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18/05/2022 | FRANCE | N°20/00133

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 18 mai 2022, 20/00133


MINUTE N° 264/22

























Copie exécutoire à



- Me Marion BORGHI



- Me Charline LHOTE





Le 18.05.2022



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A



ARRET DU 18 Mai 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/00133 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HIMA



Décision défé

rée à la Cour : 28 Novembre 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG



APPELANT - INTIME INCIDEMMENT :



Monsieur [T] [W]

19 rue du Fossé des Treize

67000 STRASBOURG



Représenté par Me Marion BORGHI, avocat à la Cour

Avocat plaidant : M...

MINUTE N° 264/22

Copie exécutoire à

- Me Marion BORGHI

- Me Charline LHOTE

Le 18.05.2022

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 18 Mai 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/00133 - N° Portalis DBVW-V-B7E-HIMA

Décision déférée à la Cour : 28 Novembre 2019 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANT - INTIME INCIDEMMENT :

Monsieur [T] [W]

19 rue du Fossé des Treize

67000 STRASBOURG

Représenté par Me Marion BORGHI, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me BLOCH, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE - APPELANTE INCIDEMMENT :

Madame [M] [P]

chez Monsieur [U] [Z], 1 Rue Jean Daniel Roederer

67206 MITTELHAUSBERGEN

Représentée par Me Charline LHOTE, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Octobre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et M. ROUBLOT, Conseiller, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'assignation délivrée le 6 novembre 2018 par laquelle M. [T] [W] a fait citer Mme [M] [P] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg,

Vu le jugement rendu le 28 novembre 2019, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties en première instance, et par lequel le tribunal de grande instance de Strasbourg a débouté M. [W] de l'intégralité de ses demandes, le condamnant aux entiers dépens, disant n'y avoir lieu à exécution provisoire, et déboutant les parties de l'ensemble de leurs autres 'ns, moyens, demandes et prétentions,

Vu la déclaration d'appel formée par M. [T] [W] contre ce jugement, et déposée le 30 décembre 2019,

Vu la constitution d'intimée de Mme [M] [P] en date du 21 janvier 2020,

Vu les dernières conclusions en date du 24 août 2020, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles M. [T] [W] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de :

- constater la non-réalisation de la condition suspensive du bail commercial.

En conséquence,

- condamner Mme [P] à lui rembourser la somme de 11 609,76 euros, avec intérêts de droit à compter du jour de la décision à intervenir,

- débouter Mme [P] de son appel incident.

à titre subsidiaire

- condamner Mme [P] à lui rembourser la somme de 8 581,16 euros, avec intérêts de droit à compter du jour de la décision à intervenir,

- condamner Mme [P] aux entiers frais et dépens de la procédure ainsi qu'au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et ce, en invoquant, notamment :

- le droit à remboursement, en conséquence de la non-réalisation de la condition suspensive, et de la caducité du contrat de bail en résultant, de sommes que Mme [P] reconnaîtrait avoir reçues,

- l'impossibilité, pour le même motif, de percevoir un quelconque montant ;

Vu les dernières conclusions en date du 8 juin 2020, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles Mme [M] [P] conclut à la confirmation du jugement entrepris, sous réserve de son appel incident, au titre duquel elle sollicite la condamnation de M. [P], outre aux entiers frais et dépens des deux instances à lui payer les sommes de :

- 4 882,30 euros au titre du reliquat des indemnités d'occupation dues forfaitairement en vertu du bail,

- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- 3 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

et ce, en invoquant, notamment :

- l'absence de justification de la demande adverse dans son principe comme dans son montant, en l'absence d'anéantissement rétroactif du contrat prévue en cas de non-réalisation de la condition suspensive, et compte tenu du comportement de M. [W] qui aurait volontairement fait échec à la bonne réalisation du bail,

- le bénéfice, en tout état de cause, par M. [W] de la jouissance du local, impliquant la mise à sa charge d'une indemnité d'occupation dans les conditions prévues par le contrat de bail, justifiée par le caractère précaire de l'occupation,

- ce qu'elle qualifie de harcèlement judiciaire de la part de l'appelant.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 15 septembre 2021,

Vu les débats à l'audience du 13 octobre 2021,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Les deux parties ont conclu, en date du 31 octobre 2017, un contrat de bail commercial sous condition suspensive de l'obtention, par le locataire, de l'autorisation préalable d'exercer par le conseil de l'ordre des médecins, s'agissant de l'ouverture d'un centre de cryothérapie. Le loyer annuel hors charges et taxes était fixé à 19 958,40 euros. L'autorisation d'exploitation lui ayant été refusée le 5 janvier 2018, soit avant le terme de la condition suspensive fixé au 31 janvier 2018, le locataire, après en avoir informé le bailleur qui a accepté le bénéfice de la condition suspensive et de sa non-réalisation, a quitté les lieux, remettant les clés le 29 janvier 2018.

Le locataire, demandeur et appelant, entend donc revendiquer la mise en compte de montants exposés au titre de loyers et frais entre la conclusion du bail et la non-réalisation de la condition suspensive, laquelle impliquait que le bail n'avait jamais existé. Il affirme que la partie adverse aurait reconnu le versement de sommes bien supérieur au montant qu'il réclame et qui correspondrait strictement au décompte fourni par la bailleresse, s'agissant des montants qu'elle aurait perçus, et sollicite à tout le moins le remboursement des sommes qu'il avait entendu initialement mettre en compte.

Il s'oppose, en outre, aux demandes formées par la partie adverse sur appel incident, arguant de la non-réalisation de la condition suspensive.

La bailleresse, défenderesse et intimée, qui invoque la jouissance du local par le locataire pendant trois mois, ce dernier ayant exposé sur la période un montant de 11 609,76 euros selon décompte, conteste tant le principe que le montant de la demande adverse. Elle entend faire remarquer, à l'instar du premier juge, qu'aucune disposition du contrat de bail n'a expressément prévu l'anéantissement rétroactif de ce contrat à sa date de conclusion en cas de défaillance de la condition suspensive et par suite la restitution des loyers déjà versés, reprochant, de surcroît, au locataire d'avoir fait échec à sa réalisation en tardant volontairement dans la réalisation de ses démarches. Elle ajoute que l'occupation des locaux justifierait la mise en compte d'un loyer, ou le cas échéant d'indemnités d'occupation,

dont elle sollicite, sur appel incident, le règlement à hauteur du montant stipulé au contrat, outre que les honoraires de rédaction du bail auraient été acceptés par le locataire, le surplus des demandes adverses portant sur des honoraires d'agence qu'elle n'a pas encaissés, tandis que les provisions sur charges seraient dues au titre de l'occupation du local, tandis que le dépôt de garantie aurait été restitué.

Elle s'estime enfin fondée à être indemnisée au titre de ce qu'elle qualifie de harcèlement judiciaire.

Sur ce, la cour observe que, si les parties sont convenues de la conclusion d'un bail devant prendre effet au 31 octobre 2017, ce bail était assorti d'une condition suspensive, à savoir la réalisation d'une condition suspensive devant intervenir dans un délai bien défini, puisqu'il appartenait au preneur de justifier de ce qu'il avait obtenu de l'ordre des médecins une autorisation d'exercer son activité, et ce avant un terme fixé au 31 janvier 2018. Or, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, la demande de M. [W] a fait l'objet d'une décision défavorable, si bien que la condition suspensive n'a pas été réalisée.

En conséquence, il résulte de application de l'article 1304-6 du code civil, lequel dispose, notamment, que si l'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive, en cas de défaillance de la condition suspensive, l'obligation est reputée n'avoir jamais existé, sous réserve, qu'en vertu de l'article 1304-3 du même code, que celui qui avait intérêt à la condition n'en ait pas empêché l'accomplissement, que dans les circonstances de l'espèce, au regard de la défaillance de la condition suspensive prévue par les parties, les obligations mises à la charge du locataire en vertu du contrat de bail, et en particulier l'obligation de paiement des loyers et charges doivent être réputées n'avoir jamais existé, le caractère, allégué tardif par la bailleresse, de la demande d'autorisation d'exploiter étant, en tout état de cause, sans incidence dès lors l'autorisation a été sollicitée et la réponse obtenue dans un délai répondant aux prévisions contractuelles, sans qu'il ne ressorte, par ailleurs, des éléments versés aux débats, que M. [W] aurait délibérément recherché l'obtention d'une décision de rejet de sa demande.

Or, il est justifié, au vu du décompte produit par les deux parties, de la mise en compte par la bailleresse, au titre de l'exécution du contrat des sommes suivantes :

- un dépôt de garantie correspondant à une mensualité de loyer, soit 1 663,20 euros, somme remise en compte au crédit du preneur en date du 12 février 2018,

- deux loyers mensuels du même montant, pour les mois de novembre et décembre, majorés de 100 euros chacun au titre de la provision sur charges, qui ont été intégralement réglés par M. [W],

- un loyer de 1 555,90 euros, majoré de 93,55 euros de provision sur charge pour le mois de janvier 2018, soit un total de 1 649,45 euros, M. [W] s'étant vu prélever à ce titre la somme de 1 763,20 euros, soit, en tout état de cause, un trop-perçu de 113,75 euros.

En définitive, le décompte fait apparaître, en incluant le règlement des frais d'honoraires de rédaction, un solde de 1 776,96 euros en faveur de M. [W], somme dont le règlement n'est cependant pas formellement justifié.

Mme [P] sollicite, en outre, dans la mesure où M. [W] se trouve déchargé de ses obligations locatives contractuelles, la mise en compte d'une indemnité d'occupation conformément aux prévisions du bail, soit sur la base du double du loyer global de la dernière année de location.

Cela étant, l'anéantissement du contrat de bail commercial conclu entre les parties exclut l'application de la clause de ce contrat stipulant une indemnité d'occupation. Par ailleurs, outre qu'il résulte de ce qui a été indiqué précédemment qu'aucune faute n'est suffisamment caractérisée à l'encontre de M. [W], et bien que ce dernier ait effectivement occupé les locaux pendant près de trois mois, il n'en demeure pas moins que cette mise à disposition résulte d'une volonté de la bailleresse de mettre à disposition les locaux pendant cette durée tout en acceptant de faire dépendre cette occupation d'un événement futur et incertain, de sorte que Mme [P] n'apparaît pas fondée à solliciter l'indemnisation d'un préjudice au titre de l'occupation précaire des lieux.

En conséquence, et en infirmation du jugement entrepris, la cour condamnera Mme [P] à verser à M. [W] la somme de 6 952,80 euros, correspondant au montant encaissé au titre des loyers et charges pour les mois de novembre 2017 à janvier 2018, trop-perçu inclus, ainsi qu'à celui du dépôt de garantie, en l'absence de preuve de sa restitution, la condamnation devant cependant être prononcée en deniers ou quittances afin de prendre en compte un éventuel remboursement.

En revanche, il n'apparaît pas justifié de mettre en compte le remboursement des honoraires de rédaction de l'acte, lequel a été passé dans l'intérêt des deux parties, peu important qu'ensuite la condition suspensive n'ait pas été réalisée.

Au vu de ce qui précède et en l'absence de faute démontrée à l'encontre de M. [W] qui était, par ailleurs, fondé à faire valoir ses droits, la cour déboutera également Mme [P] de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 3 000 euros.

Mme [P] succombant pour l'essentiel sera tenue des dépens de l'appel, ainsi que, en infirmation de la décision entreprise, de première instance.

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Infirme le jugement rendu le 28 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Strasbourg en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Condamne Mme [M] [P] à payer à M. [T] [W] la somme de 6 952,80 euros, en deniers ou quittances, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Déboute M. [T] [W] du surplus de ses demandes en paiement,

Condamne Mme [M] [P] aux dépens de première instance et d'appel,

Déboute Mme [M] [P] de sa demande en dommages-intérêts,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit tant de M. [T] [W] que de Mme [M] [P].

La Greffière :la Présidente :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 1 a
Numéro d'arrêt : 20/00133
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;20.00133 ?
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