,
- à titre subsidiaire, la déchéance des marques précitées, dont l'usage serait propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance, géographique du produit ou du service, la SAS [E] se prévalant d'une renommée qui n'est pas la sienne et faisant croire à une fausse continuité familiale de l'activité des Usines [E],
- la validité du dépôt de la marque [E] n° 4242041 par M. [X] [E], à défaut d'antériorité opposable de la marque '[E]' n° 1458312, dont la société [E] n'est pas titulaire, et donc pas recevable à solliciter le prononcé de la nullité de la marque, et qu'elle n'a pu renouveler, ainsi que d'antériorité opposable de la SAS [E] au titre de sa dénomination sociale, non cédée par la société Usines [E], ou de son nom commercial, cédé mais sans constituer un droit antérieur opposable, M. [E] étant, en tout état de cause, fondé à déposer son nom patronymique comme marque, et ayant agi de bonne foi, en prenant toutes les précautions utiles,
- l'absence d'actes de contrefaçon de marques commis par les concluants, en l'absence de titularité des marques par la société [E] et compte tenu de la liberté d'usage de son nom patronymique par M. [E], y compris comme nom commercial, la condition de bonne foi étant remplie, et l'usage de ce nom limité, la société ayant été baptisée MGT pour éviter toute confusion, le signe '[E]' n'ayant, en tout état de cause pas été utilisé comme marque, condition nécessaire à la contrefaçon, et la SAS [E] n'établissant pas de risque réel et concret de confusion et encore moins un quelconque préjudice,
- l'absence d'actes de concurrence déloyale envers la société [E], en l'absence de fait distinct par rapport à l'action en contrefaçon, et à défaut d'usurpation du nom commercial '[E]', compte tenu de la liberté d'usage du nom patronymique et, néanmoins, du seul usage de la dénomination sociale et le nom commercial 'MGT' sur les supports de la société, l'appellation 'groupe [E]' désignant la société MGT et sa holding [E] Invest, alors que seul le nom commercial 'Usines [E] aurait été cédé à la SAS [E], à l'exclusion des marques [E] n° 1458311 et n° 1458312, M. [E] étant donc titulaire d'un droit de marque sur le signe '[E]', et la société MGT n'ayant, au demeurant, opéré aucune confusion, a fortiori de mauvaise foi,
- l'absence d'utilisation illicite des plans de fabrication, exclus de l'acte de cession des Usines [E], élaborés avec le concours de M. [X] [E] et librement accessibles sur le site internet 'merger.fr', dont le contenu a été intégralement repris par la SAS [E], ainsi que sur des catalogues papiers anciennement distribués par les Usines [E], une société Befared disposant, par ailleurs, de droits de fabrication, le surplus des griefs concernant un devis relatif à un matériel qui n'était plus fabriqué par les Usines [E] lors de leur cession et qui n'a pas reçu de suites de la part de la société MGT,
- l'absence de préjudice démontré par la SAS [E] au titre de la concurrence déloyale,
- la commission d'actes de contrefaçon de marque par la SAS [E], qui ne disposait d'aucun droit sur cette marque, et constitués par la reproduction de la marque telle que déposée sur des produits ou pour désigner des produits identiques ou similaires aux produits couverts par cette marque,
- un abus de nom commis par la SAS [E], par l'utilisation d'un nom patronymique sans le consentement de son titulaire, seul un accord à la cession de la dénomination sociale 'Usines [E]' ayant été donné, et seul le nom commercial 'Usine [E]', et non cette dénomination sociale, ayant été acquis par la SAS [E], et cette utilisation abusive induisant une confusion avec la société MGT 'uvrant dans le même secteur d'activité, en s'appuyant sur une renommée et un héritage familial,
- des actes de concurrence déloyale également commis par la société [E], impliquant l'interdiction de l'usage de la dénomination sociale '[E]' et des noms de domaine 'merger.fr' et 'merger-gear.com' et en reprenant le contenu du site internet de la société Usines [E], en l'absence de droits de la SAS [E] sur ces éléments,
- enfin, des actes de parasitisme et de dénigrement reprochés à la SAS [E], en voulant 'ressusciter' la société Usines [E], et en usurpant le nom patronymique '[E]', réalisant une captation complète de l'entreprise précitée, constitutive d'un comportement parasitaire, ce qui serait particulièrement préjudiciable à M. [X] [E], qui se voit interdire toute possibilité d'exercer une activité industrielle et commerciale dans son domaine de compétences techniques, outre des propos dénigrants tenus à l'encontre de la société MGT, outre leur caractère mensonger, lui ayant occasionné un manque à gagner, ainsi qu'un préjudice d'image.
Vu les dernières conclusions en date du 16 novembre 2021, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SAS [E] demande à la cour de :
'- CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :
- reconnu l'existence sinon la validité de la cession des marques [E] n°1458311 et n°1458312 opérées en faveur de la société [E] ;
- déclaré nulle la marque française [E] N°16/4 242 041 par application de l'article L. 711-4 du Code de la Propriété Intellectuelle ou, subsidiairement, par application de l'article l. 712-6 du même Code et par suite ordonné la transmission du jugement aux fins d'inscription par l'INPI ;
- dit que la société MGT a commis des actes de concurrence déloyale pour usurpation du nom commercial [E] ;
- fait interdiction à la société MGT de poursuivre l'utilisation du nom '[E]' à titre de nom commercial ou comme partie intégrante d'un tel nom dans le cadre de son activité de vente de réducteurs, de motoréducteurs et de leurs pièces, ceci, sous astreinte provisoire de 300 € par infraction dûment constatée, à l'issu d'un délai d'un mois suivant la signification du jugement ;
- déclaré irrecevables ou mal fondées Monsieur [X] [E] et la société MGT en toutes leurs demandes reconventionnelles et les en déboutés ;
- RECEVOIR la société [E] en son appel incident, le dire bien fondé ;
- JUGER irrecevables, car nouvelles, les demandes en nullité et en inopposabilité de la cession de marque invoquée au principal pour défaut d'inscription à temps à l'INPI.
Et, sur le fond :
- INFIRMER le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Strasbourg le 24 septembre 2019 en ce qu'il a :
- débouté la société [E] de la demande en contrefaçon de marque qu'elle a dirigée contre la société MGT et [X] [E] et de sa demande consécutive d'ordonner la publication du jugement ;
- condamné la seule société MGT à payer à la société [E] une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du seul préjudice moral subi du fait des actes de concurrence déloyale sanctionnés en première instance ;
- débouté la société [E] de sa demande en concurrence déloyale en ce qu'elle était dirigée contre la société MGT pour détournement de son savoir-faire ;
Et statuant à nouveau :
- CONDAMNER conjointement et solidairement Monsieur [X] [E] et à la société MGT, en réparation du préjudice qu'ils ont causé à la société [E] du fait des actes de contrefaçon de marque, à lui verser la somme de 50.000 euros ;
- CONDAMNER conjointement et solidairement Monsieur [X] [E] et à la société MGT, en réparation du préjudice qu'ils ont causé à la société [E] du fait de tous les actes de concurrence déloyale sanctionnés, à lui verser la somme globale de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- ORDONNER la publication de l'arrêt à intervenir, intégralement ou par extraits, dans trois journaux ou magazines au choix de la société [E], le coût total de chacune de trois insertions ne pouvant excéder 5.000 euros à la charge de Monsieur [X] [E] et de la société MGT ;
- CONDAMNER conjointement et solidairement Monsieur [X] [E] et la société MGT au paiement de la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- CONDAMNER conjointement et solidairement Monsieur [X] [E] et la société MGT aux entiers dépens.'
et ce, en invoquant, notamment :
- la titularité des marques '[E]' n° 1458 311 et 312, par la cession explicite de l'ensemble des éléments corporels et incorporels du fonds de commerce, et en l'absence d'application des formalités d'inscription, invoquées nouvellement par les appelantes, et donc irrecevables à titre principal,
- la nullité de la marque '[E]' n° 16/4242041 déposée ultérieurement, pour atteinte au droit antérieur sur la marque identique '[E]', et subsidiairement pour atteinte aux droits antérieurs sur la dénomination sociale et le nom commercial, ainsi que, plus subsidiairement encore, compte tenu du caractère frauduleux du dépôt,
- la contrefaçon de la marque '[E]' dont elle serait titulaire, par l'usage d'un nom commercial portant atteinte aux droits de la marque antérieure, à savoir pour commercialiser des produits identiques à ceux couverts par cette marque, et ce en faisant un usage de mauvaise foi du nom portant atteinte aux droits de la marque, compte tenu du lien évident avec celle-ci, générant une confusion,
- la commission, par la société MGT, de faits distincts de concurrence déloyale, tel que retenu par le tribunal, pour usurpation du nom commercial '[E]', mais également pour détournement de savoir-faire, déjà commis précédemment au préjudice de la société reprise Usines [E],
- le mal fondé des demandes reconventionnelles des appelants, en confirmation du jugement entrepris, à défaut de tout usage déceptif du signe '[E]', cet usage ne créant aucune confusion, ni sur la nature, ni sur la qualité, ni sur la provenance géographique des produits et services, en l'absence, également de toute contrefaçon de la marque '[E]' n° 16/4242041, entachée de nullité, ainsi que de toute justification de l'interdiction de l'usage du nom '[E]' par la concluante à divers titres, la commission d'actes de concurrence déloyale, plus précisément de dénigrement, et, comme invoqué nouvellement à hauteur de cour, de parasitisme étant également réfutée.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 08 décembre 2021,
Vu les débats à l'audience du 13 décembre 2021,
Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS :
Sur la titularité des marques '[E]' n° 1458311 et 1458312 :
Sur le transfert de la propriété des marques à la SAS [E] :
M. [X] [E] et la société MGT poursuivent l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré valable la cession des marques nominale et semi-figurative précitées au profit de la SAS [E], en faisant, tout d'abord, valoir que cette cession au profit de la société Itafran, cessionnaire de la société Usines [E], puis du sous-cessionnaire la SAS [E], serait nulle à défaut d'écrit, par application de l'article L. 714-1 du code de la propriété intellectuelle (CPI), dans sa version applicable, arguant de l'indépendance juridique de la marque au sein du fonds de commerce, l'enregistrement de la marque ne figurant pas parmi les éléments du fonds de commerce repris.
Ils réfutent, en outre, le caractère implicite de la cession, en raison de l'interprétation littérale qui devrait être celle des dispositions précises du jugement ordonnant la première cession, corrélée à l'absence de mention des marques dans le plan de cession et dans l'offre de reprise, ainsi que du prix payé pour les éléments incorporels, la portée de la mention 'notamment' figurant dans l'acte de cession étant contestée, comme conférant un objet incertain à la cession, ôtant ainsi à l'acte une condition essentielle de validité, et ne permettant pas, ultérieurement, à la société Itafran de céder des marques dont elle n'avait pas la disposition, la force probante des attestations produites par la partie adverse étant, par ailleurs, contestées.
En réponse, la SAS [E] se réfère aux termes du jugement entrepris, invoquant l'inutilité d'une mention précise de la cession de la marque, compte tenu de la cession de l'intégralité des éléments incorporels du fonds de commerce, sans énumération limitative des éléments cédés qui ne seraient mentionnés, pour certains, qu'à titre indicatif. Elle entend rappeler que l'exclusion de la marque des actifs cédés serait incohérente alors que celle-ci aurait toujours été exploitée en lien avec le fonds de commerce dont elle constituerait un accessoire. Elle en déduit que les termes de l'acte de cession seraient en cohérence avec le jugement arrêtant la cession, ce que confirmerait de manière également cohérente le liquidateur de la société Usines [E].
Sur ce, la cour rappelle qu'aux termes de l'article L. 714-1 du CPI, tel qu'applicable à la cause, c'est-à-dire tel qu'issu de l'ordonnance n° 2001-670 du 25 juillet 2001, 'Les droits attachés à une marque sont transmissibles en totalité ou en partie, indépendamment de l'entreprise qui les exploite ou les fait exploiter. La cession, même partielle, ne peut comporter de limitation territoriale (...)
Le transfert de propriété, ou la mise en gage, est constaté par écrit, à peine de nullité.'
Or, en l'espèce, le jugement du 1er juillet 2014 arrêtant le plan de cession de la société Usines [E] mentionne explicitement que cette société cède les éléments incorporels et corporels de son fonds de commerce à la société Itafran, le prix de cession des éléments incorporels étant fixé à 25 000 euros, l'acte de cession en date du 30 septembre 2014 conclu entre les sociétés Usines [E] et Itafran indiquant que les éléments incorporels de l'entreprise comprenant notamment le nom commercial, la clientèle, l'achalandage et un certain nombre de contrats qu'il énumère, sans exclure, pour autant, la marque. À ce titre, si les dispositions de l'article L. 714-1 précitées du CPI requièrent que le transfert de propriété de la marque soit constaté par écrit, il n'en résulte pas, pour autant, que la mention de la marque soit nécessairement détaillée dans le contrat de cession, alors même que celui-ci porte, en l'espèce, sur l'intégralité des éléments incorporels, ce qui inclut, au-delà des seuls éléments indissociables du fonds ou ordinairement cédés avec celui-ci, tous les autres éléments incorporels parmi lesquels figurent nécessairement les marques, la mention particulière de certains de ces éléments dans l'acte de cession du 30 septembre 2014 n'ayant pas pour effet, au regard de la rédaction de cet acte telle qu'elle vient d'être rappelée et des termes du jugement arrêtant le plan de cession, d'exclure les marques du champ de la cession.
C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a fait, sur cette question, une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.
Sur la nullité de la cession en ce que les formalités d'inscription à l'INPI n'auraient pas été respectées :
M. [E] et la société MGT demandent à la cour, à titre subsidiaire de 'constater' qu'en toute hypothèse, la cession intervenue est nulle en ce que les formalités d'inscription de l'article L. 143-17 du code de commerce n'ont pas été respectées.
La SAS [E] conclut à titre principal à l'irrecevabilité de cette prétention pour nouveauté, et subsidiairement à son mal fondé.
Sur la recevabilité de la demande :
L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai de préfix, la chose jugée.
Et aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. En outre, il résulte des articles 565 et 566 du même code que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent, les parties pouvant aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.
En l'espèce, M. [E] et la société MGT affirment que leur demande tend aux mêmes fins que celles qu'ils ont formulées en première instance, à savoir la nullité de la cession des marques n°1458312 et n°1458311, la SAS [E] objectant, à l'appui de sa fin de non-recevoir, que si les appelants avaient déjà demandé en première instance la nullité de la cession de la marque enregistrée sous le n° 1 458 312, ce chef de dispositif devait s'interpréter à la lumière de la motivation de leurs conclusions devant le premier juge, dans lesquelles ils auraient plaidé l'inexistence de la cession des marques à défaut d'avoir été expressément visées au moment de la cession du fonds de commerce et non pas la nullité d'une cession quelconque, dont ils nient précisément l'existence.
Cela étant, il apparaît que M. [E] et la société MGT ont sollicité en première instance que le tribunal :
- déclare in limine litis la SAS [E] irrecevable à agir en contrefaçon des marques nominale et semi-figurative [E] n°1458312 et n°1458311,
- au fond et à titre principal, constate la nullité de la cession des marques précitées et dise que, n'ayant jamais été titulaire de droits sur lesdites marques, la SAS [E] ne disposait pas du droit d'agir en nullité à l'encontre de la marque [E] n° 4242041.
À hauteur de cour, les appelants sollicitent, notamment, ainsi qu'il a été rappelé, d'une part le prononcé de la nullité de la cession des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311, d'autre part et à titre subsidiaire, le prononcé de 'la nullité de la cession des marques nominale et semi-figurative [E] n° 1458312 et n° 1458311, en raison du non-respect des formalités d'inscription de l'article L. 143-17 du Code de commerce'.
Si la demande subsidiaire relève, en effet, d'un moyen nouveau, elle tend, en revanche, aux mêmes fins que la prétention soumise au premier juge, à savoir à obtenir la nullité de la cession des marques litigieuses.
La prétention de M. [E] et de la société MGT à ce titre doit donc être déclarée recevable.
Sur le bien-fondé de la demande :
Selon l'article L. 143-17 du code de commerce, dans sa version applicable en la cause, pris en son premier alinéa, 'outre les formalités d'inscription mentionnées à l'article L. 143-16, les ventes ou cessions de fonds de commerce comprenant des marques de fabrique et de commerce, des dessins ou modèles industriels, ainsi que les nantissements de fonds qui comprennent des brevets d'invention ou licences, des marques ou des dessins et modèles, doivent être inscrits à l'Institut national de la propriété industrielle, sur la production du certificat d'inscription délivré par le greffier du tribunal de commerce, dans la quinzaine qui suivra cette inscription, à peine de nullité à l'égard des tiers, des ventes, cessions ou nantissements en ce qu'ils s'appliquent aux brevets d'invention et aux licences, aux marques de fabrique et de commerce, aux dessins et modèles industriels.'
Par ailleurs, aux termes de l'article L.714-7 du Code de la propriété intellectuelle, toute transmission ou modification des droits attachés à une marque enregistrée doit, pour être opposable aux tiers, être inscrite au registre national des marques.
M. [E] et la société MGT contestent, au titre de la disposition première citée, la validité de la cession des marques litigieuses, faute d'inscription de celles-ci à l'INPI dans les quinze jours du jugement du 1er juillet 2014 arrêtant le plan de cession, invoquant l'application de cette disposition comme régissant la vente des fonds de commerce, et contestant que celles-ci, d'ordre public, auraient été supprimées ou abrogées, coexistant avec les dispositions spécifiques régissant la transmission des marques.
La SAS [E], pour sa part, entend relever le caractère relatif de la nullité invoquée par la partie adverse, qui s'analyserait comme la détermination d'un critère d'ordre entre des créanciers gagistes ou privilégiés ensuite d'une vente de fonds de commerce et relèverait donc de l'inopposabilité, et ce alors que les appelants ne revendiqueraient aucun droit ou garantie sur les marques cédées. Elle ajoute que la disposition invoquée par les appelants aurait été abrogée par les effets d'une disposition spéciale en 2008.
Elle affirme, en outre, que la chaîne des deux cessions successives a bien été inscrite au Registre national des marques à la date du 14 janvier 2016 pour la rendre opposable aux tiers, notamment aux appelants, quand bien même la première cession, ordonnée par jugement au profit d'Itafran, n'a été inscrite qu'à cette date.
Sur ce, la cour observe que les dispositions de l'article L. 714-7 du CPI, qui prévoit l'opposabilité aux tiers de toute transmission ou modification des droits attachés à une marque enregistrée au registre nationale des marques, relèvent d'une règle d'application générale en matière de marques, qui n'est pas invoquée par M. [E] et la société MGT, son respect n'étant, d'ailleurs, pas en cause, puisque, comme le fait observer la société [E], les deux cessions successives ont donné lieu à une inscription au registre national des marques.
S'agissant, en revanche, de l'article L. 143-17 du code de commerce, qui enferme l'inscription dans des conditions de délais, il a pour objet, sans contradiction avec la précédente disposition, de préserver les droits des tiers revendiquant des droits ou des garanties sur l'actif cédé, par rapport aux privilèges du vendeur ou du créancier nanti, comme cela ressort clairement, si ce n'est de la rédaction de la disposition litigieuse, à tout le moins de l'article R. 143-11 du même code, pris pour son application, lequel dispose que : 'lorsque les ventes ou cessions de fonds de commerce comprennent des marques de fabrique et de commerce et des dessins ou modèles industriels et lorsque les nantissements de ces fonds comprennent des brevets d'invention ou licences, des marques ou des dessins et modèles, le certificat d'inscription délivré par le greffier du tribunal de commerce, conformément à l'article L. 143-17, mentionne :
1° La nature, la date et le numéro de l'inscription effectuée au greffe ;
2° La forme et la date de l'acte de vente ou de l'acte constitutif du nantissement ;
3° L'identité et l'adresse du créancier gagiste et du débiteur ;
4° La désignation du fonds de commerce ainsi que la nature et les références des titres de propriété industrielle concernés.'
De même, l'article L. 143-16 du code de commerce figurant à la même section que l'article L. 143-17 précité mentionne bien que 'l'inscription et la radiation du privilège du vendeur ou du créancier gagiste sont soumises à des formalités dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'Etat.'
Dès lors que les appelants contestent la validité de la cession de marque et non le privilège du vendeur ou du créancier gagiste, leur demande en prononcé de la nullité du contrat, laquelle s'analyse, au demeurant, en une inopposabilité, n'est pas fondée et il y a lieu de les en débouter.
Au regard de ce qui précède, et la cession de marques par la société Itafran qui la détenait valablement, à la société [E], étant, elle aussi, régulière, c'est donc également à bon droit que le premier juge a retenu que la SAS [E], ayant la qualité de propriétaire des marques numéros 1458311 et 1458312, qui lui ont été valablement cédées, est recevable en son action.
Sur la déchéance des marques '[E]' n°1458311 et 1458312 :
M. [E] et la société MGT entendent, à titre subsidiaire, solliciter, en infirmation du jugement entrepris, la déchéance des marques litigieuses, contestant le raisonnement du premier juge qui a retenu un usage à titre de nom commercial. Ils invoquent un usage de la marque propre à induire en erreur sur sa titularité en faisant croire à une fausse continuité familiale de l'activité de la société Usines [E], et donc en induisant le public en erreur sur la nature des produits que la SAS [E] commercialise, peu importe qu'elle puisse prétendre à la titularité de la marque. Ils observent que, nonobstant la modification des sites internet de la SAS [E], la confusion persisterait et, notamment, que le signe '[E]' serait constamment accolé aux nombreux produits commercialisés par cette société, avec mention dans un onglet 'Fabrication' que les pièces de rechange sont 'certifiées marque [E]'. En outre, au-delà de la confusion entretenue s'agissant des produits, la SAS [E] ferait figurer des informations trompeuses relatives à l'implantation internationale du groupe Usines [E] qui n'existerait plus.
En réplique, la SAS [E], qui entend rappeler avoir fait régulièrement l'acquisition des marques, soutient utiliser le signe '[E]' en tant que marque pour désigner des produits ou services de la société mais en tant que dénomination sociale. Elle affirme que les éléments reproduits ne feraient que relater l'histoire et les caractéristiques de la société, outre que les informations prétendument erronées n'auraient aucun lien avec la nature, la qualité ou la provenance des produits ou services sur lesquels les marques sont apposées puisqu'elles concerneraient également la société en elle-même (réseau à l'international, outils de production, agrément ISO). Elle ajoute ne reprendre sur son site, qui aurait été d'ailleurs rapidement modifié, que des éléments avérés concernant [F] [E] et l'évolution ultérieure de la société, outre que M. [X] [E] ne justifierait d'aucune notoriété particulière attachée à son nom patronymique, indispensable pour justifier que le consommateur serait susceptible d'associer immédiatement tout produit commercialisé sous ce nom à sa personne, les pièces produites par la partie adverse ne faisant qu'établir la notoriété postérieure des Usines [E], d'autant que M. [F] [E] lui-même aurait consenti à l'usage de la dénomination comme nom commercial et marque indépendamment de sa personne, la société Usines [E] ayant ainsi disposé d'un droit propre à l'usage de ce nom, cédé à la concluante.
Ceci précisé, la cour rappelle qu'aux termes de l'article L. 714-6 du CPI, encourt la déchéance de ses droits le propriétaire d'une marque devenue de son fait :
a) La désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service ;
b) Propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service.
En l'espèce, la cour considère, au vu des éléments qui lui sont soumis, et notamment les extraits de site internet versés respectivement par chacune des parties, que la référence, par la SAS [E], à l'historique de la société Usines [E] et à son fondateur, [F] [E], ne relève pas en lui-même de l'usage d'une marque, attachée à un produit ou un service particulier qu'elle viserait à distinguer, le premier juge ayant fait, sur ce point, une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel.
Si, par ailleurs, la mention 'certifiées marque [E]' est, tout de même, accolée aux pièces de rechange, il n'est pas démontré en quoi elle serait trompeuse, puisque liée à l'activité de la société titulaire des marques, c'est-à-dire en dernier lieu la SAS [E], qui les tenait, fût-ce indirectement, de la société Usines [E], cette marque, comme la dénomination de la société, constituant un objet de propriété incorporelle distinct de la personne de son fondateur, M. [F] [E], tout comme de celle de M. [X] [E], fils du précédent, qui n'apporte la preuve d'aucune notoriété propre et suffisante de son patronyme de nature à créer une confusion quant à l'origine des pièces litigieuses, les intéressés ayant d'ailleurs laisser perdurer cette dénomination alors même qu'ils n'étaient plus actionnaires et, s'agissant de M. [F] [E], plus le dirigeant de la société Usines [E].
Il convient, dès lors, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [E] et la société MGT de leur demande en déchéance.
Sur la demande d'annulation du dépôt, par M. [X] [E], de la marque verbale '[E]' n° 4242041 :
La cour rappelle qu'aux termes de l'article L. 711-4 du CPI, dans sa version issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment :
a) A une marque antérieure enregistrée ou notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle ;
b) A une dénomination ou raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ;
c) A un nom commercial ou à une enseigne connus sur l'ensemble du territoire national, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ;
d) A une appellation d'origine protégée ou à une indication géographique ;
e) Aux droits d'auteur ;
f) Aux droits résultant d'un dessin ou modèle protégé ;
g) Au droit de la personnalité d'un tiers, notamment à son nom patronymique, à son pseudonyme ou à son image ;
h) Au nom, à l'image ou à la renommée d'une collectivité territoriale.
En l'espèce, il est fait grief, par la SAS [E], à M. [X] [E] d'avoir, par le dépôt de la marque susmentionnée, dont il est sollicité la nullité à ce titre, porté atteinte à ses droits antérieurs sur sa marque strictement identique '[E]', comme concernant des produits identiques ou similaires relevant des mêmes classes, sous la même dénomination, induisant un risque de confusion, d'ailleurs déjà réalisé ;
- subsidiairement, d'avoir porté atteinte :
* à ses droits antérieurs sur sa dénomination sociale antérieure, également strictement identique, le dépôt de la marque ayant été effectué après l'immatriculation de la société et l'utilisation du signe, sans incidence de la conservation de la personnalité juridique de la société Usines [E] pour les besoins de la procédure collective, ni de l'absence d'autorisation de la cession par M. [E],
* ainsi que d'avoir porté atteinte à ses droits sur son nom commercial antérieur, là encore, selon elle, strictement identique, sans nécessité d'utiliser la mention « Usines », et assorti d'une notoriété qu'elle se serait efforcée de perpétuer ;
- enfin, plus subsidiairement, d'être entaché de fraude, M. [E], dont elle entend invoquer la mauvaise foi, étant parfaitement informé de l'usage antérieur du signe [E], déposé à titre de marque depuis 1988 par les Usines [E] et largement utilisé à ce titre aussi bien qu'à titre de dénomination sociale et de nom commercial depuis plusieurs décennies, sans que M. [E] ne puisse invoquer le bénéfice d'un précédent jugement ayant rejeté l'action en contrefaçon de marque intentée contre M. [E] et MGT, la fraude étant ici reprochée à raison du dépôt du signe [E] comme marque auprès de l'INPI, et non en raison de l'activité concrète exercée par la société MGT.
Pour leur part, M. [E] et la société MGT contestent, au-delà de la titularité de la marque par la SAS [E] et de la régularité des renouvellements des marques, faute d'avoir été effectuée, selon eux, par leurs propriétaires, l'existence d'une antériorité opposable de la société [E] au titre de la dénomination sociale comme du nom commercial, dont relèverait seule la dénomination 'Usines [E]', non cédée à l'intimée et conservée par la société Usines [E] jusqu'à sa radiation en 2019, la société intimée ne pouvant pas davantage invoquer une dénomination sociale '[E]' enregistrée en fraude des droits de M. [E]. Ils contestent également l'opposabilité du nom commercial '[E]', seul le nom 'Usines [E]' ayant été cédé, sans preuve de sa notoriété contrairement au premier, et les deux signes pouvant, dès lors, coexister. Ils revendiquent également le droit de M. [E] d'user comme marque de son nom patronymique, à l'exclusion de toute fraude, rappelant la précaution prise par M. [E] de ne pas utiliser la marque '[E]' dans ses documents commerciaux, comme cela a été reconnu dans le cadre du litige l'opposant au liquidateur de la société Usines [E]. Ils ajoutent que M. [E] n'avait pas la qualité de cédant et n'est donc tenu d'aucune garantie à ce titre envers le cessionnaire Itafran et le sous-cessionnaire SAS [E].
Cela étant, la cour observe que, lors du dépôt par M. [X] [E], en date du 20 janvier 2016, de la marque '[E]', sous le n° 4242041, la SAS [E] était déjà propriétaire de la marque '[E]', numérotée 1458312, qui lui avait été cédée par la société Itafran, qui elle-même la tenait de la société Usines [E], comme la cour l'a retenu dans le cadre de l'examen de la titularité des marques n° 1458311 et 1458312. Dès lors, l'argumentation développée par M. [E] et la société MGT quant à la dénomination sociale et au nom commercial cédés, et l'issue du litige les opposant à la société Usines [E], représentée par son liquidateur, au titre de faits antérieurs relatifs à l'usage du nom commercial ou de la dénomination commerciale de cette dernière, apparaissent, à ce stade, inopérantes, d'autant que les appelants ne contestent pas factuellement que, comme cela ressort des éléments versés aux débats, les marques litigieuses portaient sur des produits similaires ou identiques, relevant des mêmes classes, tout en présentant des signes quasiment identiques, comme l'a justement relevé le premier juge, qui a retenu, à bon droit, la nullité du dépôt au regard de l'indisponibilité du signe, d'une part, d'un risque de confusion dans l'esprit du public caractérisé aux termes de motifs pertinents que la cour approuve d'autre part, sans qu'il n'y ait lieu, pour le surplus, d'examiner, dans ce cadre, le caractère frauduleux du dépôt.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré nul l'enregistrement de la marque '[E]' numéro 4242041 effectué par M. [X] [E], en date du 20 janvier 2016, ainsi qu'en ce qu'il a déclaré, par voie de conséquence, sans objet l'action en contrefaçon de marque formée par ce dernier.
Sur la demande des appelants tendant à l'interdiction d'usage du nom commercial '[E]' pour abus de nom :
Les appelants, qui entendent rappeler que les parents et héritiers du fondateur peuvent demander que l'usage du nom soit réglementé ou interdit si l'acquéreur fait abus du nom, mettent en doute l'étendue du consentement donné à l'usage du nom par le fondateur de la société Usines [E], seule la cession de cette dernière dénomination ayant, à leur sens, fait l'objet d'un accord, et seul le nom commercial, et non la dénomination sociale, ayant été cédé à l'intimée, laquelle ne pourrait contester la notoriété antérieure de M. [F] [E], et commettrait une utilisation abusive du nom commercial [E], induisant nécessairement un risque de confusion avec la société MGT, exerçant dans le même secteur d'activité, en faisant croire que la famille [E] est toujours impliquée dans la Société [E], la fabrication et la commercialisation de ses produits, ce qui constituerait un abus de nom relevant d'une pratique commerciale trompeuse, ainsi qu'une atteinte à la réputation et à l'honneur.
L'intimée, après s'être référé aux motifs du jugement dont appel, ajoute que M. [F] [E] aurait valablement donné son consentement à l'utilisation de son nom patronymique comme élément de la dénomination sociale et ce, dès la création de la société Usines [E], entendant également rappeler que l'intégralité des éléments composant le fonds de commerce de la société Usines [E] - en ce compris l'ensemble des éléments incorporels du fonds, à savoir les marques [E], le nom commercial [E] et les noms de domaine 'merger-gear' et 'merger-gear.com' - lui ont été cédés, y compris la dénomination sociale en dépit du maintien de la personnalité juridique de la société Usines [E] pour les besoins de la procédure collective, tandis que M. [E] et la société MGT ne pourraient plus licitement utiliser le signe '[E]'.
Sur ce, la cour relève, tout d'abord, que, compte tenu des conclusions auxquelles elle est parvenue quant à la titularité de la marque 4242041, tant M. [E] que la société MGT ne peuvent invoquer le bénéfice des dispositions de l'article L. 713-6 du CPI, ainsi que l'a retenu le premier juge par des motifs qui seront adoptés.
Pour le surplus, M. [X] [E] ne démontre aucune atteinte à ses droits, laquelle ne peut résulter du seul usage du nom dont il est porteur, ni aucun usage abusif du nom '[E]', nom commercial utilisé depuis de nombreuses années sur le territoire national et régulièrement acquis par la société [E], laquelle n'a pas commis d'abus ou ne s'est pas livrée à une pratique commerciale trompeuse en se référant à des éléments factuels concernant la société Usines [E] dont elle détient les droits, et le rôle qu'y a tenu M. [F] [E], la création d'une nouvelle structure en 2015 ayant ainsi été mentionnée.
Le jugement entrepris sera, dès lors, également confirmé à ce titre.
Sur les actes de concurrence déloyale reprochés par M. [X] [E] et la société MGT à la société [E] :
À ce titre, M. [X] [E] et la société MGT entendent, tout d'abord, contester la cession à la société [E] de l'usage de la dénomination sociale '[E]' et des noms de domaine 'merger.fr' et 'merger-gear.com' laquelle n'aurait, d'une part, jamais été autorisée, et, d'autre part, porte préjudice à la société MGT qui bénéficie d'une antériorité sur ce signe.
Cela étant, il sera rappelé qu'il a déjà été répondu sur ce point aux parties appelantes, tant en ce qui concerne la cession à la société [E] de l'ensemble des éléments incorporels du fonds de commerce, qu'à l'absence de titularité de M. [E] et de la société MGT quant à la marque '[E]' et de son incidence sur le droit de ceux-ci à en contester l'usage.
Si les appelants entendent voir, plus particulièrement, interdire à la société [E] l'usage de la dénomination sociale '[E]', prise isolément, à défaut d'autorisation, seule la dénomination 'Usines [E]' ayant été, selon eux, cédée, il sera relevé que le patronyme '[E]', fût-ce accolé à la mention non distinctive 'Usines' liée à l'activité de l'entreprise, pour désigner la société a fait l'objet d'un usage constant et consenti par M. [F] [E], et ce, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, alors même qu'il n'était plus impliqué dans le fonctionnement de la société, de sorte que, par une cession implicite, le patronyme était devenu un signe distinctif qui s'était détaché de la personne physique qui le porte, pour s'appliquer à la personne morale qu'il distingue, et devenir ainsi objet de propriété incorporelle.
C'est donc à bon droit que le premier juge a considéré qu'au vu des droits respectifs des parties, il ne pouvait être fait interdiction à la société [E] d'utiliser cette dénomination sociale, ainsi que les noms de domaine dont il vient, de surcroît, d'être rappelé que la SAS [E] en était valablement titulaire.
Quant aux actes de parasitisme que la société MGT et M. [E] entendent imputer à la SAS [E], la cour rappelle les conclusions auxquelles elle est parvenue quant à l'absence d'usage abusif ou de pratique commerciale trompeuse de la part de la société intimée, la 'captation' invoquée par les parties appelantes n'étant, ainsi, pas caractérisée, au regard de l'usage de droits dont il a été reconnu que la SAS [E] disposait valablement, et ce compte tenu également des droits dont disposent ou non M. [E] et la société MGT, tels que la cour les a déterminés.
Et s'agissant des actes de dénigrement imputés par les appelants à l'intimée, il est rappelé qu'est en cause un courriel adressé le 15 novembre 2016 à une société Sulzgitter AG et précisant que '[E] SAS (...) conçoit et produit une gamme complète de réducteurs. Nous possédons tous les croquis et avons les droits pour fabriquer les réducteurs [E]. Nous disposons aussi de notre propre bureau de design et de notre propre usine : tous nos réducteurs sont faits main. A titre de comparaison, MGT ne fait que vendre des réducteurs mais ne les conçoit, ni ne les fabrique.'
La société MGT et M. [E] mettent en cause à la fois l'appréciation qualifiée de dénigrante de ce courriel, ainsi que la véracité des faits qu'ils relateraient dès lors que la société MGT concevrait certains de ses réducteurs dont un motoréducteur antidéflagrant que la société Sulzgitter aurait renoncé à lui commander, lui occasionnant ainsi un manque à gagner dont elle a sollicité réparation.
Cependant, au vu des éléments dont elle dispose, la cour considère, à l'instar du premier juge dont il convient d'approuver les motifs, qu'aucun préjudice n'apparaît caractérisé, à ce titre, par la société MGT, outre, du reste, que les appelants ne caractérisent, notamment, pas en quoi le message incriminé aurait reçu une publicité suffisante pour constituer un dénigrement.
Il convient donc de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté les demandes formées par M. [X] [E] et la société MGT au titre de la concurrence déloyale.
Sur les actes de contrefaçon de marques imputés par la SAS [E] à M. [X] [E] et à la société MGT :
La société [E], appelante à titre incident sur ce point, fait grief à la société MGT d'utiliser publiquement le nom [E] GEAR TRANSMISSION pour offrir des réducteurs ou des motoréducteurs et leurs pièces, créant ce lien prohibé entre ces produits et le titulaire de la marque première pour porter atteinte à son droit exclusif, créant ainsi auprès des clients potentiels une confusion entre les deux sociétés.
Pour sa part, M. [E] revendique un droit d'usage de son nom patronymique, de bonne foi, nonobstant sa réservation antérieure comme marque, dénomination sociale, ou comme nom commercial dans un domaine voisin, tout en entendant rappeler avoir fait le choix, afin d'éviter tout risque de confusion avec la société Usines [E] qui était encore existante, de limiter l'usage de son propre nom de famille et de modifier la dénomination sociale de sa société, en optant pour MGT. Les appelants contestent, en outre, tout usage à titre de marque, apposé sur les produits de la société.
Sur ce, la cour observe que si l'utilisation de la dénomination '[E]' est reprochée par la SAS [E] à M. [E] et à la société MGT, et s'il résulte effectivement des éléments versés aux débats qu'il a pu être fait usage de cette dénomination, en particulier dans des devis, sur le site internet des 'Pages Jaunes' ou sur son propre site internet, voire que cet usage a pu, nonobstant les précautions prises par M. [E], à tout le moins concernant la dénomination de la société dont il est le gérant, susciter des interrogations ou appeler à des clarifications, aucune utilisation comme marque, en contravention des articles L. 713-2, L. 713-3 du CPI, n'apparaît, pour autant, caractérisée.
Et si l'article L.713-6 du même code, dans sa version applicable à la cause, permet l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire à une marque enregistrée soit comme dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est soit antérieure à l'enregistrement, soit le fait d'un tiers de bonne foi employant son nom patronymique, soit comme référence nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée, à condition qu'il n'y ait pas de confusion dans leur origine, tout en permettant au titulaire de l'enregistrement de demander qu'elle soit limitée ou interdite si cette utilisation porte atteinte à ses droits, il convient de relever que la SAS [E] ne réclame pas une limitation ou une interdiction de l'utilisation de la marque au titre d'une atteinte à ses droits de titulaire de l'enregistrement, mais agit aux fins d'obtenir l'indemnisation d'actes de contrefaçon qui ne relèvent pas de l'application de cette disposition mais de l'usage des signes à titre de marque, étant, au demeurant, observé qu'elle ne caractérise de manière suffisante aucun préjudice au titre de l'utilisation qu'elle dénonce.
Il y a donc lieu à confirmation du jugement entrepris, également, sur ce point.
Sur les actes de concurrence déloyale reprochés par la SAS [E] à M. [E] et à la société MGT :
La société MGT et M. [E] contestent, tout d'abord, la possibilité pour la SAS [E] d'invoquer à titre subsidiaire des actes de concurrence déloyale simultanément à une demande principale sur le fondement de la contrefaçon pour les mêmes faits.
Subsidiairement, ils réfutent toute usurpation du nom commercial '[E]', entendant rappeler la liberté d'usage de son nom patronymique dont disposerait M. [E], y compris concernant la dénomination 'groupe [E]' désignant les sociétés qui le composent et ce alors que le nom commercial cédé à la société [E] serait 'Usines [E]', tandis que M. [E] serait le titulaire régulier de la marque '[E]' et qu'aucune atteinte ne serait portée à la dénomination 'Usines [E]'.
Ils démentent également toute utilisation illicite des plans de fabrication, comme retenu, selon eux à bon droit par le premier juge, tout en relevant que les plans ne feraient pas parties des éléments cédés de l'actif des Usines [E], et que partant, ces plans pourraient uniquement bénéficier de la protection au titre du savoir-faire, s'agissant de matériel conçu par M. [X] [E] et disponibles en libre accès depuis plusieurs années sur internet, ainsi que dans des catalogues distribués aux clients.
Pour sa part, la SAS [E] expose que l'utilisation par la société MGT ([E] Gear Transmissions) de la dénomination '[E]' comme nom commercial, comme reconnu depuis le mois d'avril 2012, constituerait une usurpation du nom commercial de l'intimée, peu important que ce soit pour désigner les sociétés du groupe, ce qui ne suffirait pas à écarter le risque de confusion à l'origine de cette usurpation. Elle ajoute que l'usage litigieux constitue un fait distinct de ceux de contrefaçon de marque.
Elle entend préciser qu'il ne serait pas contestable que le nom commercial lui a été cédé, outre que [F] [E] aurait bien consenti à l'utilisation de son nom patronymique en tant que dénomination sociale et de nom commercial et que M. [X] [E] ne justifierait pas de la notoriété de son patronyme.
Elle entend encore reformuler 'légèrement' les moyens de sa demande quant aux plans de fabrication, point sur lequel elle a été déboutée par le premier juge, rappelant qu'il avait déjà été jugé que la société MGT avait utilisé sans autorisation les plans de fabrication d'Usines [E], les mêmes faits lui étant reprochés en l'espèce en novembre 2016 et août 2018, la société MGT ayant à nouveau profité du savoir-faire acquis par la société [E], dont elle n'ignorait pas les droits, pour détourner des clients.
Sur ce, la cour considère, d'abord, que le grief tiré de l'usurpation du nom, dont elle a retenu précédemment qu'il ne relevait pas de faits pouvant motiver une action en contrefaçon de marques, peut, dès lors, être retenu en appui à une action en concurrence déloyale.
Sur le fond, l'usage du nom commercial [E] est avéré, et même reconnu par M. [E] et la société MGT, qui revendiquent l'appellation 'groupe [E]', y compris par mention sur le site internet de MGT, ce qui apparaît de nature à générer une confusion pour le visiteur du site, quand bien même elle viserait à désigner le groupe intégrant la holding financière [E] Invest et la société MGT, d'autant que le public visé concerne surtout des professionnels opérant dans un secteur où le savoir-faire de la société Usines [E] conserve une certaine réputation, comme en attestent les échanges entre les parties et d'autres professionnels révélateurs d'une certaine confusion quant à l'origine des produits. Or, comme l'a indiqué précédemment la cour, la société [E] était titulaire de la marque comme du nom commercial '[E]', de sorte qu'il a été porté atteinte à ses droits, ce dont il résulte un préjudice moral que le premier juge a justement évalué à 10 000 euros, la cour n'apercevant pas, au vu des éléments qui lui sont soumis, de remettre en cause cette appréciation, non plus que la mise à la charge de la seule société MGT de cette somme, dès lors que l'usurpation lui est imputable.
S'agissant de l'utilisation des plans de fabrication de la société Usines [E], la cour, qui n'est pas liée par l'appréciation qui aurait été faite au titre d'agissements antérieurs dans un litige opposant d'autres parties, relève, à l'instar du premier juge, que ces plans, dont rien ne permet d'établir qu'ils auraient fait l'objet d'un dépôt à titre de brevet ou de dessins et modèles, comme le font observer les appelants, n'apparaissent pas avoir été irrégulièrement mis à disposition de la société MGT, certains plans de fabrication se trouvant même, comme l'indique le premier juge, en libre accès sur le site 'merger.fr' ainsi que sur le catalogue de la société Usines [E] qui comporte de multiples dessins techniques et tableaux mentionnant les caractéristiques des produits.
Il y a donc lieu à confirmation du jugement déféré à la cour également en ce qu'il a débouté la SAS [E] de ses demandes en dommages-intérêts pour actes de concurrence déloyale.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
M. [X] [E] et la SARL MGT succombant pour l'essentiel, seront tenus in solidum des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.
L'équité commande en outre de mettre à la charge de M. [E] et de la SARL MGT, in solidum, une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 5 000 euros au profit de l'intimée, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de cette dernière et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Strasbourg,
Y ajoutant,
Déclare M. [X] [E] et la SARL MGT recevables en leur demande de nullité de la cession des marques '[E]' n°1458311 et 1458312 pour non-respect des formalités d'inscription à l'INPI,
Les en déboute,
Condamne in solidum M. [X] [E] et la SARL MGT aux dépens de l'appel,
Condamne in solidum M. [X] [E] et la SARL MGT à payer à la SAS [E] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [X] [E] et de la SARL MGT.
La Greffière :la Présidente :