MINUTE N° 408 / 2008
Copies exécutoires à :
Mes D'AMBRA, BOUCON et LITOU-WOLFF
Me Claude LEVY
Mes LAISSUE-STRAVOPODIS et BOUDET
La S. C. P. CAHN et ASSOCIES
COUR D'APPEL DE COLMAR DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE-SECTION A
ARRÊT DU 12 Juin 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A 05 / 02086 Décision déférée à la Cour : jugement du 21 Mars 2005 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de STRASBOURG
APPELANTE et DEMANDERESSE :
Madame Fernande X... épouse E......... 60200 COMPIÈGNE
représentée par Mes D'AMBRA, BOUCON et LITOU-WOLFF, avocats au barreau de COLMAR, Avocat plaidant : Me Patrice BUISSON, avocat au barreau de NANCY,
INTIMÉS et DÉFENDEURS :
1- Madame Denise X... épouse B...... 68500 RIMBACH PRÈS GUEBWILLER
assignée à étude le 9 mai 2007- non représentée
2- Monsieur Jacques X...... 26220 DIEULEFIT
assigné à étude le 15 mai 2007- non représenté
3- Monsieur Pierre X...... 67640 LIPSHEIM
non assigné (P. V. de recherches infructueuses-article 659 du NCPC) du 2 mai 2007- non représenté
4- Monsieur Ernest X...... 26220 DIEULEFIT
assigné à étude le 15 mai 2007- non représenté
5- Madame Jeannine X... épouse C...... 67260 HARSKIRCHEN
Représentée par Me Claude LEVY, avocat au barreau de COLMAR,
6- Madame Rose France X...... 57157 MARLY
Représentée par Mes LAISSUE-STRAVOPODIS et BOUDET, avocats au barreau de COLMAR, (bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2005 / 2599 du 06 / 07 / 2005 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de COLMAR)
7- Madame Claudine X...... 67000 STRASBOURG
8- Madame Michèle X... épouse D...... 67201 ECKBOLSHEIM
Toutes deux représentées par la SCP CAHN et Associés, avocats au barreau de COLMAR,
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 03 Avril 2008, en audience publique, devant la Cour composée de : M. WERL, Président de Chambre Mme CONTE, Conseiller Mme DIEPENBROEK, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme LAEMLE, Greffier
ARRÊT :- par défaut-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.- signé par M. Michel WERL, président et Mme Corinne LAEMLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
- Ouï Mme CONTE, Conseiller, en son rapport,
FAITS et PROCÉDURE :
Les parties sont les enfants et héritiers des époux Maurice X... tous deux décédés, M. X... en dernier lieu le 12 janvier 1992.
Une procédure de partage judiciaire a été ouverte pour la succession de ces deux personnes.
Les 2-3-9-10 et 11 décembre 2002, Mme X... épouse E... et M. Maurice X... ont assigné leurs frères et soeurs aux fins de les voir condamner à rapporter à la succession la somme globale de 97. 557 € représentant le total des sommes que leur père aurait données aux uns et aux autres.
L'instance s'est trouvée interrompue envers Maurice X... décédé en cours de procédure.
Par jugement du 21 mars 2005, le Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG a débouté Mme E... de la totalité de ses prétentions et il l'a condamnée, outre intérêts et frais, à payer à Mme Rose X... et à Mme C... la somme de 1. 500 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Le 18 avril 2005 Mme E... a interjeté appel général de ce jugement en intimant toutes les parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 21 décembre 2007.
PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES :
Pour un plus ample exposé la Cour se réfère expressément aux dernières conclusions déposées par les parties :
- le 26 octobre 2007 par Mme E...,
- le 23 novembre 2007 par Mme C...,
- le 6 décembre 2005 par Mme Rose X...,
- le 22 décembre 2005 par Mme Claudine X....
Les autres parties assignées les 2-9-14-16 mai 2007 à l'étude de l'Huissier n'ont pas constitué avocat.
Par voie d'infirmation du jugement Mme E... conclut à la condamnation outres intérêts et frais des rentiers à rapporter les donations soit :
- Mme Jeannine C... : 3. 719, 76 €- Mme Claudine X... : 7. 317, 55 €- Mme Michèle D... : 8. 110, 29 e-M. Pierre X... : 1. 829, 39 € et elle sollicite la réserve de ses droits s'agissant d'autres demandes de rapports.
Les intimés réclament la confirmation du jugement.
MOTIFS :
Attendu que pour débouter Mme E... de ses prétentions le Tribunal a d'abord exactement considéré-et celle-là l'admet expressément à hauteur d'appel-que la demande de rapport ne pouvait valablement viser globalement tous les héritiers pour un montant forfaitaire réclamé in solidum, mais qu'elle devait être formée pour un montant précis imputé personnellement à un copartageant ;
Que désormais les réclamations de Mme E... ont été présentées conformément à ce principe ;
Attendu qu'en première instance Mme E...- qui en convient là encore-avait été totalement défaillante dans l'administration de la preuve ;
Qu'il échet donc d'examiner si elle établit-ainsi qu'elle en supporte également la charge-que les intimés auraient reçu des sommes du défunt et que ce dernier était animé d'une intention libérale ;
Attendu qu'à cet égard l'appelante ne saurait utilement faire grief aux intimés d'avoir retenu des éléments probants-notamment des documents bancaires au nom de leur défunt père-alors que d'une part elle avait en sa qualité d'héritière vocation à se faire délivrer de telles pièces par les organismes concernés et que d'autre part elle s'est abstenue de saisir le magistrat de la mise en état aux fins de voir enjoindre à ceux-là de communiquer des pièces qu'ils auraient malicieusement refusé de produire ;
Que cette demande formée dans les conclusions au fond doit être rejetée ;
Attendu que se trouvent dépourvus de valeur probante les courriers échangés entre les consorts X... avant l'engagement de la procédure et dans laquelle ils s'opposent désormais ;
Qu'ainsi Mme Jeannine X... dans ses lettres adressées à l'appelante faisait grief à leur soeur Michèle D... d'avoir bénéficié de dons d'argent de leur père, et elles sont néanmoins toutes deux intimées ;
Attendu que Mmes C..., D... et Claudine X... ne contestent pas avoir reçu de leur père les sommes dont le rapport à succession est sollicité ;
Que Mme E... ne prouve pas davantage qu'en première instance une intention libérale aurait animé M. X..., leur père, lors de ces remises de fonds ;
Qu'eu égard aux montants et aux périodes pendant lesquelles ces sommes ont été perçues, les intimées font exactement valoir qu'il s'agissait de la contrepartie de l'aide et l'assistance-notamment l'hébergement et les soins-apportés à leur père et ayant excédé la piété filiale ;
Attendu qu'il est en effet constant que Mme C... a hébergé son père du 1er juin 1985 au 28 décembre 1986 ;
Qu'elle démontre aux moyens de témoignages circonstanciés recueillis par voie d'attestations de Mme A..., de Mme F..., de M. G..., de Mme H..., de Mme I..., qu'à cette époque M. X... était alerte et en mesure de gérer ses affaires, sa fille n'ayant pas été bénéficiaire d'une procuration ;
Que le défunt percevait alors plus de 10. 000 francs par mois ;
Qu'en moyenne M. X... a versé la somme de 1. 440 francs par mois à Mme C... ce qui correspond à la contrepartie du logement, nourriture et blanchissage fournis par celle-ci ;
Attendu que M. X... a ensuite été domicilié chez Mme Claudine X... de janvier 1987 à septembre 1987 ;
Qu'elle souligne avec pertinence que la somme dont le rapport lui est demandé représente une moyenne mensuelle de 813 €, ce qui constituait une indemnité compensant les frais d'hébergement, d'entretien et de soins dispensés à son père à l'époque âgé de 80 ans ;
Attendu que M. X..., dont il est acquis aux débats qu'il nécessitait par suite d'accidents vasculaires-cérébraux ayant entraîné une paralysie partielle, une aide constante pour les actes de la vie quotidienne, ainsi que des soins contraignants, a été accueilli au domicile de sa fille Mme D... d'octobre 1987 jusqu'à son décès ;
Que Mme D... explique qu'elle-même et son mari exerçant une activité salariée, il avait été convenu avec Mme Claudine X... que celle-ci assurait la garde et les soins de son père chaque après-midi moyennant une rétribution mensuelle de 2. 000 francs et qu'à cette fin elle avait quitté son emploi occupé auprès de la société SOL-NET ;
Que ce dernier point est confirmé par le témoignage de Mme J... qui était une collègue de travail de Mme Claudine X... ;
Qu'après que Mme E... avait déposé une plainte des chefs d'abus de confiance, faux et usage de faux-n'ayant pas abouti à une condamnation-contre les époux D... et contre Mme Claudine X..., M. D... entendu par la gendarmerie a relaté que M. Pierre X..., expulsé de son logement, avait habité avec son père à son domicile, ce dernier ayant dû régler en sa qualité de caution la dette de loyers de son fils ;
Que les circonstances ont été décrites dans les mêmes termes par une amie du défunt Mme K... lors de son audition par la gendarmerie ;
Que cette dernière souligne les soins assidus dont avait besoin M. X... qui avait perdu toute autonomie physique à la fin de sa vie ainsi que les aménagements auxquels consécutivement avaient dû procéder les époux D... dans leur maison ;
Qu'elle explique que ces derniers-et M. D... précise que M. Pierre X... a contribué en nature à la réalisation de ces travaux-ont rendu habitable une partie du sous-sol de leur immeuble pour installer leur fils qui avait cédé sa chambre à son grand-père ;
Attendu qu'il apparaît du tout d'une part que la somme de 8. 110 € dont le rapport est demandé à Mme D... ne représente pour la durée d'hébergement de son père qu'une moyenne mensuelle de 159 € qui s'avère bien inférieure aux coûts exposés par elle dont les causes ont été précédemment analysées, et de deuxième part que ces mêmes explications constituent une valable reddition de comptes des retraits effectués par elle sur le compte de son père en vertu de la procuration qu'il lui avait consentie ;
Qu'en effet les retraits au titre des années 1990 et 1991 que Mme E... dénonce comme étant équivalents au montant des revenus de M. X... se situent à la fin de vie de ce dernier dont l'état de santé imposait une assistance complète diurne et nocturne ainsi que l'ont relaté les époux K... (devant la gendarmerie ou par voie d'attestations régulières) et aussi Mme Denise X... qui est intimée mais envers laquelle Mme E... ne dirige aucune prétention ;
Attendu qu'il s'évince aussi de cette analyse que l'aide apportée à M. Pierre X... était dépourvue d'intention libérale puisque procédant d'un engagement de caution et que celui-ci a en contre-partie fourni son aide aux époux D... pour contribuer aux soins et à l'assistance utile à son père ;
Attendu qu'envers tous les autres intimés Mme E... n'excipe d'aucun moyen de preuve ;
Qu'eu égard aux délais dont elle a déjà disposé pour administrer la charge probatoire, il n'y a nullement lieu de réserver ses droits ;
Attendu que ces motifs commandent de confirmer totalement le jugement déféré ;
Qu'ils imposent de débouter Mme E... de toutes ses prétentions ;
Attendu que la condamnation en première instance de Mme E... à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive se trouvait parfaitement justifiée, le premier juge ayant, sans qu'elle le critique, stigmatisé l'indigence des moyens de droit et de preuve dont elle avait argué ;
Qu'il n'y a cependant pas lieu d'élever ou d'ajouter à ces condamnations en appel alors que Mme E... a réuni des moyens de preuve nouveaux et que l'échec qu'elle subit néanmoins ne suffit pas à caractériser un abus du droit d'exercer un recours ;
Que Mme C... et Rose X... font état d'un préjudice moral sans fournir d'éléments utiles à sa caractérisation ;
Qu'elles seront donc déboutées de leurs demandes à ce titre ;
Attendu que Mme E... qui succombe sera condamnée aux entiers dépens d'appel ainsi qu'au paiement de la somme de 1. 500 e pour frais irrépétibles d'appel à chacune de Mmes C..., D..., Claudine X... et Rose X... ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Y ajoutant :
DÉBOUTE Mme E... de toutes ses prétentions et de sa demande de réserve de ses droits,
DÉBOUTE Mmes C... et Rose X... de leurs demandes de dommages-intérêts pour préjudice moral,
CONDAMNE Mme E... à payer à chacune de Mmes C..., D..., Claudine X... et Rose X... la somme de 1. 500 € (mille cinq cents euros) pour frais irrépétibles d'appel,
CONDAMNE Mme E... aux entiers dépens d'appel.