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17/02/2016 | FRANCE | N°14/02857

France | France, Cour d'appel de colmar, DeuxiÈme chambre civile - section a, 17 février 2016, 14/02857


COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRÊT DU 17 février 2016

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 14/02857
Décision déférée à la Cour : jugement du 06 mai 2014 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de STRASBOURG

APPELANTE et défenderesse :
La SARL DIMA HUNTING prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social 46A rue principale 67360 DIEFFENBACH LES WOERTH
représentée par Maîtres CHEVALLIER-GASCHY, RICHARD-FRICK et HEICHELBECH, avocats à COLMAR plaidant : Maître FRITSCH, avocat à STRASBOURGr>
INTIMÉ et demandeur :
Monsieur Philippe X... demeurant ... 13750 PLAN D'ORGON
représenté par M...

COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE - SECTION A
ARRÊT DU 17 février 2016

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 14/02857
Décision déférée à la Cour : jugement du 06 mai 2014 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de STRASBOURG

APPELANTE et défenderesse :
La SARL DIMA HUNTING prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social 46A rue principale 67360 DIEFFENBACH LES WOERTH
représentée par Maîtres CHEVALLIER-GASCHY, RICHARD-FRICK et HEICHELBECH, avocats à COLMAR plaidant : Maître FRITSCH, avocat à STRASBOURG

INTIMÉ et demandeur :
Monsieur Philippe X... demeurant ... 13750 PLAN D'ORGON
représenté par Maîtres WETZEL et FRICK, avocats à COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 16 décembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Bernard POLLET, Président Madame Isabelle DIEPENBROEK, Conseiller Monsieur Olivier DAESCHLER, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier ad hoc, lors des débats : Madame Valérie ALVARO

ARRÊT Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par Monsieur Bernard POLLET, Président et Madame Valérie ALVARO, greffier ad hoc, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 25 juillet 2013, M. X... a accepté une offre de la société Dima hunting portant sur l'organisation d'un safari d'une durée quinze jours au Zimbabwe, avec prélèvement d'un léopard et d'un buffle, pour un prix forfaitaire de 18 000 euros.
M. X... a réglé le prix, le safari s'est déroulé du 29 août au 12 septembre 2013, mais ni léopard ni buffle n'ont été abattus.
Mécontent des prestations de la société Dima hunting, M. X... l'a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Strasbourg en remboursement du prix et en dommages et intérêts.
Par jugement en date du 6 mai 2014, le tribunal de grande instance de Strasbourg a condamné la société Dima hunting à payer à M. X... une somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'une somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, avec exécution provisoire à hauteur de 7 000 euros.
Le tribunal a relevé que la société Dima hunting s'était engagée, en cas de non-prélèvement d'un léopard et d'un buffle, à rembourser les taxes d'abattage de ces animaux, d'un montant respectif de 4 000 et de 3 000 euros, et que, pour le surplus, elle n'avait pas rempli son obligation de résultat. Il a fixé à la somme de 12 000 euros, incluant le remboursement des taxes d'abattage, le préjudice de M. X....
La société Dima hunting a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 6 juin 2014.
Elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de débouter M. X... de ses demandes, de lui donner acte de ce qu'elle est d'accord pour rembourser la somme de 425,18 euros, et de condamner M. X... à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'appelante conteste avoir vendu un forfait touristique au sens de l'article L. 211-2 du code du tourisme et prétend en conséquence qu'elle n'était pas tenue à une obligation de résultat. Elle ajoute qu'une obligation de cette nature ne se conçoit pas en matière de chasse, eu égard au caractère aléatoire de cette activité.
La société Dima hunting prétend avoir exécuté ses obligations quant au logement sur place et à l'organisation de la chasse. Elle soutient que M. X... n'a pas fait preuve de suffisamment de patience pour le léopard, qu'il a refusé de chasser le buffle, et qu'il est ainsi est lui-même responsable du caractère infructueux de la chasse.

Elle accepte de rembourser uniquement les frais d'hôtel pour la première nuit et les frais de boissons, dont elle admet qu'ils étaient à sa charge, soit 425,18 euros au total.
M. X... conclut à la confirmation du jugement déféré, à la condamnation de l'appelante à lui payer une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et à ce qu'en cas d'exécution forcée par huissier de justice, le droit proportionnel dégressif dû à l'huissier en application de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 soit mis à la charge de la société Dima hunting.
Il soutient que le contrat avait bien pour objet un forfait touristique, d'où il suit que la société Dima hunting était tenue d'une obligation de résultat, et que, si le résultat de la chasse ne pouvait être garanti, il appartenait à la société Dima hunting de lui permettre de chasser sur le territoire de chasse convenu, ce qui n'a pas été le cas. Il ajoute que la société Dima hunting n'a pas rempli ses autres obligations, notamment en ce qui concerne l'hébergement, celui-ci ayant eu lieu en lodge et non en "fly camp" comme prévu.

Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique
- le 13 octobre 2015 pour la société Dima hunting, - le 2 novembre 2015 pour M. X....
La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée par ordonnance du 10 novembre 2015.

MOTIFS
Aux termes de l'article L. 211-2 du code du tourisme, constitue un forfait touristique la prestation
1o résultant de la combinaison préalable d'au moins deux opérations portant respectivement sur le transport, le logement ou d'autres services touristiques non accessoires au transport ou au logement et représentant une part significative du forfait, 2o dépassant vingt-quatre heures ou incluant une nuitée, 3o vendue ou offerte à la vente à un prix tout compris.
En l'espèce, la prestation vendue par la société Dima hunting à M. X... comprenait tous les transports depuis l'aéroport de Victoria Falls au Zimbabwe vers les zones de chasse et retour à l'aéroport, ainsi que le logement, pour une durée de quinze jours, moyennant un prix de 18 000 euros tout compris.

Dès lors que les transports et le logement étaient compris dans la prestation, il s'agissait d'un forfait touristique au sens du texte légal précité, et ce, que la chasse soit ou non considérée comme un service touristique.
Il s'ensuit que la société Dima hunting était, en vertu de l'article L. 211-16 du code du tourisme, responsable de plein droit des obligations résultant du contrat, sauf à s'exonérer en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat était imputable soit à l'acheteur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure.
Toutefois, cette présomption de responsabilité ne saurait s'appliquer au résultat de la chasse, activité par nature aléatoire.
Il convient donc d'examiner la responsabilité de la société Dima hunting en ce qui concerne la chasse d'une part, les autres prestations d'autre part.
Sur la chasse
L'offre de la société Dima hunting comportait la mention suivante: "animaux non prélevés remboursement: buffle - 3 000 € ; léopard - 4 000 €". Ainsi, la société Dima hunting s'était expressément engagée à rembourser les taxes d'abattage en cas d'insuccès de la chasse. Elle est donc tenue au remboursement de la somme de 7 000 euros, sauf à démontrer que M. X... aurait été lui-même, par son comportement, à l'origine de l'échec de la chasse, ce qu'elle ne fait pas, l'unique attestation qu'elle produit, émanant d'un de ses préposés ayant accompagné M. X... lors du safari, étant à cet égard insuffisante.
Pour le surplus, il incombe à M. X... de prouver que la société Dima hunting a été défaillante dans l'organisation de la chasse. S'il prétend que la société Dima hunting ne disposait pas de droit de chasse pour le léopard dans la zone initialement prévue (le Matetsi) et qu'il a donc été emmené dans une autre zone plus éloignée, où il n'y avait pas de buffles, force est de constater qu'il ne rapporte pas la preuve de ses affirmations. En effet, il ne justifie pas s'être plaint du déroulement de la chasse pendant le déroulement de celle-ci, il a formé sa réclamation après son retour en France et ne produit aucun élément de preuve, se contentant d'affirmer qu'il détient des enregistrements vidéo, qu'il ne produit pas.
Par conséquent, au titre du caractère infructueux de la chasse, la société Dima hunting n'est tenue qu'au remboursement de la somme de 7 000 euros.
Sur les autres prestations
S'agissant du logement et des transports, la société Dima hunting était tenue d'une obligation de résultat.
La société Dima hunting s'était engagée à effectuer une réservation dans un hôtel à l'aéroport de Johannesburg à l'arrivée de M. X.... Il est constant que cette prestation n'a pas été réalisée et que M. X... a dû payer sa chambre d'hôtel.
Par ailleurs, l'offre prévoyait un hébergement pendant la chasse en toile de tente, avec une possibilité d'hébergement en ville en lodge moyennant un supplément de 750 euros sur le séjour. Le contrat décrit le "fly camp" dans le Matetsi et en vante les attraits ("frisson garanti").
Il n'est pas contesté que M. X... a été logé dans des lodges, et la société Dima hunting ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'il aurait opté pour ce mode d'hébergement, comme le contrat lui en réservait la possibilité. Au demeurant, elle n'a pas réclamé le supplément de prix prévu dans cette hypothèse. Il s'en déduit que la société Dima hunting n'a pas respecté ses engagements concernant le logement.
Pour le surplus, les parties soutiennent des thèses contraires, en fait, sur le déroulement du séjour. En l'absence de preuve de la matérialité des griefs invoqués contre la société Dima hunting, il n'est pas établi qu'elle ait manqué à ses obligations contractuelles, sauf en ce qui concerne le logement, ainsi qu'il a été vu ci-avant.
La cour est en mesure de fixer à 1 000 euros le préjudice de M. X... imputable au non-respect des engagements pris par la société Dima hunting en matière d'hébergement.
La société Dima Hunting reconnaît par ailleurs devoir la somme de 200 euros au titre des boissons payées par M. X....
La société Dima hunting sera donc condamnée à payer à M. X... la somme de 7 000 + 1 000 + 200 = 8 200 euros, le jugement déféré devant être réformé en ce sens.
Sur les frais et dépens
Il n'apparaît pas inéquitable que chaque partie conserve la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés en cause d'appel. Il ne sera donc pas fait application de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande de M. X... tendant à ce que soit mis à la charge de la société Dima hunting le droit proportionnel prévu à l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 n'est pas fondée, ce texte prévoyant expressément que ce droit est à la charge du créancier.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, après débats en audience publique,
REFORME le jugement rendu le 6 mai 2014 par le tribunal de grande instance de Strasbourg, en ce qu'il a condamné la société Dima hunting à payer à M. Philippe X... à payer la somme de 12 000 € (douze mille euros) ;
Statuant à nouveau sur ce point,
CONDAMNE la société Dima hunting à payer à M. Philippe X... la somme de 8 200 € (huit mille deux cents euros), avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
CONFIRME, pour le surplus, le jugement déféré ;
Ajoutant au dit jugement,
REJETTE les demandes formées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : DeuxiÈme chambre civile - section a
Numéro d'arrêt : 14/02857
Date de la décision : 17/02/2016
Type d'affaire : Civile

Analyses

La prestation comprenant les transports et le logement constitue un forfait touristique au sens de l'article L.211-2 du code du tourisme et ce, que la chasse soit ou non considérée comme un service touristique. Si la société organisatrice est tenue d'une obligation de résultat au titre des transports et du logement, en revanche, la présomption de responsabilité édictée par l'article L.211-16 ne s'applique pas au résultat de la chasse, activité par nature aléatoire, et il appartient à l'acheteur de rapporter la preuve d'une défaillance du prestataire dans l'organisation de la chasse.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 06 mai 2014


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2016-02-17;14.02857 ?
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