MINUTE N° 248/22
Copie exécutoire à
- Me Joëlle LITOU-WOLFF
- Me Céline RICHARD
Le 11.05.2022
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRET DU 11 Mai 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 19/03646 - N° Portalis DBVW-V-B7D-HFER
Décision déférée à la Cour : 21 Juin 2019 par la Chambre commerciale du Tribunal de grande instance de STRASBOURG
APPELANTE - INTIMEE INCIDEMMENT :
SAS [O] LOCATION
prise en la personne de son représentant légal
11 rue de Lisbonne 67300 SCHILTIGHEIM
Représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour
INTIMEE - APPELANTE INCIDEMMENT :
SARL [U] exerçant sous l'enseigne 'HOTEL RIQUET'
prise en la personne de son représentant légal
96, Rue Pierre-Paul Riquet 31000 TOULOUSE
Représentée par Me Céline RICHARD, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me FERAY-LAURENT, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME et APPELE EN INTERVENTION FORCEE :
Maître [E] [K] mandataire liquidateur de la société WIFIPTV
6 quai de Lorraine 11100 NARBONNE
non représenté, assigné par voie d'huissier à domicile le 03.12.2019
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 805 modifié du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Octobre 2021, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et M. ROUBLOT, Conseiller, un rapport de l'affaire ayant été présenté à l'audience.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
ARRET :
- Rendu par défaut
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu les assignations délivrées, respectivement en date du 23 octobre 2017 et du 20 octobre 2017, par lesquelles la SARL [U], ci-après également dénommée '[U]', a fait assigner la SAS [O] Location, ci-après également '[O]', ainsi que la SARL WIFIPTV en liquidation judiciaire, représentée par son mandataire liquidateur, Me [E] [K], devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg, sollicitant, notamment, le prononcé de la nullité du contrat de location ou subsidiairement sa résiliation judiciaire,
Vu le jugement rendu le 21 juin 2019, par lequel le tribunal de grande instance de Strasbourg a :
- annulé le contrat de location conclu par [O] avec [U] daté du 13 février 2017,
- condamné [O] à payer à titre de restitution à [U] la somme de 14 422,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- débouté [O] de sa demande reconventionnelle formée contre [U],
- condamné [O] aux entiers dépens de l'instance, ainsi qu'à payer à [U] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- déclaré le jugement commun à la SARL WIFIPTV en liquidation judiciaire représentée par son mandataire liquidateur Me [E] [K],
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,
- débouté la concluante de leurs plus amples prétentions.
Vu la déclaration d'appel formée par la SAS [O] Location contre ce jugement, et déposée le 8 août 2019,
Vu la constitution d'intimée de la SARL [U] en date du 3 septembre 2019,
Vu l'assignation en date du 17 février 2020, de Me [E] [K], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL WIFIPTV par la SARL [U], la signification à personne s'avérant impossible en raison d'un refus du destinataire de recevoir l'acte, au motif que l'affaire aurait été clôturée le 14 février 2018,
Vu l'arrêt avant dire droit rendu le 27 janvier 2021, auquel il sera renvoyé pour le surplus de l'exposé des faits, ainsi que des prétentions et moyens des parties, sous réserve de leurs dernières écritures, et par lequel la cour de céans a ordonné la réouverture des débats, invitant, notamment, les parties et en particulier la société [U] :
- à présenter ses observations quant à la recevabilité de ses demandes dirigées contre la société WIFIPTV, et au bien fondé des demandes formées contre la société [O] Location en conséquence de la demande de résiliation du contrat conclu avec la société WIFIPTV en l'absence de mise en cause de cette dernière ou de l'une des personnes habilitées à la représenter,
- à justifier de la situation de la société WIFIPTV ;
- le cas échéant, à mettre en cause un mandataire ad hoc, dont elle aurait préalablement obtenu la nomination, pour représenter la société WIFIPTV.
Vu l'assignation en intervention forcée délivrée par la SARL [U] le 26 mars 2021 à Me [E] [K], ès qualités de mandataire ad hoc de la société WIFIPTV, comme désigné selon ordonnance rendue le 26 février 2021 par le président du tribunal de commerce de Narbonne,
Vu les dernières conclusions en date du 19 août 2021, auquel est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SAS [O] Location demande à la cour :
d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- annulé le contrat de location conclu par la concluante avec [U] daté du 13 février 2017 ;
- condamné la concluante à payer à titre de restitution à [U] la somme de 14 422,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- débouté la concluante de sa demande reconventionnelle formée contre [U] ;
- condamné la concluante aux entiers dépens de l'instance, ainsi qu'à payer à [U] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- déclaré le jugement commun à la SARL WIFIPTV en liquidation judiciaire, représentée par son mandataire liquidateur Me [E] [K],
- débouté la SAS [O] Location de ses plus amples prétentions,
et statuant à nouveau, de :
- dire et juger que le contrat de location longue durée n'encourt aucune annulation, subsidiairement aucune résiliation ;
- débouter [U] de l'intégralité de ses fins, moyens et prétentions ou toutes conclusions contraires.
Subsidiairement, en cas de prononcé de la résiliation du contrat de location en raison des manquements de la société [U], au visa de l'article 1382, désormais 1240, du code civil :
- condamner [U] à lui payer la somme de 31 818,18 euros correspondant au prix du matériel décaissé, ainsi que la somme de 8 501,82 euros correspondant à la perte de marge escomptée au titre du contrat de location, ainsi encore qu'à lui restituer, à ses frais, l'ensemble du matériel objet du contrat, à savoir le matériel WIFI, le matériel vidéo et le matériel TV et ce sous astreinte comminatoire de 500 euros par jour de retard après la signification de l'arrêt.
Sur l'appel incident subsidiaire de la société [U] :
- le dire mal fondé,
- le rejeter,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour venait à prononcer la résiliation du contrat de location :
- condamner [U] à lui payer au titre du contrat de location tous les loyers échus et non payés et les loyers à échoir jusqu'au terme de la période initiale de location majorée de 10 %, à savoir la somme de 21 120 euros, ainsi qu'à lui restituer, à ses frais, l'ensemble du matériel objet du contrat, à savoir le matériel WIFI, le matériel vidéo et le matériel TV et ce sous astreinte comminatoire de 500 euros par jour de retard après la signification de l'arrêt,
- débouter [U] de toutes conclusions contraires et de l'ensemble de ses prétentions,
En tout état de cause,
- condamner [U] à lui payer une indemnité de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens, s'agissant de la procédure de première instance et la somme de 3 500 euros au titre de la procédure d'appel outre les frais et dépens d'appel,
- dire l'arrêt à intervenir commun et opposable à Me [E] [K], ès qualités de mandataire ad hoc de la société WIFIPTV ;
et ce, en invoquant, notamment :
- l'objet et les limites de son intervention, uniquement au niveau du financement, avec l'obligation principale de louer le matériel qu'elle met à disposition du locataire,
- la validité du contrat de location, le matériel ayant été acheté par la concluante et livré dans son ensemble, comme confirmé sans réserve par [U], matérialisant ainsi l'obligation de délivrance que la partie adverse ne serait donc pas recevable à contester, outre que l'intimée a réglé les loyers, contrepartie de cette obligation, sans contestation ni réserve à compter du 23 février 2017, ajoutant que la notion de contrepartie dérisoire retenue par le premier juge ne vaut que lors de la conclusion du contrat,
- l'absence d'interdépendance entre les contrats de location et de fourniture et services, à défaut de preuve de l'existence d'un contrat de maintenance et d'un manquement de WIFIPTV, et le cas échéant, l'existence de deux obligations de nature différente sans contrepartie mutuelle, cette divisibilité étant démontrée par le recours de [U] aux services d'une société LSA Multimédias,
- l'absence de déséquilibre significatif qui serait fondé sur l'article L. 442-6 du code de commerce inapplicable à une relation contractuelle,
- à titre subsidiaire, l'absence de préjudice de la société [U], et, en cas de nullité du contrat, l'existence d'une faute de celle-ci née de la légèreté avec laquelle elle aurait accepté la livraison, alors qu'elle connaissait parfaitement l'objet du contrat et l'étendue de ses obligations, appelant indemnisation du prix décaissé par la concluante entre les mains du fournisseur,
- subsidiairement également, la restitution du matériel propriété de la concluante,
- plus subsidiairement, en cas de résiliation du contrat, le paiement de l'indemnité de résiliation l'indemnisant de l'acquisition du matériel, conformément aux dispositions du contrat, sans que son caractère excessif, dont l'appréciation doit être objective, ne soit prouvé, outre la restitution du matériel ;
Vu les dernières conclusions en date du 20 mai 2021, auquel est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, et par lesquelles la SARL [U] demande à la cour de :
A titre liminaire :
- DECLARER recevable et bien-fondé l'appel en cause de Maître [E] [K] ès qualité de mandataire ad hoc de la S.A.R.L. WIFIPTV immatriculée au R.C.S. de NARBONNE sous le n° 502 465 073, et radiée du R.C.S. de Narbonne le 21 février 2018 ;
En conséquence,
- déclarer recevables les demandes dirigées contre la société WIFIPTV ;
- déclarer la société [U] bien fondée à former des demandes contre la société [O] en conséquence de la demande de résiliation du contrat conclu avec la société WIFIPTV, compte tenu de l'intervention d'un mandataire ad hoc habilité à la représenter ;
à titre principal :
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :
* déclaré le jugement commun à la SARL WIFIPTV en liquidation judiciaire représentée par son mandataire liquidateur Me [E] [K] ;
* prononcé la nullité du contrat de location conclu avec la société [O] le 13 février 2017 ;
* condamné [O] à lui restituer les sommes indûment perçues depuis la conclusion du contrat, fixées à la somme de 37 562,30 euros TTC (arrêtée au 1er septembre 2020, à parfaire selon la date de l'arrêt à intervenir), assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- débouter [O] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires à son encontre ;
A titre subsidiaire, de :
- constater l'interdépendance du contrat de location conclu avec [O] et du contrat de prestation de services conclu avec la société WIFIPTV, ainsi que l'inexécution par la société WIFIPTV de ses prestations ;
En conséquence,
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de location,
- condamner [O] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ;
- débouter [O] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à son encontre ;
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de prestation de services conclu entre la société [U] et la société WIFIPTV ;
- fixer à la somme de 4 176,09 euros le montant de la créance de la société [U] à inscrire au passif de la SARL WIFIPTV au titre des dommages-intérêts dus à la concluante en réparation des préjudices subis.
En tout état de cause, :
- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné [O] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance ;
- condamner [O] à lui verser la somme de 4 500 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en cause d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- fixer à la somme de 4 500 euros le montant de sa créance au titre de l'article 700 du code de procédure civile à inscrire au passif de la société WIFIPTV ;
- condamner [O] aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de constat d'huissier.
et ce, en invoquant, notamment :
- l'appel en la cause d'un mandataire ad hoc désigné pour représenter la société WIFIPTV,
- la nullité du contrat de location pour défaut d'objet, en l'absence de contrepartie réelle à son obligation de paiement, la société [O] ne lui ayant pas procuré la jouissance effective du matériel, alors que la confirmation de livraison ne visait qu'un seul téléviseur, de sorte que [O] ne pourrait, sans s'affranchir de son obligation, se prévaloir des conditions générales du contrat, dont il résulte que l'absence de contrepartie étant née dès la formation du contrat, et renvoyer la concluante à agir contre le fournisseur,
- la restitution, en conséquence, de l'intégralité des loyers versés, arrêtée au 1er septembre 2020, et du prélèvement indu de frais d'assurance,
- le mal fondé des demandes subsidiaires en indemnisation de [O], le matériel n'ayant été livré que très partiellement et la concluante n'ayant fait preuve d'aucune légèreté, la nullité ne lui étant pas imputable, mais résultant d'une architecture contractuelle ne proposant aucune réelle contrepartie au paiement des loyers,
- subsidiairement, l'interdépendance des contrats, constitutifs d'un ensemble contractuel indissociable, incluant une prestation de service stipulée et techniquement nécessaire, et l'inexécution grave et manifeste de ses prestations par WIFIPTV, motivant la résiliation judiciaire du contrat de location,
- un préjudice, consécutif à la résiliation, résultant du déséquilibre manifeste entre les droits et obligations des parties, fondé sur l'article L. 442-6 du code de commerce,
- l'inscription au passif de la société WIFIPTV des sommes tendant à la réparation du préjudice subi par la concluante qui découlerait précisément de l'inexécution de ses prestations par le fournisseur, préjudice de nature matérielle et immatérielle, qu'elle détaille,
- l'absence de justification de la demande indemnitaire de [O] en cas de résiliation judiciaire du contrat, notamment au titre de l'indemnité de résiliation anticipée, manifestement excessive et en conséquence nulle ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 septembre 2021,
Vu les débats à l'audience du 13 octobre 2021,
Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l'article 455 du code de procédure civile, pour l'exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS :
La cour observe, au préalable, qu'à la suite de l'arrêt avant dire droit rendu en date du 27 janvier 2021, et aux termes duquel il était demandé aux parties, et en particulier à la société [U] de présenter ses observations quant à la recevabilité de ses demandes dirigées contre la société WIFIPTV, et au bien fondé des demandes formées contre la société [O] Location en conséquence de la demande de résiliation du contrat conclu avec la société WIFIPTV en l'absence de mise en cause de cette dernière ou de l'une des personnes habilitées à la représenter, ainsi qu'à justifier de la situation de la société WIFIPTV, et le cas échéant, à mettre en cause un mandataire ad hoc, dont elle aurait préalablement obtenu la nomination, pour représenter la société WIFIPTV. Me [K] a été désigné, selon ordonnance rendue le 26 février 2021 par le président du tribunal de commerce de Narbonne, comme mandataire ad hoc de la société WIFIPTV, dont la liquidation judiciaire a été clôturée le 14 février 2018 pour insuffisance d'actif. Me [K] ès qualités n'a pas constitué avocat à la suite de l'assignation en intervention forcée qui lui a été délivrée par la SARL [U] le 26 mars 2021.
Dès lors, et en l'absence de contestation de [O] sur ce point, l'appel en la cause de Me [K], ès qualités, et, partant, les demandes dirigées contre la société WIFIPTV, doivent être jugés recevables.
Sur le fond, il convient de rappeler que le premier juge, saisi par la société [U], a prononcé l'annulation du contrat de location financière conclu entre les parties, pour contrepartie illusoire, sur le fondement de l'article 1169 du code civil, dans sa version applicable en la cause, considérant que le bailleur, qui était tenu d'une obligation de délivrance dont il ne pouvait s'exonérer, s'en était déchargé en cédant au locataire les droits et actions qu'il détiendrait contre le fournisseur, tout en percevant du locataire des loyers, alors même que ce dernier n'aurait pas reçu les biens meubles objet du contrat.
La partie appelante entend contester cette solution, faisant, notamment, valoir que son intervention se limitait au financement du matériel loué, lequel aurait été livré sans réserve à la locataire, qui aurait ensuite réglé des loyers sans contestation ni réserve, l'obligation essentielle de délivrance pesant sur la concluante ayant ainsi été respectée, à charge pour la locataire, en application de l'article 3 des conditions générales, d'agir contre le fournisseur du matériel en cas de dysfonctionnement ou de manquement à ses obligations, ce qui n'impliquait, au moment de la formation du contrat, aucun déséquilibre susceptible de justifier son annulation, le dysfonctionnement dénoncé relevant de l'exécution du contrat.
Elle conteste, par ailleurs, toute interdépendance entre le contrat de location et un contrat de fourniture et de services dont elle conteste l'existence, et qui serait, en tout état de cause divisible de l'autre contrat.
Pour sa part, la partie intimée invoque, pour solliciter la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de location conclu avec la société [O] Location le 13 février 2017, l'absence de cause du contrat de location, à défaut de contrepartie réelle, la société [O] Location ne lui ayant pas procuré la jouissance effective du matériel loué, dont elle n'aurait reçu qu'un seul exemplaire, en contrepartie des loyers, tout en se déchargeant des obligations découlant habituellement de la qualité de bailleur, notamment en cas de défaillance de la société WIFIPTV dans la fourniture du matériel et des services, vidant ainsi le contrat de location de sa substance, la bailleresse n'étant, notamment, pas même en mesure de garantir la jouissance du matériel dont ni le nombre, ni la description n'étaient précisés.
Subsidiairement, elle invoque l'interdépendance des contrats de location et de fournitures de service et de matériel, nécessairement incluse dans la prestation globale du fournisseur, la clause d'indépendance devant être réputée non écrite, et l'inexécution par la société WIFIPTV de ses prestations, devant justifier la résiliation judiciaire du contrat conclu avec la société [O].
Sur ce, la cour relève qu'en l'espèce, la société [U], représentée par son gérant, a signé en date du 13 février 2017, avec la société [O] Location, un contrat de location de longue durée, ce contrat mentionnant comme fournisseur la société ICT International Concept Technologie, devenue par la suite WIFIPTV, et désignant comme matériel 'vidéo-WiFI-TV' avec comme fabricant 'Samsung' et la quantité '1', moyennant le versement de 63 loyers mensuels de 768 euros TTC, la case permettant d'informer [O] de la conclusion d'un contrat de maintenance ou d'entretien n'étant pas cochée. Le même jour, la société [U] a signé une 'confirmation de livraison' portant sur le même objet, attestant de la réception, en bon état de fonctionnement, du produit désigné, correspondant aux descriptions figurant au contrat de location, ainsi que d'une livraison intégrale.
Il est, cependant, produit par la société [U] deux documents à en-tête de la société ICT, datés tous deux du 14 février 2017, l'un constituant un bon de commande de 37 téléviseurs Samsung connectés 40 pouces, tandis que l'autre indique que les 37 téléviseurs commandés se trouvaient en stock chez ICT 'le temps des travaux de l'hôtel' outre qu'il était 'aussi entendu que les six premiers mois' étaient 'offerts'.
Pour ce qui la concerne, la société [O] Location verse aux débats une facture de la société ICT en date du 14 février 2017 portant sur une installation WiFi-TV-Vidéo incluant une prestation de livraison, paramétrage et installation, divers matériels WiFI, un enregistreur et sept caméras dômes, ainsi que 37 téléviseurs Samsung 40 pouces LED.
Dès lors, il apparaît que, si la société [O] Location était liée contractuellement à la société [U], ce contrat s'inscrivait dans le cadre d'une opération dans laquelle la société [O] faisait l'acquisition auprès de la société ICT d'un matériel ensuite livré par cette dernière à la société [U], de sorte qu'il ne saurait être reproché à la SAS [O] Location, non tenue d'une obligation de livraison du matériel, laquelle était confiée, contractuellement, à la société ICT, un manquement à une obligation de délivrance de nature à fonder une éventuelle nullité du contrat de location, lequel n'avait pas pour effet de priver la société [U] de contrepartie à la location du matériel, celle-ci étant assurée dans le cadre de contrats interdépendants, puisque conclus de manière concomitante ou rapprochée dans le temps, et visant à la mise en 'uvre d'une même opération, étant, cependant, observé qu'il n'est pas établi que ces contrats aient entendu inclure une prestation de maintenance à la charge du fournisseur.
Dans ces conditions, l'annulation du contrat de location financière n'est pas encourue. Aussi le jugement entrepris sera-t-il infirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat conclu entre les sociétés [U] et [O] Location, la société [U] étant déboutée de ce chef.
Pour autant, si la société [U] sollicite, subsidiairement, la résiliation judiciaire des contrats de fourniture et de location aux torts respectifs du fournisseur et du bailleur, il convient de rappeler qu'elle a bien signé le bon de livraison du matériel dans les conditions qui ont été rappelées ci-avant, étant noté, qu'en dépit de l'imprécision de l'intitulé de l'objet du contrat, celui du bon de livraison est exactement le même, sans qu'aucune mention ne fasse apparaître, dans le bon lui-même, le caractère incomplet de la livraison. Certes, il est établi qu'en réalité, l'installation des 37 téléviseurs qui devaient être montés à la livraison a été différée en raison de travaux dans l'hôtel exploité par la société [U], moyennant un engagement de la société ICT d'assurer une franchise de six mois de loyers, qui n'engage cependant pas [O], faute d'opposabilité ni même d'une information de cette dernière à ce titre antérieurement au courrier qui lui a été adressé le 5 juillet 2017 par le conseil de la société [U], la société [O] Location ayant même, le 16 février 2017, confirmé à la société [U] 'suite à la livraison du matériel' l'entrée en vigueur du contrat de location, sans réaction immédiate de la locataire.
L'absence de mise à disposition immédiate de certains des matériels, à savoir les téléviseurs, a donc pour cause des travaux dans l'hôtel, qui sont de la responsabilité de l'exploitant, la société [U], et ne peut donc être imputée à la société ICT, devenue WIFIPTV, de surcroît au regard des termes de la confirmation de livraison signée par la société [U], qui a ainsi entendu, en quelque sorte, donner quitus à la société ICT, sans démontrer par la suite de résistance, ni même de carence de cette société dans l'exécution de ses obligations, alors, en particulier que si le courrier adressé le 5 juillet 2017 par le conseil de la société [U] à la société WIFIPTV mentionne l'absence de livraison des téléviseurs, il ne comporte aucune mise en demeure ou injonction à cet égard, lui rappelant, en revanche, son engagement à l'obtention d'une franchise de loyers de six mois, étant, cependant, noté qu'un tel engagement, qui relève de l'exécution d'un contrat auquel elle n'est pas partie, fût-ce dans un contexte d'interdépendance des contrats, ne saurait relever d'un manquement contractuel qui lui soit imputable.
Quant aux dysfonctionnements affectant les autres matériels, en particulier le mauvais fonctionnement du WiFi tel qu'il a pu être relevé dans le constat d'huissier réalisé à la demande de la société [U], il y a lieu d'observer que cette société a reçu lesdits matériels en parfait état de fonctionnement, sans établir que sa vigilance aurait été particulièrement trompée alors même qu'elle est une professionnelle de l'hôtellerie, et sachant qu'elle n'établit pas avoir conclu avec la société ICT, devenue WIFIPTV de contrat de maintenance ou de prestation de service relatif à ce matériel, et qui aurait été susceptible, en cas de manquement de la société prestataire, de résiliation.
Il en résulte que la société [U] n'est pas fondée à solliciter le prononcé de la résiliation judiciaire ni du contrat la liant à la société WIFIPTV, ni du contrat de location financière conclu entre elle et la société [O] Location, et sera donc débouté de ces demandes, ainsi que des demandes en découlant, dirigées tant contre la société [O] Location que contre la société WIFIPTV, représentée par son mandataire ad hoc.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
La société [U] succombant pour l'essentiel sera tenue des dépens de l'appel, par application de l'article 696 du code de procédure civile, outre infirmation du jugement déféré sur cette question, et mise à sa charge, également, des dépens de première instance.
L'équité commande en outre de mettre à la charge de la société [U] une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 2 000 euros au profit de la société [O] Location au titre de la première instance et de l'appel, tout en disant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de cette dernière et en infirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Strasbourg,
Et statuant à nouveau,
Déboute la SARL [U] de l'ensemble de ses demandes dirigées contre la SAS [O] Location et contre la SARL WIFIPTV, représentée par Me [E] [K], ès qualités de mandataire ad hoc,
Condamne la SARL [U] aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la SARL [U] à payer à la SAS [O] Location la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL [U].
La Greffière :la Présidente :