MINUTE N° 483/22
Copie exécutoire à
- Me Guillaume HARTER
- Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS
- Me Laurence FRICK
Le 12.10.2022
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 12 Octobre 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/03107 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HNL2
Décision déférée à la Cour : 07 Juillet 2020 par le Tribunal judiciaire de MULHOUSE - 1ère chambre civile
APPELANTE - INTIMEE INCIDEMMENT :
S.A.S.U. ADVENIS GESTION PRIVEE
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 1]
Représentée par Me Guillaume HARTER, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me LYONNET, avocat au barreau de Lyon
INTIME - APPELANT INCIDEMMENT :
Monsieur [V] [C]
[Adresse 3]
Représenté par Me Christine LAISSUE-STRAVOPODIS, avocat à la Cour
INTIMEE :
CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
Représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me WURTH, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Janvier 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
M. FREY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
ARRET :
- Contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'assignation délivrée le 24 octobre 2017, par laquelle M. [V] [C] a fait citer la SASU Advenis Gestion Privée, ci-après également dénommée 'Advenis', devant le tribunal de grande instance, devenu le 1er janvier 2020 le tribunal judiciaire de Mulhouse, en invoquant le détournement d'une somme de 27 250 euros par le préposé de la défenderesse,
Vu l'assignation en intervention forcée, délivrée le 1er août 2018 par la SASU Advenis Gestion Privée, de la Caisse de Crédit Mutuel (CCM) Région Altkirch, ci-après également 'le Crédit Mutuel' ou 'la banque',
Vu la jonction des deux procédures par mention au dossier,
Vu le jugement rendu le 7 juillet 2020, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal judiciaire de Mulhouse a :
- condamné la SASU Advenis Gestion Privée immatriculée au RCS PARIS sous le n°431 974 963 et dont le siège social est situe [Adresse 1] à payer à M. [V] [C] la somme de 27 250 euros au titre de son préjudice matériel augmentée des intérêts au taux légal à compter de la présente décision
- condamné la SASU Advenis Gestion Privée à payer à M. [V] [C] la somme de 2 500 euros au titre de son préjudice moral augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision,
- débouté la SASU Advenis Gestion Privée de ses demandes à l'encontre de la CCM Région Altkirch,
- condamné la SASU Advenis Gestion Privée à payer à M. [V] [C] la somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné la SASU Advenis Gestion Privée à payer à la CCM Région Altkirch la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière à M. [V] [C] au titre de la décision,
- condamné la SASU Advenis Gestion Privée aux dépens de l'instance,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision en ce compris s'agissant des dispositions relatives aux dépens de l'instance.
Vu la déclaration d'appel formée par la SASU Advenis Gestion Privée contre ce jugement, et déposée le 26 octobre 2020,
Vu la constitution d'intimée de M. [V] [C], déposée le 5 novembre 2020,
Vu la constitution d'intimée de la CCM Région Altkirch, déposée le 3 novembre 2020,
Vu les dernières conclusions en date du 4 mai 2021, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SASU Advenis Gestion Privée demande à la cour de :
'DECLARER l'appel recevable et bien fondé ;
En conséquence :
INFIRMER LE JUGEMENT EN CE QU'IL A :
CONDAMNE la société ADVENIS GESTION PRIVEE à payer à Monsieur [V] [C] la somme de 27.250 € au titre de son préjudice matériel augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision déférée,
CONDAMNE la société ADVENIS GESTION PRIVEE à payer à Monsieur [V] [C] la somme de 2.500 € au titre de son préjudice moral augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision déférée,
DEBOUTE la société ADVENIS GESTION PRIVEE de ses demandes à l'encontre de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH,
CONDAMNE la société ADVENIS GESTION PRIVEE à payer à Monsieur [V] [C] la somme de 1.800€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNE la société ADVENIS GESTION PRIVEE à payer à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH la somme de 1.200€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile
ORDONNE la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière à Monsieur [V] [C] au titre de la décision déférée,
CONDAMNE la société ADVENIS GESTION PRIVEE aux dépens de l'instance,
STATUANT A NOUVEAU :
DECLARER recevables et bien-fondées l'ensemble des prétentions formulées par la société ADVENIS GESTION PRIVEE,
REJETER en conséquence l'ensemble des demandes et prétentions de Monsieur [C] dirigées à son encontre tant au titre de la confirmation de la décision déférée que de l'appel incident formé par ce dernier,
CONDAMNER Monsieur [C] à payer la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 CPC à la société ADVENIS GESTION PRIVEE, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'exécution.
A TITRE SUBSIDIAIRE
CONSTATER que la société CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH a manqué à son obligation de vérification de la régularité des chèques émis par Monsieur [C] et que ce manquement a causé un préjudice à la société ADVENIS GESTION PRIVEE ;
CONDAMNER en conséquence la société CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH à verser à la société ADVENIS GESTION PRIVEE des dommages et intérêts au titre du préjudice qu'elle a subi en raison du manquement susvisé, équivalent au montant des condamnations prononcées à son encontre dans la présente affaire, soit la somme de 32 596,59 € à parfaire si la cour devait augmenter le quantum desdites condamnations ;
CONDAMNER au besoin la société CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH, sans approbation des fins de la demande dirigée contre la concluante par Monsieur [C], à relever et garantir la société ADVENIS GESTION PRIVEE de toutes condamnations en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais de l'article 700 du Code de Procédure Civile et dépens, qui viendraient à être prononcés contre elle sur la demande de Monsieur [C] ;
REJETER l'ensemble des demandes et prétentions de la société CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH,
CONDAMNER la société CAISSE DE CREDIT MUTUEL REGION ALTKIRCH à payer à la société ADVENIS GESTION PRIVEE la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'exécution.'
et ce, en invoquant, notamment :
- l'absence de preuve d'un détournement des chèques litigieux par M. [B], à défaut d'identification possible, au regard des faits relatés, des bénéficiaires des chèques, et de preuve que les chèques auraient un jour été remis à l'intéressé en vue d'un usage déterminé, la concluante contestant toute reconnaissance non équivoque ou tout changement d'objet de sa demande à ce titre,
- en tout état de cause, la circonstance que M. [B] aurait agi hors de ses fonctions, sans se présenter comme salarié de la concluante, ni utiliser les moyens mis à sa disposition par celle-ci, les pièces produites par M. [C] concernant exclusivement le précédent employeur de M. [B],
- à supposer même que M. [B] ait agi dans le cadre de ses fonctions de salarié de la concluante, la commission par celui-ci d'un abus de fonction, comme ayant agi à l'insu du commettant, sans autorisation, à des fins étrangères à ses attributions en poursuivant un intérêt frauduleux strictement personnel
- subsidiairement, l'exonération de responsabilité de la concluante tant du fait de la banque qui se serait abstenue de vérifier les chèques litigieux qui présentaient des anomalies flagrantes, qu'elle détaille, et aurait ainsi commis une faute délictuelle à son égard et contractuelle envers M. [C], peu important que cette faute ne revête pas la qualification exonératoire de fait du tiers, que de la victime, dès lors que s'il n'est pas établi que les chèques ont été falsifiés, l'unique explication à leur détournement réside nécessairement dans le défaut d'inscription de leur ordre, manquement constitutif d'une faute du client, cause exclusive du dommage, en l'absence de surcroît de recours de M. [C] contre la banque,
Vu les dernières conclusions en date du 5 mai 2021, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [V] [C] demande à la cour de :
'REJETER l'appel principal,
RECEVOIR l'appel incident,
INFIRMER le jugement entrepris
Et statuant à nouveau,
CONDAMNER la SASU ADVENIS GESTION PRIVEE à payer la somme de 27.250,00 € assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
DIRE que les intérêts seront capitalisés par année entière échue,
CONDAMNER la SASU ADVENIS GESTION PRIVEE à payer une somme de 5.000,00 € au titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral,
CONDAMNER la SASU ADVENIS GESTION PRIVEE à payer une somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens des deux instances.'
et ce, en invoquant, notamment :
- la remise des chèques à M. [B], contestée pour la première fois à hauteur d'appel par Advenis, mais qu'implique nécessairement la reconnaissance de la falsification des contrats par M. [B], qui a été licencié et a fait l'objet d'une plainte pénale pour abus de confiance par Advenis, sauf à accuser le concluant d'escroquerie,
- l'encaissement de chèques par M. [B], sans qu'il n'appartienne au concluant d'en rapporter la preuve, mais seulement d'établir qu'ils n'ont pas été encaissés par les sociétés Ageas ou Advenis sur les contrats auxquels ils étaient destinés,
- la falsification des chèques, peu important qu'elle soit imputable à M. [B] ou à un tiers, dès lors qu'ils ont été remis à M. [B], qui a commis une faute étrangère à l'exécution de son contrat de travail ou constitutive d'un abus de fonction engageant la responsabilité de son employeur, trouvant dans son emploi l'occasion et les moyens de sa faute, le seul fait que des échanges de courriers mettent en cause également la SA Ageas, présentant par ailleurs des liens très étroits avec la société Advenis, étant insuffisant pour démontrer le fait que ce dernier ait agi en dehors de ses fonctions,
- l'absence de cause d'exonération d'Advenis, qui serait tenue d'une responsabilité de plein droit dont elle ne pourrait se dégager qu'en prouvant que le dommage serait dû à une force majeure, ou à la faute d'un tiers présentant un caractère imprévisible et irrésistible, l'erreur de la banque ne pouvant, le cas échéant, que permettre un recours à son encontre,
- des intérêts devant courir à compter de l'acte d'assignation et être capitalisés par année,
- un préjudice moral subi, notamment, du fait de l'attitude frustratoire et de la résistance abusive d'Advenis,
Vu les dernières conclusions en date du 20 avril 2021, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la CCM Région Altkirch demande à la cour de :
'DECLARER mal fondé l'appel principal de la société ADVENIS GESTION PRIVEE ;
REJETER l'appel principal de la société ADVENIS GESTION PRIVEE ;
CONFIRMER le Jugement du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE du 7 juillet 2020 en toutes ses dispositions ;
DEBOUTER la société ADVENIS GESTION PRIVEE de l'intégralité de ses fins, moyens et conclusions ;
CONDAMNER la société ADVENIS GESTION PRIVEE à verser à la CCM REGION ALTKIRCH une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER la société ADVENIS GESTION PRIVEE aux entiers frais et dépens de la procédure.'
et ce, en invoquant, notamment :
- l'absence de cause propre d'exonération du commettant du fait de son préposé,
- l'absence de responsabilité du banquier en matière de chèque lorsque l'apparence du chèque était régulière, et que la falsification était indécelable pour un employé normalement diligent, la charge de la preuve de l'irrégularité incombant au demandeur à l'action, et la détection de la falsification éventuelle incombant à la banque présentatrice, à laquelle le chèque est remis, la CCM étant, en l'espèce, le banquier tiré, outre qu'en l'espèce, la mauvaise qualité de la copie des chèques ne permettrait pas de dire s'il y a eu une falsification de nom du bénéficiaire ainsi que le degré de grossièreté de celle-ci le cas échéant, en l'absence, par ailleurs, de surcharge rendant une anomalie détectable, le banquier n'étant, pour le surplus, en vertu du principe de non-immixtion, pas tenu de contrôler les opérations effectuées par son client, ni de vérifier les mouvements des comptes courants,
- l'absence, par conséquent, de faute de la concluante ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 15 décembre 2021,
Vu les débats à l'audience du 19 janvier 2022,
Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS :
Sur la demande principale :
M. [C] expose avoir été démarché, soi-disant pour le compte de la société Ageas France, par un dénommé [Y] [B], auquel il affirme avoir remis deux chèques d'un montant respectif de 14 300 et 3 200 euros en dates du 28 mai 2014, dont copie versée aux débats, obtenue de la CCM Région Altkirch, banque de M. [C], avant d'effectuer un nouveau versement de 5 850 euros par chèque en date du 8 juillet 2014, dont une copie est également produite. Ces chèques sont établis à l'ordre d'une société 'Golden N 68' ou 'Golden N'Expert 68', les mentions correspondantes apparaissant diversement lisibles, s'agissant, toutefois, de copies.
Deux documents à en-tête d'Ageas France lui ont été remis le 16 juin 2014, puis le 24 juillet 2014, supposés attester de l'ouverture d'un contrat.
Un nouveau chèque a été établi en date du 23 mars 2015 d'un montant de 4 500 euros au profit d'une dénommée 'Boaics Sandrine', ce versement s'inscrivant dans le cadre de la souscription d'un contrat 'Latitude Patrimoine' d'un montant de 110 000 euros, au titre duquel 105 500 euros ont été effectivement versés.
M. [B] expose s'être rapproché de la société Ageas pour obtenir une attestation fiscale, cette société lui faisant part de l'absence de souscription du premier contrat et de la souscription du second seulement à hauteur de la somme susmentionnée. Il a déposé une plainte pénale le 30 juin 2015.
La société Advenis Gestion Privée, employeur, au moment des faits, de M. [B] qui avait précédemment travaillé pour la société Ageas France, a elle-même déposé plainte contre l'intéressé le 17 juillet 2015 pour faux et altération frauduleuse de la vérité, après avoir mis fin à son contrat de travail le 6 juillet 2015.
Elle conteste, cependant, la remise des chèques, par M. [C], à l'intéressé, faute de preuve suffisante, selon elle, et entend, subsidiairement, faire valoir qu'il aurait agi hors de ses fonctions, ou éventuellement en abusant de ses fonctions, et, en tout état de cause, entend se voir exonérer de son éventuelle responsabilité du fait de la banque, à défaut de vérification suffisante, ou de la victime, à défaut de preuve d'une falsification, l'unique explication à leur détournement résidant ainsi dans le défaut d'inscription de leur ordre.
La banque conteste, pour sa part, toute anomalie apparente décelable, rappelant, dès lors, n'avoir pas à s'immiscer dans les affaires de son client, tandis que M. [C] entend souligner la nouveauté de la contestation, par la société Advenis, de la remise des chèques à M. [B], tout en contestant avoir à en rapporter la preuve, et en réfutant que M. [B] ait pu agir en dehors de ses fonctions ou que la banque puisse bénéficier d'une cause d'exonération.
Sur ce, la cour rappelle le principe de la responsabilité de plein droit des commettants du fait de leurs proposés, en application de l'article 1384, alinéa 4, du code civil, dans sa version applicable à la cause.
Il convient encore de rappeler que, pour l'application de ces dispositions, la seule constatation, à la charge du préposé, d'une faute constitutive d'une infraction pénale volontaire, à la supposer même établie, ce qui n'est, d'ailleurs, pas le cas en l'espèce, ne suffit pas à caractériser les conditions d'exonération de l'employeur, surtout si les clients concernés ont pu être fondés avoir cru traiter avec l'intéressé en sa qualité de préposé de la société.
Or, en l'espèce, M. [B] s'est présenté comme agissant pour le compte de la société Ageas, des documents ayant, à ce titre, été remis à M. [C] à l'en-tête de cette société, et ce alors que son contrat de travail avec cette société avait fait l'objet d'un transfert vers la société Advenis, et que, comme l'a rappelé le premier juge, une confusion a été opérée entre des produits des deux sociétés, en particulier le contrat Renovalis proposé à M. [C] et qui correspondait à un investissement proposé par la société Advenis, le courrier de M. [C] en date du 15 novembre 2015 attestant, par ailleurs, de ce que la société Advenis n'était qu'une nouvelle dénomination de la société Ageas, avec laquelle, au demeurant, des liens existaient puisque M. [B] avait vu son contrat de travail transféré de l'une à l'autre. En outre, une partie des fonds confiés par M. [C], en l'occurrence à hauteur de 105 500 euros ont bien été placés, ce qui n'aurait pas été le cas s'il n'avait pas eu un interlocuteur habilité à le faire.
Dans ces conditions, sur ce point, le premier juge a, par des motifs pertinents que la cour adopte, fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties en retenant que la responsabilité de la société Advenis Gestion Privée était engagée en sa qualité de commettant sans qu'elle ne puisse invoquer, pour s'en exonérer, les agissements de son préposé en dehors de ses fonctions, ou l'existence d'un abus de fonction, dont il a été rappelé ci-avant qu'il ne pouvait même résulter de la seule commission d'une infraction pénale.
Quant à l'existence de causes exonératoires tirées du comportement de la banque ou de la victime, en l'espèce M. [C], la cour n'aperçoit également aucun élément de nature à remettre en cause, au vu de l'argumentation des parties et des pièces qui lui sont soumises, l'appréciation faite à bon droit sur cette question par le juge de première instance, en l'absence, notamment, d'élément suffisant, quelles que soient les observations faites précédemment quant à la lisibilité des mentions figurant sur les copies des chèques, à
caractériser une rature ou une surcharge de nature à constituer une anomalie apparente, et ce alors que, comme l'a encore rappelé le premier juge, il n'appartenait pas à la banque de s'immiscer dans les affaires de son client.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Advenis à verser à M. [C] les sommes de 27 250 euros, au titre du préjudice matériel, outre 2 500 euros au titre du préjudice moral, lequel apparaît pleinement caractérisé, au regard des circonstances de la cause telles qu'elles viennent d'être rappelées, les motifs retenus par le premier juge à ce titre étant également approuvés, y compris dans l'appréciation qu'il a faite à bon droit, au vu de ce qui précède, du quantum de ce préjudice.
Sur la demande subsidiaire de dommages-intérêts formée par Advenis à l'encontre de la CCM Région Altkirch :
Au vu des conclusions auxquelles est parvenue la cour sous l'angle de l'examen des demandes de M. [C], et à défaut, en conséquence, de faute caractérisée à l'encontre de la banque, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Advenis de ses demandes de dommages-intérêts et de relever indemne à l'encontre de la CCM Région Altkirch.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
La SASU Advenis Gestion Privée succombant pour l'essentiel sera tenue des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.
L'équité commande en outre de mettre à la charge de la société Advenis une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 2 500 euros au profit de M. [C], ainsi que de 2 000 euros au profit de la CCM Région Altkirch, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre des intimées, et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse,
Y ajoutant,
Condamne la SASU Advenis Gestion Privée aux dépens de l'appel,
Condamne la SASU Advenis Gestion Privée à payer à M. [V] [C] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SASU Advenis Gestion Privée à la CCM Région Altkirch payer à la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SASU Advenis Gestion Privée.
La Greffière :la Présidente :