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19/10/2022 | FRANCE | N°19/02756

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 19 octobre 2022, 19/02756


MINUTE N° 494/2022

























Copie exécutoire à



- Me Christine BOUDET



- Me Valérie SPIESER



- Me Thierry CAHN



- Me Loïc RENAUD





Le 19.10.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 19 Octobre 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A NÂ

° RG 19/02756 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HDSB



Décision déférée à la Cour : 30 Avril 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR - 1ère Chambre civile



APPELANT - INTIME INCIDEMMENT :



Monsieur [I] [B]

[Adresse 2]



Représenté par Me Christine BOUDET, avo...

MINUTE N° 494/2022

Copie exécutoire à

- Me Christine BOUDET

- Me Valérie SPIESER

- Me Thierry CAHN

- Me Loïc RENAUD

Le 19.10.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 19 Octobre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 19/02756 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HDSB

Décision déférée à la Cour : 30 Avril 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR - 1ère Chambre civile

APPELANT - INTIME INCIDEMMENT :

Monsieur [I] [B]

[Adresse 2]

Représenté par Me Christine BOUDET, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me PEGUET, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMES - APPELANTS INCIDEMMENT :

Monsieur [J] [V]

[Adresse 5]

Monsieur [H] [P]

[Adresse 7]

Monsieur [K] [F]

[Adresse 3]

SARL AGENCE CRISTAL

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 6]

Représentés par Me Valérie SPIESER, avocat à la Cour

La SELAS [N] ET ASSOCIÉS, mandataire liquidateur de la société FREDERIC CHOCOLATIER, en liquidation judiciaire

[Adresse 1]

Représentée par Me Loïc RENAUD de la SELARL ARTHUS, avocat à la Cour

SELARL [D] [O] prise en la personne de Maître [D]

[Adresse 4]

Représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me MATHIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

SELAS [N] & ASSOCIES,

prise en la personne de Me [M] [N] à titre personnel

[Adresse 1]

Représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me MATHIS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. ROUBLOT, Conseiller, et Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les assignations délivrées les 21, 22 et 23 juillet 2014, par lesquelles M. [J] [V], M. [H] [P], M. [K] [F] et la SARL Agence Cristal ont fait citer la SAS Chocolaterie Frédéric, la SELAS [G] [D] et [A] [O], prise en la personne de Me [G] [D], la SELAS [N] et Associés, prise en la personne de Maître [M] [N], la SA Frédéric Chocolatier et M. [I] [B] devant le tribunal de grande instance de Colmar,

Vu le jugement rendu le 30 avril 2019, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal de grande instance de Colmar a :

- déclaré irrecevables les demandes de M. [J] [V], M. [H] [P], M. [K] [F] et la SARL Agence Cristal dirigées contre la liquidation judiciaire de la SAS Chocolaterie Frédéric,

- les a déclarées recevables pour le surplus,

- débouté M. [J] [V], M. [H] [P], M. [K] [F] et la SARL Agence Cristal de leurs demandes dirigées contre la SELAS [N] et Associés,

- les a condamnés aux dépens à l'égard dé la SELAS [N] et Associés,

- débouté la SELAS [N] et Associés de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SELAS [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D] et M. [I] [B] in solidum à payer à M. [J] [V] la somme de 3 070,36 euros, in solidum avec la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à hauteur de la somme de 1 070,36 euros au titre de l'article L. 622-17 du code de commerce,

- condamné la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à l'égard de M. [J] [V] dans cette mesure,

- condamné la SELAS [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D] et M. [I] [B] in solidum à payer à M. [H] [P] la somme de 3 465,02 euros, in solidum avec la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à hauteur de la somme de l 465,02 euros au titre de l'article L 622-17 du code de commerce,

- condamné la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à l'égard de M. [H] [P] dans cette mesure,

- condamné la SELAS [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Me [G] [D] et M. [I] [B] in solidum à payer à M. [K] [F] la somme de 5 967,03 euros, in solidum avec la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à hauteur de la somme de 3 967,03 euros au titre de l'article L 622-17 du code de commerce,

- condamné la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à l'égard de M. [K] [F] dans cette mesure,

- condamné la SELAS [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D] et M. [I] [B] in solidum à payer à la SARL Agence Cristal la somme de 7 045,48 euros, in solidum avec la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à hauteur de la somme de 5 045,48 euros au titre de l'article L. 622-17 du code de commerce,

- condamné la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire à l'égard de la SARL Agence Cristal dans cette mesure,

- débouté la SELARL [G] [D] et [A] [O] de sa demande de dommages-intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [I] [B] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire, la SELAS [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D] et M. [I] [B] à payer à M. [J] [V], M. [H] [P], M. [K] [F] et la SARL Agence Cristal, une indemnité de 1 000 euros pour chacun d'eux, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la SA Frédéric Chocolatier en liquidation judiciaire, la SELAS [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Me [G] [D] et M. [I] [B] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Vu la déclaration d'appel formée par M. [I] [B] contre ce jugement, et déposée le 13 juin 2019, intimant M. [J] [V], M. [H] [P], M. [K] [F], la SELARL [D] [G] et [O] [A], la SELAS [N] et Associés et la société Frédéric Chocolatier,

Vu les constitutions d'intimés de :

- de la SELARL [D] [O], prise en la personne de Me [D], et de la SELAS [N] et Associés, prise en la personne de Me [M] [N], en date du 25 juin 2019,

- de MM. [J] [V], [H] [P], [K] [F] et de la SARL Agence Cristal en date du 6 août 2019, puis du 5 décembre 2019 à la suite d'un changement d'avocat,

- de la SAS Frédéric Chocolaterie 'prise en la personne de son liquidateur Me [N]' et de la SELAS [N] et Associés, ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS Frédéric Chocolatier en date du 16 décembre 2019,

Vu l'ordonnance de jonction avec la procédure n° RG 19/3579,

Vu les dernières conclusions en date du 4 décembre 2020, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [I] [B] demande à la cour de :

'DECLARER l'appel de Monsieur [B] recevable et bien fondé.

En conséquence,

INFIRMER le Jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur [B] à payer diverses sommes aux agents commerciaux.

STATUANT A NOUVEAU :

DECLARER les demandes des agents commerciaux irrecevables, en tous cas, mal fondées.

Les en DEBOUTER.

Les CONDAMNER aux entiers frais et dépens d'instance, ainsi qu'au paiement d'une

indemnité de 4.000 € en application de l'article 700 du CPC.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

DECLARER l'appel incident des agents mal fondé.

Le REJETER.

CONDAMNER les appelants incidents aux entiers frais.'

et ce, en invoquant, notamment :

- l'irrecevabilité, en application des articles L. 622-20 et L. 651-2 du code de commerce, des demandes, fondées sur l'action en responsabilité de droit commun, fût-ce en qualité de créanciers postérieurs, à défaut de constatation d'une absence d'insuffisance d'actif, comme à défaut de préjudice personnel et distinct de celui des autres créanciers, ces demandes ne pouvant, subsidiairement, concerner que des créances bénéficiant du traitement préférentiel, à savoir le solde des factures de commissions de Pâques 2013, à l'exclusion des autres,

- plus subsidiairement, sur le fond, le mal fondé des demandes, à défaut de caractérisation d'une faute intentionnelle d'une particulière gravité qui lui soit imputable personnellement, incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales, notamment au titre d'une dissimulation des agents commerciaux aux organes de la procédure dont le caractère délibéré ne serait pas établi, outre qu'il ne pourrait lui être reproché d'avoir poursuivi avec eux des relations à l'ouverture de la procédure de redressement sans dissimuler la situation de la société, les créances nées après le jugement ayant, de surcroît, été communiquées aux organes de la procédure, et le maintien de la procédure d'observation jusqu'en novembre 2013 pour favoriser le bon déroulement de la campagne de Noël, quand bien même la Chocolaterie Frédéric en a été l'opérateur et le bénéficiaire, ne constituant pas une faute inexcusable qui lui soit imputable, au regard de la définition des modalités de reprise, et en l'absence de dissimulation aux demandeurs, encore moins pour favoriser ses propres intérêts,

- à titre infiniment subsidiaire, l'absence d'imputabilité des préjudices au concluant, au regard des obligations qui étaient les siennes, et auxquelles il aurait satisfait, et en l'absence de contribution de sa part à l'insuffisance d'actif ou à la création du passif,

Vu les dernières conclusions en date du 28 mai 2020, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles MM. [J] [V], [H] [P], [K] [F] et la SARL Agence Cristal demandent à la cour de :

'DECLARER mal fondé Monsieur [I] [B] en son appel du jugement du Tribunal de Grande Instance de COLMAR en date du 30 avril 2019,

DEBOUTER Monsieur [I] [B] de l'ensemble de ses conclusions, fins et prétentions,

REJETER l'appel incident formé par la SELARL [D] & [O],

DEBOUTER la SELARL [D] & [O] de l'ensemble de ses conclusions, fins et prétentions,

REJETER l'appel incident formé par la SELAS [N] et Associés en qualité de mandataire liquidateur de la SA FREDERIC CHOCOLATIER,

DEBOUTER la SELAS [N] et Associés en qualité de mandataire liquidateur de la SA FREDERIC CHOCOLATIER de l'ensemble de ses conclusions, fins et prétentions,

DEBOUTER la SELAS [N] et Associés, prise en la personne de Maître [N] de l'ensemble de ses conclusions, fins et prétentions

CONFIRMER le jugementen ce qu'il a retenu les fautes de Monsieur [I] [B] et la Selarl [D] [G] et [O] et les a condamnés à payer des commissions, dommages et intérêts et indemnités de procédure,

CONSTATER que la SELARL [G] [D] et [A][O] priseen la personne de Maître [G][D], la SELAS [N] et ASSOCIES, prise en la personne de Maître [M] [N], Monsieur [I] [B] ont adopté une décision concertée pour la poursuite de l'activité des agents commerciaux en faveur de la société CHOCOLATERIE FREDERIC,

DIRE ET JUGER que la SELARL [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D], la SELAS [N] et ASSOCIES prise en la personne de Maître [M] [N], Monsieur [I] [B] et la Liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER ont commis desfautesqui engagent leur responsabilité et les obligent à réparer in solidum le préjudice que leurs fautes respectives ont concouru à créer chez Messieurs [V], [P], [F] et l'AGENCECRISTAL,

En conséquence :

RECEVANT Monsieur [J] [V], Monsieur [H] [P], Monsieur [K] [F] et la Sarl AGENCECRISTAL en leur appel incident,

Et REFORMANT sur les sommes allouées par le jugement déféré :

CONDAMNER la SELARL CMWEILet [A] [O] prise en la personne de Maître [G][D], la SELAS [N] et ASSOCIES, prise en la personnede Maître [M] [N], Monsieur [I] [B], etla liquidationjudiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER in solidum à payer les sommes de :

- 12 660,86 € à MonsieurJean-Claude [V] en réparation de son préjudice, dont 3 702,36 € au titre de l'article L.622-17 du Code de Commerce par la liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER ;

- 34 457,50 € à la SARL AGENCE CRISTAL en réparation de son préjudice, dont 12 361.92 €au titre de l'article L.622-17 du code de Commerce par la liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER ;

- 7 580,82 €à Monsieur [H] [P] en réparation de son préjudice matériel, dont 2 738.84 au titre de l'article L. 622-17 du Code de Commerce par la liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER ;

- 24 321,12 € à Monsieur [K] [F] en réparation de son préjudice matériel, dont 9 287.95 € au titre de l'article L.622-17 du Code de Commerce par la liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER ;

CONDAMNER la SELARL [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D],la SELAS [N] etASSOCIES, prise en la personne de Maître [M] [N], Monsieur [I] [B], etla liquidationjudiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER insolidum à payer la somme de :

- 5 000,00 €à Monsieur [J] [V] en réparation deson préjudice moral;

- 5 000,00 € à la SARL AGENCECRISTAL en réparation du préjudice moral subi par son dirigeant Monsieur [S] [W] ;

- 5 000,00 € à Monsieur [H] [P] en réparation de son préjudice moral ;

- 5 000,00 € à Monsieur [K] [F] en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNER la SELARL [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G] [D], la SELAS [N] et ASSOCIES, prise en la personne de Maître [M] [N], Monsieur [I] [B] et la liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER insolidum à payer la somme à parfaire de 5 000,00 € à chacun de Monsieur [J] [V], la SARL AGENCE CRISTAL, Monsieur [H] [P], Monsieur [K] [F] au titre de l'article 700du Code de procédure civile ;

CONDAMNER la SELARL [G] [D] et [A] [O] prise en la personne de Maître [G][D], la SELAS [N] et ASSOCIES prise en la personne de Maître [M] [N], Monsieur [I] [B] et la liquidation judiciaire de la société FREDERIC CHOCOLATIER in solidum aux entiers dépens de l'instance.

et ce, en invoquant, notamment :

- la recevabilité de leurs demandes, en qualité de créanciers postérieurs méritants, agissant dans le cadre d'une responsabilité civile de droit commun des dirigeants, et n'ayant pas à déclarer leur créance,

- sur le fond, la responsabilité de M. [B], qui ne les aurait pas avertis de l'ouverture d'une procédure collective, et n'aurait pas davantage informé, en tout cas de manière claire et loyale, les organes de la procédure de leur existence, ce qui constituerait une omission consciente caractérisant une faute séparable de sa fonction,

- la responsabilité 'in solidum' des organes de la procédure, que ce soit la SELARL [D] et [O], en qualité d'administrateur judiciaire, qui avait connaissance de leur réseau, alors qu'une partie des commissions des campagnes de Pâques et Noël 2013 ont été payées après le jugement d'ouverture, et dont émane la requête en prolongation de la procédure d'observation, qui a permis à la société Chocolaterie Frédéric de bénéficier des suites du travail des agents, ou, en infirmation du jugement, la SELAS [N] et Associés qui aurait 'uvré pour la prolongation de la période d'observation, sans s'être souciée des ruptures éventuelles des modes de prospection de la clientèle qu'une simple lecture des comptes d'exploitation pouvait lui permettre de connaître,

- un préjudice, consécutif aux actes de dissimulation et omission reprochés tant à M. [B] qu'aux organes de la procédure, à défaut de règlement de la totalité des commissions portant sur la campagne de Pâques 2013, ainsi que de l'ensemble des commissions pour Noël 2013 et Pâques 2014, et en l'absence de règlement de l'indemnité compensatrice de préavis non effectué et l'indemnité de cessation de contrat d'agence, pour l'indemnisation desquelles aucune déclaration de créance ne serait nécessaire, un préjudice moral étant également mis en compte au regard de l'ancienneté de la relation entre les agents et la société avec laquelle ils entretenaient une relation de confiance trahie par les conditions de leur éviction,

Vu les dernières conclusions en date du 4 décembre 2019, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SELARL [D] et [O], prise en la personne de Me [D], demande à la cour de :

- rejeter comme irrecevables les demandes des requérants,

- par conséquent, infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes de MM. [V], [P], [F] et de la société Agence Cristal,

- subsidiairement, dire et juger que les requérants n'apportent la preuve d'aucune faute imputable à la concluante en lien causal direct avec un préjudice certain,

- par conséquent, débouter MM. [V], [P], [F] et la société Agence Cristal de leurs demandes, fins et conclusions,

- infirmer le jugement en ses dispositions emportant condamnation de la concluante,

- condamner in solidum MM. [V], [P], [F] et la société Agence Cristal à lui payer une somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

et ce, en invoquant, notamment :

- l'irrecevabilité des demandes, en l'absence de créances admises, et dès lors qu'à suivre leur raisonnement, ils demanderaient simplement réparation de leur quote-part d'un préjudice qui aurait été subi par l'ensemble des créanciers de la procédure collective, et en réparation duquel ils n'ont pas qualité à agir,

- l'absence de faute imputable à l'administrateur judiciaire, pourvu d'une simple mission d'assistance, n'ayant donné aucune instruction aux requérants concernant leur activité, sans exiger la poursuite de leurs contrats, dont il ignorait l'existence avant le 8 octobre 2013 et qu'eux-mêmes ne l'ont pas mis en demeure de poursuivre, ni fourni de garantie de paiement, alors qu'il appartenait à M. [B] de lui soumettre leurs demandes de paiement de commission au demeurant modiques au regard du chiffre d'affaires de la société, et pour certaines postérieures à la cession, tandis que le maintien de la période d'observation était justifié, d'une part pour permettre la régularisation des actes de cession, d'autre part pour favoriser la commercialisation des produits référencés 'Frédéric Chocolatier' pour la période de Noël,

- l'absence de préjudice et de lien causal, en l'absence de mise en demeure à l'administrateur s'agissant de contrats en cours dans le cadre d'une procédure collective dont le jugement d'ouverture, publié, est opposable à tous, et s'agissant de demandes concernant des créances échues à l'ouverture de la procédure collective ou d'indemnités imputables à la société cédante ou de préjudices hypothétiques et ne correspondant pas à des prestations réalisées pour la société cédante, alors qu'il appartenait aux requérants de s'assurer de la qualité de leur mandant, outre un préjudice moral ni argumenté, ni justifié.

Vu les dernières conclusions en date du 5 mars 2020, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SELAS [N] et Associés demande à la cour de :

'Rejeter comme irrecevables les demandes des requérants,

Subsidiairement,

Dire et juger que l'ensemble des requérants ne rapporte la preuve d'aucune faute imputable à la SELAS [N] ET ASSOCIES, en lien causal direct avec un préjudice certain,

Par conséquent,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté toutes parties de leurs prétentions à l'encontre de la SELAS [N] ET ASSOCIES.

Condamner in solidum Messieurs [J] [V], [H] [P], [K] [F] et la SARL AGENCE CRISTAL, et/ou Monsieur [B], à verser à la SELAS [N] ET ASSOCIES une somme complémentaire au stade d'appel de 4 000 € en application de l'article 700 du CPC.

Les condamner aux entiers dépens.'

et ce, en invoquant, notamment :

- l'irrecevabilité des demandes, en l'absence de créances admises, et dès lors qu'à suivre leur raisonnement, ils demanderaient simplement réparation de leur quote-part d'un préjudice qui aurait été subi par l'ensemble des créanciers de la procédure collective, et en réparation duquel ils n'ont pas qualité à agir,

- subsidiairement, sur le fond, l'absence de faute imputable à la concluante, mandataire judiciaire qui n'intervient ni dans la gestion de l'entreprise, ni dans les contrats en cours dans le cadre de l'élaboration du plan de cession, et alors même que les demandeurs ne figuraient pas, ce qui est établi, sur la liste des créanciers remise par le dirigeant à l'ouverture de la procédure collective, dont elle n'avait pas à pallier la carence, qu'ils n'avaient pas de créances antérieures et n'ont déclaré, sauf un, leur créance que tardivement, tandis que le maintien de la période d'observation était justifié, d'une part pour permettre la régularisation des actes de cession, d'autre part pour favoriser la commercialisation des produits référencés 'Frédéric Chocolatier' pour la période de Noël,

- l'absence de préjudice et de lien causal, en l'absence de mise en demeure à l'administrateur s'agissant de contrats en cours dans le cadre d'une procédure collective dont le jugement d'ouverture, publié, est opposable à tous, et s'agissant de demandes concernant des créances échues à l'ouverture de la procédure collective ou d'indemnités imputables à la société cédante ou de préjudices hypothétiques et ne correspondant pas à des prestations réalisées pour la société cédante, outre un préjudice moral ni argumenté, ni justifié.

Vu les dernières conclusions en date du 8 juin 2021, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SELAS [N] et Associés, ès qualités de mandataire liquidateur de la SA Frédéric Chocolatier, demande à la cour de :

'REJETER l'appel incident de Messieurs [V], [P], [F] et la SARL AGENCE CRISTAL comme non fondé

DIRE ET JUGER recevable et bien-fondé l'appel incident de la SELAS [N] & ASSOCIES, es qualité de mandataire liquidateur de la SA FREDERIC CHOCOLATIER

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a condamné in solidum la SA FREDERIC CHOCOLATIER en liquidation judiciaire, la SELARL [G] [D] et [A] [O], prise en la personne de Maître [G] [D], et Monsieur [I] [B] à payer à Monsieur [J] [V], Monsieur [H] [P], Monsieur [K] [F] et la SARL AGENCE CRISTAL, les sommes respectivement de :

- 1 070,36 € au titre de l'article L622-17 du Code de Commerce,

- 1 465,02 € au titre de l'article L622-17 du Code de Commerce,

- 3 967,03 € au titre de l'article L622-17 du Code de Commerce,

- 5 045,48 € au titre de l'article L622-17 du Code de Commerce,

outre une indemnité de 1 000 € pour chacun d'eux au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Et statuant à nouveau,

DONNER ACTE à la SELAS [N] & ASSOCIES de ce qu'elle s'en remet à sagesse en ce qui concerne le montant des créances fixées au profit de Messieurs [I] [B], [J] [V], [H] [P], [K] [F], la SARL AGENCE CRISTAL au passif de la SA FREDERIC CHOCOLATIER en vertu de l'article L622-17 du Code de Commerce, s'agissant de la campagne de Pâques 2013.

DIRE ET JUGER que les créances retenues par la Cour d'Appel de céans au passif de la SA FREDERIC CHOCOLATIER en liquidation judiciaire, au titre de la campagne de Pâques 2013, seront inscrites sur la liste des créances au titre de l'article L622-17 du Code de Commerce,

DIRE ET JUGER que les indemnités allouées aux demandeurs en première instance, ainsi que les dépens, seront inscrits au passif de la SA FREDERIC CHOCOLATIER en liquidation judiciaire en tant que créances chirographaires,

En tout état de cause,

DIRE ET JUGER n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit d'aucune partie à hauteur de Cour,

STATUER ce que de droit en ce qui concerne les dépens d'appel.'

et ce, en invoquant, notamment :

- l'opposabilité de la période d'observation comme de sa conversion en liquidation judiciaire aux anciens agents commerciaux, et l'absence de justifications par ces derniers de ce qu'ils auraient effectué des prestations pour les besoins du déroulement de la procédure de liquidation judiciaire, s'agissant à tout le moins des campagnes de Noël 2013 et Pâques 2014, à supposer qu'il soit justifié de diligences au titre de ces campagnes,

- l'irrecevabilité, à défaut de déclaration de créance, et en tout en état de cause le mal fondé de la demande au titre d'un préjudice moral dont il ne serait pas justifié,

- l'absence de reconnaissance par la concluante du caractère privilégié des indemnités de cessation de contrat du préavis des agents et des commissions mises en compte dans un courrier en date du 11 juillet 2014, comme soutenu par ceux-ci, alors qu'elle a seulement pris acte de leur déclaration de créance,

- l'impossibilité d'admettre au passif des créances au titre des dépens ou de l'article 700 du code de procédure civile, seules des créances préalablement déclarées pouvant être admises,

- sur appel incident, l'impossibilité de mettre en compte les divers montants et indemnités mis à la charge de la société Frédéric Chocolatier par le premier juge en application de l'article L. 622-17 du code de commerce, et qui ne pourraient donner lieu qu'à fixation de créances correspondantes au passif de la société, étant observé qu'en tout état de cause, les créances invoquées pour les campagnes de Noël 2013 et Pâques 2014 ne pourraient pas être admises au titre de ces dispositions ni même à titre de créances chirographaires, au regard de ce qui précède ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 novembre 2021,

Vu les débats à l'audience du 8 décembre 2021,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Au préalable, la cour rappelle que :

- aux termes de l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion,

- ne constituent pas des prétentions, au sens de l'article 4 du code de procédure civile, les demandes des parties tendant à 'dire et juger' ou 'constater', en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d'emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour n'y répondra qu'à la condition qu'ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif mais dans ses motifs.

La cour observe, par ailleurs, que si le premier juge a déclaré irrecevables les demandes formées par MM. [V], [P] et [F], et la société Cristal à l'encontre de la liquidation judiciaire de la société Chocolaterie Frédéric, relevant que les demandeurs n'avaient pas déclaré leur créance à ce titre au passif de la procédure collective de cette société, pas davantage qu'ils n'avaient mis en cause les organes de la procédure, les intéressés ne forment, à hauteur d'appel, aucune demande à l'encontre de la société Chocolaterie Frédéric en liquidation judiciaire, laquelle n'est, d'ailleurs, pas intimée.

La décision du premier juge ne faisant, de surcroît, sur ce point, l'objet d'aucune remise en cause par les parties à l'instance d'appel, ce qui revient, en application du dernier alinéa de l'article 954 précité, à s'en approprier les motifs, il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

Sur la recevabilité des demandes de MM. [V], [P] et [F] et de la société Agence Cristal :

M. [B], ainsi que la SELAS [N] et Associés et la SELARL [D] et [O] contestent la recevabilité des demandes adverses, en l'absence de créance déclarée, et à défaut de constatation d'une absence d'insuffisance d'actif, comme à défaut de préjudice personnel et distinct de celui des autres créanciers, tandis que MM. [V], [P] et [F], et la SARL Agence Cristal invoquent leur qualité de créanciers postérieurs méritants, agissant dans le cadre d'une responsabilité civile de droit commun des dirigeants et dispensés, de ce fait, de déclarer leur créance.

Cela étant, la cour rappelle qu'aux termes de l'article L. 622-17 du code de commerce, dans sa version applicable à la cause :

'I.-Les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance.

II.-Lorsqu'elles ne sont pas payées à l'échéance, ces créances sont payées par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûretés, à l'exception de celles garanties par le privilège établi aux articles L. 143-10, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail, des frais de justice nés régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure et de celles garanties par le privilège établi par l'article L. 611-11 du présent code.

III.-Leur paiement se fait dans l'ordre suivant :

1° Les créances de salaires dont le montant n'a pas été avancé en application des articles L. 143-11-1 à L. 143-11-3 du code du travail ;

2° Les prêts consentis ainsi que les créances résultant de l'exécution des contrats poursuivis conformément aux dispositions de l'article L. 622-13 et dont le cocontractant accepte de recevoir un paiement différé ; ces prêts et délais de paiement sont autorisés par le juge-commissaire dans la limite nécessaire à la poursuite de l'activité pendant la période d'observation et font l'objet d'une publicité. En cas de résiliation d'un contrat régulièrement poursuivi, les indemnités et pénalités sont exclues du bénéfice du présent article ;

3° Les autres créances, selon leur rang.

IV.-Les créances impayées perdent le privilège que leur confère le II du présent article si elles n'ont pas été portées à la connaissance de l'administrateur et, à défaut, du mandataire judiciaire ou, lorsque ces organes ont cessé leurs fonctions, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur, dans le délai d'un an à compter de la fin de la période d'observation.'

En l'espèce, le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel, et ce s'agissant d'une créance dont il a établi le caractère postérieur à l'ouverture de la procédure collective, en relevant la poursuite des contrats d'agent commercial nonobstant l'intervention de cette procédure, tout en caractérisant le caractère personnel du préjudice qu'ils invoquent, en ce qu'il vise à obtenir, indépendamment de la reconstitution de l'actif de la société Frédéric Chocolatier, l'indemnisation d'une prestation fournie au débiteur durant cette période ainsi que de la rupture de leurs relations contractuelles, la responsabilité, notamment, de M. [B] n'étant, ainsi, pas recherchée au titre de l'article L. 651-2 du code de commerce, lequel régit l'hypothèse d'une faute de gestion ayant contribué à une insuffisance d'actif.

Dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré les demandeurs recevables en leur action.

Sur les responsabilités :

Sur la responsabilité de M. [I] [B] :

Si M. [B], auquel MM. [P], [V], [F], et la société Agence Cristal reprochent de ne pas les avoir informés de l'existence d'une procédure collective, les laissant poursuivre leur activité, qui ne devait pas ensuite être reprise par le repreneur de la société, sans, par ailleurs informer les organes de la procédure de leur existence, entend, pour sa part, réfuter toute faute séparable de sa fonction, excluant toute dissimulation délibérée, d'autant qu'il aurait porté les créances ultérieures à la connaissance des organes de la procédure, il convient, cependant, de relever, ainsi que l'a fait le juge de première instance, que celui-ci a bien délibérément fait en sorte de permettre la poursuite des contrats d'agent commercial, alors même que la société se trouvait en procédure collective, ce qui résultait d'une information dont le premier juge a justement relevé le caractère sommaire, confidentiel, et au demeurant tardif, ce d'autant que M. [B] s'est abstenu de les mentionner sur la liste des créanciers de la société, en dépit de l'ancienneté de leurs relations avec celle-ci et de l'importance de leur concours à l'activité de l'entreprise, dans un contexte de préparation, par M. [B], d'un plan de cession de cette activité à laquelle il était intéressé et dont ils devaient se trouver exclus.

C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties en retenant la responsabilité de M. [B], ce qui implique la confirmation, à ce titre, de la décision déférée à la cour.

Sur la responsabilité de la SELARL [D] et [O] :

Ainsi qu'il a été rappelé, la SELARL [D] et [O] conteste toute responsabilité, au regard de l'étendue de sa mission, de son ignorance des contrats avant le 8 octobre 2013, de l'absence de mise en demeure ou de garantie de la part des agents commerciaux et de demandes soumises à ce titre par M. [B], tout en justifiant le maintien de la période d'observation, tandis que MM. [V], [F] et [P], ainsi que la société Agence Cristal estiment que l'administrateur avait connaissance de leur réseau, alors qu'une partie des commissions des campagnes de Pâques et Noël 2013 ont été payées après le jugement d'ouverture, et qu'il serait à l'origine de la requête en prolongation de la procédure d'observation, qui a permis à la société Chocolaterie Frédéric de bénéficier des suites de leur travail.

Sur ce, la cour rappelle que l'administrateur judiciaire a pour mission, en vertu de l'article L. 631-12 du code de commerce, selon le cadre des prérogatives qui lui sont fixées par le tribunal ayant ouvert la procédure, d'assister le débiteur pour tous les actes relatifs à la gestion ou certains d'entre eux, ou d'assurer seuls, entièrement ou en partie, l'administration de l'entreprise. Il ressort des dispositions du même article que dans sa mission, l'administrateur est tenu au respect des obligations légales et conventionnelles incombant au débiteur.

En outre, comme l'a rappelé le premier juge, en application de l'article 1992 du code civil, le mandataire rémunéré répond des fautes, mêmes légères, qu'il a commises dans sa gestion.

En l'espèce, par son jugement du 4 décembre 2012, la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Colmar a confié à la SELARL [D] et [O] une mission d'assistance pour tous les actes concernant la gestion de la société placée en redressement judiciaire, avant d'homologuer un plan de cession par jugement du 30 avril 2013. Puis, par jugement en date du 9 juillet 2013, rendu sur requête de l'administrateur, a maintenu la période d'observation, afin de ne pas remettre en cause les contrats conclus avec la grande distribution, qui auraient pu être compromis par une liquidation judiciaire, laquelle a finalement été prononcée, avec cessation immédiate d'activité, le 19 novembre 2013.

Dans ce contexte, s'il est vrai qu'il n'est pas établi que l'administrateur judiciaire aurait eu formellement connaissance des contrats des agents commerciaux avant le 8 octobre 2013, il n'en demeure pas moins que, fût-ce dans le cadre d'une mission d'assistance, dans lequel le dirigeant de la société peut, certes, effectuer seul les actes de gestion courante, il appartenait toutefois à l'administrateur d'exercer une mission de surveillance et d'effectuer les actes d'administration, et plus particulièrement de s'assurer de la situation économique et financière de l'entreprise et, comme rappelé par le juge de première instance, d'en informer le tribunal de manière complète, et ce d'autant que, comme également relevé par le premier juge, ont été établis successivement en février et en avril 2013 un bilan économique et social et un rapport en vue du plan de cession, rappelant les spécificités de la commercialisation de la production de la société, ce qui impliquait nécessairement, pour l'administrateur, de s'intéresser à ces modalités.

Dans ces conditions, la cour approuve les motifs retenus à bon droit par le premier juge pour caractériser la responsabilité de la SELARL [D] et [O], le jugement entrepris devant donc être confirmé à ce titre.

Sur la responsabilité de la SELAS [N] et Associés :

MM. [V], [P] et [F], et la société Agence Cristal mettent encore en cause la SELAS [N] et Associés, mandataire judiciaire au redressement de la société Frédéric Chocolatier.

Ils entendent contester l'appréciation du premier juge, lequel, pour écarter la responsabilité du mandataire, a relevé que 'compte tenu du rôle qui lui est dévolu et de la mission conférée par le tribunal, les demandeurs ne démontrent aucun manquement de la SELAS [N] et Associés en sa qualité de mandataire judiciaire'.

Ils lui reprochent d'avoir permis la prolongation de la période d'observation, sans se soucier des ruptures éventuelles des modes de prospection de la clientèle qu'une simple lecture des comptes d'exploitation pouvait, à leur sens, lui permettre de connaître, ce à quoi la SELAS [N] et Associés entend objecter qu'elle n'intervenait ni dans la gestion de l'entreprise, ni dans les contrats en cours dans le cadre de l'élaboration du plan de cession, et alors même que les demandeurs ne figuraient pas, ce qui est établi, sur la liste des créanciers remise par le dirigeant à l'ouverture de la procédure collective, dont elle n'avait pas à pallier la carence, qu'ils n'avaient pas de créances antérieures et n'ont déclaré, sauf un, leur créance que tardivement, tandis que le maintien de la période d'observation était justifié, d'une part pour permettre la régularisation des actes de cession, d'autre part pour favoriser la commercialisation des produits référencés 'Frédéric Chocolatier' pour la période de Noël.

Sur quoi la cour rappelle que l'article L. 622-20 du code de commerce confère au mandataire judiciaire la qualité d'agir à titre exclusif au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, ce qui implique, notamment qu'il est chargé, en application de l'article L. 624-1 du même code, d'établir la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente, liste qu'il transmet au juge-commissaire.

À cet égard, la cour n'aperçoit pas de motif de s'écarter de l'appréciation faite par le premier juge, dès lors que les demandeurs, désormais appelants à titre incident, soutiennent eux-mêmes n'avoir pas été à même de déclarer leur créance, en tout cas dès l'ouverture de la procédure collective, faute de figurer sur la liste des créanciers établie par M. [B], dont il n'appartenait pas au mandataire de pallier la carence, ni de se prononcer sur la poursuite des contrats en cours, ou le versement d'éventuelles indemnités de rupture, MM. [V], [P] et [F], et la société Agence Cristal ne démontrant, pour le surplus, pas en quoi le mandataire judiciaire aurait agi en fraude de leurs droits en oeuvrant pour le maintien de la période d'observation, étant relevé que celle-ci a été prolongée à la requête de l'administrateur.

Le jugement entrepris sera donc également confirmé sur ce point.

Sur les préjudices :

Sur le préjudice au titre des commissions non réglées :

MM. [V], [P] et [F], et la société Agence Cristal exposent, à ce titre, n'avoir pas été réglés de la totalité des commissions pour la période de Pâques 2013 et n'avoir reçu aucune commission pour Noël 2013 et Pâques 2014.

La SELARL [D] et [O] conteste tant le principe de ce préjudice, qu'elle qualifie d'hypothétique, que le montant réclamé, relevant que la société avait cessé toute activité le 1er juillet 2013, et qu'il ne serait pas justifié des montants sollicités.

M. [B], pour sa part, outre qu'il estime avoir satisfait à toutes ses obligations, considère qu'en tout état de cause, ayant quitté l'entreprise au courant de l'été 2013 et n'ayant à ce titre plus aucune responsabilité dans une poursuite d'activité qui n'aurait été décidée par le tribunal que dans le souci de ménager à la Chocolaterie Frédéric une transition et une reprise du fonds plus confortable, à charge pour elle de supporter les charges inhérentes à une exploitation dont elle était le bénéficiaire économique, il ne serait pas concerné par les demandes au titre des commissions pour les campagnes de Noël 2013 et Pâques 2014.

Sur ce, la cour considère que, sur ce point également, le premier juge a, par des motifs pertinents qu'il y a lieu d'adopter, fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties, étant observé que MM. [V], [P] et [F], et la société Agence Cristal n'apportent pas d'éléments ou même d'arguments de nature à remettre en cause cette appréciation, s'agissant, notamment, du rejet des demandes faites au titre de la période de Pâques 2014, tandis que les agissements fautifs de M. [B], tels qu'ils ont été caractérisés précédemment, et quand bien même il aurait quitté l'entreprise en juillet 2013, ont contribué à la réalisation de leur préjudice, y compris postérieur dès lors qu'il s'inscrit dans le cadre de la poursuite de leur activité qui trouve son origine dans les manquements précités.

Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

Sur le droit à indemnités :

MM. [V], [P] et [F], et la société Agence Cristal entendent également, obtenir, en infirmation du jugement entrepris, indemnisation du préjudice correspondant, selon eux, à la privation de l'indemnité compensatrice de préavis non effectué, ainsi qu'à l'indemnité de cessation de contrat d'agence compensant la perte de commissions liées à l'exploitation d'une clientèle appartenant à autrui.

À ce titre, la cour rappelle que le premier alinéa de l'article L. 134-12 du code de commerce prévoit qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

En outre en application de l'article L. 134-11 du même code, qui ouvre droit à un préavis en cas de rupture d'un contrat d'agence à durée indéterminée, le non-respect de ce préavis donne droit à son bénéficiaire à une indemnité compensatrice.

En l'espèce, ainsi que l'a justement relevé le premier juge, l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Frédéric Chocolatier, avec cessation immédiate d'activité, en date du 19 novembre 2013 a eu pour effet de rompre les relations contractuelles liant cette société à MM. [V], [P] et [F], ainsi qu'à la société Cristal, ouvrant droit à indemnisation pour ces derniers, lesquels ont également été privés de préavis, eu égard aux circonstances de la rupture, sous réserve, toutefois, pour eux, de déclarer la créance correspondante au passif de la procédure collective.

Les intéressés entendent contester l'appréciation du juge de première instance, en ce qu'il a retenu que, dès lors qu'ils n'auraient pas déclaré leur créance, la société ne pouvait donc être poursuivie à ce titre, pas davantage que les organes de la procédure ou M. [B].

Ils affirment avoir sollicité du liquidateur le paiement des sommes dues au titre des indemnités de cessation de leur contrat, ce dont Me [N] aurait accusé réception, reconnaissant, dans son courrier en réponse, le caractère postérieur privilégié des indemnités de cessation de contrat.

Ils ajoutent qu'en tout état de cause, ni la déclaration de créance, ni l'admission au passif ne seraient une condition d'engagement de la responsabilité de M. [B] ou des organes de la procédure, au regard des fautes, selon eux commises, ce que contestent la SELAS [N] et Associés et la SELARL [D] et [O], s'agissant d'indemnités qu'elles considèrent comme imputables à la société et résultant directement de sa liquidation, tout comme M. [B] qui ne voit aucune raison juridique à ce qu'il soit condamné à suppléer la société Frédéric Chocolatier sauf à lui faire indirectement supporter une insuffisance d'actif que les organes de la procédure ne lui auraient jamais reprochée.

La cour ne peut dénaturer les courriers adressés le 25 juin 2014 par M. [V], M. [F], M. [P] et la SARL Agence Cristal à la SELAS [N] et Associés dès lors qu'en page 2 de ces courriers, les parties appelantes indiquent que '(') la présente constitue une mise en demeure de payer sous huitaine (...)', et ce quand bien même la SELAS [N] et Associés aurait considéré qu'il s'agissait d'une déclaration de créance.

En conséquence, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que, faute de déclaration de créance à ce titre, la société ne pouvait plus être poursuivie de ce chef. Dans cette mesure, s'agissant d'indemnités dont la cause est strictement imputable à la société, il y a donc lieu également de confirmer le jugement dont appel à ce titre.

Sur le préjudice moral :

MM. [V], [F], [P] et la SARL Agence Cristal entendent voir réévaluer leur indemnisation à ce titre, au regard du comportement 'particulièrement déloyal' ayant présidé à leur éviction, tandis qu'au-delà de la recevabilité de leur demande à ce titre, la société Frédédic Chocolatier, représentée par son liquidateur en conteste le bien-fondé, à défaut de justificatif, tout comme la SELAS [N] et Associés et la SELARL [D] et [O], qui invoquent, en outre, l'absence d'argumentation de ce chef de la part des intéressés, tandis que M. [B] reproche aux demandeurs, désormais intimés et appelants à titre incident, de peiner à justifier en quoi ce préjudice se distingue des indemnités de fin de mandat qu'ils revendiquent par ailleurs.

Ceci rappelé, la cour, au vu des éléments dont elle dispose, ne voit pas de motif de s'écarter de l'appréciation faite à bon droit par les juges de première instance, et qu'elle approuve, en ajoutant que cette indemnisation relève de causes distinctes de celles des indemnités de rupture, lesquelles visent à indemniser la rupture dans son principe ou à compenser l'absence de préavis et non les fautes commises ou les circonstances de la rupture, de sorte que le jugement entrepris sera également confirmé sur ce point en ce qu'il a mis à la charge de la SELARL [D] et [O] et de M. [B], in solidum, la somme de 2 000 euros à ce titre au profit de chacun des demandeurs désormais intimés, tout en relevant qu'aucune déclaration de créance n'avait été faite de ce chef à la procédure collective de la société Frédéric Chocolatier.

La cour ayant statué sur l'ensemble des moyens opérants, il convient donc de confirmer en toutes ses dispositions, sous réserve de l'examen des demandes annexes ci-après, les dispositions du jugement de première instance.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Chaque partie succombant partiellement conservera la charge de ses propres dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.

L'équité commande en outre de dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de l'une ou l'autre des parties, tout en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 avril 2019 par le tribunal de grande instance de Colmar,

Y ajoutant,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de l'appel,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice tant de M. [I] [B] que de M. [J] [V], M. [H] [P], M. [K] [F] et la SARL Agence Cristal, de la SELAS [N] et Associés, et de la SELARL [D] et [O].

La Greffière :la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 19/02756
Date de la décision : 19/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-19;19.02756 ?
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