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03/07/2008 | FRANCE | N°04/06021

France | France, Cour d'appel de colmar, 03 juillet 2008, 04/06021


MINUTE N° 582/2008
Copie exécutoire à :
- la SELARL ARTHUS CONSEIL
- Me Antoine S. SCHNEIDER
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A
Décision déférée à la Cour : 26 Octobre 2004 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR
APPELANTE et défenderesse :
LA S.C.I. LE MANDELBERG, ayant son siège social Chemin du Mandelberg à 68630 MITTELWIHR, prise en la personne de son représentant légal,
Représentée par la SELARL ARTHUS CONSEIL, Avocat à la Cour,Plaidant : Me SIMOENS, Avocat à COLMAR,

INTIMEE et demanderesse :
LA SARL SOMEST, ayant son siège social

3, Rue de Hengwiller à 67440 DIMBSTHAL, prise en la personne de son représentant légal,
Représenté...

MINUTE N° 582/2008
Copie exécutoire à :
- la SELARL ARTHUS CONSEIL
- Me Antoine S. SCHNEIDER
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE - SECTION A
Décision déférée à la Cour : 26 Octobre 2004 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE COLMAR
APPELANTE et défenderesse :
LA S.C.I. LE MANDELBERG, ayant son siège social Chemin du Mandelberg à 68630 MITTELWIHR, prise en la personne de son représentant légal,
Représentée par la SELARL ARTHUS CONSEIL, Avocat à la Cour,Plaidant : Me SIMOENS, Avocat à COLMAR,

INTIMEE et demanderesse :
LA SARL SOMEST, ayant son siège social 3, Rue de Hengwiller à 67440 DIMBSTHAL, prise en la personne de son représentant légal,
Représentée par Me Antoine S. SCHNEIDER, Avocat à la Cour,
COMPOSITION DE LA COUR :L'affaire a été débattue le 14 Mai 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :M. WERL, Président de Chambre,Mme CONTE, Conseiller,Mme DIEPENBROEK, Conseiller,qui en ont délibéré.

Greffier ad'hoc, lors des débats : Mme WEIGEL,
ARRET :- Contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.- signé par M. Michel WERL, président, et Mme Corinne LAEMLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

- Ouï Mme CONTE, Conseiller, en son rapport.
FAITS ET PROCEDURE :
Le 25 novembre 1999, par le truchement de M. Z..., gérant de la SCI "LE MANDELBERG", un contrat d'entreprise était conclu au profit de cette dernière avec la SARL SOMEST qui s'obligeait, moyennant le prix de 812.327,63 francs TTC, à réaliser des travaux de menuiseries intérieures dans des locaux à usage d'hôtel appartenant à la SCI.
En considération des acomptes payés en cours de chantier, le 16 octobre 2000, après que les travaux étaient achevés, la SARL SOMEST adressait à la SCI sa facture finale pour réclamer paiement du solde à hauteur de 73.074 €.
Après discussion, la SARL SOMEST a réduit sa prétention à un solde de 7.934,44 € et par suite d'une mise en demeure infructueuse, elle a les 17 janvier 2002 et 13 février 2003 fait citer la SCI et M. Z... en paiement de cette somme.
Par jugement du 26 octobre 2004, le Tribunal de Grande Instance de COLMAR a prononcé la mise hors de cause de M. Z... et il a outre intérêts et frais condamné la SCI au paiement de la somme de 7.934,44 €.
La SCI a interjeté appel de ce jugement le 27 décembre 2004 en intimant seulement la SARL SOMEST.
Le 7 juillet 2005 le conseiller de la mise en état a ordonné une expertise dont le rapport a été déposé le 19 avril 2006.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 février 2008.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Pour un plus ample exposé, la Cour se réfère expressément aux dernières conclusions déposées par les parties :
- le 20 décembre 2007 par la SCI,- le 11 octobre 2007 par la SARL SOMEST.

Par voie d'infirmation du jugement entrepris, la SCI sollicite la condamnation de la SARL SOMEST à lui payer la somme de 3.143,55 € au titre des prestations exécutées non conformément au contrat ou en méconnaissance de son devoir d'information et de conseil, ainsi qu'à lui restituer les sommes payées en exécution du jugement querellé ; subsidiairement elle conclut, conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, à la réduction du montant de sa condamnation à la somme de 6.300€.
La SARL SOMEST réclame la confirmation du jugement entrepris, et à tout le moins l'homologation du rapport d'expertise.
MOTIFS :
Attendu que M. Z... n'étant pas intimé, ni appelant, ne se trouve dévolu à la Cour que le litige au fond qui oppose la SCI MANDELBERG et la SARL SOMEST sur la détermination et l'exécution de leurs obligations contractuelles réciproques ;
Attendu que l'appelante critique les motifs du Tribunal qui a accueilli les prétentions de la SARL SOMEST en se bornant à considérer qu'elle avait accepté les travaux supplémentaires dont le paiement lui était réclamé et qu'elle ne détaillait pas les moins-values qu'elle entendait imputer sur la facture ;
que cependant tant par suite de la réalisation de l'expertise que des nouveaux moyens de droit invoqués, les données du litige ont évolué et imposent un réexamen ;
Attendu qu'il convient donc de reprendre successivement les points demeurant en discussion;
Attendu qu'il s'agit d'abord des encadrements des portes ;
que le devis initial du 25 novembre 1999 accepté par la SCI stipulait, s'agissant des portes "cadre plein cintre" ;
que l'expert a expliqué que cette dénomination correspondait à un encadrement de porte entourant de manière continue la courbure en demi-cercle de la partie supérieure de l'ouverture ;
qu'il a constaté que le travail réalisé par la SARL SOMEST ne satisfaisait pas à cette description technique alors que celle-là s'était affranchie de la difficulté de prolonger les modénatures moulurées du cadre de porte autour de la partie cintrée, limitant celles-ci aux parties verticales de l'encadrement;
qu'il en résulte - comme l'a admis l'expert - que la SARL SOMEST n'a pas exécuté la prestation technique qu'elle avait elle-même mentionnée dans le contrat et en sa qualité de professionnelle elle ne peut prétendre que pour elle "le plein cintre" consistait dans le travail incomplet qu'elle a mis en oeuvre, ni qu'elle n'aurait pas disposé des moyens pour se conformer aux préconisations décrites par l'expert ;
que c'est vainement que la SARL SOMEST fait valoir que cette non-conformité contractuelle aurait été couverte par l'acceptation du maître d'ouvrage puisqu'elle était apparente ;
que d'abord il est constant que la réception des travaux n'a jamais été prononcée et que ce point était l'un des motifs invoqués par la SCI pour ne pas régler le solde de facture réclamé par la SARL SOMEST ;
que contrairement à ce qu'affirme la SARL SOMEST, la SCI, par le truchement de son gérant, n'était pas professionnelle en matière de menuiserie ;
que s'il n'est pas contesté que M. Z... est le gérant d'une entreprise d'installations sanitaires, il n'en résulte pas, en l'absence d'autres éléments de preuve à cet égard, qu'il ait possédé une compétence notoire dans la même spécialité que la SARL SOMEST ;
que la SCI fait donc exactement valoir que la SARL SOMEST n'était pas déliée envers elle de son devoir de conseil et d'information, et que notamment elle devait l'éclairer sur le résultat correspondant aux descriptions techniques contenues dans le contrat ;
que la SARL SOMEST succombe dans la charge de prouver qu'elle a exécuté ce devoir de conseil et d'information ;
que ce n'est qu'au moyen de ses propres affirmations, dépourvues de valeur probante, qu'elle prétend avoir installé une "chambre prototype" montrant l'aspect et la nature des travaux qu'elle s'engageait à réaliser ;
que la circonstance - là encore non autrement prouvée que par les allégations de l'intimée - que le gérant de la SCI se serait rendu quotidiennement sur le chantier est inopérante ;
que la SARL SOMEST ne saurait valablement soutenir que le choix du maître d'ouvrage de ne pas contracter avec un maître d'oeuvre serait de nature à l'exonérer de sa responsabilité ou de ses devoirs contractuels imposés par sa qualité de professionnelle ;
que l'expert a relevé l'imprécision du devis du 25 novembre 1999 qui est le seul document contractuel signé par les parties ;
que l'expert en a déduit que la SCI, en l'absence d'instructions claires ou de réalisation d'un croquis, avait implicitement accepté la pose des encadrements de portes ;
que la SARL SOMEST reprend à tort cet argument qui se trouve juridiquement erroné, alors que professionnelle envers un maître d'ouvrage profane elle était exclusivement tenue d'émettre un devis éclairant complètement ce dernier sur l'objet du contrat ;
Attendu qu'il résulte du tout que la non-conformité des cadres des portes n'était pas apparente pour la SCI et que sa volonté non équivoque de les accepter tels qu'ils avaient été mis en oeuvre n'est pas caractérisée ;
que la SARL SOMEST est donc obligée à réparation du préjudice découlant pour la SCI de cette exécution non conforme à son engagement - la circonstance qu'il ne s'agisse pas d'un désordre, ni que les conséquences ne soient qu'esthétiques n'ayant pas pour effet, contrairement à ce qu'elle soutient, de l'exonérer de sa responsabilité - ainsi que du manquement à son devoir d'information ;
Attendu que l'expert a considéré que sur ce point la SCI serait remplie de ses droits par la déduction de la somme de 37.373 francs, soit 5.697,48 €, sur la facture réclamée par la SARL SOMEST;
que c'est ce que la SCI réclame, et il y sera donc fait droit ;
Attendu que la discussion se pose en termes identiques s'agissant des seuils de portes et des façades de placards ;
que la SARL SOMEST a mis en oeuvre des seuils intégrés dans la porte alors que la SCI fait valoir qu'elle attendait la pose de seuils dits "SUISSE" apparents ;
que l'expert a mis en exergue l'absence de précision à cet égard dans le devis ;
que là encore la SARL SOMEST s'abstient de prouver qu'elle aurait mis en mesure la SCI de procéder à un choix éclairé sur les différents types de seuils ;
qu'il importe dès lors peu que l'expert ait observé que les seuils posés soient ceux généralement choisis dans les hôtels et qu'ils ne soient affectés d'aucun vice ou malfaçon ;
que l'expert a clairement constaté que les façades de placards n'avaient pas été réalisées comme prévu ;
que par ailleurs il a néanmoins proposé d'exclure toute réparation à la charge de la SARL SOMEST - qui reprend cette argumentation - aux motifs que celle-ci s'était adaptée à l'existant, qu'elle avait compensé la perte de la taille par des modifications de prestations et que la SCI n'avait pas donné d'instructions précises ;
que la SCI proteste à bon droit contre cette analyse en observant à nouveau que la SARL SOMEST est défaillante dans l'administration de la preuve qu'elle aurait satisfait à son devoir d'information et de conseil afférents à l'explication des mentions de son devis ou au contraintes techniques imposant leur adaptation, ou qu'elle aurait obtenu son accord non équivoque, notamment par voie d'avenant au contrat ;
Attendu que consécutivement, la SARL SOMEST se trouve obligée à réparation intégrale de cette méconnaissance de ses engagements contractuels ;
que la SCI sera remplie de ses droits par l'imputation sur la facture - conformément à sa demande - des sommes de 1.608,32 € (seuils) et 1.604,50 € (placards), étant observé que cette estimation n'a pas été critiquée par l'intimée ni par l'expert mais que sa prise en compte avait été écartée par lui pour les raisons en droit erronées ci-avant analysées ;
Attendu que les mêmes moyens invoqués par la SCI et tels qu'ils ont précédemment été reçus justifient que soit exclu de la facture de la SARL SOMEST le montant de 656,38 € - là aussi non remis en cause par l'expert ou par l'intimée - correspondant aux travaux supplémentaires exécutés sur trois portes afin de les mettre en conformité avec la réglementation de sécurité-incendie ;
que l'expert a conclu que cette transformation n'avait pas été prévue au contrat, mais qu'ayant été imposée par le bureau de contrôle en cours de chantier, la SCI devait en assumer le prix ;
que c'est à tort que la SARL SOMEST fait sienne cette appréciation juridiquement inexacte ;
que la SCI soutient encore avec pertinence qu'elle n'est pas tenue de payer des travaux qui n'avaient pas été expressément commandés dans le contrat initial ou dans un avenant alors que la SARL SOMEST, spécialiste de son art et de la réglementation de sécurité y afférente, ne justifie pas l'avoir informée des travaux spécifiques qu'il convenait de prévoir sur ce point ;
Attendu que finalement, en se référant pour le surplus aux autres rectifications de la facture proposées par l'expert dans le tableau récapitulatif annexé à son rapport qui sont admises sans discussion par les deux parties et compte tenu des montants justifiés déjà réglés par elle, la SCI est bien fondée à solliciter la condamnation de la SARL SOMEST à lui payer la somme de 3.143,55 € ;
qu'en considération des motifs de cette décision, cette créance s'avère de nature indemnitaire et pour satisfaire au principe du droit à réparation intégrale, elle sera augmentée - conformément à la réclamation de l'appelante - des intérêts au taux légal à compter des demandes, soit le 22 novembre 2002 sur 1.276 € et le 20 décembre 2007 sur 1.867,55 € ;
que l'infirmation totale du jugement querellé s'impose en conséquence ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de condamnation formée par la SCI du chef des sommes réglées par elle en exécution provisoire du jugement ;
qu'il suffit à cet égard de rappeler que le présent arrêt vaut titre de restitution des montants ainsi payés qui conformément à l'article 1153 du Code civil produiront intérêts au taux légal à compter de la signification dudit arrêt valant mise en demeure de restituer ;
Attendu que l'échec de la SARL SOMEST ne suffit pas à caractériser un abus du droit d'agir en justice, de sorte que la SCI sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre ;
Attendu que la SARL SOMEST, qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel - en ceux-ci compris les honoraires d'expertise et frais d'exécution du jugement mais à l'exclusion des frais d'injonction de payer - ainsi qu'au paiement à la SCI de la somme de 3.500 € pour frais irrépétibles de première instance et d'appel, sa propre demande à ce titre étant rejetée.
PAR CES MOTIFS
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
CONDAMNE la SARL SOMEST à payer à la SCI LE MANDELBERG la somme de 3.143,55€ (trois mille cent quarante trois euros et cinquante cinq cents) en réparation de ses entiers préjudices augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2002 sur la somme de 1.276 € (mille deux cent soixante seize euros) et du 20 décembre 2007 sur celle de 1.867,55 € (mille huit cent soixante sept euros et cinquante cinq cents), ainsi que la somme de 3.500 € (trois mille cinq cents euros) pour frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
RAPPELLE que l'arrêt vaut envers la SARL SOMEST titre d'obligation de restituer à la SCI LA MANDELBERG les sommes reçues en exécution provisoire du jugement attaqué qui produiront intérêts au taux légal à compter de la signification de celui-là valant mise en demeure ;
DÉBOUTE la SCI LE MANDELBERG de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et la SARL SOMEST de sa demande de frais irrépétibles ;
CONDAMNE la SARL SOMEST en tous les dépens et frais d'exécution de première instance et d'appel, en ceux-ci compris les honoraires d'expertise, mais à l'exclusion des frais d'injonction de payer.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Numéro d'arrêt : 04/06021
Date de la décision : 03/07/2008
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Colmar, 26 octobre 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2008-07-03;04.06021 ?
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