La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2009 | FRANCE | N°24/09

France | France, Cour d'appel de colmar, Premiere chambre civile - section a, 15 décembre 2009, 24/09


CC/ CJ
MINUTE.

Copie exécutoire à
-Me Anne CROVISIER-Me Christophe ROUSSEL

Le 15/ 12/ 2009
Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE-SECTION A
ARRET DU 15 Décembre 2009

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 07/ 04087
Décision déférée à la Cour : 18 Juillet 2007 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE MULHOUSE
APPELANTE :
SA SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE 86 Bld Haussmann 75380 PARIS CEDEX 08 Représentée par Me Anne CROVISIER, avo

cat à la Cour Avocat plaidant : Me BOUYEURE, avocat au Barreau de Lyon
INTIMES :
SA SMAT, en redresse...

CC/ CJ
MINUTE.

Copie exécutoire à
-Me Anne CROVISIER-Me Christophe ROUSSEL

Le 15/ 12/ 2009
Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE-SECTION A
ARRET DU 15 Décembre 2009

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 07/ 04087
Décision déférée à la Cour : 18 Juillet 2007 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE MULHOUSE
APPELANTE :
SA SWISS LIFE PREVOYANCE ET SANTE 86 Bld Haussmann 75380 PARIS CEDEX 08 Représentée par Me Anne CROVISIER, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me BOUYEURE, avocat au Barreau de Lyon
INTIMES :
SA SMAT, en redressement judiciaire, représentée par Maître Pierre X..., ès-qualités de Commissaire à l'exécution du plan de cession ...68170 RIXHEIM Représentée par Me Christophe ROUSSEL, avocat à la Cour Avocat plaidant : Me BELZUNG, avocat au Barreau de Mulhouse
Monsieur Noël Y...... Représenté par Me Christophe ROUSSEL, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de : M. HOFFBECK, Président de Chambre, entendu en son rapport M. CUENOT, Conseiller M. ALLARD, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme ARMSPACH-SENGLE, Greffier
ARRET :- Contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.- signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Attendu qu'une instance a été introduite devant le Tribunal de grande instance de MULHOUSE par la société SMAT en redressement judiciaire, pour faire juger qu'une assurance de groupe souscrite auprès de la société SUISSE ACCIDENTS FRANCE devait prendre en charge l'invalidité d'un de ses anciens salariés, M. Noël Y..., au cas où la juridiction sociale viendrait à confirmer que la rupture de son contrat de travail devait avoir effet au 31 janvier 1996 ;
Que M. Noël Y...est intervenu à cette instance pour demander le paiement par l'assureur d'une somme complémentaire de 78. 405, 84 €, après le règlement par l'organisme d'assurance des salaires d'un montant de 103. 530, 96 € ; Attendu que par jugement du 18 juillet 2007, le Tribunal de grande instance de MULHOUSE a fait droit à la demande de M. Y..., sans statuer expressément sur la demande de la société SMAT qui sollicitait la garantie de l'assureur au titre de sa condamnation à payer à son ancien salarié une somme de 181. 936, 62 € ;
Attendu que la compagnie SWISS LIFE, aux droits de la compagnie SUISSE ACCIDENTS, a relevé appel de ce jugement le 26 septembre 2007, dans des conditions de recevabilité non contestées, en l'absence de justification de sa signification ;
Attendu qu'au soutien de son recours, l'appelante oppose la prescription biennale à l'action intentée contre elle, et subsidiairement la prescription quinquennale, en contestant l'impossibilité d'agir contre elle pendant le cours de celles-ci ;
Qu'elle oppose aux demandes de M. Y...le principe de cohérence, actuellement reconnue en jurisprudence sous des conditions d'identité d'objet et de parties, toutes réunies selon elle dans le cas d'espèce, et souligne l'incompatibilité entre sa demande d'indemnisation de la perte de garantie d'assurance, accueillie par la Cour de LYON, et la demande destinée à obtenir cette même garantie de la part de la compagnie ;
Qu'elle rappelle que sa garantie était réservée au personnel présent dans l'entreprise ;
Qu'elle oppose aux demandes de la société SMAT le fait qu'elle n'est pas son assureur de responsabilité ;
Qu'elle conclut à l'infirmation du jugement entrepris, au rejet des demandes contre elle, et à l'attribution de compensations de son obligation de plaider ;
Attendu que M. Y...conclut à la confirmation du jugement entrepris, en faisant notamment état de l'inopposabilité de la prescription biennale à défaut de mention de celle-ci dans la notice d'assurance, et en rappelant les dispositions de l'article L 1234-4 du Code du Travail sur l'absence de modification de l'échéance du contrat en cas d'inobservation du délai congé ;
Qu'il sollicite 10. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Attendu que la société SMAT conclut à la confirmation du jugement entrepris et demande à être garantie de la condamnation prononcée par la Cour de LYON, en faisant valoir notamment que la prescription a été interrompue par des courriers recommandés, et que le Tribunal a retenu à bon droit l'opposabilité à l'assureur de la décision de cette Cour sur la date de rupture du contrat ; Qu'elle sollicite une compensation de son obligation de plaider ;
Attendu que l'instance dévolue à cette Cour fait suite au licenciement de Noël Y...par la société SMAT le 21 novembre 1995 et à une transaction du même jour, intervenue pour en arrêter les modalités en fixant l'expiration du contrat au 31 décembre ;
Attendu que le 6 janvier 1996, M. Y...a été victime d'un accident cérébral qui l'a laissé invalide, classé ultérieurement en deuxième catégorie par la Sécurité Sociale ;
Que la question s'est naturellement posée de la possibilité pour lui de revendiquer le bénéfice de l'assurance de groupe souscrite par son ancien employeur contre divers risques, notamment celui d'invalidité ;
Que la compagnie a naturellement refusé la prise en charge en considération de la date d'expiration du contrat ;
Attendu que M. Y...a intenté une instance prud'homale pour contester la transaction et faire juger que le terme de son contrat aurait dû être fixé au 31 janvier compte tenu de son statut de cadre, lequel aurait dû lui valoir un préavis de deux mois ;
Attendu qu'il a obtenu satisfaction devant la juridiction prud'homale et devant la Cour d'appel de LYON ;
Que celle-ci a jugé le 2 novembre 2004 que le préavis trop bref avait fait effectivement perdre la garantie d'invalidité souscrite au profit du personnel, et a condamné l'employeur à payer à M. Y...la totalité des indemnités perdues, estimées à 181. 936, 62 € ;
Attendu que cet arrêt a été rendu en présence de la compagnie SWISS LIFE, dont l'appel en cause a été jugé cependant irrecevable ;
Attendu que la société SMAT a été placée en redressement judiciaire, et que l'organisme CGEA de Nancy a payé comme garant des sommes dues aux salariés les montants de 39. 819, 60 € et de 63. 711, 36 € ;
Attendu que c'est donc une demande bien problématique qui est actuellement dévolue à cette Cour, puisqu'après avoir obtenu satisfaction contre son employeur, qui lui avait fait perdre la garantie d'assurance par un préavis trop bref, M. Y...revendique maintenant les garanties qui ont été jugées perdues et dont la perte a été compensée pour lui, partiellement dans les faits ;
Attendu qu'il n'est pas possible de faire droit au moyen de prescription biennale, dans la mesure où la notice remise au bénéficiaire de l'assurance de groupe ne mentionnait pas le délai de prescription conformément à l'article R 112-1 du Code des assurances ;
Attendu que la demande de M. Y...doit être sanctionnée par contre sur le fondement du principe de cohérence, lequel interdit de présenter des demandes contradictoires relativement aux mêmes faits et entre les mêmes parties ;
Attendu en effet que l'objet essentiel de l'instance sociale était de faire juger de la date d'effet de la rupture du contrat de travail compte tenu de l'enjeu de la garantie d'assurance, et que les parties en ont eu tellement conscience qu'elle ont appelé en cause l'assureur devant la Cour de LYON ;
Que cette Cour a jugé sur cette question essentielle, et contradictoirement à l'égard de tous, que les relations de travail avaient été fautivement rompues au 31 décembre 1995 et que cette faute avait entraîné la perte de la garantie ;
Que même si l'appel en cause de l'assureur a été jugé irrecevable, il demeure cependant qu'il était effectivement présent ;
Attendu que les mêmes parties se retrouvent maintenant, en paraissant admettre que ce qui a été jugé par la juridiction sociale compétente s'impose à l'assureur, ce qui apparaît effectivement comme normal ;
Or attendu que la Cour de Lyon n'a pas jugé que les effets de la rupture devaient être reportés au 31 janvier 1996, contrairement à ce que l'on voudrait lui faire dire maintenant ;
Qu'elle a tout au contraire jugé que la rupture avait eu lieu prématurément le 31 décembre 1995 et que la faute de l'employeur avait entraîné la perte de la garantie d'assurance ;
Qu'eu égard à ce qui a été ainsi jugé, il n'est plus possible d'invoquer l'article L 1234-4 du Code du Travail pour tenter de donner une autre portée à la décision de la Cour de LYON, et que si l'interprétation proposée actuellement pour cette disposition avait été retenue, il aurait été pris une décision radicalement contraire à l'égard de l'employeur ;
Attendu d'ailleurs que même si les moyens des parties ne sont pas en ce sens, il serait possible d'admettre également qu'il y a chose jugée à l'égard de toutes les parties encore une fois en cause maintenant sur la question de la date de rupture des relations contractuelles de travail ;
Attendu que la chose jugée, tout comme le principe de cohérence dont elle est d'ailleurs une application particulière, s'opposent donc à ce qu'il soit fait droit à la demande actuelle de M. Y...;
Attendu que l'on voit d'ailleurs que celui-ci a tenté de rendre un peu de cohérence apparente à sa procédure en déduisant de ce qu'il demandait les indemnités allouées par l'organisme CGEA, alors qu'une telle déduction n'a évidemment rien de juridique ;
Que malgré cette déduction, il conserve deux titres pour un total de 181. 936, 62 + 78. 405, 84 = 260. 342, 46 € ;
Attendu que la demande de son employeur a été omise en première instance, et que son admission aurait conduit également à de fâcheux problèmes de cohérence ;
Qu'il aurait été délicat de donner une portée particulière à sa propre demande, ou de la rejeter en contradiction avec l'admission de celle de M. Y...;
Attendu que la demande de M. Y...est donc effectivement irrecevable ;
Attendu que celle de la société SMAT n'a pas de fondement, et que la compagnie SWISS LIFE, qui n'est pas son assureur de responsabilité, ne peut pas prendre en charge sa condamnation à réparer une faute dans la rupture d'un contrat ; Que la société SMAT n'invoque pas de subrogation dans les droits de M. Y..., et qu'une telle subrogation n'aurait effectivement pas pu être invoquée, ne serait ce que parce qu'elle n'a rien payé ;
Que sa demande est donc rejetée au fond ;
Attendu que le jugement entrepris est donc réformé dans le sens précédent ; Que l'équité ne commande pas cependant de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,
LA COUR,

REÇOIT l'appel de la compagnie SWISS LIFE contre le jugement du 18 juillet 2007 du Tribunal de grande instance de MULHOUSE ;
au fond, REFORME le jugement entrepris, et statuant à nouveau,
DECLARE irrecevable les demandes actuelles de M. Noël Y...; REJETTE au fond les demandes de la société SMAT ;
REJETTE les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE M. Y...et la société SMAT aux entiers dépens de première instance et d'appel, chacun à concurrence de la moitié.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Premiere chambre civile - section a
Numéro d'arrêt : 24/09
Date de la décision : 15/12/2009
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance de groupe - / JDF

Le principe de cohérence s'oppose à ce que le salarié, licencié sans respect du préavis, victime postérieurement à l'expiration de son contrat de travail d'un accident qui l'a laissé invalide, obtienne la condamnation de l'assureur à exécuter le contrat d'assurance de groupe conclu avec son ancien employeur au profit des salariés contre le risque invalidité lorsque ce dernier l'a précédemment indemnisé pour la perte du bénéfice de cette assurance


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Mulhouse, 18 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2009-12-15;24.09 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award