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27/05/2010 | FRANCE | N°439/2010

France | France, Cour d'appel de colmar, Premiere chambre civile-section b, 27 mai 2010, 439/2010


JML/ SD
MINUTE No
Copie exécutoire à
-Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY
-Me Claus WIESEL

Le 27. 05. 2010
Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE-SECTION B
ARRET DU 27 Mai 2010

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 B 08/ 04638
Décision déférée à la Cour : 02 Septembre 2008 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE STRASBOURG
APPELANTE :
EURL X... 13 rue du Marais 67800 BISCHHEIM
représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à

la Cour
INTIMEE :
SCI ARAMIS 23 rue Finkmatt 67000 STRASBOURG
représentée par Me Claus WIESEL, avocat ...

JML/ SD
MINUTE No
Copie exécutoire à
-Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY
-Me Claus WIESEL

Le 27. 05. 2010
Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE-SECTION B
ARRET DU 27 Mai 2010

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 B 08/ 04638
Décision déférée à la Cour : 02 Septembre 2008 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE STRASBOURG
APPELANTE :
EURL X... 13 rue du Marais 67800 BISCHHEIM
représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la Cour
INTIMEE :
SCI ARAMIS 23 rue Finkmatt 67000 STRASBOURG
représentée par Me Claus WIESEL, avocat à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31 Mars 2010, en audience publique, devant la Cour composée de : M. LITIQUE, Président de Chambre, entendu en son rapport Mme MAZARIN-GEORGIN, Conseiller M. ALLARD, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme MUNCH-SCHEBACHER
ARRET :- Contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.- signé par M. Jean-Marie LITIQUE, président et Mme Corinne ARMSPACH-SENGLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Selon acte sous seing privé du 7 septembre 1993, la SCI ARAMIS a consenti à la SNC STENGER-X..., Pharmacie du Marais, aux droits de laquelle vient l'EURL X..., à compter du 1er septembre 1993 un bail commercial portant sur un local professionnel avec cinq places de parking, situé rue du Marais à BISCHHEIM et à destination exclusive d'usage d'une pharmacie moyennant un loyer initial de 180. 000 frs par an, soit 15. 000 frs HT par mois (14. 250 frs HT pour le local et 750 frs HT pour les parkings) indexé, porté par avenant du 24 février 1997, suite à un rajout d'une place de parking dans la location, à un loyer de 15. 268, 63 frs HT par mois et réduit selon avenant du 9 juin 1999 pendant les travaux de mise en place de la ligne B du tramway pour la période du 1er juillet 1999 au 30 décembre 1999.
Selon acte extra-judiciaire du 21 août 2005, et suite à la cession de toutes les parts sociales de l'EURL par Madame veuve X... à Mme Z..., Maître A..., huissier de justice, notifiait, à la demande de la preneuse, à la bailleresse une demande de renouvellement du bail à compter du 1er septembre 2005 " aux même charges et conditions que précédemment ".
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 octobre 2005, la SCI ARAMIS faisait part de son accord quant au renouvellement du bail " aux anciennes charges et conditions ", tout en notifiant le nouveau loyer à compter du 1er septembre 2005, soit un montant de 3. 432, 58 euros TTC par mois correspondant à l'ancien loyer augmenté par le jeu de la clause d'indexation.
L'EURL X... a alors notifié le 21 août 2007 un mémoire préalable à la saisine du Juge des Loyers Commerciaux par lequel elle demandait de constater que le renouvellement du bail était acquis faute pour la bailleresse de s'être opposée à sa demande, et que le loyer renouvelé soit fixé à 15. 295 euros, montant modifié ultérieurement et porté à 27. 256 euros par an sur le fondement de l'article L. 145-33 du Code de commerce, étant précisé qu'à cette époque-là l'EURL X... payait un loyer annuel de plus de 37. 000 euros.
De son côté, la SCI ARAMIS s'opposait à la demande en faisant valoir que, par l'acceptation pure et simple de la demande de renouvellement, il y avait eu un accord parfait entre les parties si bien qu'il n'y avait pas lieu de fixer un loyer renouvelé.
Par jugement du 2 septembre 2008, le Juge des Loyers saisi, considérant que :
- il n'était compétent, par principe, que pour fixer les loyers révisés ou les loyers renouvelés.
- en l'espèce, il y avait eu accord des parties sur le renouvellement du bail aux charges et conditions anciennes si bien que, dès lors que l'acceptation recouvrait parfaitement l'offre qui avait été faite, en application de l'article 1134 du Code civil les conventions légalement formées tenaient lieu de loi entre les parties et ne pouvaient être révoquées que par consentement mutuel et devaient être exécutées de bonne foi
-l'article L. 145-33 du Code de commerce n'empêche pas les parties de se mettre d'accord sur le montant d'un loyer renouvelé, ce qui était le cas en l'espèce, si bien qu'en l'absence de contestation sur le montant du loyer le mémoire préalable notifié le 21 août 2007 ne s'inscrivait dans aucun litige ni dans aucune période de révision ou de renouvellement du bail
a statué comme suit :
" DEBOUTE l'EURL X... de sa demande, CONSTATE que le bail liant les parties a été renouvelé le 1er septembre 2005 aux charges et conditions du bail initial du 7 septembre 1993, CONDAMNE l'EURL X... aux dépens de la présente procédure et à payer à la SCI ARAMIS la somme de 1. 200 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement. "
A l'encontre de cette décision, l'EURL X... a interjeté appel par déclaration déposée le 26 septembre 2008 au Greffe de la Cour.
Se référant à ses derniers écrits du 15 septembre 2009, elle conclut à l'infirmation du jugement, à voir constater l'accord de la bailleresse au principe du renouvellement du bail, et à la fixation de la valeur locative à la somme annuelle de 27. 256 euros au 1er septembre 2005, en conséquence à la fixation du loyer annuel à ce montant, soit 2. 271, 33 euros HT par mois, au débouté de la bailleresse de l'intégralité de ses prétentions et à sa condamnation au paiement, outre les dépens, d'un montant de 2. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en faisant valoir pour l'essentiel que :
- la SCI ARAMIS n'ayant jamais répondu dans les formes à la demande de renouvellement, celui-ci est, en tout état de cause, réputé avoir été accepté.
- il n'y a jamais eu accord sur le montant du loyer, la mention dans la demande de renouvellement " aux même charges et conditions que précédemment " ne constituant qu'une formule de style ne permettant en aucun cas de retenir l'existence d'un accord.
- le montant du loyer du bail renouvelé ou révisé doit correspondre à la valeur locative. Or, selon le rapport d'expertise privée, la valeur locative est moindre que le loyer annuel actuellement payé.
Se référant à ses derniers écrits du 18 novembre 2009, la SCI ARAMIS conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de l'appelante au paiement, outre les dépens, d'un montant de 4. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en soutenant en substance que :
- un accord parfait est intervenu sur le principe du renouvellement du bail et sur le montant du loyer.
- par le biais de l'acte de cession de parts sociales, l'EURL X... a expressément reconnu l'existence du bail initial ainsi que les deux avenants qui s'en sont suivis.
- une modification du loyer, y compris à la baisse, suppose une modification notable des facteurs locaux de commercialité, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
SUR QUOI LA COUR :
Vu la procédure, les pièces régulièrement versées aux débats et les écrits des parties auxquels il est référé pour plus ample exposé de leurs moyens et arguments :
L'appel interjeté dans des conditions de forme et de délai légaux est recevable.
A) Sur le renouvellement du bail :
Si, au regard de la formulation de la demande de renouvellement et de celle de la réponse de la bailleresse, il est établi que les parties se sont mises d'accord sur le principe du renouvellement du bail, il n'en demeure pas moins que l'acceptation du principe de renouvellement du bail n'a qu'un caractère provisoire et que tant que les conditions d'un bail ne sont pas définitivement fixées, chacune des parties demeure libre de ne pas se lier et ne peut se voir imposer le bail (Cass. Civ. 30. 04. 1969).
En l'espèce, et contrairement à l'opinion du premier juge, rien ne permet d'établir qu'un accord soit intervenu entre les parties sur le montant du loyer du bail renouvelé, en tout cas tant que n'était pas intervenue une fixation conventionnelle ou judiciaire du loyer dès lors que la formule d'usage " aux même clauses et conditions du bail antérieur ", qui ne faisait aucune référence expresse au loyer, élément essentiel du contrat de bail, ne pouvait suffire à caractériser un engagement précis, complet et ferme de la preneuse sur le montant du loyer du bail à renouveler, d'autant que le loyer initial avait été modifié par deux avenants en raison du jeu de la clause d'indexation et de la modification de l'assiette du bail et que rien ne permet d'établir qu'elle ait accepté le montant du loyer proposé par la bailleresse dans sa lettre de réponse à la demande de renouvellement.
Ce défaut d'acceptation s'est d'ailleurs traduit par la saisine du Juge des Loyers Commerciaux après un mémoire préalable dans lequel la société preneuse réclamait la fixation du loyer à un montant moindre correspondant à la valeur locative sur le fondement de l'article L. 145-33 du Code de commerce.
En conséquence, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.
B) Sur le montant du loyer :
Dès lors que la valeur locative est inférieure au montant du loyer plafonné, le loyer du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative sans qu'il soit nécessaire pour le locataire d'établir une quelconque modification notable des éléments mentionnés aux articles 1 et 4 de l'article L. 145-33 du Code de commerce pour la détermination de la valeur locative (Cass. Civ. 03. 06. 2004).
Le rapport d'expertise privé établi par Mme B...à la demande de l'EURL X... et soumis au débat contradictoire, tout en relevant que, sur la période comprise entre le 1er septembre 1993 et le 1er septembre 2004, période du bail antérieur, la commercialité du quartier (avec la construction et la mise en service de la ligne B du tramway le 1er septembre 2000 et sa modification de la voirie Rue du Marais avec création d'un terre-plein central gênant considérablement la visibilité du local et réduisant l'accessibilité de celui-ci pour la clientèle qui ne pouvait plus traverser la rue), avait subi une évolution défavorable pour le commerce de pharmacie exploité par l'appelante, considère que la valeur locative s'établit à 30. 000 euros par an, soit 2. 500 euros par mois, cette valeur s'entendant au deuxième semestre 2007 sous réserve de faits et documents n'ayant pas été portés à la connaissance de l'expert et de ce que les surfaces mentionnées dans le rapport sont exprimées sans la production d'un relevé réalisé par un géomètre expert.
Il convient d'observer d'une part que l'expert se fonde, en termes de référence, sur les loyers de diverses pharmacies de BISCHHEIM, HOENHEIM, SCHILTIGHEIM et STRASBOURG, sans indiquer l'adresse desdites pharmacies, alors que la commercialité d'une pharmacie au centre-ville de STRASBOURG n'a rien à voir avec celle de la pharmacie de l'appelante et que rien ne permet de déduire que la commercialité des pharmacies retenues comme terme de référence sont en rapport avec le fonds de l'appelante dès lors qu'il résulte de l'expertise de Mme B...et de l'extrait de la carte jointe que la pharmacie de l'appelante se situe à l'Est du ban de la commune de BISCHHEIM et à proximité immédiate du ban des communes de SCHILTIGHEIM et de STRASBOURG, dans une zone où les commerces sont implantés en discontinu de sorte que la clientèle se déplace essentiellement en voiture, ce qui n'est pas forcément le cas de la situation des commerces situés à proximité immédiate du centre-ville de BISCHHEIM constitué autour de l'axe formé par la Route de Bischwiller.
En outre, il est versé aux débats une attestation de NOLL CONCEPT donnant les surfaces de la PHARMACIE DU MARAIS, dont on ignore s'il s'agit d'un document établi par un expert géomètre, mais qui en toute hypothèse donne des surfaces différentes de celles établies par l'expert B...uniquement sur la base du métré réalisé sur plan.
Enfin, le prix du bail à renouveler s'apprécie à la date de renouvellement alors que la valeur locative établie par l'expert B...est évaluée à la date du premier semestre 2007 et non au 31 août 2005 date de notification du congé avec demande de renouvellement.
En conséquence, et au vu de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de recourir à une expertise judiciaire aux frais avancés de la société preneuse à l'origine du congé.
C) Pour le surplus :
Il y a lieu de réserver à statuer sur les demandes après dépôt du rapport d'expertise, y compris en ce qui concerne les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DECLARE l'appel régulier et recevable en la forme
INFIRME le jugement entrepris en toutes des dispositions
CONSTATE l'accord des parties sur le principe du renouvellement du bail
ORDONNE une expertise sur la valeur locative et le montant du loyer
COMMET pour y procéder Mme Laurence C..., ...à 67000 STRASBOURG, avec mission de :
"- convoquer les parties et leurs conseils et les entendre en leurs explications-se rendre sur les lieux 13 rue du Marais à BISCHHEIM-donner son avis sur la valeur locative au 31 août 2005 des locaux à usage commercial situés à cette adresse d'après : 1. Les caractéristiques du local considéré 2. La destination des lieux 3. Les obligations respectives des parties 4. Les facteurs locaux de commercialité 5. Les prix couramment pratiqués dans le voisinage-préciser explicitement les méthodes d'évaluation et éléments de référence utilisés en application des dispositions des articles 23-1 à 23-5 du décret no53960 du 30 octobre 1953 devenus les articles R. 145-2 et suivants du Code de commerce-entendre tous sachants, se faire remettre tous documents, et répondre aux dires des parties. "
DIT que l'expert déposera son rapport dans le délai de 4 mois à compter de sa saisine
FIXE à la somme de 4. 500 euros (quatre mille cinq cents euros) l'avance sur les frais d'expertise qui devra être consignée par l'EURL X... avant le 30 juin 2010
RESERVE à statuer sur les demandes, y compris sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, jusqu'après le dépôt du rapport d'expertise
RENVOIE l'affaire à l'audience de mise en état du :
VENDREDI 02 JUILLET 2010, SALLE 10 à 09 HEURES
pour vérification du paiement de l'avance.

LE GREFFIER : LE PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Premiere chambre civile-section b
Numéro d'arrêt : 439/2010
Date de la décision : 27/05/2010
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Renouvellement - Demande -

Si, au regard de la formulation d'une demande de renouvellement d'un bail commercial par un preneur et de celle de la réponse du bailleur, il est établi que les parties se sont mises d'accord sur le principe du renouvellement du bail, il n'en demeure pas moins que l'acceptation de ce principe n'a qu'un caractère provisoire et que, tant que les conditions d'un bail ne sont pas définitivement fixées, chacune des parties demeure libre de ne pas se lier. La formule d'usage aux mêmes clauses et conditions du bail antérieur", même inscrite sur la demande et sur l'acceptation de renouvellement d'un bail commercial, ne fait aucune référence expresse au loyer et ne suffit pas à caractériser l'engagement du preneur sur le montant du loyer du bail à renouveler


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 02 septembre 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2010-05-27;439.2010 ?
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