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13/07/2022 | FRANCE | N°20/02125

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 13 juillet 2022, 20/02125


MINUTE N° 383/22

























Copie exécutoire à



- Me Thierry CAHN



- Me Patricia CHEVALLIER -GASCHY





Le 13.07.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 13 Juillet 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/02125 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HLWO



Décision déférée à la Cour : 03 Juillet 2020 par la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE



APPELANTE - INTIMEE INCIDEMMENT :



S.A. PROMETAL

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par...

MINUTE N° 383/22

Copie exécutoire à

- Me Thierry CAHN

- Me Patricia CHEVALLIER -GASCHY

Le 13.07.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 13 Juillet 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/02125 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HLWO

Décision déférée à la Cour : 03 Juillet 2020 par la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE - INTIMEE INCIDEMMENT :

S.A. PROMETAL

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour

INTIMEE - APPELANTE INCIDEMMENT :

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LORR AINE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et M. ROUBLOT, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

La société Prometal a fait appel à la société Compagnie de Ferraillage pour la pose d'armatures sur différents chantiers. Le 16 juillet 2015, elles ont signé une convention de compensation pour les créances et dettes qu'elles détiennent mutuellement l'une sur l'autre.

La société Compagnie de Ferraillage a cédé des créances envers la société Prometal à la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Leasing et Factoring, exploitant sous le nom Eurofactor, la société Prometal en étant informée par lettres comprises entre le 12 janvier et le 3 mars 2017.

Par jugement du 9 mai 2017, la société Compagnie de Ferraillage a été mise en liquidation judiciaire.

Par lettre du 16 mai 2017, la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Leasing et Factoring a déclaré sa créance à hauteur d'un montant de 125 025,04 euros.

Selon quittances subrogatives, la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine a payé la somme de 110 971,99 euros à la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Leasing et Factoring, qui a subrogé la première dans ses droits qu'elle détient à l'égard de la société Compagnie de Ferraillage ou de ses débiteurs au titre des factures concernées.

La société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine, venant aux droits de la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Leasing et Factoring en tant que subrogée dans ses droits, a agi en paiement contre la société Prometal.

Par jugement du 3 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :

- condamné la SA Prometal à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine la somme de 66 438,65 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017, au titre des factures F002-01-17, F004-01-17, F001-02-17, F005-02-17 et F004-02-17,

- débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine du surplus de ses demandes,

- condamné la SA Prometal à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté la demande de la SA Prometal faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SA Prometal aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

Le 27 juillet 2020, la SA Prometal en a interjeté appel.

Par ses dernières conclusions du 16 avril 2021, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le même jour, la société Prometal demande à la cour de :

- dire et juger que les créances de la société Compagnie de Ferraillage et celle de la société Prometal sont connexes ;

- dire et juger que les créances de la société Compagnie de Ferraillage doivent se compenser avec celle de la société Prometal ;

- dire et juger que les créances de la société Compagnie de Ferraillage sont éteintes par l'effet de la compensation ;

En conséquence,

- infirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Mulhouse du 3 juillet 2020 en tant qu'il a condamné la société Prometal au paiement de la somme de 66 438,65 euros, assortie des intérêts au taux légal, et à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

Statuant à nouveau,

- débouter la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine de ses demandes relatives au paiement des factures F001-02-17, F004-01-17, F005-02-17, F002-01-17, F004-02-17 et F003-02-17, soit la somme de 66 438, 65 euros ;

- confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Mulhouse du 3 juillet 2020 en tant qu'il a débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine de ses demandes de paiement des factures F001-03-17, F008-02-17, F006-02-17 et F005-01-17 ;

- confirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Mulhouse du 3 juillet 2020 en tant qu'il a opéré une compensation à hauteur de 1 593,26 euros ;

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine à verser à la société PROMETAL une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En substance, elle soutient que sa créance doit être compensée avec les créances de la société Compagnie de Ferraillage, de sorte que les demandes à son encontre doivent être rejetées.

Elle soutient être fondée à opposer dans son principe, à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine, la compensation des dettes connexes.

Sur les factures F001-02-17, F004-01-17, F005-02-17 ' chantier Cave Gassmann, pour un montant de 29 931,66 euros, dont il lui est demandé paiement, elle expose avoir émis une facture n°01/2017 de 92 700 euros, déclarée dans la procédure collective, pour des pénalités liées à 12 jours de retard et des surcoûts engendrés par l'abandon du chantier par la société Compagnie de Ferraillage. Elle ajoute avoir subi, du fait de la défaillance de cette société, une augmentation du prix de la pose de ses armatures à la tonne de 150 euros pour la poursuite du chantier. Elle souligne qu'elles sont ainsi créancière et débitrice l'une envers l'autre au titre du même contrat de sous-traitance.

Sur les factures F002-01-17, F004-02-17, F003-02-17 - Viaduc de Mambouc et kuhn Sotravest, elle oppose la compensation de ses propres créances au titre du chantier Cave Gassmann. Elle soutient que leurs créances réciproques relèvent d'un ensemble contractuel unique, que leur relation contractuelle continue les a conduites à organiser l'interdépendance de leurs contrats de sous-traitance d'un point de vue financier et qu'elles ont signé une convention de compensation, de sorte que bien qu'issues de contrats distincts, ces créances sont régies par cette convention de compensation.

Sur les factures F002-01-17, F004-02-17, F003-02-17 - Viaduc de Mambouc et kuhn Sotravest, elle reproche au premier juge de ne pas avoir retenu la compensation au motif que les factures n'étaient pas du même mois. Elle soutient, d'abord, que selon les contrats signés avec la société Compagnie de Ferraillage, l'exécution des prestations donne lieu à l'émission mensuelle de facture de situation de travaux, conduisant la société Prometal à verser à son sous-traitant des acomptes, et que les situations mensuelles sont cumulatives, c'est-à-dire se cumulent, de sorte qu'à la fin du chantier, est émis un décompte final déterminant le solde du contrat, et que ce décompte constitue une facture susceptible de faire l'objet de la convention de compensation. Ensuite, elle soutient, que la société Compagnie de Ferraillage a abandonné le chantier en mars 2017, circonstance exclusivement imputable à cette société qui a empêché l'établissement d'un décompte sur les chantiers précités et ainsi l'a empêchée d'opérer, en mars 2017, compensation entre sa facture 01/2017 et les trois factures précitées.

Sur les factures F001-03-17, F008-02-17, F006-02-17 et F005-01-17, elle conclut à la confirmation du jugement ayant rejeté la demande de la Caisse en paiement de ces factures pour 42 599,21 euros. Elle ajoute que le tribunal a justement estimé qu'elle avait émis plusieurs factures en janvier et février 2017, et qu'en application de la convention de compensation, il y avait lieu de compenser la somme de 1 593,26 euros sur les factures des mêmes mois émises par la société Compagnie de Ferraillage.

Le 18 août 2020, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine s'est constituée intimée.

Par ses dernières conclusions portant la date du 19 janvier 2020, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le 19 janvier 2021, la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine demande à la cour de :

Sur l'appel principal de la société Prometal :

- le déclarer mal fondé et confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 3 juillet 2020 en ce qu'il a condamné la société SA Prometal au paiement de la somme de 66.438,65 euros, assortie des intérêts au taux légal, outre la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du CPC et en tant qu'il a limité la condamnation de la partie adverse à ce montant,

Sur l'appel incident de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine :

- le dire recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 3 juillet 2020 en tant qu'il a débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine du paiement des factures F005 01 17, F006 02 17, F008 02 17 et F001 03 17 et opéré une compensation à hauteur de 1.593,26 euros,

En conséquence, Statuant à nouveau,

- condamner la SA Prometal à régler à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine un montant de 44.186,47 euros au titre des quatre factures ci-dessus visées,

- condamner la SA Prometal à régler à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine un montant de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- débouter la société Prometal de toutes ses conclusions plus amples ou contraires,

- condamner la SA Prometal à régler à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine un montant de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC pour les frais irrépétibles à hauteur de Cour.

En substance, elle soutient que les factures émises par la société Compagnie de Ferraillage à l'égard de la société Prometal entre le 11 janvier et le 3 mars 2017 s'élèvent à la somme de 110 625,12 euros, qui ont été cédées en vertu d'un contrat d'affacturage avec la société Eurofactor, et que suite au paiement qu'elle a elle-même effectué au profit du factor et aux quittances subrogatives émises, elle est elle-même subrogée dans les droits du factor, lui-même subrogé dans les droits de la société Compagnie de Ferraillage. Elle en déduit être fondée à agir en paiement en application des articles 1342 et suivants du code civil.

Elle conteste que les créances soient connexes, soutenant que les factures dont il est demandé paiement relèvent de quatre contrats distincts et non d'un ensemble contractuel unique. Elle ajoute que la convention de compensation conclue est destinée à régler le mécanisme de paiement et de compensation 'des factures émises et reçues par les deux parties datées d'un même mois, la date de facture faisant foi' et que toute tentative d'appliquer un autre régime juridique que celui prévu par les parties est vaine. Elle soutient qu'il résulte de l'article 1103 du code civil que seules ces dispositions sont applicables en la matière.

Sur l'exception d'inexécution, elle soutient que les courriers produits sont insuffisants pour permettre à la société Prometal d'échapper au paiement et qu'il en résulte, au contraire, que la somme de 67 676,81 euros (110 625,12 - 42 948,31) n'est pas discutée.

Sur la déclaration de créance de la société Prometal, elle rappelle que la compensation n'est possible que dans le cadre de la convention de compensation du 16 juillet 2015. Elle ajoute que la facture de 92 700 euros de la société Prometal est litigieuse dès lors qu'elle ne démontre pas avoir réglé un quelconque montant au titre des pénalités de retard et surcoûts, et surtout n'a pas été déclarée au liquidateur de la société Compagnie de Ferraillage, seule une créance de 32 680,92 euros ayant été déclarée.

Sur son appel incident, elle demande paiement de la somme de 44.186,47 euros, correspondant aux factures F005-01-17, F006-02-17, F008-02-17, F001-03-17 pour un montant global de 42.593,21 euros, et à la somme de 1 593,26 euros au titre de la somme indûment compensée par le premier juge. Elle soutient, d'une part, que les prestations ainsi facturées ont été effectuées, même si certaines souffrent de contestations, et, d'autre part, que la somme précitée ne pouvait pas être compensée, dès lors qu'en application de la convention de compensation, qui prévoyait uniquement une compensation entre factures précisément identifiées, émises et reçues par les deux parties et datées d'un même mois, ne pouvait permettre la compensation de factures émises en janvier et février 2017. Elle ajoute qu'aucune compensation ne pouvait s'effectuer en l'absence de déclaration de créance de la société Prometal au passif de la liquidation judiciaire de la société Compagnie de Ferraillage. Elle soutient qu'aucune facture précise n'a été déclarée, le montant de 32 680,92 euros ne correspondant à aucune prestation précisément identifiée, de sorte que cette créance ne peut mettre en jeu la convention de compensation.

Sur sa demande de dommages-intérêts en application de l'article 1231-1 du code civil, elle soutient que la résistance au paiement de la société Prometal constitue une faute au sens de ce texte, et qu'elle a subi un préjudice lié au paiement de la somme de 110 625,12 euros en mai 2017 et dont elle n'a toujours pas obtenu remboursement quatre ans plus tard.

Par ordonnance du 28 mai 2021, la clôture de la procédure a été ordonnée et l'affaire renvoyée à l'audience de plaidoirie du 22 novembre 2021.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.

MOTIFS DE LA DECISION :

Il n'est pas contesté que la société Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine (la Caisse) vient aux droits de la société Compagnie de Ferraillage (la société CDF) au titre des créances de cette dernière envers la société Prometal.

La société CDF a été mise en liquidation judiciaire le 9 mai 2017.

Assignée en paiement de ses dettes contre la société CDF, la société Prometal a alors opposé, à la Caisse, subrogée dans les droits de cette dernière, une exception d'inexécution ainsi que la compensation entre les créances dont il lui est demandé paiement, avec ses propres créances contre cette dernière.

S'agissant des créances de la société CDF :

Il résulte des conclusions de la société Prometal qu'elle conteste devoir les factures F 001-03-17, F 008-02-17, F 006-02-17 et F 005-01-17, demandant la confirmation du jugement ayant rejeté la demande à ce titre.

Au soutien de son appel incident, la Caisse soutient que les prestations ont été réalisées, même si certaines souffrent de contestations.

La société Prometal justifie cependant avoir contesté devoir ces factures au motif que les poses n'avaient pas été réalisées, et ce, par courrier des 8 et 21 mars 2017, s'agissant des factures F 005-01-17, F 001-03 17 et F 008-02-17. En outre, s'agissant de la facture F 006-02-17 d'un montant de 13 415,58 euros, si elle avait indiqué dans un courrier du 21 mars 2017, le 'montant à vous régler au 15/04/17 de 13 234,34 euros' en évoquant certaines déductions à opérer, elle a écrit le 31 mars 2017 que la société CDF n'était plus présente sur le chantier depuis le 13 mars 2017, puis par courrier du 26 avril 2017, a contesté devoir le montant total de cette facture, demandant un avoir du montant de la facture, au motif que la pose n'était pas effectuée. Il ne peut dès lors être déduit de ces courriers que la société Prometal a reconnu devoir, au moins partiellement, la facture F 006-02-17.

Pas plus que devant le premier juge, la Caisse ne produit d'élément permettant d'établir que ces prestations facturées ont été effectivement réalisées.

Dès lors, il convient de confirmer le jugement ayant rejeté la demande au titre de ces factures.

Pour le surplus, la société Prometal conteste devoir les factures dont le paiement lui est demandé en invoquant leur compensation avec ses propres créances, résultant de l'inexécution des prestations de la société CDF et qui sont dès lors également antérieures au jugement de liquidation judiciaire de la société CDF.

S'agissant de la compensation invoquée entre les factures F 001-02-17, F 004-01-17 et F 005-02-17 de la société CDF et la facture n°01/2017 de 92 700 euros de la société Prometal :

- Les factures F 001-02-17, F 004-01-17 et F 005-02-17 de la société CDF datent, respectivement, des 11 janvier 2017, 18 janvier 2017 et 10 février 2017 et concernent le chantier 'cave Gassmann'.

- La facture n°01/2017 de la société Prometal d'un montant de 92 700 HT date du 31 mars 2017, concerne le chantier OLRY Cave Rolly Gassmann et facture 12 jours de retard et des '550 tonnes à 150 euros/tonnes de surplus', tout en précisant : ' cette facture sera déduite sur vos factures en cours comme le prévoit notre accord de compensation'.

La société Prometal ne justifie pas qu'une compensation conventionnelle des créances a pu s'opérer entre ces factures.

En effet, l'accord de compensation prévoit que les parties 'décident d'effectuer la compensation sur l'ensemble des factures émises et reçues datées d'un même mois, la date de facture faisant foi'. Dès lors que les factures dont il est demandé paiement ne sont pas datées du même mois que la facture du 31 mars 2017 de la société Prometal, la convention de compensation ne prévoit pas leur compensation. Contrairement à ce que soutient la société Prometal, le fait que la société CDF ait abandonné le chantier n'est pas de nature à la priver de l'application normale de la convention de compensation. Il sera d'ailleurs observé que la convention de compensation ne prévoit pas que la compensation s'effectuera sur la base de décompte.

Dans le cadre de la présente instance, la société Prometal invoque, en outre, la compensation des créances connexes.

La Caisse conteste l'existence et le montant de la créance de la société Prometal à l'égard de la société CDF au titre de la facture émise par la société Prometal le 31 mars 2017, en soutenant que celle-ci ne démontre pas avoir réglé un quelconque montant au titre des pénalités de retard et de surcoût.

La société Prometal produit, en pièce 8, le courrier qu'elle a adressé le 31 mars 2017 à la société CDF constatant qu'elle n'était plus présente sur le chantier OLRY Cave Rolly Gassmann depuis le 13 mars 2017 malgré ses relances, l'informant de la résiliation du contrat de sous-traitance les liant. Elle indiquait 'nous estimons à ce jour le préjudice de notre société, recherche d'un sous-traitant pour palier à votre défection. Le tonnage posé par votre société est estimé à 20 % du tonnage total. Notre nouveau sous-traitant reprend le chantier au niveau 0, le travail de ferraillage n'étant plus le même qu'au niveau des fondations (le travail des fondations étant le plus rémunérateur pour votre société). Celui-ci nous demande un surplus de 150 euros la tonne pour finir le chantier. Nous vous prions donc de trouver ci-joint notre première facture de décompte (...)'.

En pièce 20, la société Prometal produit le contrat de sous-traitance passé pour ce chantier avec la société RS Pose d'armatures le 27 mars 2017 pour la pose des armatures fabriquées par Prometal au prix de 550 Tonnes à 495 euros/tonne, alors que, selon sa pièce 3, le contrat de sous-traitance conclu avec la société CDF pour ce chantier, mentionne un prix de 600 tonnes à 345 euros/tonne.

Au surplus, elle produit, en pièce 34, une facture de la société RS Pose d'armatures du 20 novembre 2018 au titre des travaux réalisés pour la société Prometal au titre de ce chantier relative notamment à la pose de treillis soudés et un courriel du 29 novembre 2017 de la société 'RS pose' évoquant une différence de quasi 150 euros/tonne entre le montant déjà facturé et le coût du travail effectué.

Il en résulte que la société Prometal justifie avoir été contrainte, du fait de l'abandon de chantier de la société CDF, de s'adresser à une autre société pour la pose des armatures pour un prix supérieur de 150 euros/tonne par rapport au prix convenu avec la société CDF, et ce pour 550 tonnes, soit un surcoût de 82 500 euros HT.

En revanche, elle ne produit aucun élément permettant d'établir qu'elle a dû supporter un coût ou ait subi un préjudice résultant du retard induit par cet abandon de chantier.

Eu égard à la contestation émise par la Caisse venant aux droits de la société CDF, la créance de la société Prometal n'était pas liquidée avant le prononcé de la liquidation judiciaire, et ne le sera que par sa fixation judiciaire par le présent arrêt.

Le caractère connexe des créances invoquées est établi, dès lors qu'elles ont trait aux prestations et conséquences de l'inexécution alléguées des prestations de la société CDF dans le cadre du même chantier.

Comme le soutient la Caisse, la compensation des créances antérieures connexes ne peut cependant s'opérer après le prononcé de la liquidation judiciaire de la société CDF que si la créance de la société Prometal a été déclarée.

Par lettre du 13 juillet 2017, la société Prometal a déclaré au mandataire judiciaire une créance de 32 680,92 euros, précisant avoir déjà, avant le jugement de liquidation, compensé les sommes réciproques.

Selon le tableau joint détaillant le montant de 32 680,92 euros ainsi déclaré, cette somme correspond, d'une part, à une somme de 6 699,07 euros (au titre des factures dues par la société CDF, comprenant pour partie des factures du 28 février 2017, 15 février 2017 et 31 janvier 2017 dont il sera question ci-après pour un montant total de 1 593,26 euros), et d'autre part, à une somme de 25 981,85 euros (correspondant aux sommes de 92 700 euros et 1 750 euros dont la société CDF estime être créancière envers la société Prometal après déduction des sommes qu'elle doit à la société CDF au titre des factures 0002-01-17, 0003-01-17, 0004-01-17, 0001-02-17, 00003-02-17, 0004-02-17, 0005-02-17 de la société CDF, étant précisé qu'elle conteste devoir toute somme sur les factures 005-01-17, 0006-02-17, 0008-02-17 et 0001-03-17).

Ainsi, si elle n'a ainsi pas déclaré en tant que telle une créance de 92 700 euros, ni d'ailleurs de 1 593,26 euros, elle a déclaré une créance moindre, de 32 680,92 euros, en apportant les précisions nécessaires permettant d'identifier sa nature et sa cause et en joignant les justificatifs nécessaires.

Selon le tableau précité, elle a ainsi déclaré, au titre de la facture du 31 mars 2017, une somme de 32 680,92 euros - 6 699,07 euros - 1 750 euros = 24 231,85 euros (les sommes précitées de 6 699,07 euros et 1 750 euros correspondant à d'autres créances qu'elle invoque).

Dès lors, elle est fondée à opposer compensation, dans cette seule limite, de sa créance au titre de ladite facture avec les factures F 001-02-17, F 004-01-17 et F 005-02-17 d'un montant total de 29 931,66 euros.

S'agissant de la compensation invoquée entre les factures F 002-01-17, F 003-02-17 et F 004-02-17 de la société CDF et la facture n°01/2017 de 92 700 euros de la société Prometal :

Ces deux premières factures portent les dates des 11 janvier et 6 janvier 2017 (étant relevé, que la seconde indique 'mois de fév. 2017' et que son numéro est postérieur à celle du 11 janvier 2017) et concernent le chantier 'Viaduc de Mambouc'. La troisième date du 10 février 2017 et concerne le chantier 'Kuhn Sotravest'.

Pour les raisons précitées, s'agissant de factures de janvier et février 2017, la convention de compensation ne prévoit pas leur compensation avec la facture du mois de mars 2017 de la société Prometal.

La société Prometal ne justifie pas du caractère connexe des factures dont on lui demande paiement avec le solde de sa facture du 31 mars 2017, tout au moins pour le solde de la créance déclarée à ce titre.

En effet, les factures dont le paiement lui est demandé correspondent à des chantiers différents de celui ayant fait l'objet de sa propre facture du 31 mars 2017. En outre, l'existence d'une relation contractuelle continue entre les parties ne suffit pas à démontrer que l'ensemble des factures émises, pas plus que celles précitées, relève d'un ensemble contractuel. La convention de compensation précitée ne permet pas non plus de considérer qu'au-delà des 'factures émises et reçues datées d'un même mois', l'ensemble des factures émises relève d'un ensemble contractuel.

Il convient dès lors de rejeter la demande de compensation. La société Prometal est dès lors débitrice de la somme de 38 100,25 euros au titre des factures F 002-01-17, F 003-02-17 et F 004-02-17.

Sur la compensation ordonnée par les premiers juges à hauteur de 1 593,26 euros :

Le tribunal a retenu la compensation de la somme de 1 593,26 euros sur les factures F 002-01-17 , 004-01-17, F 001- 02-17 et 005-02 -17 et 004-02-17

La société Prometal conclut à la confirmation et se réfère à sa pièce 19, la cour observant que cette pièce, produite à l'appui de la déclaration de créance et du tableau précité, contient notamment, des factures qu'elle a émises à l'ordre de la société CDF, en particulier deux factures du 28 février 2017 de 303,50 euros et 528 euros, une facture du 15 février 2017 de 254,40 euros et une facture du 31 janvier 2017 de 507,36 euros, soit un total de 1 593,26 euros.

La Caisse ne conteste pas que ces factures sont dues par la société CDF, mais soutient que la convention prévoit uniquement la compensation entre factures précisément identifiées, émises et reçues par les deux parties et datées d'un même mois et que tel n'est manifestement pas la situation des factures émises en janvier et février 2017, et qu'aucune compensation ne peut intervenir en l'absence de déclaration de créance.

Les factures F 0002-01-17 , F 0004-01-17, F 001- 02- 17 et 005-02 -17 et 004-02-17 datent, respectivement, du 11 janvier 2017, 18 janvier 2017, 2 février 2017, les deux dernières datant du 10 février 2017. Selon la convention de compensation, la date de la facture fait foi.

Dès lors, en application de la convention de compensation, les factures émises réciproquement en janvier 2017 se sont compensées entre elles, comme les factures émises réciproquement en février 2017, et ce avant la liquidation judiciaire, de sorte que la société Prometal n'était pas tenue de les déclarer.

Dès lors, il convient de confirmer le jugement ayant fait droit à la compensation d'un montant de 1 593,26 euros.

Sur le total dû :

Dès lors, la société Prometal est débitrice, au titre des factures F 001-02-17, F 004-01-17 et F 005-02-17, F 002-01-17, F 003-02-17 et F 004-02-17,et ce après compensation avec ses propres créances de 24 231,85 euros et de 1 593,26 euros, de la somme de 42 206,80 euros (38 100,25 euros + 29 931,66 - 24 231,85 euros - 1 593,26 euros).

Le jugement sera dès lors partiellement infirmé et la société Prometal sera condamnée à payer cette somme à la Caisse, outre intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017.

Sur la demande de dommages-intérêts de la Caisse :

La Caisse ne démontre pas en quoi la résistance de la société Prometal est abusive. Sa demande de dommages-intérêts sera rejetée.

Sur les frais et dépens :

La société Prometal succombe partiellement mais obtient partiellement gain de cause en son appel.

Il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il a statué sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, de condamner la Caisse aux dépens d'appel et de dire que l'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Mulhouse du 3 juillet 2020 en ce qu'il rejette la demande en paiement des factures F 001-03-17, F 008-02-17, F 006-02-17 et F 005-01-17, condamne la SA Prometal à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SA Prometal faite au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamne la SA Prometal aux entiers dépens,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

Condamne la société Prometal à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine la somme de 42 206,80 euros au titre des factures F 001-02-17, F 004-01-17 et F 005-02-17, F 002-01-17, F 003-02-17 et F 004-02-17, et ce après compensation avec ses propres créances de 24 231,85 euros et de 1 593,26 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2017,

Y ajoutant :

Déboute la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine du surplus de ses demandes.

Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Lorraine aux dépens d'appel,

Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière :la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 20/02125
Date de la décision : 13/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-13;20.02125 ?
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