MINUTE N° 278/22
Copie exécutoire à
- Me Guillaume HARTER
- Me Joëlle LITOU-WOLFF
Le 25.05.2022
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 25 Mai 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/00325 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HPC7
Décision déférée à la Cour : 09 Décembre 2020 par le Président de la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de STRASBOURG, statuant en référé,
APPELANTE :
S.À.R.L. MVS
prise en la personne de son représentant légal
95, route de Calais
62280 SAINT-MARTIN-BOULOGNE
Représentée par Me Guillaume HARTER, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me PAWLETTA, avocat au barreau de LILLE
INTIMEE :
S.A.S. HYPROMAT FRANCE
prise en la personne de son représentant légal
15 rue du Travail
67720 HOERDT
Représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me LEVY, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 Octobre 2021, en audience publique, un rapport ayant été présenté, devant la Cour composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
ARRET :
- Contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :
La Société Hypromat France a développé une formule spécifique relative à la conception, l'implantation et l'exploitation de centres de lavage rapide en self service pour véhicules. Elle a développé un important réseau de centre de lavage rapide en franchise sous l'enseigne Eléphant Bleu.
La société MVS exploite depuis les années 2000 un centre de lavage automobile à l'entrée de la commune de Boulogne sur Mer.
Le 14 avril 2009, les parties ont conclu un contrat de franchise.
La société Hypromat France a refusé de renouveler le contrat à son terme le 14 avril 2018.
Par ordonnance du 9 décembre 2020, le président de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg :
- a condamné la société MVS à cesser d'utiliser les marques Hypromat et Eléphant Bleu de quelque manière que ce soit, ainsi que les jetons de lavage du réseau Eléphant Bleu que ce soit en les commercialisant ou en les acceptant dans ses monnayeurs, et ce sous astreinte de 3 000 euros par jour à compter du quinzième jour qui suivra la signification de la présente,
- s'est réservé la compétence pour connaître du contentieux en liquidation de l'astreinte,
- condamné la société MVS à payer à la société Hypromat France à titre de provision sur indemnité contractuelle la somme de 50 000 euros,
- condamné la société MVS aux dépens,
- condamné la société MVS à payer à la société Hypromat France la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 23 décembre 2020, la société MVS en a interjeté appel.
Le 21 janvier 2021, la société Hypromat France s'est constituée intimée.
Le 7 mai 2021, l'affaire a été fixée à l'audience du 25 octobre 2021.
Le même jour, le greffier a adressé l'avis de fixation.
Par ses dernières conclusions du 10 septembre 2021, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le même jour, la société MVS demande à la cour de :
- déclarer l'appelante recevable en son appel.
- la dire bien fondée.
- infirmer in integrum l'Ordonnance de référé du 9 décembre 2020,
Statuant à nouveau,
- déclarer irrecevable l'ensemble des demandes formulées par la société HYPROMAT.
- dire et juger mal fondé l'ensemble des demandes formulées par la société HYPROMAT.
- débouter en conséquence la société HYPROMAT de l'ensemble de ses demandes, fin et conclusions.
A défaut,
- débouter la société HYPROMAT de ses demandes de condamnations sous astreinte,
- dire et juger que la demande provisionnelle à valoir sur la clause pénale doit être réduite et la fixer à l'euro symbolique,
En toute hypothèse,
- condamner la société HYPROMAT à payer à la société MVS la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ainsi qu'à la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles liés à la procédure d'appel.
- condamner la société HYPROMAT aux entiers dépens de première instance et d'appel.
En substance, elle expose exploiter, après le 14 avril 2018, la station sous l'enseigne Kaliclean, mais continuer à se fournir auprès de la société Hypromat France concernant les monnayeurs, les jetons et tous les petits matériels permettant d'assurer le lavage des véhicules, comme les perches de lavage. Elle règle ainsi les factures d'Hybis qui indiquent qu'elle est un département de la société Hypromat France. Elle précise que les jetons ainsi achetés portent le logo Lavage Auto, mais qu'elle doit faire face à des clients qui disposent encore de jetons Eléphant Bleu et peuvent les utiliser, ce qui pollue ses monnayeurs et est catastrophique économiquement pour elle, puisqu'elle lave les véhicules sans contrepartie monétaire. Elle invoque un constat d'huissier du 24 juillet 2020 assistant au déballage d'un monnayeur expédié par la société Hypromat et constatant qu'il dysfonctionne, et que l'autre accepte les jetons Eléphant Bleu et Kaliclean. Le constat d'huissier effectué le 1er août 2020 à la demande de la société Eléphant Bleu constate que pour certains monnayeurs, les jetons Eléphant Bleu sont acceptés et que certains tickets électroniques indiquent la mention 'bienvenue chez Eléphant Bleu'. Elle invoque un constat d'huissier du 26 août 2020 et soutient que les jetons Eléphant Bleu ne semblent plus être acceptés par les monnayeurs.
Au soutien de son appel, elle invoque le constat d'huissier réalisé le 17 décembre 2020 montrant qu'il n'existe plus de logo ou de marque Eléphant Bleu et qu'elle ne commercialise ni n'accepte les jetons Eléphant Bleu. Elle ajoute n'avoir aucun intérêt à utiliser la marque ou les jetons Eléphant Bleu. Enfin, elle évoque la position dominante de la société Eléphant Bleu, un concurrent se situant à 6 kms, le fait que sa disparition lui profiterait directement et la disparité entre la situation économique des deux sociétés.
Elle reproche au premier juge d'avoir procédé à une appréciation au fond du litige excédant ses pouvoirs en matière de référé. Elle invoque une contestation sérieuse concernant la faute contractuelle invoquée, dès lors que la soit-disante faute qui lui est reprochée repose sur l'existence de matériels livrés par la société Hypromat qui sont défaillants puisqu'ils leur arrivent d'accepter des jetons Eléphant Bleu et de mentionner un message relatif à Eléphant Bleu. Elle ajoute que la problématique de la programmation du monnayeur est soumise à une contestation sérieuse relevant du juge du fond.
Elle conteste toute similitude de couleurs entre sa marque et la marque Eléphant Bleu, ainsi que tout parasitisme et contrefaçon.
Elle ajoute que l'astreinte prononcée est générale alors que le constat d'huissier porte sur la présence fortuite d'un jeton Eléphant bleu qui n'aurait jamais dû se trouver dans les caisses de son monnayeur. Elle précise que la station est expurgée de tout logo Eléphant Bleu ou Hypromat.
A titre subsidiaire, elle soutient que la demande de provision est mal fondée, dès lors que selon l'article 1231-5 du code civil, une telle pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure, ce qui n'a pas été le cas.
A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que la provision de 50 000 euros est sévère et disproportionnée pour la présence d'un jeton et la mention Eléphant Bleu sur un matériel défaillant.
Dans ses dernières conclusions du 13 octobre 2021, auxquelles était joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, lesquels ont été transmis par voie électronique le même jour, la société Hypromat France demande à la cour de :
- dire l'appel mal fondé,
- en débouter la société MVS ainsi que de l'intégralité de ses fins, moyens et prétentions,
en conséquence,
- confirmer l'ordonnance entreprise,
Y ajoutant,
- condamner la société MVS à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC au titre de la procédure d'appel et aux frais et dépens de la procédure d'appel.
En substance, elle soutient que le constat d'huissier du 1er août 2020 prouve le non-respect du contrat de franchise qui prévoit des obligations post-contractuelles et l'utilisation frauduleuse de la marque nominative et figurative Eléphant Bleu. Elle ajoute que le constat du 17 décembre 2020 montre que la station est toujours en partie dans les couleurs de la franchise bleu et blanc de sorte qu'elle viole les obligations post-contractuelles qui lui imposent de repeindre sa station dans d'autres couleurs que ces deux couleurs.
Elle indique demander le paiement d'une provision à valoir sur l'indemnité prévue par l'article 16 du contrat de franchise et souligne avoir limité le montant de sa demande par rapport à l'indemnité théorique.
Elle précise que les produits génériques vendus sous la marque Hybis, qui est l'un de ses départements, permettent aux anciens franchisés et à tout commerçant exploitant des stations de lavage de se fournir en pièces détachées, ce qui permet de ne pas rendre captifs les commerçants souhaitant quitter la franchise et de ne pas se voir reprocher un abus de position dominante. Elle indique que les matériaux vendus ne comportent aucune référence à la franchise Eléphant Bleu.
Elle soutient qu'il est enfantin de régler les monnayeurs et de les déprogrammer, que pour qu'il n'accepte plus les jetons Eléphant Bleu, il suffit de mettre le switch 4 sur Off. Elle conteste tout préjudice, qu'au lieu de restituer les jetons à la société Hypromat France qui les lui rembourserait au prix d'achat, elle les remet en vente en faisant un bénéfice. Elle critique les conditions de réalisation du constat de décembre 2020. Elle précise que pour modifier les messages apparaissant sur la borne de paiement et les tickets, il suffit de contacter le fournisseur de la borne, en l'espèce, la société Comestero.
Elle ajoute que la clause est claire et est précisée dans les annexes au contrat. Elle invoque en outre l'article 6 de l'avenant au contrat, soulignant qu'elle a pourtant continué de recevoir et de commercialiser le jeton Eléphant Bleu.
Elle fait aussi valoir que, dès lors que la société MVS associe dans les pages jaunes la marque Eléphant Bleu à sa propre marque MVS Kali Clean, elle trouve un intérêt illégitime dans sa pratique qui associe le parasitisme et la contrefaçon.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux dernières conclusions des parties pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.
MOTIFS DE LA DECISION :
1. Sur la demande tendant à cesser d'utiliser les marques Hypromat et Eléphant Bleu ainsi que les jetons de lavage du réseau Eléphant Bleu :
En application de l'article 873 du code de procédure civile, le président peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
La société Hypromat France demande qu'il soit mis fin aux infractions aux obligations post-contractuelles du contrat de franchise, résultant de son article 16 et précisées dans les annexes au contrat, notamment l'annexe 8, ainsi que de l'article 6 de l'avenant au contrat.
Elle soutient que la station est toujours en partie dans les couleurs de la franchise bleu et blanc, alors que les obligations post-contractuelles imposent de repeindre la station dans d'autres couleurs que ces deux couleurs, qu'un message 'Bienvenue chez Eléphant Bleu' apparaît sur les bornes de paiement et les tickets, et qu'elle continue à recevoir et commercialiser les jetons Eléphant Bleu.
S'agissant des couleurs de la station :
L'ordonnance entreprise, dont la société Hypromat France demande la confirmation, a condamné la société MVS à cesser d'utiliser les marques Hypromat et Eléphant Bleu de quelque manière que ce soit, ainsi que les jetons de lavage du réseau Eléphant Bleu que ce soit en les commercialisant ou en les acceptant dans ses monnayeurs.
Elle ne l'a pas condamnée à changer les couleurs de la station ; et il n'est pas soutenu ni de surcroît démontré que l'utilisation des couleurs bleu et blanc actuellement utilisées par la société MVS s'analyse en l'utilisation des marques Hypromat et Eléphant Bleu.
La société Hypromat France soutient en revanche que le contrat impose à la société MVS de modifier les couleurs spécifiques de la franchise (bleu et blanc) et que la station de la société MVS est toujours en partie dans les couleurs de la franchise et ainsi viole ses obligations post-contractuelles lui imposant de repeindre sa station dans d'autres couleurs.
Cependant, elle n'a pas présenté de demande tendant, pour faire cesser la violation des obligations qu'elle invoque, à interdire à la société MVS d'utiliser les couleurs qu'elle utilise actuellement ou à l'obliger à en changer.
S'agissant de l'utilisation de la marque Hypromat et Eléphant Bleu :
La société Hypromat France ne conteste pas que, comme le soutient la société MVS, celle-ci n'utilise pas la marque Hypromat.
S'agissant de la marque Eléphant Bleu, les utilisations invoquées et démontrées par la société Hypromat France sont celles apparaissant sur les tickets de caisse émis lors du paiement, sur les écrans des monnayeurs et sur les jetons, comme ont pu le constater des huissiers de justice pendant une certaine période et ainsi qu'il sera examiné ci-après.
Le constat d'huissier du 17 décembre 2020 indique ne constater aucune inscription et aucun affichage à l'effigie des marques Hypromat et Eléphant bleu au sein de la station Kaliclean.
Enfin, il sera observé que la société Hypromat France ajoute que la société MVS associe, sur les pages jaunes, la marque de notoriété Eléphant Bleu à sa propre marque MVS Kali Clean, et que cette pratique associe le parasitisme et la contrefaçon. Cependant, la pièce 11 qu'elle produit au soutien de son affirmation ne comprend aucune date, et la société MVS réplique en invoquant le fait que les pages jaunes sont gérées par la société Solocal et produit une attestation de ladite société mentionnant que 'MVS n'est pas associée au nom de l'entreprise Eléphant Bleu sur l'ensemble de nos supports. Cette société apparaît sous son nom propre, lui et uniquement lui'. La société Hypromat France ne démontre dès lors pas suffisamment l'existence d'un trouble manifestement illicite qu'il conviendrait de faire cesser à ce titre.
S'agissant des monnayeurs acceptant et commercialisant des jetons Eléphant Bleu, distribuant des tickets de carte bancaire mentionnant Eléphant Bleu et mentionnant Eléphant Bleu sur l'écran de contrôle :
La société Hypromat France admet que la société MVS a acheté des monnayeurs 'Hybis' à l'une de ses filiales, et précise que les matériaux vendus ne comportent aucune référence à la franchise Eléphant Bleu.
Il résulte cependant des conclusions et pièces des parties que ces monnayeurs ont la capacité d'accepter puis de vendre des jetons Eléphant Bleu, outre d'autres jetons.
La société Hypromat France reproche à la société MVS de ne pas avoir programmé les monnayeurs pour ne plus accepter et commercialiser les jetons Eléphant Bleu. S'agissant des messages apparaissant sur la borne et sur les tickets, la société Hypromat France soutient qu'il suffit de demander au fournisseur de la borne de procéder à la modification.
La société MVS admet que des jetons Eléphant Bleu étaient acceptés et commercialisés par ses monnayeurs, soutenant qu'ils les 'polluaient' et qu'elle en subissait un préjudice lorsque le client utilisait un jeton acquis chez d'autres exploitants Eléphant Bleu.
Elle produit une attestation de la personne assurant la maintenance de sa station.
Seuls les éléments de fait qu'il indique avoir personnellement constatés seront considérés comme étant suffisamment établis. Tel est le cas des faits suivants qu'il relate : il indique être intervenu le 12 et 18 avril 2018 pour la suppression des jetons de la marque 'Eléphant Bleu' sur toutes les machines équipées d'accepteur de pièces de monnaie et de jetons, précise avoir reprogrammé les accepteurs et bornes de paiement avec les nouveaux jetons du client 'MVS' différents des jetons 'Eléphant Bleu'. Il ajoute notamment que les accepteurs de la marque Eagle, que le client a commandés chez la société Hybis, ont été préprogrammés avec les jetons Eléphant bleu et qu'il a dû inhiber les jetons éléphant bleu sur ces accepteurs. Il précise que le client a vérifié son travail sur l'accepteur de chaque machine. Il ajoute ne pas avoir pu retirer le message d'accueil des bornes de paiement n'ayant pas le matériel, ni le programme pour effectuer cette intervention.
Il résulte du constat d'huissier du 24 juillet 2020 réalisé à la demande de la société MVS qu'un monnayeur accepte les jetons Eléphant Bleu et les jetons Kaliclean, tandis qu'un monnayeur venant d'être installé dysfonctionne et n'accepte aucun jeton et qu'un monnayeur des aspirateurs n'accepte aucun jeton.
Selon le constat du 1er août 2020 réalisé à la demande de la société Hypromat France, en vertu d'une ordonnance du 25 juin 2020 du président du tribunal de commerce de Boulogne sur Mer, sur les 11 jetons payés, dont un offert, le monnayeur a distribué dix jetons frappés de la mention 'Lavage Auto' et un jeton identifié comme celle du 'Réseau éléphant bleu' comportant les mêmes faces que les jetons acquis par l'huissier dans une station Eléphant bleu la veille. La facture mentionne 'Kaliclean'. Le ticket de caisse mentionne 'Eléphant Bleu'.
La cour observe que le ticket de caisse qualifié comme tel par l'huissier de justice est en réalité le ticket relatif au paiement par carte bancaire.
En outre, l'huissier de justice a comparé ces deux types de jetons, relevant des tailles, poids et épaisseurs différents. Il précise avoir procédé au dépôt de jetons du Réseau Eléphant Bleu dans les monnayeurs des quatre pistes de lavage au jet sous pression et constaté que l'ensemble des monnayeurs les rejette, à l'exception du monnayeur de la piste non couverte qui a accepté tous les jetons du Réseau Eléphant Bleu.
Il a également constaté que les monnayeurs des espaces de lavage et des deux postes d'aspiration mentionnent sur l'écran de contrôle : 'Bienvenue chez Eléphant Bleu'.
Cependant, selon constat d'huissier du 26 août 2020, dressé à la demande de la société MVS, l'huissier de justice a constaté que M. [R] lui indique avoir apposé un adhésif en partie supérieure de l'écran de certains monnayeurs. L'huissier constate qu'aucune mention 'Eléphant Bleu' n'est visible sur les monnayeurs des pistes 1, 2 et 3 et sur les monnayeurs des aspirateurs. Il constate aussi que les monnayeurs rejettent les jetons à l'effigie 'Eléphant bleu'.
Selon constat du 17 décembre 2020, réalisé à la demande de la société MVS, l'huissier de justice indique que les 7 monnayeurs n'acceptent pas les jetons 'Eléphant Bleu' et les rejettent systématiquement. Il constate qu'en ouvrant le distributeur de jetons, seuls sont présents des jetons contenant l'inscription 'Lavage Auto' et il ne relève aucun jeton à l'effigie 'Eléphant Bleu'. En achetant un jeton dans ce distributeur, il note aucune inscription, aucun rappel des marques Hypromat et Eléphant Bleu, constate que les tickets de caisse mentionnent l'enseigne Kaliclean et que les jetons obtenus portent l'inscription 'Lavage auto'.
Outre la photographie du ticket relatif à l'achat de jetons mentionnant Kaliclean et l'adresse, le constat d'huissier contient la photographie du ticket relatif au paiement par carte bancaire, lequel mentionne le nom de Kali Clean. Aucun ticket ne comporte la mention Eléphant Bleu.
La société Hypromat France discute vainement la portée probante de ce constat d'huissier de justice, lequel contient des descriptions suffisamment précises, et d'ailleurs non contredites par des éléments contraires postérieurs.
Ainsi, et en l'absence de tout autre élément contraire, notamment plus récent, il résulte clairement du constat du 17 décembre 2020 que les monnayeurs de la station de la société MVS n'acceptent plus et ne commercialisent pas de jetons de lavage du réseau Eléphant Bleu, que les tickets, y compris celui relatif au paiement par carte bancaire, mentionnent seulement l'enseigne Kaliclean et qu'aucune mention Eléphant Bleu n'apparaît plus.
Il sera observé que cette situation est postérieure au prononcé de l'ordonnance, mais antérieure à la signification de l'ordonnance entreprise, le 18 décembre 2020, à la société MVS comme celle-ci en justifie et à partir de laquelle courait la condamnation prononcée à son encontre.
Cependant, avant même le prononcé de l'ordonnance entreprise le 9 décembre 2020, il résulte du constat d'huissier de justice du 26 août 2020 que les jetons Eléphant bleu ne pouvaient plus être utilisés dans la station de la société MVS et que la mention Eléphant Bleu n'est plus visible sur les monnayeurs notamment sur l'écran.
Certes, lorsque le juge a statué, il n'était pas établi que les tickets de caisse relatifs au paiement par carte bancaire n'indiquaient plus la mention Eléphant Bleu.
Dès lors, la société MVS pouvait être condamnée à cesser d'utiliser la marque Eléphant Bleu sur lesdits tickets, et ce sous astreinte. En revanche, en l'absence d'autre trouble manifestement illicite persistant au jour où le premier juge a statué, il n'y a avait pas lieu de prononcer une condamnation en ce qui concerne les jetons, ni une condamnation dans des termes plus généraux.
Dès lors qu'il résulte du constat d'huissier du 17 décembre 2020 que la mention Eléphant bleu n'apparaît plus, soit avant même la signification de l'ordonnance, l'astreinte prononcée n'a pas couru et il n'y a désormais plus lieu de prononcer la condamnation précitée concernant les tickets.
Il convient dès lors, en partie en raison de l'évolution du litige après le prononcé de l'ordonnance, d'infirmer cette ordonnance en ce qu'elle a condamné la société MVS à cesser d'utiliser les marques Hypromat et Eléphant Bleu de quelque manière que ce soit, ainsi que les jetons de lavage du réseau Eléphant Bleu que ce soit en les commercialisant ou en les acceptant dans ses monnayeurs, et ce sous astreinte de 3 000 euros par jour à compter du quinzième jour qui suivra la signification de la présente.
2. Sur la demande de provision :
Selon l'article 863 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
La société Hypromat France demande le paiement d'une provision à valoir sur l'indemnité contractuelle prévue par l'article 16 du contrat de franchise pour le cas où le franchisé ne respectait pas les obligations de ladite clause.
Par lettre du 16 octobre 2017, la société Hypromat France a informé la société MVS qu'elle ne procédera pas au renouvellement du contrat de franchise à compter du 14 avril 2018, de sorte qu'à compter de cette date, elle devra exécuter ses obligations post-contractuelles prévues à l'article 16 du contrat de franchise et à son annexe 8, et listait un certain nombre d'actions à mener.
Par lettre du 10 décembre 2018, elle lui indiquait que les obligations suivantes n'étaient pas respectées : le référencement de la ligne téléphonique sur les pages jaunes, l'entête Eléphant Bleu sur les tickets de carte bleue et les 2 lances de lavage siglées Hypromat au niveau de la poignée, et la mettait en demeure d'y remédier dans un délai de quinze jours.
Au soutien de sa demande de provision, la société Hypromat France ne reproche plus à la société MVS l'utilisation de ces lances de lavage et ne produit d'ailleurs aucun élément à cet égard.
S'agissant du référencement de la ligne téléphonique, la société Hypromat France invoque une pièce 11, qui ne comporte aucune date. La société MVS réplique en invoquant le fait que les pages jaunes sont gérées par la société Solocal et produit une attestation de ladite société mentionnant que 'MVS n'est pas associée au nom de l'entreprise Eléphant Bleu sur l'ensemble de nos supports. Cette société apparaît sous son nom propre, lui et uniquement lui'. Ainsi, la question de savoir si la société MVS a manqué à son obligation suppose d'apprécier la portée de ces deux éléments de preuve. La contestation de la société MVS est dès lors sérieuse, cette appréciation excédant le pouvoir du juge des référés.
S'agissant de l'entête Eléphant Bleu sur les tickets de carte bleue, il résulte du constat d'huissier du 1er août 2020 qu'il a été constaté qu'un distributeur délivre un tel ticket, tout en délivrant également une facture au nom de la société Kaliclean. Toutefois, il a été remédié à cette situation en décembre 2020 avant même la signification de l'ordonnance.
Pour expliquer le temps mis à y remédier, la société MVS soutient ne pas avoir de prise sur ce document bancaire. La société Hypromat France oppose que la société MVS sait très bien qu'il convenait de s'adresser au fournisseur, qui était la société Comestero, pour faire modifier ces messages figurant sur les tickets. Cependant, elle ne produit aucun élément en ce sens permettant de s'assurer de manière non contestable que la société MVS savait qu'elle devait s'adresser à cette société pour opérer cette modification, alors même de surcroît qu'il n'est pas contesté que la société Hypromat France commercialisait elle-même les monnayeurs. Il en résulte que l'application de la clause pénale à raison d'un tel manquement se heurte à une contestation sérieuse.
S'agissant des autres manquements invoqués, qu'il s'agisse de l'acceptation et la commercialisation des jetons Eléphant Bleu et du message Eléphant Bleu s'affichant sur l'écran de la borne de paiement, la société MVS invoque l'absence de mise en demeure préalable à l'assignation, laquelle est nécessaire pour que la clause pénale s'applique. Elle ne conteste cependant pas le motif du premier juge ayant pris en compte le manquement à compter d'un délai de 15 jours suivant la délivrance de l'assignation, soit le 16 octobre 2020.
La société MVS soutient que la substance du litige et sa soi-disante faute repose sur l'existence de matériels livrés par la société Hypromat France qui sont manifestement défaillants, dans la mesure où il arrive aux matériels livrés d'accepter les jetons acquis chez d'autres exploitants Eléphant Bleu, qu'il s'agit de matériels non conformes à la commande, que lorsqu'elle commande des monnayeurs après la rupture du contrat, elle est en droit d'avoir des monnayeurs qui n'affichent pas la marque Eléphant Bleu et ne permettent pas d'accueillir des jetons Eléphant Bleu, contestant ainsi avoir commis une faute.
En l'état de l'attestation précitée de la personne assurant la maintenance évoquant les diligences effectuées en avril 2018, mais également le pré-programmage des monnayeurs commandés auprès de la société Hybis, que la société Hypromat France indique être l'un de ses départements qui ne constitue pas une entité différente mais l'un de ses services, les contestations émises par la société MVS quant à l'imputabilité de la possibilité d'utiliser les jetons Eléphant bleu sur les monnayeurs qu'elle a acquis auprès de cette société, sont sérieuses et supposent une appréciation au fond des éléments du litige.
Au surplus, il existe une contestation sérieuse tenant au fait de savoir si la société MVS avait été mise en demeure de cesser d'utiliser ces jetons pendant la période où les constats d'huissier ont relevé que les monnayeurs acceptaient les jetons et qu'un jeton était présent dans le distributeur, dès lors qu'une telle cessation ne figurait pas dans la mise en demeure du 10 décembre 2018, que comme l'a retenu le premier juge, la computation du délai ne court qu'à compter du 16 octobre 2020 et que l'huissier de justice a constaté le 26 août 2020 que les monnayeurs rejetaient les jetons.
S'agissant de la mention Eléphant Bleu figurant sur l'écran, il existe également une contestation sérieuse tenant au fait de savoir si la société MVS avait été mise en demeure de supprimer ladite mention pendant la période où elle a été constatée, dès lors qu'une telle suppression ne figurait pas dans la mise en demeure du 10 décembre 2018, que comme l'a retenu le premier juge, la computation du délai ne court qu'à compter du 16 octobre 2020 et que la société MVS y avait déjà remédié, et ce dès le 26 août 2020, au surplus très rapidement après le constat de la présence de ladite mention effectué par l'huissier le 1er août 2020.
S'agissant de l'utilisation de couleurs bleu et blanc, outre le fait qu'elle n'a pas fait l'objet d'une mise en demeure, et n'était d'ailleurs pas invoquée par la société Hypromat France en première instance, l'appréciation du respect par la société MVS de son obligation post-contractuelle excède le pouvoir du juge des référés, supposant de comparer les couleurs utilisées et résultant des constats d'huissier avec celles que devait cesser d'utiliser la société MVS au titre de son obligation, prévue par l'article 16 du contrat, de repeindre 'dans d'autres couleurs dans un délai de 6 mois après la cessation du contrat'.
Il en résulte que l'application de la clause pénale se heurte à des contestations sérieuses.
La demande de provision sera rejetée.
3. Sur les frais et dépens :
La société Hypromat France succombant, il convient d'infirmer l'ordonnance ayant statué sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Elle sera condamnée à supporter les dépens de première instance et d'appel.
L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance, de sorte que les demandes seront rejetées.
En revanche, pour la procédure à hauteur d'appel, la société Hypromat France sera condamnée à payer à la société MVS la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sa demande sera rejetée.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Infirme l'ordonnance du président de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg du 9 décembre 2020,
Statuant à nouveau :
Rejette la demande de la société Hypromat France tendant à la condamnation de la société MVS à cesser d'utiliser les marques Hypromat et Eléphant Bleu de quelque manière que ce soit, ainsi que les jetons de lavage du réseau Eléphant Bleu que ce soit en les commercialisant ou en les acceptant dans ses monnayeurs, et ce sous astreinte,
Rejette la demande de la société Hypromat France en paiement d'une provision,
Condamne la société Hypromat France aux dépens de première instance,
Rejette les demandes des parties fondées sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance,
Y ajoutant :
Condamne la société Hypromat France aux dépens d'appel,
Condamne la société Hypromat France sera condamnée à payer à la société MVS la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.
La Greffière :la Présidente :