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20/07/2022 | FRANCE | N°21/02122

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 20 juillet 2022, 21/02122


MINUTE N° 398/22



























Copie exécutoire à



- Me Sophie BEN AISSA -ELCHINGER



- Me Valérie PRIEUR





Le 20.07.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 20 Juillet 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/02122 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HSFG
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Décision déférée à la Cour : 24 Novembre 2020 par la Première chambre civile du Tribunal judiciaire de MULHOUSE



APPELANT :



Monsieur [B] [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER, avocat à la Cour



INTIMEE ...

MINUTE N° 398/22

Copie exécutoire à

- Me Sophie BEN AISSA -ELCHINGER

- Me Valérie PRIEUR

Le 20.07.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 20 Juillet 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/02122 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HSFG

Décision déférée à la Cour : 24 Novembre 2020 par la Première chambre civile du Tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANT :

Monsieur [B] [P]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie BEN AISSA-ELCHINGER, avocat à la Cour

INTIMEE :

S.A. CREDIT FONCIER DE FRANCE

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Valérie PRIEUR, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me LOUISET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Février 2022, en audience publique, un rapport ayant été présenté, devant la Cour composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Vu le jugement du 24 novembre 2020 du tribunal judiciaire de Mulhouse, régulièrement frappé d'appel, le 19 avril 2021, par voie électronique, par M. [P],

Vu la constitution d'intimée de la société Crédit Foncier de France du 2 juin 2021,

Vu les conclusions de M. [P], auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le 16 juillet 2021,

Vu les conclusions de la société Crédit Foncier de France datées du 13 octobre 2021, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le 13 octobre 2021,

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 22 octobre 2021 renvoyant l'affaire à l'audience de plaidoirie du 28 février 2022,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION :

Il résulte des pièces et des conclusions des parties que selon offre de crédit émise le 27 juin 2012 et acceptée le 9 juillet 2012, la société Crédit Foncier de France a consenti à M. [P], afin de financer un logement neuf acquis en état futur d'achèvement, un prêt à taux zéro d'un montant de 11 060 euros et un prêt intitulé 'Pas Liberté' d'un montant de 98 940 euros remboursable moyennant un taux d'intérêt de 4,55 %, par mensualités dont le montant variait selon les paliers, l'offre mentionnant un TEG de 5,19 %.

Le 27 janvier 2017, M. [P] a accepté un avenant concernant le prêt intitulé 'Pas Liberté' ramenant le taux d'intérêt à 2,45 % l'an à effet au 5 juillet 2016, l'avenant mentionnant un TEG de 3,230 %.

Le contrat de prêt était soumis aux dispositions des articles L.312-1 et suivants du code de la consommation, et l'avenant aux dispositions les ayant remplacées, à savoir les articles L.313-1 et suivants du code de la consommation.

Par acte d'huissier délivré le 23 octobre 2018, M. [P] a agi en nullité de la stipulation d'intérêts, subsidiairement en déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la banque et restitution d'une somme trop versée.

Le jugement attaqué a :

- déclaré irrecevables pour être prescrites l'action principale en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et l'action subsidiaire en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels, sauf en ce qu'elles sont fondées sur l'absence de mention du taux de période dans l'offre d'avenant acceptée le 27 janvier 2017,

- déclaré, en conséquence, irrecevables les demandes de M. [P] de substitution du taux d'intérêt conventionnel présent dans l'offre de prêt acceptée le 9 janvier 2012 par le taux d'intérêt légal, de condamnation de la banque à lui verser le trop-perçu sur la période échue au titre de ladite offre de prêt, et tendant à voir juger qu'à compter de la décision, il sera fait application de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, à savoir l'application du taux d'intérêt légal de l'année de souscription, à défaut le taux d'intérêt légal fixé semestriellement par décret, en ce qu'elle vise l'offre de prêt acceptée le 9 janvier 2012,

- déclaré recevable l'action principale en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et l'action subsidiaire en déchéance du droit aux intérêts conventionnels, en ce qu'elles portent sur l'offre avenant acceptée le 27 janvier 2017 ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription s'agissant de l'avenant accepté le 27 janvier 2017,

- débouté M. [P] de sa demande tendant à la substitution du taux d'intérêt conventionnel présent dans l'offre avenant acceptée le 27 janvier 2017 par le taux d'intérêt légal, de sa demande de condamnation de la banque à lui verser le trop-perçu sur la période échue au titre de ladite offre de prêt, et tendant à voir juger qu'à compter de la décision, il sera fait application de la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, à savoir l'application du taux d'intérêt légal de l'année de souscription, à défaut le taux d'intérêt légal fixé semestriellement par décret, en ce qu'elle vise l'offre d'avenant acceptée le 27 janvier 2017,

- condamné M. [P] à payer à la banque la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejeté sa demande de ce chef,

- condamné M. [P] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 699 du code de procédure civile et à l'exécution provisoire de la décision.

M. [P] demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de déclarer recevables et fondées ses demandes relatives à l'offre de prêt, et bien fondées ses demandes relatives à l'avenant.

M. [P] demande à la cour d'ordonner la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au détriment de la banque, et en conséquence, dire que le prêt, et à titre subsidiaire, l'avenant, sera soumis uniquement aux intérêts légaux.

Sa demande de déchéance du droit aux intérêts est fondée sur :

- l'absence d'intégration au calcul du TEG de l'offre et de l'avenant :

- des frais de la période pré-financement,

- des frais d'assurance au titre de la période de préfinancement

- le calcul des intérêts du prêt et de l'avenant sur la base d'une année lombarde.

La banque conclut au rejet de l'appel.

1. Sur la prescription des demandes concernant l'offre de prêt :

M. [P] agit uniquement devant la cour d'appel en déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la banque, et non plus en nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel.

La banque oppose la prescription de l'action.

Le délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts est de cinq ans en application de l'article L.110-4 du code de commerce, et non pas de vingt ans comme le soutient M. [P].

En application de l'article 2224 du code civil, le point de départ du délai quinquennal de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le calcul du taux effectif global.

Le délai de prescription ne peut ainsi courir à compter de l'acceptation de l'offre que si l'emprunteur était en mesure de déceler par lui-même, à la seule lecture de l'offre, l'erreur affectant le calcul du taux effectif global.

Contrairement à ce que soutient M. [P], le délai de prescription court à compter du jour où il a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant le calcul du taux effectif global, et ce peu important que le prêt était, au jour de la demande en justice, toujours en cours d'exécution.

Enfin, lorsque la simple lecture de l'offre de prêt permet à l'emprunteur de déceler son irrégularité, le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour de l'acceptation de l'offre, sans report possible tiré de la révélation postérieure d'autres irrégularités.

En l'espèce, M. [P] soutient, notamment, que n'ont pas été intégrés dans le calcul du TEG les frais d'assurance au titre de la période de préfinancement.

Or, l'offre de prêt indiquait (en page 6) que le taux effectif global 'inclut, outre le taux d'intérêt du prêt, les éléments suivants :

- frais de dossier : 500 euros, payables en 6 mensualités,

- frais de garantie (évaluation) : 766 euros

- assurance obligatoire pour la durée prévisionnelle du prêt (hors période de préfinancement) dont le montant (mensuel) figure dans les tableaux indiqués ci-après au paragraphe Assurances.'

Ainsi, il ressortait de la seule lecture de cette clause claire et précise que le TEG n'incluait pas les frais d'assurance dus pendant la période de préfinancement.

Dès la signature de l'offre de prêt, le 9 juillet 2012, M. [P] a, dès lors, connu ou aurait dû connaître l'erreur alléguée affectant le calcul du taux effectif global qu'il entend invoquer dans la présente instance.

En conséquence, et comme le soutient la banque qui invoque le principe d'unicité de la prescription, applicable à l'action et non pas aux moyens au soutien de l'action, le point de départ du délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts se situe au jour de l'acceptation de l'offre, sans report possible tiré de l'éventuelle révélation postérieure des autres irrégularités invoquées par M. [P].

Son action, introduite plus de cinq ans après le 9 juillet 2012, en déchéance du droit aux intérêts de la banque au titre du prêt est dès lors prescrite. Le jugement sera confirmé.

2. Sur les demandes concernant l'avenant :

Comme le soutient la banque, le TEG mentionné dans l'avenant n'avait pas à intégrer le coût lié à la période de préfinancement, les intérêts intercalaires et l'assurance afférent à une telle période, dès lors qu'outre le fait que M. [P] ne soutient pas que l'avenant prévoit une telle période de préfinancement, il peut être relevé que celui-ci n'en comporte aucune.

En outre, M. [P] ne démontre pas l'existence d'une erreur dans le calcul des intérêts ou du TEG qui résulterait de l'application de l'année lombarde, qui n'est d'ailleurs pas non plus démontrée.

Il soutient que les intérêts mis en compte mensuellement par la banque correspondent à une fraction de 30/360 de l'intérêt conventionnel annuel appliqué au capital restant dû lors de la précédente échéance.

Alors qu'il indique, par exemple pour l'échéance du 5 août 2017, que la banque a calculé un intérêt de 190,86 euros, il convient de relever qu'il existe 31 jours entre le 5 août 2017 et l'échéance précédente du 5 juillet 2017 date à laquelle le capital restant dû s'élevait à 93 484,80 euros selon le tableau d'amortissement, de sorte qu'il soutient de manière erronée que l'application de l'année civile devrait en réalité conduire à un intérêt calculé comme suit 93 484,80 x 2,45 % / 365 jours x 30.

En outre, et surtout, comme le souligne la banque, le mois normalisé, d'une durée de 30,41666 jours, prévu à l'Annexe à l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002, a vocation à s'appliquer au calcul des intérêts conventionnels lorsque ceux-ci sont calculés sur la base d'une année civile et que le prêt est remboursable mensuellement. (1re Civ., 24 octobre 2019, pourvoi n° 18-12.255).

Cette annexe a été remplacée par l'Annexe à l'article R. 314-3 du Code de la consommation, qui s'applique en matière de calcul du TEG et reprend les mêmes dispositions, en son c) stipulant que 'L'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fraction d'années. Une année compte 365 jours, ou pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est à dire 365/12), que l'année soit bissextile ou non'.

De surcroît, il convient de relever que M. [P] fait valoir que les termes de la Directive 2014/17UE du Parlement européen et du Conseil du 4 février 2014 sur les crédits aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et cite des dispositions similaires à celles précitées relatives à l'application d'un mois normalisé.

Or, en tenant compte de ce mois normalisé, les intérêts mis en compte dans le tableau d'amortissement lors des échéances mensuelles critiquées par M. [P] ont été justement calculés :

Échéance du 5 août 2017 : 93 484,80 x 2,45 % x 30,41666/ 365 = 190,86 euros

Echéance du 5 mars 2019 : 90 201,24 x 2,45 % x 30,41666/ 365 =184,16 euros

Echéance du 5 novembre 2020 : 86 604,59 x 2,45 % x 30,41666/ 365 = 176,82 euros

Il en résulte que M. [P] ne démontre pas l'existence d'une erreur, de sorte que sa demande tendant à obtenir la déchéance du droit aux intérêts et ses demandes subséquentes seront rejetées, le jugement étant ainsi confirmé.

3. Sur les frais et dépens :

M. [P] succombant, il convient de confirmer le jugement ayant statué sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, et, y ajoutant, de le condamner à supporter les dépens d'appel et à payer à la banque la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter sa demande de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 24 novembre 2020,

Y ajoutant,

Condamne M. [P] à supporter les dépens d'appel,

Condamne M. [P] à payer à la société Crédit Foncier de France la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de M. [P] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière :la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 21/02122
Date de la décision : 20/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-20;21.02122 ?
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