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28/09/2022 | FRANCE | N°21/03309

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 28 septembre 2022, 21/03309


MINUTE N° 468/22

























Copie exécutoire à



- Me Marion BORGHI



- Me Joseph WETZEL





Le 28.09.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 28 Septembre 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/03309 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HUJB



Décision dÃ

©férée à la Cour : 21 Juillet 2021 par le Juge des référés commerciaux du Tribunal judiciaire de STRASBOURG



APPELANTS - INTIMES INCIDEMMENT :



Monsieur [B] [X]

[Adresse 3] [Localité 5]



Monsieur [J] [X]

[Adresse 3] [Localité 5]



S.A.S. STRASPOKE...

MINUTE N° 468/22

Copie exécutoire à

- Me Marion BORGHI

- Me Joseph WETZEL

Le 28.09.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 28 Septembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/03309 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HUJB

Décision déférée à la Cour : 21 Juillet 2021 par le Juge des référés commerciaux du Tribunal judiciaire de STRASBOURG

APPELANTS - INTIMES INCIDEMMENT :

Monsieur [B] [X]

[Adresse 3] [Localité 5]

Monsieur [J] [X]

[Adresse 3] [Localité 5]

S.A.S. STRASPOKE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2] [Localité 4]

Représentés par Me Marion BORGHI, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me DERRENDINGER, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIME - APPELANT INCIDEMMENT :

Monsieur [K] [G] [U]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Joseph WETZEL, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. ROUBLOT, Conseiller, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

M. FREY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES :

 

 

La société STRASPOKE a été fondée par les consorts [X] et M. [G] [U] le 17 septembre 2019, [B] [X] est le Président, [J] [X] et [K] [G] [U] sont les Directeurs Généraux, et ils exploitent un restaurant situé à [Localité 6].

 

Par lettre simple du 6 juillet 2020, [J] [X] a démissionné de son poste de Directeur Général, et le 10 juillet il constitue une SAS [M] exploitant un restaurant du même nom.

 

Le 10 août 2020 M. [G] [U] a, par lettre AR, interrogé [B] [X] en sa qualité de Président de STRASPOKE sur des questions relatives à des opérations de gestion.

Il a reçu une réponse le 8 septembre 2020, et le 15 septembre 2020 une assemblée générale est convoquée par [B] [X], et l'ordre du jour portait alors sur la révocation de M. [G] [U] de son poste de Directeur Général.

Cette révocation a été adoptée le 5 octobre 2020.

Par délibération de l'assemblée générale des associés du 27 janvier 2020, M. [G] [U] a été exclu de la société STRASPOKE.

Le 21 février 2021, M. [J] [X] a vendu ses actions à M. [B] [X], celui-ci devenant majoritaire alors qu'il ne l'était pas initialement.

 

Par exploit du 2 mars 2021, invoquant un abus de majorité, M. [G] [U] a saisi le Président de la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de STRASBOURG statuant en référé d'une demande dirigée contre les consorts [X], en présence de la société STRASPOKE.

Par une ordonnance du 21 juillet 2021, le juge des référés commerciaux du Tribunal judiciaire de Strasbourg a ordonné la suspension des effets de la délibération adoptée lors de l'assemblée générale de la société STRASPOKE en date du 5 octobre 2020 et prononçant la révocation de M. [G] [U] de ses fonctions de Directeur Général jusqu'au prononcé d'une décision revêtue de la force de chose jugée sur cette question, a ordonné la suspension des effets de la délibération adoptée lors de l'assemblée générale de la société STRASPOKE en date du 27 janvier 2021 et prononçant l'exclusion de M. [G] [U] jusqu'au prononcé d'une décision revêtue de la force jugée sur cette question, a dit que les dispositions qui précèdent seront caduques à défaut d'introduction d'une procédure au fond avant le 15 septembre 2021, désigné la SELAS WEIL ET GUYOMARD en qualité de séquestre des 27 actions initialement détenues par [J] [X], dit que le séquestre exercera le droit de vote attaché aux actions, dit que le séquestre exercera sa mission jusqu'au prononcé d'une décision de justice sur la validité de la cession desdites actions ayant force de chose jugée, dit que la rémunération du séquestre sera supportée par STRASPOKE, dit que les dispositions qui précèdent seront caduques à défaut d'introduction d'une procédure au fond avant le 15 septembre 2021, a rejeté la demande d'organisation d'une expertise sur le fondement des dispositions de l'article L 225-231 du code de commerce, a condamné in solidum les consorts [X] aux dépens et a condamné in solidum les consorts [X] à payer à M. [G] [U] une indemnité de 2.000,00 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens et dit que la présente décision sera communiquée par les soins du greffe au séquestre.

Par déclaration faite au greffe le 27 juillet 2021, les consorts [X] et la société STRASPOKE ont interjeté appel.

 

Par déclaration faite au greffe, M. [G] [U] s'est constitué intimé le 6 août 2021.

 

Par ses dernières conclusions en date du 22 octobre 2021, auxquelles a été joint le bordereau de pièces récapitulatif, qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, les consorts [X] et STRASPOKE demandent à la Cour de recevoir l'appel et le dire bien fondé. Y faisant droit, d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a suspendu les effets des délibérations des assemblées générales du 5 octobre 2020 et du 27 janvier 2021 de la société STRASPOKE en ce qu'elles ont respectivement révoqué et exclu M. [G] [U], d'infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a prononcé la désignation d'un séquestre et statuant à nouveau, de débouter M. [G] [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, de dire n'y avoir lieu à suspension des effets des délibérations des assemblées générales, de dire n'y avoir lieu à désignation d'un séquestre.

A titre subsidiaire et si la Cour venait à confirmer l'ordonnance sur la désignation d'un séquestre, les consorts [X] demandent à la Cour de dire que le séquestre exercera sa mission jusqu'au prononcé d'une décision de justice rendue en première instance sur la validité des délibérations des assemblées générales, de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la demande d'organisation d'une expertise sur le fondement de l'article L 225-231 du code de commerce et en tout état de cause, de débouter M. [G] [U] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de son appel incident, de condamner M. [G] [U] au paiement d'une somme de 5.000,00 € aux consorts [X] et à la société STRASPOKE chacun, sur le fondement de l'article 700 CPC, ainsi qu'aux dépens.

 

Par ses dernières conclusions en date du 23 septembre 2021 auxquelles a été joint le bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, M. [G] [U] demande à la Cour, sur l'appel principal, de débouter les appelants de l'ensemble de leurs prétentions, moyens et fins et de confirmer l'ordonnance sauf en ce qu'elle rejette la demande d'expertise.

Sur l'appel incident, M. [G] [U] demande à la Cour de déclarer recevable et bien fondé son appel incident, d'infirmer la décision déférée en ce qu'elle a rejeté la demande d'expertise et statuant à nouveau, de désigner tel expert dans le domaine de l'évaluation et le diagnostic d'entreprise qu'il lui plaira, avec pour mission de : convoquer les parties et leurs conseils, de prendre connaissance de tous documents utiles au sein de la STRASPOKE ou après de tiers prestataires ou cocontractants de cette dernière, de recueillir les observations de toute personne qu'il jugera utile, interne ou externe à l'entreprise, d'examiner la nature des opérations identifiées dans le courrier adressé par M. [G] [U] à [B] [X], leurs conséquences financières pour STRASPOKE ainsi que leur conformité aux dispositions légales et statutaires, d'émettre un avis sur l'opportunité de ces opérations et leur conformité par rapport à l'intérêt social de STRASPOKE, de dire que les constatations et avis de l'expert seront consignés dans un rapport qui sera déposé au greffe de ce tribunal, de dire que ce rapport sera communiqué au ministère public, au comité d'entreprise, au commissaire aux comptes et au conseil d'administration conformément à l'article L 225-231 du Code de commerce, de fixer la provision à consigner au greffe à titre d'avance sur les honoraires de l'expert, dans tel délai de l'ordonnance, de mettre à la charge de la STRASPOKE les frais de l'expertise, de réserver les dépens afin qu'ils puissent être statués après le dépôt du rapport d'expertise. En tout état de cause, de condamner les appelants au paiement d'une somme de 5.000,00€ en application de l'article 700 CPC ; de condamner les appelants aux dépens de l'appel.

La Cour se référera aux dernières écritures de parties pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties.

L'ordonnance de fixation de l'affaire à bref délai est intervenue le 25 novembre 2021 fixant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 28 mars 2022.

MOTIFS DE LA DECISION : 

Au soutien de leurs prétentions, les consorts [X] et STRASPOKE, sur les actes de concurrence déloyale, affirment que M. [J] [X] a créé le restaurant [M] après avoir démissionné de la société STRASPOKE, que dès lors, il ne peut lui être fait de reproches sur ce point. En ce qui concerne les actes reprochés à la société [M], Monsieur [X] [B], Monsieur [X] [J] et la SAS STRASPOKE affirment qu'elle n'est pas partie à l'instance, que ces faits relèvent d'une décision sur le fond et ne peuvent étayer les demandes de suspension des décisions litigieuses en l'absence de lien entre [M] et les motifs de révocation et d'exclusion dont se plaint l'intimé. Quant au prétendu stratagème mis en place par les consorts [X] pour ralentir l'activité de la société STRASPOKE, les parties appelantes invoquent les difficultés administratives plus fastidieuses au restaurant STRASPOKE qu'au [M] car le dernier a succédé à un fonds de commerce disposant de toutes les autorisations nécessaires, contrairement à STRASPOKE, qu'en plus, M. [G] [U] était également responsable de ces formalités, et que ce dernier ne s'est jamais intéressé à la gestion du restaurant.

Sur l'infirmation de l'ordonnance concernant la suspension des effets des assemblées générales, Monsieur [X] [B], Monsieur [X] [J] et la SAS STRASPOKE indiquent que le juge des référés a accueilli l'argumentaire de M. [G] [U], alors qu'une telle question relève de l'appréciation souveraine des juges du fond qui seuls peuvent caractériser l'existence de motifs graves de révocation et d'exclusion. Elles prétendent que rien ne démontre en quoi la révocation et l'exclusion de M. [G] [U] provoque un dommage imminent à la société STRASPOKE, ce départ n'a selon eux aucune conséquence pour la société. Monsieur [X] [B], Monsieur [X] [J] et la SAS STRASPOKE soutiennent que la révocation et l'exclusion de Monsieur [G] [U] sont uniquement dus à la défaillance et à la nuisance aux intérêts de la société que M. [G] [U] a causées.

Elles affirment qu'il y a donc bien un motif grave qui a motivé la décision de révocation et d'exclusion et que la décision de révocation et d'exclusion n'a pas été prise dans l'intérêt de l'associé majoritaire mais dans l'intérêt de la société au vu des graves mésententes entre associés, de l'absence d'implication de M. [G] [U] et de son incompétence.

Sur la demande de désignation d'un séquestre, Monsieur [X] [B], Monsieur [X] [J] et la SAS STRASPOKE prétendent que cette procédure de cession est parfaitement régulière, en tout état de cause étant donné que l'ordonnance sera infirmée, le séquestre ordonné n'aura plus lieu d'être.

Sur la demande d'organisation d'une expertise gestion, elles estiment que c'est à juste titre que cette demande a été rejetée, car toutes les réponses aux questions de M. [G] [U] lui ont été apportées, aucune des opérations identifiées par ce dernier ne serait irrégulière, que cette demande d'expertise est sans objet, que si l'ordonnance est infirmée, M. [G] [U] n'aura d'ailleurs plus qualité pour demander une telle expertise, que de surcroît la plupart des points critiqués par M. [G] [U] dans ses conclusions ne sont que des allégations sans fondement et ne sont pas prouvées, et qu'en conséquence l'organisation d'une telle expertise n'est pas opportune.

 

Au soutien de ses prétentions, M. [G] [U], sur l'appel principal en ce qui concerne les actes de concurrence déloyale, affirme que les consorts [X] ont fermé le restaurant STRASPOKE lors du confinement alors que les livraisons et ventes à emporter étaient possibles, dans le but de se consacrer aux travaux et à l'ouverture du restaurant [M], afin de capter la clientèle de STRASPOKE et de profiter des investissements réalisés par STRASPOKE. De plus, M. [J] [X] a ouvert le restaurant [M] un jour après avoir démissionné de ses fonctions à STRASPOKE, s'il n'était plus dirigeant de droit à la date de création il est toujours resté dirigeant de fait et continuait à gérer certaines taches au sein du restaurant STRASPOKE. Les consorts [X] nient les faits de concurrence déloyale, en affirmant que copier un produit concurrent non protégé ne constitue pas un acte de concurrence déloyale susceptible de caractériser un trouble manifestement illicite, pourtant, cette pratique risque de provoquer une confusion dans l'esprit de la clientèle. Ces actes sont d'autant plus graves car commis par l'ancien directeur général de STRASPOKE, profitant de la fermeture de STRASPOKE pour en attirer la clientèle et profiter indûment de la confusion créée. Aussi, la liste des fournisseurs est exactement la même entre [M] et STRASPOKE, [M] bénéficiant ainsi du travail de recherche et de test effectué par STRASPOKE. De plus, [M] a pratiqué un débauchage chez les employés de STRASPOKE anciens ou actuels. Enfin, le fait que les consorts [X] aient pris beaucoup de temps pour accomplir les formalités administratives démontrent une volonté de délaisser STRASPOKE au profit de [M] (par exemple se mettre aux normes EPR).

Sur sa révocation et son exclusion qu'il estime manifestement injustifiées, M. [G] [U] affirme que son exclusion de la société STRASPOKE provoque une situation majoritaire pour les consorts [X], dès lors libres de prendre des décisions contraires à l'intérêt social de STRASPOKE, que les motifs de révocation sont fallacieux et ne sont pas démontrés, que son manque d'implication dans le restaurant n'est pas avéré, qu'il a seulement dû s'absenter pour des problèmes de santé, que les retards dans l'accomplissement de certaines formalités ne peuvent pas lui être uniquement imputés, qu'il n'est pas le seul responsable.

Il affirme qu'en l'espèce, les fautes reprochées ne sont ni graves, ni de nature à compromettre l'intérêt social et le fonctionnement de la société, d'autant plus qu'elles ne sont pas prouvées. M. [G] [U] affirme avoir subi des violences physiques de la part de M. [B] [X] ayant donné lieu au dépôt d'une main courante le 27 juillet 2020 et d'une ITT de 3 jours.

Sur l'abus de majorité, il argue qu'il ressort du PV d'assemblée générale et du refus de M. [B] [X] d'inscrire à l'ordre du jour la révocation de M. [J] [X] que la décision d'exclure M. [G] [U] était déjà actée en amont de l'assemblée générale, ce qui constitue un abus de majorité, de par sa préméditation mais également de par sa contrariété à l'intérêt social de STRASPOKE.

Sur la vente par M. [J] [X] de ses actions en fraude manifeste des droits de M. [G] [U], il indique que les actions ont été vendues à son père sans l'aval des autres associés, ce qui contrevient à l'article 17 des statuts de STRASPOKE, une cession effectuée en contravention d'une clause d'assemblée générale est nulle selon l'article L228-23 du Code de commerce.

Sur la demande d'expertise, quant au caractère sérieux de la demande, il rappelle que le juge des référés a estimé que les réponses apportées par le Président de STRASPOKE étaient 'satisfaisantes' et donc que M. [G] [U] n'était pas fondé à demander une telle expertise, alors que les opérations en question sont apparues au demandeur de nature à porter atteinte à l'intérêt social de la STRASPOKE, que par exemple, la plupart des embauches dans le restaurant ont été effectuées par M. [B] [X] parmi ses amis et sa famille sans prendre en compte son avis alors qu'il est pourtant directeur général et opposé à certaines de ces embauches, que certains de ces employés sont payés plus que ce que leur contrat indique, font des heures supplémentaires ou déclarent des heures non effectuées. Monsieur [G] [U] affirme que les consorts [X] ont mal géré l'approvisionnement du restaurant, ont effectué des changements sur la carte, ont fermé le restaurant sans prendre en compte son avis. Ce dernier allègue également des doutes quant à l'encaissement des espèces par M. [B] [X] qui a refusé de produire les justificatifs d'espèce ainsi que ses notes de frais. Enfin, il affirme que les comptes annuels de la société font apparaître de nombreuses irrégularités et qu'il y a donc lieu d'ordonner une expertise au vu des questions soulevées par la concluante.

Il résulte des dispositions de l'article 873 alinéa 1 du code de procédure civile que le président du Tribunal judiciaire peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le juge des référés ne peut en référé prononcer la suspension des résolutions d'une assemblée générale que pour des raisons qui relèvent d'une violation évidente d'une règle de droit et notamment en matière du droit des sociétés d'une violation évidente des règles de fonctionnement de la société.

L'évidence ainsi requise s'interprète restrictivement.

Or, Monsieur [G] [U] ne démontre pas l'existence d'une violation manifeste des dispositions statutaires, réglementaires ou légales, au soutien de sa demande de suspension des effets des résolutions de l'assemblée générale.

Sur la demande en suspension des effets des délibérations des AG des 5 octobre 2020 et du 27 janvier 2021, c'est à bon droit que le juge des référés indique que l'absence de motif grave n'est pas une cause de nullité de la délibération mais permet seulement d'ouvrir un droit à indemnisation de sorte qu'elle ne saurait justifier la suspension des effets de la délibération litigieuse. Mais en tout état de cause, le bien fondé du motif ne relève pas du pouvoir juridictionnel du juge des référés mais de celui du juge du fond.

S'agissant de sa demande fondée sur l'abus de majorité, Monsieur [G] [U] ne démontre pas que la décision prise est contraire à l'intérêt social, qu'elle est prise dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des autres associés et que la décision constitue une violation évidente de l'intérêt social.

Monsieur [G] [U] ne démontre pas en quoi son absence de la société constituerait pour elle un trouble manifestement illicite alors que les attestations produites aux débats par Monsieur [X] [B], Monsieur [X] [J] et la SAS STRASPOKE démontrent les manquements avérés établis à l'encontre de la partie intimée et que dans ces conditions, l'atteinte à l'intérêt social n'est pas démontrée.

S'agissant du dommage imminent dont l'existence est soutenue par la partie intimée, il convient de rappeler que le dommage imminent est un dommage qui ne s'est pas encore réalisé.

Or, la partie intimée invoque l'existence d'un dommage imminent qui serait la conséquence d'actes de concurrence déloyale imputables aux parties appelantes et qui se seraient déjà réalisés et résultant de la perte de sa qualité de directeur général associé sans justifier en quoi cette perte de qualité serait susceptible d'être dommageable pour la société.

Dans ces conditions, la décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle a suspendu les effets des délibérations du 05 Octobre 2020 et du 27 Janvier 2021.

En conséquence, la demande tendant à voir désigner un séquestre des 27 actions initialement détenues par Monsieur [J] [X] est devenue sans objet.

Sur la demande de désignation d'un expert, par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 août 2020 M. [G] [U] a interrogé la société STRASPOKE sur différentes opérations de gestion, et une demande d'expertise sur ces seules questions est possible, par application des dispositions de l'article L 225-231 du code de commerce.

Le 8 septembre 2020 Monsieur [B] [X] a répondu à toutes ces questions, ces réponses sont satisfaisantes et Monsieur [G] [U] n'allègue ni ne justifie de l'irrégularité de ces opérations.

En conséquence, la décision entreprise sera confirmée en ce que la demande d'expertise a été rejetée.

Succombant, Monsieur [G] [U] sera condamné aux entiers dépens, de première instance et d'appel.

L'équité n'appelle pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit des parties appelantes et intimée.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Infirme l'ordonnance rendue par le juge des référés commerciaux du Tribunal judiciaire de Strasbourg, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande d'organisation d'une expertise sur le fondement des dispositions de l'article L225-231 du code de commerce,

Statuant sur les chefs infirmés et Y Ajoutant,

Déboute Monsieur [G] [U] de l'intégralité de ses demandes,

Condamne Monsieur [G] [U] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Rejette les demandes présentées par Monsieur [G] [U] et Monsieur [X] [B], Monsieur [X] [J] et la SAS STRASPOKE fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière :la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 21/03309
Date de la décision : 28/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-28;21.03309 ?
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