La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2013 | FRANCE | N°182

France | France, Cour d'appel de colmar, Chambre 12, 05 juillet 2013, 182


Chambre 12

R. G. No : 12/ 00343

Minute No : 12M 182/ 13

LRAR aux parties

Copie exécutoire à Me Jean luc VONFELT la SCP SCHWOB et Associés le

Le Greffier RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
ARRET DU 05 JUILLET 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU PRONONCE
M. LEIBER, Président Mme DIEPENBROEK, Conseiller M. DAESCHLER, Conseiller qui en ont délibéré sur le rapport de Mme DIEPENBROEK

Greffier, lors du prononcé : Mme MUNCH-SCHEBACHER, Greffier

MINISTERE PUBLIC auquel le dossier a

été communiqué : Mme HARTMANN, Substitut Général

ARRET CONTRADICTOIRE du 05 Juillet 2013 prononcé par le Présiden...

Chambre 12

R. G. No : 12/ 00343

Minute No : 12M 182/ 13

LRAR aux parties

Copie exécutoire à Me Jean luc VONFELT la SCP SCHWOB et Associés le

Le Greffier RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
ARRET DU 05 JUILLET 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU PRONONCE
M. LEIBER, Président Mme DIEPENBROEK, Conseiller M. DAESCHLER, Conseiller qui en ont délibéré sur le rapport de Mme DIEPENBROEK

Greffier, lors du prononcé : Mme MUNCH-SCHEBACHER, Greffier

MINISTERE PUBLIC auquel le dossier a été communiqué : Mme HARTMANN, Substitut Général

ARRET CONTRADICTOIRE du 05 Juillet 2013 prononcé par le Président.

NATURE DE L'AFFAIRE : vente forcée immobilière

DEMANDEURS AU POURVOI :

Monsieur Serge Y...Madame Madeleine Z...épouse Y......68300 SAINT LOUIS

représentés par Me Jean luc VONFELT, avocat au barreau de MULHOUSE
DEFENDERESSE AU POURVOI :
SA UBS, élisant domicile en l'étude de Mes SCHWOB et Associés, avocats, 36 rue Paul Cézanne BP 1097-68051 MULHOUSE CEDEX 8 rue du Rhône 1211 GENEVE 2 (SUISSE)

représentée par la SCP SCHWOB et Associés, avocats au barreau de MULHOUSE
Par ordonnance en date du 9 novembre 2005, le tribunal d'instance d'Huningue, statuant en tant que tribunal de l'exécution, a sur requête de la société de droit suisse UBS SA, ordonné l'adjudication forcée des biens immobiliers inscrits au livre foncier de Saint Louis, au nom des époux Serge et Madeleine Y..., en communauté de biens.
Par décision en date du 16 février 2006, le tribunal d'instance d'Huningue, statuant sur pourvoi immédiat des époux Serge et Madeleine Y..., a donné acte à la société UBS SA de ce qu'elle acceptait de suspendre la procédure d'exécution forcée jusqu'à nouvel avis.
Par requête enregistrée au greffe le 11 avril 2011, la société UBS SA a sollicité la reprise de la procédure, les délais de paiement accordés n'ayant pas été respectés.
Par ordonnance du 30 août 2011, le tribunal d'instance de Mulhouse, désormais territorialement compétent, a accueilli cette demande.
Le 8 septembre 2011, les époux Serge et Madeleine Y...ont formé un pourvoi immédiat à l'encontre de cette ordonnance à eux notifiée le 3 septembre 2011.
À l'appui de leur pourvoi, ils font valoir qu'ils se sont engagés en qualité de cautions hypothécaires des époux X... pour une durée de huit années, laquelle est désormais expirée, de sorte que leur engagement a pris fin.
Ils invoquent par ailleurs la péremption de l'instance, aucun acte de poursuite n'ayant été diligenté depuis 2005.
Ils ajoutent que le commandement de payer délivré depuis plus de six ans a cessé de produire ses effets conformément à l'article 694 de l'ancien code de procédure civile en l'absence de toute publication d'un jugement de prorogation et qu'il ne saurait être valablement invoqué pour engager la procédure, alors que, de surcroît, la créance visée n'ayant pas été actualisée, malgré les paiements intervenus, est indéterminée.
Subsidiairement, ils sollicitent le sursis à l'exécution et de larges délais de paiement compte-tenu des procédures en cours.
Par écrits déposés les 28 et 30 novembre 2011, la société UBS SA réplique que :- la péremption n'a pas vocation à s'appliquer en droit local,- subsidiairement, le délai a été interrompu par l'envoi de mises en demeure aux débiteurs principaux et la procédure a été suspendue par une décision assimilable à un sursis à statuer,- le cautionnement hypothécaire des époux Serge et Madeleine Y...n'est pas limité dans le temps, seule l'affectation hypothécaire ayant été limitée à huit années, en outre l'inscription a été prorogée jusqu'au 31 décembre 2012 par acte du 20 décembre 2007, or l'exécution a été entreprise avant expiration de ce délai,- les dispositions de droit général relatives au commandement ne s'appliquent pas en droit local.

Elle conclut au rejet du pourvoi immédiat et sollicite la condamnation des époux Serge et Madeleine Y...au paiement d'une somme de 3000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et d'une indemnité de procédure de 1500 ¿ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 10 janvier 2012, le tribunal d'instance de Mulhouse a maintenu son ordonnance du 30 août 2011 et a transmis le dossier à la Cour d'Appel.
Devant la Cour, les époux Serge et Madeleine Y...ont conclu les 12 et 26 janvier et 6 mars 2012 et la société UBS SA les 3 février et 26 mars 2012.
Les époux Serge et Madeleine Y...reprennent leur argumentation antérieure et font valoir en outre que la procédure engagée par la société UBS SA est abusive, le défaut de remboursement du prêt trouvant son origine dans la grave maladie dont est atteint le débiteur principal qui est désormais en invalidité et dans le refus de garantie opposé par l'assurance, contre laquelle une procédure a été engagée, ce dont la banque a parfaitement connaissance.
Ils font également valoir que des irrégularités affectent l'acte d'affectation hypothécaire en date du 24 novembre 1997 servant de fondement à la procédure. Ainsi la procuration donnée au mandataire de la société UBS SA ne revêt pas la forme authentique en méconnaissance des dispositions des articles 2416 et 2417 du code civil, l'acte de prorogation d'hypothèque du 27 décembre 2007 présentant le même vice. En outre, l'acte d'affectation hypothécaire ne mentionne pas les époux Serge et Madeleine Y...comme étant parties. Enfin, le contrat de prêt auquel est affectée la garantie, n'a pas été signé par les époux Serge et Madeleine Y...et comporte une erreur sur l'adresse du bien sur lequel l'hypothèque a été consentie. Ils considèrent que l'ensemble de ces irrégularités entache la validité de l'affectation hypothécaire. Ils ajoutent que la garantie est affectée à un acte de prêt dressé à l'étranger, en l'espèce à Bâle, lequel est dépourvu de force exécutoire en France, en l'absence de toute procédure d'exequatur.
Subsidiairement, ils sollicitent le sursis à la procédure d'adjudication forcée au regard des instances en cours et les plus larges délais afin d'apporter une autre garantie.
La société UBS SA conteste tout abus de procédure de sa part, n'ayant repris la procédure qu'après expiration des délais accordés aux débiteurs principaux et aux cautions.
S'agissant des prétendues irrégularités affectant l'acte d'affectation hypothécaire et l'acte de prêt, elle fait valoir que :
- l'erreur purement matérielle affectant l'adresse de l'immeuble hypothéqué est sans emport, la désignation cadastrale du bien étant exacte,- l'acte de prêt établi sous seing privé a été signé par les époux Serge et Madeleine Y...,- ces derniers sont désignés comme cautions hypothécaires en page 6 de l'acte du 24 novembre 2007 qu'ils ont signé,- aucune disposition n'impose la forme authentique s'agissant du mandat donné par le créancier qui accepte l'hypothèque,- l'acte du 24 novembre 1997 qui reproduit les conditions du prêt et comporte engagement de payer des époux Serge et Madeleine Y...et soumission à l'exécution forcée immédiate, constitue un titre exécutoire de droit local, indépendamment du contrat de prêt auquel il se rattache.

La société UBS SA s'oppose enfin au sursis demandé, n'étant pas partie à la procédure opposant les débiteurs principaux à la compagnie d'assurance et porte sa réclamation au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive à 10. 000 ¿ et au titre de l'article 700 du code de procédure civile à 5000 ¿.

Monsieur le Procureur Général s'en est remis à justice.
SUR QUOI, la Cour :
Vu le dossier de la procédure,
Le pourvoi immédiat formé dans le délai légal est recevable en la forme.
Conformément aux articles 1 et 2 de l'annexe du code de procédure civile, les dispositions de ce code sont applicables en Alsace-Moselle, sauf dispositions contraires. L'article 386 du code de procédure civile relatif à la péremption d'instance est donc susceptible de s'appliquer à la procédure d'exécution forcée immobilière de droit local, sous réserve qu'existe un lien d'instance.
Cette disposition ne saurait en effet trouver application s'agissant de la procédure qui se déroule devant le notaire, faute d'instance. En revanche, elle est applicable lorsque le tribunal de l'exécution est saisi d'une contestation relative à l'ouverture ou au déroulement de la procédure. En effet, le pourvoi immédiat formé contre l'ordonnance d'ouverture de la procédure, qui a pour effet de lui conférer un caractère contentieux, crée un lien d'instance.
La péremption d'instance peut donc être soulevée.
L'article 392 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le délai de péremption continue à courir en cas de suspension de l'instance sauf si celle-ci n'a lieu que pour un temps ou jusqu'à la survenance d'un événement déterminés, dans ces derniers cas, un nouveau délai court à compter de l'expiration de ce temps ou de la survenance de cet événement.
Contrairement à ce que soutient la société UBS SA, la décision en date du 16 février 2006, par laquelle le tribunal d'instance d'Huningue, statuant sur pourvoi immédiat des époux Serge et Madeleine Y..., a donné acte à la société UBS SA de ce qu'elle acceptait de suspendre la procédure d'exécution forcée jusqu'à nouvel avis, ne saurait être assimilée à une décision de sursis à statuer, dans la mesure où elle n'a pas pour effet de suspendre l'instance pour un temps déterminé, la reprise de la procédure étant en effet soumise à la volonté du créancier.
Il appartient dès lors à la société UBS SA de démontrer l'existence de diligences interruptives du délai de péremption.
S'il peut être considéré que la convention sous seing privée établie entre la société UBS SA, les époux Serge et Madeleine Y...et les époux A...X... et Angela Y..., débiteurs principaux, le 20 décembre 2007, réitérée par acte authentique du 27 décembre 2007, aux termes de laquelle la société UBS SA a accordé aux époux X... un délai de paiement jusqu'au 30 novembre 2009 et les époux Serge et Madeleine Y...ont consenti à une prorogation de leur engagement de cautions hypothécaires jusqu'au 31 décembre 2011 avec effet de l'inscription hypothécaire jusqu'au 31 décembre 2012, constitue un acte interruptif de péremption dans la mesure où elle mentionne la procédure engagée contre les époux Serge et Madeleine Y...et traduit la volonté de la société UBS SA de ne pas abandonner la procédure, force est toutefois de constater qu'il n'est justifié d'aucun acte interruptif de péremption dans les deux années suivantes.
Le courrier de mise en demeure du 10 novembre 2009 adressé uniquement aux époux A...et Angela X..., comme le courrier du 7 décembre 2009 adressé aux débiteurs principaux avec copie aux cautions, par lequel la banque rappelle que la créance est exigible, le délai accordé étant expiré et invite les débiteurs à prendre contact " afin de discuter de la suite à donner à cette affaire, la situation ne pouvant en rester là ", n'ont pas valeur interruptive dès lors qu'ils ne manifestent pas clairement la volonté non équivoque de la société UBS SA de poursuivre la procédure engagée contre les cautions.
Si la volonté de la société UBS SA de poursuivre la procédure résulte par contre clairement du courrier du 12 janvier 2010, adressé en copie aux époux Serge et Madeleine Y..., par lequel la société UBS SA a accordé aux débiteurs principaux un ultime délai jusqu'au 26 février 2010, précisant : " à défaut nous reprendrons sans autre avis le cours des procédures qui avaient été antérieurement initiées ", ce courrier est toutefois inopérant puisque postérieur de plus de deux ans à l'expiration du nouveau délai de péremption qui a recommencé à courir à la date de l'acte du 27 décembre 2007.
Il y a donc lieu, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens soulevés, d'infirmer la décision entreprise et de constater la péremption de l'instance.
La société UBS SA qui succombe sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et supportera la charge des dépens, sans pouvoir prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La COUR, statuant en Chambre du Conseil,
Déclare le pourvoi immédiat recevable et bien fondé ;
Infirme l'ordonnance du tribunal d'instance de Mulhouse du 30 août 2011 ;
Statuant à nouveau,
Constate la péremption de l'instance ;
Déboute la société UBS SA de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société UBS SA aux dépens ;
Ordonne la notification du présent arrêt aux parties ;
Dit qu'une copie sera adressée à Me B..., notaire à Hégenheim, désigné pour les opérations de l'exécution forcée.
Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Chambre 12
Numéro d'arrêt : 182
Date de la décision : 05/07/2013

Analyses

En vertu des articles 1 et 2 de l'annexe du code de procédure civile, l'article 386 du même code relatif à la péremption d'instance est applicable à la procédure d'exécution forcée immobilière de droit local sous réserve qu'il y ait un lien d'instance. Il en résulte que, si dans le cadre de la procédure se déroulant devant le notaire, la péremption d'instance ne saurait être invoquée, faute de lien d'instance, en revanche, les débiteurs pourront s'en prévaloir lorsque le tribunal de l'exécution est saisi, sur pourvoi immédiat, d'une contestation relative à l'ouverture ou au déroulement de la procédure


Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Mulhouse, 30 août 2011


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2013-07-05;182 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award