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30/08/2022 | FRANCE | N°18/04837

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 5 b, 30 août 2022, 18/04837


Chambre 5 B



N° RG 18/04837 -

N° Portalis DBVW-V-B7C-G44P







MINUTE N°





































































Copie exécutoire à



- Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA

- Me Dominique HARNIST



Copie au

- Ministère Public





Le



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CINQUIEME CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 30 Août 2022





Décision déférée à la Cour : 19 Septembre 2018 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG





APPELANT :



Monsieur [Y] [I]

né le 03 Octobre 1972 à [Localité 6] (YOUGOSLAVIE)

de nationalité française

[Adresse 1]

[Loca...

Chambre 5 B

N° RG 18/04837 -

N° Portalis DBVW-V-B7C-G44P

MINUTE N°

Copie exécutoire à

- Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA

- Me Dominique HARNIST

Copie au

- Ministère Public

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CINQUIEME CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 30 Août 2022

Décision déférée à la Cour : 19 Septembre 2018 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANT :

Monsieur [Y] [I]

né le 03 Octobre 1972 à [Localité 6] (YOUGOSLAVIE)

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Valérie BISCHOFF - DE OLIVEIRA, avocat à la cour,

INTIMÉS :

Madame [K] [M]

née le 09 Septembre 1981 à [Localité 4]

de nationalité Ukrainienne

chez [Adresse 3]

[Localité 5]

Aide juridictionnelle Totale numéro 2019/002056 du 23/04/2019

Représentés par Me Dominique HARNIST, avocat à la cour,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Juin 2022, en Chambre du Conseil, devant la Cour composée de :

Mme HERBO, Président de chambre

Mme LAMBOLEY-CUNEY, Conseiller

M. BARRE, Vice Président placé, faisant fonction de Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme FLEURET, Greffier

MINISTÈRE PUBLIC auquel le dossier a été communiqué

Mathilde PIMMEL, Substitut général, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Karine HERBO, président et Mme Linda MASSON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Mme [K] [M] a donné naissance le 30 juin 2016 à [Localité 5] à [N], ce dernier n'ayant pas fait l'objet d'une reconnaissance paternelle.

Par assignation en date du 26 juin 2017, elle a fait citer M. [I] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins de voir établir sa paternité envers l'enfant [N].

Par jugement réputé contradictoire avant dire-droit du 31 août 2017, cette juridiction a ordonné une mesure d'expertise génétique.

Le 6 mars 2018, l'expert a dressé un procès-verbal de carence, M. [I] ne s'étant pas présenté pour effectuer le prélèvement salivaire nécessaire à la réalisation de l'expertise génétique.

Par jugement du 19 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Strasbourg a pour l'essentiel :

- dit que M. [I] est le père de l'enfant [N],

- ordonné la mention de cette paternité en marge de l'acte de naissance de l'enfant,

- constaté que Mme [M] exerce exclusivement l'autorité parentale,

- dit que les parents déterminent ensemble la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles M. [I] accueille l'enfant,

- fixé à 150 euros par mois, avec indexation, la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant versée par le père à la mère,

- condamné M. [I] aux dépens comprenant les frais de carence de l'expertise.

Le 6 novembre 2018, M. [I] a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt du 1er décembre 2020, la cour de céans a :

- débouté M. [I] de ses demandes de nullité,

- débouté M. [I] de son exception d'incompétence,

- avant dire-droit, ordonné une expertise aux d'examen comparatif des empreintes génétiques des parties,

- réservé pour le surplus et les dépens.

Le rapport d'expertise a été déposé le 14 octobre 2021.

Suite à ce rapport, le parquet général a conclu à la confirmation du jugement conforme à la réalité biologique.

Dans ses dernières conclusions en date du 15 décembre 2021, M. [I] demande à la cour de :

- déclarer l'action en recherche de paternité diligentée par Mme [M] irrecevable et mal fondée,

- dire que sa paternité n'est pas établie à 100 % à l'égard de l'enfant [N] [M],

- débouter Mme [M] de ses fins, demandes et conclusions,

- condamner Mme [M] à lui verser la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral,

En tous les cas,

- condamner l'intimée à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700

du code de procédure civile,

- la condamner aux dépens de première instance et d'appel.

M. [I] fait valoir qu'il n'a jamais vécu avec Mme [M] ni jamais eu l'intention d'avoir un enfant avec elle. Il a l'impression de s'être fait piéger par Mme [M] pour qu'elle puisse obtenir un titre lui permettant de rester sur le territoire français et d'avoir une source de revenus grâce à la pension alimentaire, alors qu'il a seulement voulu la soutenir dans des moments difficiles.

Il relève que les demandes de Mme [M] font apparaître le but réel poursuivi à savoir se servir de lui pour obtenir la nationalité française pour son fils, ce qui la protégerait d'une mesure d'expulsion du territoire français, et obtenir une pension alimentaire pour lui garantir des revenus stables et réguliers, soulignant que sa demande d'asile aurait été rejetée en octobre ou novembre 2015 et qu'elle se trouvait sous le coup d'une menace de reconduite à la frontière.

Il indique voir son honneur bafoué par les demandes de Mme [M].

Concernant le rapport d'expertise, il souligne que Mme [M] a tardé à se présenter avec son enfant au laboratoire chargé du prélèvement ; que ce rapport conclut que sa paternité vis-à-vis de l'enfant est extrêmement vraisemblable, ce qui l'a abasourdi, Mme [M] lui ayant affirmé prendre les précautions nécessaires.

Mme [M] n'a pas conclu après le dépôt du rapport d'expertise.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 27 mai 2019, Mme [M] sollicitait de la cour qu'elle :

- déboute M. [I] de sa demande de nullité,

- déboute M. [I] de son exception d'incompétence,

- avant dire-droit, si la cour l'estime nécessaire, ordonne une expertise génétique,

- confirme le jugement en toutes ses dispositions,

- condamne M. [I] au paiement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Mme [M] relevait que M. [I] a été assigné à son adresse et qu'il ne retire pas ses recommandés volontairement. Elle remarque par ailleurs que sa société est domiciliée à son adresse, l'autre adresse fournie correspondant à un homonyme.

Elle soulignait que l'incompétence territoriale du tribunal de grande instance de Strasbourg n'a pas été soulevée dans le cadre du jugement avant dire-droit, et que M. [I] ne peut donc plus l'invoquer.

Elle précisait qu'elle a entretenu une liaison avec M. [I] courant 2014 à 2016, venant le voir tous les week-ends et souvent une ou deux fois par semaine jusqu'à ce qu'il la délaisse en découvrant sa grossesse.

Elle demandait en conséquence, qu'une expertise biologique soit ordonnée et que les autres décisions du premier juge soient confirmées, [N] n'ayant que trois ans, ne connaissant pas son père, lequel ne s'est jamais intéressé à lui.

Par réquisitions du 12 juin 2019, le procureur général s'en est rapporté.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 10 février 2022, l'affaire étant fixée à l'audience de plaidoiries du 8 juin 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions susvisées.

DISCUSSION

Sur l'action en recherche de paternité

En application de l'article 327 du code civil, la paternité hors mariage peut être judiciairement déclarée.

Dans ses dernières conclusions après dépôt du rapport d'expertise, M. [I] reprend son argumentation quant à la volonté réelle de Mme [M] quant à cette recherche de paternité en soulignant qu'il n'avait jamais eu l'intention d'avoir un enfant avec cette dernière.

Cependant, il doit être rappelé que dans l'arrêt avant dire-droit, la cour a d'ores et déjà souligné qu'en matière de filiation, l'expertise biologique est de droit, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder, motif qui ne saurait être constitué par l'absence de vie commune entre les parties, de désir de paternité de la part de M. [I], ses voyages limités en Alsace ou les nombreux changements de résidence de Mme [M] et que, par ailleurs, la volonté de fraude à la loi, invoquée par M. [I], de la part de Mme [M] pour obtenir un titre lui permettant de séjourner un France, outre le fait qu'elle n'est pas établie, ne saurait faire obstacle à l'intérêt légitime d'un enfant de voir reconnaître sa filiation.

Le seul fait que Mme [M] ne se soit pas présentée avec son fils pour les prélèvements dès les premières convocations, ne peut induire une quelconque conséquence alors qu'il apparaît qu'elle avait été convoquée à son ancienne adresse.

Les arguments soulevés par M. [I] pour faire obstacle à l'action en recherche de paternité initiée par Mme [M] ne peuvent donc aboutir.

L'expertise biologique a conclu au fait que la paternité de M. [I] vis-à-vis de l'enfant [N] [M] est extrêmement vraisemblable, puisque l'indice de paternité combiné est supérieur à 100 milliards et que la probabilité de paternité est supérieure à 99,99999 %.

Dès lors, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que M. [I] est le père de l'enfant [N] et ordonné la mention de cette paternité en marge de l'acte de naissance de l'enfant, mention correspondant à la réalité biologique.

Sur les mesures relatives à l'enfant

Sur l'autorité parentale

En application de l'article 372 alinéa 2 du code civil, lorsque la filiation est établie à l'égard de l'un des parents plus d'un an après la naissance d'un enfant dont la filiation est déjà établie à l'égard de l'autre, celui-ci reste seul investi de l'exercice

de l'autorité parentale. Il en est de même lorsque la filiation est judiciairement déclarée à l'égard du second parent de l'enfant ou, dans le cas d'un établissement de la filiation dans les conditions prévues au chapitre V du titre VII du présent livre, lorsque la mention de la reconnaissance conjointe est apposée à la demande du procureur de la République.

La filiation paternelle de [N] étant judiciairement déclarée, l'autorité parentale est exercée exclusivement par la mère.

Sur le droit de visite et d'hébergement paternel

Aux termes de l'article 373-2-9 du code civil lorsque la résidence de l'enfant est fixée au domicile de l'un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l'autre parent.

M. [I] ne forme aucune demande de ce chef et n'a jamais eu de contact avec l'enfant.

Dès lors, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que les parents déterminent ensemble la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles M. [I] accueille l'enfant.

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant

L'obligation d'entretenir et d'élever les enfants résulte d'une obligation légale à laquelle les parents ne peuvent échapper qu'en démontrant qu'ils sont dans l'impossibilité matérielle de le faire. Elle ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur.

Le montant de la pension alimentaire est calculé en proportion du revenu net d'un minimum vital du parent débiteur, en fonction du nombre total d'enfants à charge et de l'amplitude des droits de visite et d'hébergement.

Aucune des parties ne donne d'indications ni ne fournit de justificatifs quant à ses ressources et charges.

Eu égard aux besoins spécifiques de l'enfant compte tenu de son âge, au temps passé par l'enfant chez chacun des parents, en l'absence de tout justificatif des ressources et charges des parents, il convient de fixer la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant versée par M. [I] à Mme [M] à la somme de 150 euros par mois.

Sur les dommages et intérêts

La demande de dommages et intérêts présentée par M. [I] ne saurait aboutir alors que sa filiation est judiciairement établie envers l'enfant.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de l'appel principal de M. [I],

Confirme le jugement,

Déboute M. [I] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [I] aux dépens, comprenant les frais d'expertise.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 5 b
Numéro d'arrêt : 18/04837
Date de la décision : 30/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-30;18.04837 ?
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