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18/03/2016 | FRANCE | N°196

France | France, Cour d'appel de colmar, Ct0248, 18 mars 2016, 196


OD
MINUTE No 196/ 2016

Copies exécutoires à

Maître ACKERMANN
La SELARL ARTHUS

Le 18 mars 2016

Le Greffier RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE-SECTION A

ARRÊT DU 18 mars 2016

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 14/ 02530

Décision déférée à la Cour : jugement avant dire droit du 25 mars 2014 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de MULHOUSE

APPELANTE et défenderesse :

La Compagnie d'Assurances ZURICH IRELAND INSURANCE Ltd prise

en la personne de son représentant légal ayant son siège social 96 rue Edouard Vaillant 92300 LEVALLOIS PERRET

représentée par Ma...

OD
MINUTE No 196/ 2016

Copies exécutoires à

Maître ACKERMANN
La SELARL ARTHUS

Le 18 mars 2016

Le Greffier RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE-SECTION A

ARRÊT DU 18 mars 2016

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 14/ 02530

Décision déférée à la Cour : jugement avant dire droit du 25 mars 2014 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de MULHOUSE

APPELANTE et défenderesse :

La Compagnie d'Assurances ZURICH IRELAND INSURANCE Ltd prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social 96 rue Edouard Vaillant 92300 LEVALLOIS PERRET

représentée par Maître ACKERMANN, avocat à COLMAR plaidant : Maître ROCHARD, avocat à PARIS

INTIMÉE et demanderesse :
La S. A. MINES DE POTASSE D'ALSACE (MDPA) venant aux droits de la S. A. STOCAMINE prise en la personne de son liquidateur ayant son siège social Avenue Joseph Else 68310 WITTELSHEIM

représentée par la SELARL ARTHUS, avocats à COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 29 janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Bernard POLLET, Président Madame Isabelle DIEPENBROEK, Conseiller Monsieur Olivier DAESCHLER, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Nathalie NEFF

ARRÊT Contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.- signé par Monsieur Bernard POLLET, Président et Madame Nathalie NEFF, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 20 octobre 1998, la SA Stocamine, ayant pour activité le stockage sécurisé de déchets ultimes dans des cavités souterraines situées dans les anciennes mines de potasse d'Alsace, souscrivait auprès de la compagnie Zurich International, devenu Zurich Ireland Insurance Limited, une police multirisque industrielle.
Le 10 septembre 2002, elle était victime d'un incendie dans une de ces cavités. Malgré l'intervention rapide des pompiers, le feu perdurait jusqu'au 20 septembre 2002 en raison de la poursuite de la combustion lente liée à la nature des déchets stockés.
Par courrier du 11 février 2003, l'assureur informait Stocamine de son refus de prise en charge, au motif que les conditions générales du contrat excluaient les cavités souterraines du champ d'application des garanties.
Sur saisine de la SA Stocamine en date du 6 janvier 2005, et après sursis à statuer ordonné dans l'attente de l'issue de la procédure pénale, le tribunal de grande instance de Mulhouse, statuant contradictoirement le 25 mars 2014 par jugement mixte, a :
• déclaré l'action recevable,
• dit que la compagnie Zurich Ireland Insurance Ltd, venant aux droits de la compagnie Zurich International, devait sa garantie à la SA Stocamine au titre des dommages consécutifs à l'incendie,
• ordonné une expertise pour l'évaluation des dommages subis et désigné pour ce faire M. X..., aux frais avancés par la société Stocamine, selon mission détaillée dans le dispositif,
• renvoyé l'affaire pour vérification du paiement de l'avance sur frais d'expertise et réservé les droits des parties pour le surplus.
Par déclaration électronique enregistrée au greffe le 16 mai 2014, la compagnie Zurich Assurances a interjeté appel général.
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions de la compagnie Zurich Ireland Insurance Ltd, reçues le 8 décembre 2014, tendant à :
• infirmer le jugement entrepris,
• déclarer la demande de la société Stocamine irrecevable comme prescrite,

• subsidiairement, dire l'assureur non tenu à garantie, et débouter la SA Stocamine, mettre l'assureur hors de cause,

• plus subsidiairement, dire et juger que la société Stocamine ne " rapporte pas la réalité économique de son préjudice " et confirmer l'expertise,
• la débouter de sa demande de condamnation provisionnelle à concurrence de 1 500 000 euros,
• la condamner aux dépens, outre 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions récapitulatives de la SA Mines de Potasse d'Alsace (MDPA), venant aux droits de la SA Stocamine par transmission universelle de patrimoine à effet au 1er janvier 2014, avec appel incident, reçues le 27 avril 2015, aux fins de :
• rejeter l'appel principal,
• confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de réparation,
• condamner Zurich Ireland Insurance Ltd à lui payer la somme provisionnelle de 1 500 000 euros à valoir sur le préjudice,
• la condamner à lui payer 5 000 euros pour appel abusif,
• la condamner aux dépens, y compris le droit de l'article 10 du tarif des huissiers, outre une somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance de clôture du 8 décembre 2015 ;

MOTIFS

Sur la prescription

Attendu que, pour critiquer la décision entreprise, en ce que le premier juge a estimé l'action recevable, comme non atteinte par la prescription biennale de l'article L. 114-2 du code des assurances, aux motifs que le point de départ de la prescription biennale devait être fixé au jour du sinistre, que le délai avait été interrompu par une mise en demeure de la société Stocamine à son assureur en date du 11 avril 2003, en application de l'ancien article 2244 du code civil, puis par l'assignation du 28 décembre 2004, en application de l'article 2241 du code civil, et que l'effet interruptif avait subsisté tout au long de l'instance, en dépit d'un sursis à statuer prononcé le 15 juin 2006, la société Zurich Ireland Insurance fait valoir que, si le délai a été interrompu par l'assignation, un nouveau délai a couru à compter du jour de l'assignation, sans qu'aucun acte interruptif ne soit intervenu avant la reprise d'instance le 1er juillet 2009 ;
Attendu que, pour s'en défendre et conclure à la confirmation du jugement sur ce point, les MDPA rappellent que l'article L. 114-2 du code des assurances prévoit que la prescription est interrompue par les causes ordinaires d'interruption et par la désignation d'un expert à la suite d'un sinistre ; que l'article 2242 du code civil prévoit que l'interruption de la demande en justice produit effet jusqu'à extinction de l'instance ; que la décision de sursis à statuer n'a pas mis fin à l'instance ; qu'ainsi, la prescription n'est pas encourue ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que le délai de la prescription biennale a couru à compter du 10 septembre 2002, date du sinistre, ni que le délai a été interrompu, dans les conditions dérogatoires au droit commun prévues à l'article L. 114-2 du code des assurances, par la notification à l'assureur d'un courrier de la société Stocamine, en date du 11 avril 2003, aux fins d'indemnisation, ainsi que, postérieurement, par la signification d'une assignation au fond le 28 décembre 2004 ;
Attendu qu'en l'état du droit applicable à l'époque, il était admis que l'effet interruptif perdurait tout au long de l'instance, soit jusqu'à la solution du litige, en l'absence de désistement ou de constatation de la péremption (par exemple : Cass. 3ème civ. 8 juin 1994 ; Bull. civ. III no 118), étant au demeurant observé que cette position jurisprudentielle a été confirmée par le législateur sous l'empire du nouveau droit applicable au 17 juin 2008 (article 2242 nouveau du code civil) ;
Attendu, ainsi que l'a relevé le tribunal, que la circonstance que l'instance ait été suspendue par un sursis à statuer dans l'attente du résultat d'une instance pénale parallèle apparaît indifférente, contrairement à ce que soutient l'appelante, alors qu'il résulte des considérations précédentes que l'arrêt du cours interruptif d'une instance s'attache à son extinction, quelle qu'en soit l'origine, et non à sa suspension, qui ne dessaisit pas le juge ;
Attendu qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir est manifestement mal fondée et que la décision attaquée doit être confirmée de ce chef.
Sur l'ouverture de la garantie
Attendu que, pour critiquer la décision dont appel, en ce que le premier juge a retenu que la compagnie d'assurance engageait sa garantie vis-à-vis de son assurée, en retenant qu'il résultait des clauses relatives à l'objet des risques et activités assurés, qui n'étaient pas limitatives, ainsi que des principes d'interprétation et de la définition des bâtiments proposés par le code civil, que les activités connexes et annexes pouvant se rattacher à la manutention des déchets à enfouir, comme leur transport et leur stockage dans des cavités souterraines, se rattachaient aux activités expressément couvertes, y compris dans des galeries souterraines creusées par la main de l'homme, sauf à faire perdre au contrat tout sens pour recevoir exécution, outre qu'aucune exclusion de garantie ne les visait, en dépit de l'activité de l'assurée, et qu'ainsi la commune intention des parties était d'assurer l'ensemble des installations, la compagnie Zurich soutient :
- que sa police est une " multirisque industrielle " énonçant tous les risques garantis et qu'il incombe à l'assuré de démontrer qu'un sinistre est couvert par la garantie et que les conditions en sont réunies ;
- que le refus de garantie s'appuie sur l'exclusion des " terrains " du champ de la garantie des biens assurés, alors que les conditions particulières ne visent que des bâtiments et leurs dépendances (chapitre II paragraphe A) ; qu'il n'y a pas de définition légale du terme " bâtiment " ; que les aires de stockage sont des cavités souterraines préalablement creusées par les MDPA, et non des bâtiments, et qu'elles relèvent de la technique minière ;
- que, dans le chapitre " déclarations ", il est rappelé que les bâtiments sont construits et couverts en matériaux incombustibles et sont soit à simple rez-de-chaussée, soit à étages, ce qui exclut les galeries souterraines ;
- que, dans la mesure où Stocamine disposait, par ailleurs, de bâtiments traditionnels, qui entraient dans la garantie, le contrat n'était pas privé de tout effet ;
- que, lors de la souscription de la police, Stocamine n'avait pas fait état de galeries souterraines ;
Attendu que, pour conclure au rejet et à la confirmation sur ce point, les MDPA font valoir :
- que la société Stocamine avait pour objet social exclusif le stockage de déchets dans des galeries souterraines, qui ne sont pas naturelles mais construites par les MDPA ; que cette activité est rappelée dans les " déclarations " (A activité et B construction/ couverture) ; qu'au demeurant, un inspecteur de la compagnie s'est rendu sur place lors de la souscription et que la notion de " bâtiment " mentionnée dans le contrat est fort ambiguë ; qu'ainsi, les tunnels sont considérés comme des constructions, de même pour les cavités minières, qui sont artificielles ;
- qu'en application des règles d'interprétation des conventions énoncées par les articles 1156, 1157 et 1162 du code civil, l'intention commune des parties était d'assurer l'activité de stockage, sauf à préciser le contraire, ce qui n'a pas été fait ; qu'il n'est nullement démontré que la garantie se limiterait à des bâtiments en surface, alors que, selon la définition de la police, les galeries sont construites dans du sel gemme incombustible et que l'activité déclarée est le stockage de déchets dans des cavités minières ;
- que l'assureur a déclaré connaître le risque suivant visite et qu'au titre des " biens non assurés " (D) ne sont nullement visées les cavités de stockage ; que, si un document récemment produit par la compagnie Zurich semble indiquer que seules les installations de surface étaient assurées, rien ne prouve que cette mention n'a pas été ajoutée après conclusion du contrat, outre que le document n'est pas complet ;
Attendu que, selon la clause " Déclarations A Activité ", " les risques assurés sont principalement à usage de bureaux, garage, locaux sociaux et atelier de préparation et de manutention des déchets à enfouir, avec toutes activités annexes ou connexes pouvant se rattacher à ce genre d'activité " ; que la clause " B Construction/ Couverture " énonce que " dans l'ensemble, les bâtiments sont construits et couverts en matériaux incombustibles. Toutefois, un certain nombre peuvent être construits et/ ou couverts à l'aide de matériaux divers. Les bâtiments sont soit à simple rez-de-chaussée, soit avec des étages " (page 6 annexe no 3 d'Arthus) ;
Attendu que, selon la clause " II Bien assurés-Garanties accordées ", on entend notamment par biens " A. Bâtiments l'ensemble et la généralité des bâtiments construits, en construction avec toutes leurs annexes, aisances et dépendances et tous les aménagements intérieurs ou extérieurs, réputés immeubles par nature ou destination, composant les établissements assurés, ainsi que toutes dépendances et attenances " (page 21 annexe no 3 d'Arthus) ;
Attendu, ainsi que l'a justement considéré le tribunal, qu'une lecture attentive de ces clauses révèle que ces énumérations ne sont clairement pas limitatives, comme le montre l'emploi d'expressions comme " principalement ", " toutes activités annexes ou connexes pouvant se rattacher à ce genre d'activité ", " avec toutes leurs annexes, aisances et dépendances et tous les aménagements intérieurs ou extérieurs, réputés immeubles par nature ou destination, composant les établissements assurés, ainsi que toutes dépendances ou attenances " ;
Attendu qu'ainsi, et par application des principes d'interprétation posés par le code civil en ses articles 1156, 1157 et 1162, la garantie vise non seulement des bâtiments de surface et les activités de transport et de manutention des déchets qui peuvent s'y dérouler, mais plus généralement " un établissement " et les éléments de son environnement spécialement dédiés à son activité, dont celle de stockage de déchets enfouis proprement dite, opérée dans des galeries de mine creusées par la main de l'homme, qui sont des immeubles au sens de l'article L. 131-4 du code minier et sont bien des annexes, dépendances ou attenances de l'établissement assuré ;
Attendu, qu'un autre argument textuel milite en faveur de cette interprétation puisque la clause " Titre VIII Pertes d'exploitation III Conventions ", sous le paragraphe " G. Risques annexes ", énonce de façon particulièrement libérale et extensive : " La garantie est étendue aux conséquences d'un sinistre frappant les différents risques annexes, ateliers, magasins ou dépôts quelconques exploités par l'assuré et non spécialement désignés au présent contrat, mais entrant dans le cadre de réalisations normales de l'assuré, en marge brute et/ ou salaires, au sein de la même entreprise et relevant de la même comptabilité et dans la mesure où ces risques sont garantis dans la police incendie " (page 42 annexe no 3 d'Arthus) ;
Attendu, au demeurant, qu'adopter l'interprétation restrictive proposée par la compagnie Zurich, non seulement n'apparaît pas conforme à la lettre du contrat, qui n'est pas limitative, mais aboutirait largement à vider le contrat de son intérêt pour l'assurée, alors qu'il n'est pas contesté que l'objet social de la société Stocamine (Société de Stockage de Déchets industriels en Mine), d'ailleurs notoirement révélé par son nom commercial même, était la " réception, stockage dans les galeries de mine de résidus industriels agréés, entretien, maintenance, directement ou indirectement, installations minières au fond comme au jour " en exploitation directe (annexe no 18 d'Arthus) ;
Attendu, en outre, qu'il n'est pas contesté que la police, longue de cinquante-quatre pages, ne comporte aucune exclusion de garantie concernant les galeries ou le stockage, et qu'un inspecteur s'est rendu sur place pour inspecter le risque avant souscription du contrat et ne pouvait pas ne pas se rendre compte, s'agissant d'un site de carreau minier, de la réalité des installations à assurer, sauf à manquer à l'obligation de conseil ;
Attendu que l'assureur produit la photocopie d'un document intitulé " fiche technique ", signé du seul représentant du bureau régional de cette compagnie, portant notamment la mention " installations de surface ", qui pourrait signifier que seul était pris en compte ce risque (annexe no 4 de Me Ackermann) ;
Attendu, cependant, que la production à hauteur d'appel de ce document quelque peu providentiel, après plusieurs années de procédure, n'est pas de nature à révoquer en doute l'analyse qui précède ;
Attendu, en effet, qu'il s'agit d'un document purement interne à la compagnie d'assurance, non signé par l'assurée, et dont l'intégrité n'est pas garantie, s'agissant d'une simple photocopie, alors même que l'assureur, qui le produit, n'a pas cru devoir présenter les " rapports techniques joints " qui l'accompagnaient au titre de l'appréciation sur le risque (mention in fine) ;
Attendu, en conséquence, que l'interprétation retenue par le tribunal apparaît pleinement justifiée et mérite confirmation ;
Sur la provision
Attendu que, pour solliciter le versement d'une provision et pour contester la décision attaquée, en ce que le premier juge ne lui alloué en l'état aucun montant et a simplement réservé ses droits à indemnisation, en estimant que, si le préjudice apparaissait démontré par un rapport de la société Price Waterhouse Coopers (PWC), celui-ci n'apparaissait pas contradictoire et qu'il y avait lieu d'ordonner une expertise sans allouer de provision, les MDPA font valoir :

- que le préjudice a été évalué par ce rapport de 2003 à 1 680 614 euros ; qu'il est contradictoire puisque l'expert de la compagnie Zurich y a participé sans émettre d'observation ou de réserve ; qu'il est circonstancié et s'appuie sur des pièces comptables ; que rien ne démontre un quelconque parti pris de l'expert et que le rapport n'est pas contesté sur le fond ;

- qu'ainsi, la demande de provision est justifiée et est confirmée par un second rapport d'expertise comptable d'une société Sadec Adelys, qui a chiffré les dommages hors pertes d'exploitation à 880 930 euros et la perte d'exploitation à 3 666 399 euros ;
Attendu que, pour s'en défendre et conclure à la confirmation sur ce point, la société Zurich relève :
- que le rapport PWC, expert mandaté par l'assurée, n'est pas contradictoire, peu important qu'il ait été versé aux débats ou que son propre expert ait rencontré celui de PWC, dès lors qu'il n'a pas participé à la rédaction du rapport et au chiffrage et qu'ainsi l'impartialité du document présenté n'est pas garantie ;
- qu'en outre, ses conclusions sont présentées comme provisoires ; que l'absence de contestation ne vaut pas aval sur les évaluations proposées ; qu'il y a lieu de confirmer l'expertise judiciaire, dont les frais n'ont d'ailleurs pas été consignés ;
Attendu qu'il sera rappelé, à titre liminaire, que la demande, telle qu'elle est formulée à hauteur d'appel, n'a pas pour objet de liquider le préjudice subi, comme tendait à le faire la demande en première instance, mais d'obtenir une provision à valoir sur ce préjudice, tel qu'il sera déterminé après l'expertise judiciaire dont l'avance des frais, contrairement à ce qu'affirme la compagnie Zurich, a été consignée par l'assurée le 29 avril 2014 (annexe no 21 d'Arthus) ;
Attendu, dans cette optique, que, sans méconnaître que les rapports d'expertise privés présentés n'ont pas de caractère contradictoire au sens procédural, dès lors qu'ils n'ont pas été élaborés en présence des deux parties ou de leurs experts, il n'en demeure pas moins qu'ils constituent un élément d'appréciation du préjudice et de son importance pour déterminer l'opportunité et le montant d'une éventuelle provision sur le préjudice définitif ;
Attendu que, se retranchant derrière une position purement formelle concernant l'utilisation exclusive de rapports d'expertise privée non contradictoires pour la détermination d'une responsabilité ou d'une indemnisation définitive, la compagnie Zurich n'articule strictement aucune observation tant soit peu détaillée et motivée sur les évaluations proposées, les documents qui les fondent et le montant de la provision sollicitée ;
Attendu, dans cette mesure, que la cour estime que ceux-ci peuvent être utilisés sans inconvénient pour l'examen de la demande de provision ;
Attendu que la société PWC a chiffré le préjudice à 1 680 614 euros (annexe no 11 d'Arthus) ;
Attendu que la société d'expertise comptable Sadec Adelys l'estime pour sa part à 3 666 399 euros pour les pertes d'exploitation et à 880 930 euros au titre des dommages hors pertes d'exploitation (annexe no 20 d'Arthus) ;
Attendu que ces appréciations apparaissent suffisantes pour considérer que les MDPA peuvent prétendre, sans contestation sérieuse possible, à l'octroi d'une provision de 800 000 euros, somme au paiement de laquelle sera condamnée la société Zurich Ireland Insurance Ltd, avec les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Attendu, en revanche, que l'appel principal, même non fondé, n'a pas dégénéré en abus ; qu'il convient de rejeter la demande d'indemnisation formulée à ce titre par les MDPA ;
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Attendu qu'il y a lieu d'indemniser la société MDPA au titre des frais irrépétibles exposés pour sa défense en appel à hauteur de 4 000 euros ;
Attendu que la compagnie Zurich Ireland Insurance sera condamnée aux dépens, à l'exclusion formelle, cependant, du droit de l'article 10 du tarif des huissiers, qui incombe légalement au créancier ;
PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement, après débats en audience publique, sur mise à disposition au greffe,

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Zurich Ireland Insurance Limited, venant aux droits de la compagnie Zurich International et prise en la personne de son représentant légal, à payer à la SA Mines de Potasse d'Alsace, venant aux droits de la SA Stocamine et prise en la personne de son liquidateur, une provision de 800 000 euros (huit cent mille euros) à valoir sur son préjudice, avec les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE la société Zurich Ireland Insurance Limited, venant aux droits de la compagnie Zurich International et prise en la personne de son représentant légal, aux dépens, à l'exclusion du droit de l'article 10 du tarif des huissiers, ainsi qu'à payer à la SA Mines de Potasse d'Alsace, venant aux droits de la SA Stocamine et prise en la personne de son liquidateur, une somme de 4 000 euros (quatre mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Ct0248
Numéro d'arrêt : 196
Date de la décision : 18/03/2016

Analyses

"Une société ayant pour activité le stockage sécurisé de déchets ultimes dans des cavités souterraines non naturelles, est fondée à rechercher la garantie de son assureur, en vertu d'une police multirisque industrielle, pour un sinistre incendie survenu dans ces galeries souterraines, dès lors qu'au regard des différentes clauses relatives à la définition de l'objet des risques et des activités garanties qui ne sont pas limitatives, la garantie vise non seulement les bâtiments de surface et les activités de transport et de manutention des déchets qui peuvent s'y dérouler, mais plus généralement un ¿établissement¿ et les éléments de son environnement spécialement dédiés à son activité, dont celle de stockage de déchets opérée dans des galeries de mine creusées par la main de l'homme, qui sont des immeubles au sens de l'article L.131-4 du code minier et constituent des annexes, dépendances ou attenances de l'établissement assuré"


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Mulhouse, 25 mars 2014


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2016-03-18;196 ?
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