MINUTE N° 08 / 864
COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE-SECTION B
ARRET DU 17 Juin 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 07 / 02573
Décision déférée à la Cour : 26 Septembre 2006 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE COLMAR
APPELANTE :
ASSOCIATION ADELE DE GLAUBITZ, prise en la personne de son représentant légal, 8, rue du Général de Castelnau 67000 STRASBOURG Non comparant, représenté par Me MOYON-VIRELIZIER-avocat au barreau de STRASBOURG
INTIME :
Monsieur André X... ...... Comparant, représenté par M. Antoine GARCIA-Délégué syndical ouvrier
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Mars 2008, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme BURGER, Conseiller faisant fonction de Président M. SCHILLI, Conseiller Mme WOLF, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme MASSON,
ARRET :- contradictoire- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président- signé par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président et Mme Linda MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Monsieur André X... a été engagé par l'association ABBAYE DE MARBACH à compter du 02 mai 1978 en qualité de moniteur de sport deuxième groupe selon contrat de travail à durée indéterminée.
Suite à l'obtention d'un brevet d'Etat, il a été reclassé en octobre 1999 en tant que moniteur d'éducation physique et sportive premier groupe.
L'association ABBAYE DE MARBACH a cédé ses activités médico-sociales à l'association ADELE DE GLAUBITZ à partir du 1er juillet 2003.
Monsieur X... a, selon avenant à son contrat de travail avec effet au 1er septembre 2003, été confirmé dans son poste au coefficient 617.
En novembre 2003, il a été affecté au poste d'éducateur technique sur le site de MARBACH pour y effectuer la fonction de moniteur d'atelier.
Compte tenu des dispositions de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 et de l'article L. 363-1 du Code de l'éducation, Monsieur X... ne pouvait plus exercer les fonctions de moniteur d'éducation physique et sportive.
Dans le cadre de la V. A. E-validation des acquis de l'expérience-Monsieur X... a obtenu le diplôme d'éducateur spécialisé le 26 avril 2005.
Il a, le 09 décembre 2005, saisi le conseil de prud'hommes de COLMAR d'une demande aux fins de reclassement en qualité d'éducateur spécialisé avec attribution du coefficient 715 conformément à la grille de classification des emplois et des coefficients de salaire du personnel éducatif pédagogique et social et ce à compter du 1er mai 2005, il a également sollicité la condamnation de l'association ADELE DE GLAUBITZ à lui verser :- la somme de 6024, 43 € brut à titre de rappels de salaires à compter du 20 décembre 2005,- la somme de 1. 263, 44 € correspondant aux heures supplémentaires et de nuits de garde effectués par lui du 26 décembre 2000 au 12 janvier 2001,- la somme de 2. 500 € pour résistance abusive,- la somme de 2. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement rendu le 26 septembre 2006, le conseil de prud'hommes de COLMAR a dit et jugé que Monsieur X... doit bénéficier du reclassement au coefficient 715 en qualité d'éducateur spécialisé à compter du 1er mai 2005, a fait droit à la demande au titre des heures supplémentaires et de garde de nuits, et il a condamné l'association ADELE DE GLAUBITZ à lui verser la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Pour statuer en ce sens, les premiers juges ont rappelé les dispositions de la convention collective applicable, qui s'imposent en termes de classification et de rémunération à compter de l'obtention du diplôme d'éducateur spécialisé.
En ce qui concerne les heures supplémentaires et nuits de garde, ils se sont référés à la directive 23 / 104 / CE du conseil du 23 novembre 1993 et à l'arrêt de la CJCE du 1er décembre 2005 pour dire et juger que des heures d'équivalence sont assimilées à du travail effectif, toutes les heures accomplies par le salarié devant être décomptées comme temps de travail à part entière.
En revanche, ils ont rejeté la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Ce jugement a été notifié à l'association ADELE DE GLAUBITZ le 27 septembre 2006, laquelle en a interjeté appel le 18 octobre 2006.
Par ordonnance du magistrat de la mise en état du 06 juin 2007, l'affaire a été radiée.
L'association ADELE DE GLAUBITZ a déposé un acte de reprise d'instance le 11 juin 2007.
Se référant oralement à ses conclusions visées le 14 décembre 2007, l'association ADELE DE GLAUBITZ demande que la Cour infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau, déboute Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes, le condamne au versement des sommes de 2. 000 € et de 2. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que si Monsieur X... bénéficie d'une priorité dans l'examen de sa candidature dans le cadre d'un poste à pourvoir, le reclassement n'est pas automatique et elle n'a pas d'obligation conventionnelle de reclassement.
La convention collective ne prévoit pas le cas d'un éducateur spécialisé ayant acquis sa qualification dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience.
Subsidiairement, seul aurait pu être appliqué le coefficient 679.
Elle ajoute qu'elle a à deux reprises proposé à Monsieur X... un poste d'éducateur spécialisé, à STRASBOURG puis à STILL, que ce dernier a refusé.
Pour ce qui est des heures supplémentaires, elle estime que l'organisation du temps de travail se faisait selon un emploi du temps précis avec un horaire hebdomadaire de 35 heures, lequel s'inscrivait dans une modulation de treize semaines ainsi qu'il résulte de l'accord de réduction du temps de travail applicable.
Enfin, il résulte du bulletin de salaire du mois de janvier 2001, qu'une prime de " camp foyer " de 32 heures, une indemnité de dimanche et jours fériés correspondant à 38 heures ont été payés en sus de la rémunération habituelle avec une référence à l'ARTT, à hauteur de 1. 557, 16 €.
Se référant à ses conclusions visées le 29 octobre 2007, Monsieur André X... demande que la Cour infirme le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre de la résistance abusive, et sur le montant au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et le confirme pour le surplus.
Il forme une demande additionnelle de condamnation de l'association ADELE DE GLAUBITZ en paiement de la somme de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale et un appel incident aux fins de condamnation à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et en application de l'article 700 du Code de procédure civile aux mêmes montants que ceux initialement sollicités. La demande de rappels de salaire doit être appliqué au coefficient 762 à compter de mai 2006.
Il réplique que l'association ne l'a jamais informé des accords de branche applicables à l'établissement et que la convention collective applicable impose à l'employeur de prendre en compte le nouveau niveau obtenu pour la classification et la rémunération.
Il invoque une discrimination en matière salariale, les fonctions exercées alors qu'il était classé éducateur technique étant déjà celles d'éducateur spécialisé.
Il est moins bien payé que ses collègues éducateurs techniques spécialisés Messieurs Z... et A..., alors qu'il occupe les mêmes fonctions.
Il a subi une rétrogradation en étant affecté à une fonction de suppléance.
L'usage prévoyait la prise en compte du nouveau diplôme. Cet usage n'a pas été dénoncé.
Les postes de reclassement proposés par l'association sont situés à plus de 80 kilomètres de son lieu actuel de travail et d'autres sont à temps partiel.
En ce qui concerne les heures supplémentaires il se réfère à la directive CE susvisée et à l'arrêt de la CJCE du 1er décembre 2005.
SUR QUOI, LA COUR ;
Sur la demande de reclassement avec effet au 1er mai 2005 :
Monsieur André X..., confirmé au poste de moniteur d'EPS du 1er groupe selon avenant au contrat de travail du 25 août 2003, avec effet au 1er septembre 2003 ne répondait pas aux conditions de diplôme définies par l'article L. 363-1 du Code de l'éducation et ne pouvait donc plus exercer une activité salariée d'EPS ou d'APS.
Il avait l'obligation de suivre une formation qualifiante, conformément aux dispositions de l'avenant no292 du 14 janvier 2004 relatif aux emplois d'EPS et d'APS, à la convention collective nationale du 15 mars 1966.
Il a obtenu le diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé le 26 avril 2005 dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience-V. A. E-, après avoir bénéficié d'un accompagnement de 24 heures selon attestation établie le 10 novembre 2001 par le pôle de ressources régional pour la promotion du travail éducatif et social.
C'est à bon droit que les premiers juges ont dit que Monsieur X... doit bénéficier d'un reclassement dans la fonction d'éducateur spécialisé à compter du 1er mai 2005.
En effet, l'article 8 de la convention collective nationale du 15 mars 1966 relatif aux conditions de " reclassement " des personnels éducatifs tributaires de l'action d'adaptation ou de formation en cours d'emploi dispose qu'à compter de l'obtention de leur titre de qualification d'emploi conventionnel les personnels éducatifs en fonction ci-après sont reclassés dans leur nouvel emploi conventionnel à un échelon de " majoration pour ancienneté " donnent salaire égal ou à défaut immédiatement supérieur à celui perçu dans leur emploi conventionnel précédent.
Parmi ces personnels éducatifs pouvant être reclassés est mentionné l'éducateur spécialisé ayant acquis sa qualification.
Les actions tendant à faire valider les acquis de l'expérience sont des actions de formation professionnelle au sens de l'article L. 900-2 du Code du travail.
L'employeur a donc l'obligation conventionnelle de reclasser le salarié qui a obtenu le diplôme d'éducateur spécialisé au terme de la démarche de validation des acquis de l'expérience.
Il convient d'observer à cet égard que la convention collective prime sur le protocole d'accord du 29 avril 1985 sur les objectifs de formation, en ce qu'elle est plus favorable aux salariés.
Le principe de reclassement étant acquis, il convient, réformant sur ce point le jugement déféré, de dire que Monsieur X... sera reclassé au coefficient 679 à compter du 1er mai 2005 indice immédiatement supérieur à celui dont il bénéficiait depuis le 1er septembre 2003 (617).
Sur la demande au titre des heures supplémentaires et nuits de garde :
C'est à bon droit que les premiers juges ont alloué à ce titre une somme de 1. 263, 44 € pour les périodes du 26 décembre au 31 décembre 2000 et du 1er au 02 janvier 2001.
Il n'est en effet pas contesté qu'à ces dates, Monsieur X... a encadré des camps de ski avec les adultes handicapés.
La Cour de justice des communautés européennes, dans son arrêt du 1er décembre 2005, a assimilé les heures supplémentaires prévues par le décret n° 2001-1384 du 31 décembre 2001, pris pour l'application de l'article L. 212-4 du Code du travail, à du travail effectif.
Toutes les heures accomplies par le salarié doivent être décomptées comme temps de travail à part entière.
Les premiers juges ont donc décompté toutes les heures accomplies par le salarié et ont chiffré les heures restant dues à 71 heures pour la période du 26 décembre 2000 au 31 décembre 2000, et à 21 heures pour la période du 1er au 02 janvier 2001, en appliquant une majoration de 10 % pour les heures supplémentaires accomplies du 26 décembre au 31 décembre 2000, et de 25 % pour les heures supplémentaires accomplies du 1er au 02 janvier 2001.
De ce montant de 1. 263, 44 € représentant les heures supplémentaires effectuées par Monsieur X..., il convient toutefois de déduire la prime de camp de 640, 14 francs soit 97, 59 € brut et l'indemnité de dimanche et jours fériés de 1. 694, 04 francs soit 258, 25 € mentionnées sur le bulletin de paie de janvier 2001. Il est dû en définitive à ce titre : (1. 263, 44 €)- (258, 25 € + 97, 59 €) = 907, 60 €.
Sur la demande formée devant la Cour d'appel, à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale :
Monsieur X... ne rapporte pas la preuve d'avoir subi une discrimination salariale.
Les collègues pour lesquels il fait état d'un reclassement à la suite de leur promotion au poste d'éducateur spécialisé ont obtenu le diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé pour Mademoiselle B... le 13 décembre 2006 et pour Madame C... le 05 décembre 2005.
D'autre part, le fait pour Monsieur X... d'avoir été affecté à la rentrée 2002 à l'IMP et non plus au foyer, en activité de jour avec un rôle essentiellement de suppléance, selon le compte rendu de la réunion du 18 juillet 2002 ne saurait constituer une sanction déguisée.
Il convient, dans ces conditions de rejeter la demande à ce titre.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :
C'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté cette demande. Il convient de confirmer le jugement déféré sur ce point.
Sur les frais irrépétibles :
Il convient de confirmer le jugement déféré en ce que la somme de 1. 000 € a été allouée à Monsieur X... au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance, et de condamner l'association ADELE DE GLAUBITZ à verser à Monsieur X... la somme de 1. 000 € au titre des frais irrépétibles pour la procédure d'appel.
Sur les frais et dépens :
Il convient de condamner l'Association ADELE DE GAUBITZ aux entiers frais et dépens des procédures de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir statué conformément à la loi,
En la forme,
Déclare l'appel recevable ;
Au fond,
Confirme le jugement déféré en ce que Monsieur André X... doit bénéficier d'un reclassement d'indice à compter du 1er mai 2005, et en ce que des heures supplémentaires et nuits de garde pour les périodes du 26 décembre 2000 au 02 janvier 2001 doivent être rémunérées ;
Le réforme sur les modalités du reclassement et sur les montants dus au titre des heures supplémentaires ;
Statuant dans cette limite :
Dit et juge que Monsieur X... doit être reclassé à l'indice 679 de la grille de rémunération éducateur spécialisé de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées du 15 mars 1966, à compter du 1er mai 2005 ;
Condamne l'association ADELE DE GLAUBITZ à verser à Monsieur André X... la somme de 907, 60 € (neuf cent sept euros et soixante centimes) au titre des heures supplémentaires et nuits de garde ;
Confirme le jugement déféré en ce que Monsieur André X... a été débouté de sa demande à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
Déboute Monsieur André X... de sa demande à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale ;
Condamne l'association ADELE DE GLAUBITZ à verser à Monsieur X... la somme de 1. 000 € (mille euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel ainsi qu'aux entiers frais et dépens des procédures de première instance et d'appel.