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15/06/2022 | FRANCE | N°20/00948

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 15 juin 2022, 20/00948


MINUTE N° 330/22





























Copie exécutoire à



- Me Thierry CAHN



- Me Laurence FRICK





Le 15.06.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 15 Juin 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/00948 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HJY3



Décision déférée à la Cour : 21 Janvier 2020 par la Première chambre civile du Tribunal judiciaire de COLMAR



APPELANTS - INTIMES INCIDEMMENT :



Monsieur [L] [G]

12 route du Vin

68420 HUSSEREN LES CHATEAUX



E.A.R.L. VIGNOBLE A. [G]

prise en la personne de ...

MINUTE N° 330/22

Copie exécutoire à

- Me Thierry CAHN

- Me Laurence FRICK

Le 15.06.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 15 Juin 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/00948 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HJY3

Décision déférée à la Cour : 21 Janvier 2020 par la Première chambre civile du Tribunal judiciaire de COLMAR

APPELANTS - INTIMES INCIDEMMENT :

Monsieur [L] [G]

12 route du Vin

68420 HUSSEREN LES CHATEAUX

E.A.R.L. VIGNOBLE A. [G]

prise en la personne de son représentant légal

12 route du Vin

68420 HUSSEREN LES CHATEAUX

Représentés par Me Thierry CAHN, avocat à la Cour

INTIMEE - APPELANTE INCIDEMMENT :

S.A. CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES

prise en la personne de son représentant légal

1 Place de la Gare - BP 20440

67008 STRASBOURG CEDEX

Représentée par Me Laurence FRICK, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 Octobre 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'assignation délivrée le 8 août 2017 par laquelle la SA Crédit Agricole Alsace Vosges, ci-après également dénommée 'le Crédit Agricole' ou 'la banque' a fait citer l'EARL Vignoble A. [G], ci-après également 'l'EARL [G]' ou 'l'EARL', et M. [L] [G] devant le tribunal de grande instance, devenu le 1er janvier 2020 le tribunal judiciaire, de Colmar,

Vu le jugement rendu le 21 janvier 2020, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal judiciaire de Colmar a :

- condamné l'EARL [G] à payer au Crédit Agricole la somme de 29 101,71 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2017,

- condamné M. [G] à payer à la banque la somme de 26 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2017,

- dit que la condamnation de 1'EARL [G] et la condamnation de M. [G] sont des condamnations solidaires,

- dit que les règlements effectués par l'une des parties, en réduisant le montant de la créance de la banque, profitera à proportion de cette réduction à l'autre partie,

- condamné solidairement l'EARL [G] et M. [G] à payer au Crédit Agricole la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens,

- dit n'y avoir lieu a exécution provisoire.

Vu la déclaration d'appel formée par l'EARL Vignoble A. [G] et M. [L] [G] contre ce jugement, et déposée le 27 février 2020,

Vu la constitution d'intimée de la SA Crédit Agricole Alsace Vosges en date du 17 mars 2020,

Vu les dernières conclusions en date du 29 octobre 2020 par lesquelles l'EARL Vignoble A. [G] et M. [L] [G] demandent à la cour de :

'RECEVOIR l'appel,

REJETER l'appel incident,

INFIRMER le jugement entrepris et Statuant à nouveau,

REJETER toutes prétentions de la SA CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES,

SUBSIDIAIREMENT, CONDAMNER la SA CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES à produire un décompte expurgé des intérêts conventionnels depuis 2014, avec recalcul des montants dus d'origine, avec mise en compte du taux d'intérêts légal année par année,

CONDAMNER la SA CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES aux entiers dépens des deux instances, ainsi qu'au versement d'un montant de 2.000,- € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.'

et ce, en invoquant, notamment :

- le caractère incompréhensible de la somme réclamée, et en particulier du taux appliqué, le TAEG manquant de précision, alors qu'il ne devait prendre en compte que le taux de départ, et non les éventuelles évolutions sachant de plus que l'ouverture de crédit n'avait pas de taux capé et ne prévoyait pas d'échéance plafonnée, le taux indiqué au contrat, à titre indicatif ce qui ne serait pas possible, étant lui-même incompréhensible et dépendant en grande partie de la volonté de la banque elle-même,

- la mise en compte, durant la vie du contrat, de montants comportant tant le capital que les intérêts conventionnels déterminés dans les conditions précitées et ne pouvant faire l'objet d'une quelconque condamnation, faute pour la banque d'avoir extourné les intérêts depuis l'origine en les substituant par des intérêts au taux légal,

- le caractère potestatif et l'absence d'information relative au taux d'intérêt moratoire appliqué par la banque.

Vu les dernières conclusions en date du 3 décembre 2020, auquel est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SA Crédit Agricole Alsace Vosges demande à la cour de confirmer le jugement entrepris dans la limite de l'appel incident, et à ce titre de :

'DECLARER l'appel incident recevable,

LE DECLARER bien fondé,

INFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire du 21 janvier 2020 en ce qu'il condamne l'EARL VIGNOBLE A. [G] à payer au CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES la somme de 29.101,71 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2017,

Statuant à nouveau dans cette limite,

CONDAMNER l'EARL VIGNOBLE A. [G] à payer au CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES la somme de 29.101,71 euros augmentée des intérêts au taux de 13,24 % l'an à compter du 31 mars 2017,

SUBSIDIAIREMENT, CONDAMNER l'EARL VIGNOBLE A. [G] à payer au CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES la somme de 29.101,71 euros augmentée des intérêts au taux de 5,43 % l'an à compter du 31 mars 2017,

CONFIRMER le jugement pour le surplus,

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

CONDAMNER solidairement l'EARL VIGNOBLE A. [G] et Monsieur [L] [G] à payer au CREDIT AGRICOLE ALSACE VOSGES une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER solidairement l'EARL VIGNOBLE A. [G] et Monsieur [L] [G] aux entiers frais et dépens de la procédure d'appel.'

et ce, en invoquant, notamment :

- la stipulation d'un taux d'intérêt variable, le contrat prévoyant le TEG applicable, ses modalités de variation et indiquant le TEG applicable au moment de la signature du contrat, et les factures adressées à la société [G], sans réserve ou protestation de cette dernière, mentionnant le taux d'intérêt applicable trimestre par trimestre,

- la justification du taux de l'usure s'appliquant au 1er trimestre 2017 pour les prêts aux personnes morales ayant une activité agricole qui est de 13,29 % l'an,

- la lecture erronée par la partie adverse du courrier de mise en demeure, qui mentionnerait bien une somme due en principal de 29 102,85 euros,

- l'application aux comptes courants débiteurs du taux d'usure -0,05 % conformément aux conditions générales du Crédit Agricole, et subsidiairement, l'application du taux contractuel dû au 4ème trimestre 2016 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 15 septembre 2021,

Vu les débats à l'audience du 25 octobre 2021,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions,

MOTIFS :

M. [G] et l'EARL [G] sont appelants d'un jugement mettant à leur charge, solidairement, la somme en principal de 29 101,71 euros, dans la limite de 26 000 euros pour M. [G], au titre d'un contrat global de crédits de trésorerie souscrit le 22 juillet 2014 par l'EARL, et dont M. [G] s'est porté caution dans la limite sus-indiquée.

Les appelants entendent contester les prétentions adverses, ou à tout le moins voir recalculer leur charge en l'expurgeant des intérêts conventionnels. Ils mettent ainsi en cause le montant réclamé, qu'ils qualifient d'incompréhensible, soulignant sa différence avec celui figurant dans la mise en demeure, ce qui semble résulter, à leur sens, de l'application d'un taux variable, manquant de précision et excédant le taux d'usure, qui aboutirait à un taux exorbitant au titre de l'année 2017, tout en relevant le caractère incompréhensible et, en substance, potestatif du calcul contractuel, avec mention d'un taux indicatif prohibé. Ils ajoutent que les intérêts conventionnels mis en compte dans ces conditions auraient été retenus tout au long de la vie du contrat, soit depuis 2014, et que les intérêts ainsi déterminés auraient intégré le capital, de sorte que les montants mis en compte comporteraient tant le capital que les intérêts conventionnels et ne pourraient donc faire l'objet d'une quelconque condamnation, faute pour la banque d'avoir extourné les intérêts depuis l'origine en les substituant par des intérêts au taux légal.

L'intimée, qui entend préciser qu'est en cause un concours financier sous forme d'une ouverture de crédit en compte courant, qu'elle a dénoncé en date du 27 janvier 2017, sollicitant ensuite le règlement du solde débiteur qui s'élevait à la somme de 29 102,85 euros, conteste l'argumentation adverse relative à l'absence de respect des dispositions de l'article L. 314-5 du code de la consommation, entendant rappeler que le taux contractuel est stipulé variable, ce qui le conduit à changer régulièrement en fonction de la variation de l'indice de référence, et que le contrat de prêt prévoit le TEG applicable, ses modalités de variation et indique le TEG applicable au moment de la signature du contrat, la mention d'un taux effectif global indicatif qui correspond au TEG applicable au moment de l'octroi du crédit s'expliquant par ce caractère variable, et que l'emprunteur devait être, comme il résulterait des conditions générales et de la jurisprudence, suffisamment informé des variations du taux par sa mention sur les tickets d'agios et/ou relevés de comptes dès lors que ces documents ne font l'objet, lors de leur réception, d'aucune protestation ou réserve de la part de l'emprunteur et que le taux d'intérêt y est indiqué, ce dont il serait justifié en l'espèce. En outre, le taux appliqué serait inférieur au taux d'usure.

Sur ce, la cour constate que la partie appelante invoque l'application de l'article L. 314-5 du code de la consommation, lequel reprend les dispositions de l'article L. 313-2 dudit code, dans leur version applicable à la cause, s'agissant d'un contrat conclu antérieurement à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et recevant application, comme relevé par le premier juge, en matière de contrats de crédits professionnels, en ce que ces dispositions prévoient que le taux effectif global (TEG) doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt.

Il résulte de l'application de ces dispositions que, s'agissant, en l'espèce, d'un taux d'intérêt stipulé variable, 'en fonction des variations du Taux de Référence du Crédit Agricole Mutuel dit TRCAM fixé à partir du taux d'intervention de la Banque de France, par décision du Conseil d'Administration de Crédit Agricole SA', le contrat précisant encore que 'pendant la durée de l'ouverture de crédit en compte courant, le TEG sera calculé en fonction des utilisations réelles de l'ouverture de crédit et sera porté trimestriellement à la connaissance de l'Emprunteur sur ses relevés de compte et/ou tickets d'agios', il appartenait à l'établissement bancaire, dans la mesure où la variation de certains éléments indispensables à sa détermination était soumise aux conditions d'utilisation du crédit en compte, d'informer à échéances régulières l'emprunteur, en particulier par le biais de la réception des extraits de compte ou de tickets d'agios, pour peu que le TEG figure dans le contrat sous forme d'une indication chiffrée, ce qui a été fait, en l'espèce, sur la base d'une utilisation maximum du crédit pendant une seule période annuelle et de l'indice précisé au paragraphe 'Désignation du crédit', lequel renvoie à l'application du taux variable TRCAM.

Il est justifié par la banque de la mention du taux appliqué aux périodes en cause, par la production des relevés mensuels de factures du 1er juillet 2014 au 31 janvier 2017, dont aucun n'apparaît avoir fait l'objet de protestations ou de réserves de la part de l'emprunteur.

Par ailleurs, ainsi que l'a également rappelé le premier juge, l'emprunteur a également accepté le caractère variable du taux, tant dans son principe que dans ses modalités, et notamment que celui-ci évolue en fonction des variations du Taux de Référence du Crédit Agricole Mutuel, le caractère abusif de cette clause n'étant, du reste, pas contesté par l'emprunteur, à supposer que celui-ci soit même en mesure de l'invoquer dans le cadre d'un crédit professionnel.

Enfin, il est justifié par la banque que le taux appliqué par la banque n'a pas excédé le taux d'usure applicable en la matière, c'est-à-dire pour les prêts aux personnes morales ayant une activité agricole, lequel avait atteint, au premier trimestre 2017, le taux de 13,29 % supérieur au taux effectivement appliqué.

Dans ces conditions, et au vu de l'ensemble des éléments produits par la banque à hauteur de cour pour justifier de sa créance, la cour estime que le premier juge a, par des motifs pertinents qu'il y a lieu d'adopter, fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties, justement retenu qu'il y avait lieu de condamner l'EARL à payer à la banque la somme de 29 101,71 euros.

S'agissant des intérêts sollicités par la banque, si cette dernière entend obtenir l'application du taux d'usure ' dont elle justifie sur la période ' minoré de 0,05 points, qu'elle estime résulter des conditions générales du Crédit Agricole, lesquelles sont effectivement visées dans la convention au titre de la dénonciation du concours et de la détermination des intérêts dont serait assorti le solde débiteur restant dû, lesdites conditions générales ne sont pas produites, de sorte que la cour n'est pas mise en mesure de déterminer quel taux serait applicable, qu'il s'agisse, notamment, du taux revendiqué, de 13,24 %, ou même du taux de 5,43 % évoqué à titre subsidiaire, qui correspond certes au taux mis en compte en janvier 2017 au titre du dernier trimestre 2016, mais dont rien ne permet de justifier l'application au regard des stipulations contractuelles dont le sens vient d'être rappelé.

En l'absence de contestation pour le surplus, s'agissant plus particulièrement de la somme mise en compte au titre du cautionnement de M. [G], il convient encore de confirmer, sur ce point, le jugement entrepris, dont il y a lieu d'approuver, à ce titre également, les motifs.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Les appelants succombant pour l'essentiel seront tenus solidairement des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.

L'équité commande en outre de mettre à la charge des appelants une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 1 500 euros au profit de l'intimée, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de cette dernière et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 janvier 2020 par la 1ère chambre civile du tribunal judiciaire de Colmar,

Y ajoutant,

Condamne solidairement M. [L] [G] et de l'EARL Vignoble A. [G] aux dépens de l'appel,

Condamne solidairement M. [L] [G] et de l'EARL Vignoble A. [G] à payer à la SA Crédit Agricole Alsace Vosges la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [L] [G] et de l'EARL Vignoble A. [G].

La Greffière :la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 20/00948
Date de la décision : 15/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-15;20.00948 ?
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