MINUTE N° 22/732
NOTIFICATION :
Copie aux parties
- DRASS
Clause exécutoire aux :
- avocats
- parties non représentées
Le
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB
ARRET DU 22 Septembre 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 16/01864 - N° Portalis DBVW-V-B7A-GDYC
Décision déférée à la Cour : 09 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du BAS-RHIN
APPELANTE :
S.A.S. [5]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Dispensée de comparution
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES COTES D'ARMOR
[Adresse 1]
[Localité 2]
Comparante en la personne de Mme [S] [L], munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre, chargée d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
Mme ARNOUX, Conseiller
Mme HERY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,
- signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
FAITS ET PROCEDURE
Le 1er juillet 2013, la SAS [5] a établi, en vue de prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Côtes d'Armor, une déclaration 'accident du travail dont son salarié M. [D] [P] a été victime le 29 juin 2013, indiquant que M. [P] « s'est bloqué le dos en portant le treillis ».
Le certificat médical initial établi le 29 juin 2013 faisait état de « dorsalgies » et d'un arrêt de travail jusqu'au 3 juillet 2013.
Le 2 octobre 2013, la CPAM a notifié à la société [5] sa décision de prendre en charge cet accident du travail au titre de la législation professionnelle.
L'état de santé de M. [P] a été déclaré guéri au 24 janvier 2014.
Après avoir constaté l'imputation à son compte employeur 2013-2014 de 200 jours d'arrêt de travail au bénéficie de M. [D] [P], la société [5] a, par courrier du 2 mai 2014, saisi la commission de recours amiable de la caisse qui, en sa séance du 6 juin 2014, a déclaré le recours irrecevable, puis elle a, le 11 juillet 2014, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin, demandant que lui soit déclarée inopposable la décision de la caisse de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l'ensemble des arrêts de travail prescrits.
Par jugement du 9 mars 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin a :
- déclaré le recours de la société [5] recevable mais mal fondé,
- l'a rejeté,
- a déclaré les décisions de la CPAM des Côtes d'Armor de prise en charge de l'ensemble des arrêts de travail et soins opposable à la société [5],
- a débouté la CPAM des Côtes d'Armor de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société [5] a formé appel à l'encontre de ce jugement le 8 avril 2016.
Par arrêt du 13 septembre 2018, la cour a dit que l'appel de la société [5] est recevable et a ordonné une expertise médicale.
L'expert désigné après remplacement, le docteur [H], a déposé son rapport daté du 2 février 2021.
Aux termes de son écrit daté du 1er février 2022, la société [5], dispensée de comparution, sollicite le rejet des conclusions de l'expertise judiciaire, considérées rendues à l'issue d'une mesure d'instruction accomplie de manière non contradictoire, et la mise en 'uvre d'une nouvelle mesure d'instruction aux frais de la CPAM des Côtes d'Armor.
Aux termes de sa note transmise par courriel du 28 janvier 2022 et de ses conclusions visées le 16 juillet 2021, soutenues oralement à l'audience, la CPAM des Côtes d'Armor demande à la cour de :
- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 6 janvier 2016 (en réalité le 9 mars 2016) ;
- en conséquence, juger opposable à la société [5] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du 29 juin 2013 ainsi que l'ensemble des soins et arrêts de travail prescrits à ce titre ;
- condamner la société [5] au paiement de la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société [5] aux dépens, y inclus les frais d'expertise.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le fond
Seule est contestée l'imputabilité à l'accident du travail dont M. [D] [P] a été victime le 29 juin 2013 des arrêts de travail et soins prescrits à la victime jusqu'à sa guérison fixée le 24 janvier 2014.
A l'appui de son appel, la société [5] fait valoir en dernière analyse que les conclusions de l'expert, le docteur [H], sont à écarter, faute de respect du contradictoire dans l'exécution de la mesure d'expertise.
Elle se réfère à une attestation de son médecin conseil le docteur [R] en date du 27 janvier 2022 indiquant que certaines pièces visées par l'expert dans son rapport en page 2 (à savoir la note technique du docteur [V], les certificats d'arrêts de travail du 3 juillet 2013 au 24 janvier 2014, les avis du médecin conseil du 29 janvier 2014 et du 23 janvier 2014, la note technique de la CPAM) ne lui ont pas été transmises.
La société [5] ne conclut cependant pas à la nullité de l'expertise. Le docteur [H] a par ailleurs relevé dans son rapport, qu'étant invité à recueillir les observations des parties « sur les éléments médicaux communiqués et sur ses conclusions », il a contacté le docteur [R] le 2 février 2021 par téléphone (pour cause d'épidémie de covid) et que celui-ci « n'ajoute pas de remarque ». Il y a lieu de noter que dans son rapport le docteur [H] a notamment pris soin d'énumérer les différents certificats médicaux de prolongation d'arrêt avec l'indication de leur date, de leur auteur (docteur [Z]) et de leur motif soit « traumatisme dorsal » ou « traumatisme dorsal avec tassement du corps vertébral de L5 à la radio », mettant en mesure la société [5] par l'intermédiaire du docteur [R] de critiquer les conclusions de l'expert.
Il est en tout cas jugé jugé, au visa des articles L411-1 du code de la sécurité sociale et 1353 du code civil, que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt a été initialement prescrit ou que le certificat médical d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, ce sans que la caisse n'ait à produire l'ensemble des certificats médicaux en justifiant pour démontrer une continuité de symptômes et de soins, et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.
En l'espèce, il résulte des pièces produites que la CPAM des Côtes d'Armor, à la suite de l'accident du travail du 29 juin 2013, a versé à M. [D] [P] des indemnités journalières pour accident de travail jusqu'au 24 janvier 2014, très exactement du 30 juin 2013 au 27 juillet 2013, puis du 28 juillet 2013 au 12 septembre 2013 et du 23 septembre 2013 au 24 janvier 2014, de sorte que la présomption d'imputabilité à l'accident du travail des arrêts et soins jusqu'au 24 janvier 2014 trouve à s'appliquer.
Il résulte aussi des pièces produites devant la cour que la caisse a interrogé le médecin conseil près la caisse qui, dans un avis exactement daté du 22 janvier 2014, a estimé l'arrêt de travail justifié.
Devant la cour, la société [5], qui a la charge de renverser la présomption d'imputabilité des lésions à l'accident du travail, ne démontre d'aucune façon que les arrêts de travail successifs et les soins prescrits à son salarié et pris en charge à ce titre, sont sans lien avec le travail, ni n'apporte quelque élément que ce soit de nature à remettre en cause la décision de prise en charge des soins et arrêts de travail dispensés jusqu'à la guérison fixée par la CPAM au 24 janvier 2014.
En conséquence, il convient de débouter la société [5] de sa demande d'expertise destinée à suppléer sa carence dans l'administration de la preuve et de dire que la décision de la CPAM des Côtes d'Armor de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident du travail dont M. [D] [P] a été victime le 29 juin 2013 est opposable à la société [5], ce qui impose d'infirmer le jugement entrepris dans les termes du dispositif ci-après.
Sur les dispositions accessoires
Le différend qui oppose un employeur à un organisme de sécurité sociale, relatif à la prise en charge d'un accident et de ses suites au titre des risques professionnels ne relève pas de la procédure d'expertise médicale prévue à l'article L141-1 du code de la sécurité sociale.
La société [5] qui succombe doit donc supporter les frais de l'expertise confiée au docteur [H].
Elle sera en outre condamnée aux dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018 et à verser à la CPAM des Côtes d'Armor la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,
Vu l'arrêt de la cour de céans du 13 septembre 2018,
INFIRME le jugement du 9 mars 2016 du tribunal des affaires de sécurité sociale du Bas-Rhin dans les termes ci-après, et statuant à nouveau,
DECLARE le recours de la société [5] recevable ;
DEBOUTE la société [5] de sa demande ;
DIT la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident du travail dont M. [D] [P] a été victime le 29 juin 2013 opposable à la société [5] jusqu'à la date de guérison de l'assuré fixée au 24 janvier 2014 ;
CONDAMNE la société [5] à supporter les frais de l'expertise médicale confiée au docteur [H] ;
CONDAMNE la société [5] aux dépens exposés postérieurement au 31 décembre 2018 ;
CONDAMNE la société [5] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,