MINUTE N° 08 / 740
COUR D'APPEL DE COLMAR CHAMBRE SOCIALE-SECTION B
ARRET DU 20 Mai 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 07 / 00427
Décision déférée à la Cour : 12 Janvier 2007 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MULHOUSE
APPELANT :
Monsieur Natalino X... ...... Comparant, représenté par Me Serge ROSENBLIEH-avocat au barreau de COLMAR
INTIMEE et APPELANTE INCIDENTE :
SARL GARAGE DU FOSSE, prise en la personne de son représentant légal, RN 66 68440 SCHLIERBACH Non comparant, représenté par Me Thierry CAHN de la SCP CAHN et associés-avocats au barreau de COLMAR
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 18 Mars 2008, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme BURGER, Conseiller faisant fonction de Président M. SCHILLI, Conseiller Mme WOLF, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme MASSON,
ARRET :- contradictoire- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président- signé par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président et Mme Linda MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Natalino X... a été engagé par la Sarl GARAGE DU FOSSE selon contrat de travail à durée indéterminée du 26 janvier 1998, en qualité de carrossier-peintre.
Il a été convoqué le 12 août 2004 à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire.
Une mise à pied disciplinaire d'une durée de quatre jours lui a été notifiée le 22 août 2004 suite à différents incidents à caractère professionnel les 19 juillet et 31 juillet 2004.
Monsieur X... a contesté cette mise à pied disciplinaire par courrier du 1er septembre 2004.
Convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement par courrier du 26 août 2004, une mise à pied conservatoire lui était notifiée par le même courrier.
Monsieur X... a été licencié pour faute grave le 13 septembre 2004 aux motifs suivants :
Contestant la légitimité de ce licenciement et le bien fondé de la sanction disciplinaire du 22 août 2004 Monsieur X... a, le 03 mai 2005, saisi le conseil de prud'hommes de Mulhouse d'une demande tendant à dire et juger le licenciement illégitime et la mise à pied disciplinaire injustifiée et disproportionnée ainsi qu'à la condamnation de la Sarl GARAGE DU FOSSE à lui verser les montants suivants :-3. 602, 80 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-360, 28 € à titre de congés payés sur préavis,-1. 004, 75 € brut à titre de rappel de salaire de la période de mise à pied conservatoire,-100, 97 € brut à titre de congés payés sur le salaire de la période de mise à pied conservatoire,-2. 341, 82 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,-1. 722, 48 € à titre d'indemnité de congés payés,-69, 21 € à titre de rappel de prime d'assiduité pour le mois de juillet 2001,-18. 018 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement illégitime,-1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement rendu le 12 janvier 2007, le conseil de prud'hommes de Mulhouse a dit et jugé que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et a fait droit aux prétentions de Monsieur X... à l'exception de la demande à titre de dommages et intérêts, l'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile étant fixée à 500 €.
Pour statuer en ce sens, les premiers juges ont estimé que les griefs invoqués par l'employeur étaient fondés mais ne pouvaient revêtir le caractère de faute grave.
Ce jugement a été notifié à Monsieur X... le 25 janvier 2007, lequel en interjeté appel le 26 janvier 2007.
La Sarl GARAGE DU FOSSE a interjeté appel incident le 09 mai 2007.
Se référant oralement à ses conclusions récapitulatives et en réplique visées le 24 janvier 2008, Monsieur Natalino X... demande que la Cour réforme le jugement en tant qu'il a jugé que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et en ce que la demande à titre de dommages et intérêts a été rejetée, et statuant dans cette limite, dise et juge que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamne la Sarl GARAGE DU FOSSE à verser la somme de 18. 018 € à titre de dommages et intérêt, confirme le jugement pour le surplus, déclare la Sarl GARAGE DU FOSSE mal fondée en son appel incident, condamne la Sarl GARAGE DU FOSSE au paiement de la somme de 2. 000 € à titre d'indemnité de procédure.
Au soutien de son appel, il fait valoir que l'employeur n'a pas démontré la réalité des fautes qu'il impute à son salarié et que les trois véhicules qui auraient été mal réparés, visés dans la mise à pied du 22 août 2004, l'ont été postérieurement aux quatre véhicules visés dans la lettre de licenciement. L'employeur ne pouvait par conséquent ignorer les réclamations des clients au moment où il a prononcé la sanction disciplinaire de la mise à pied.
L'examen minutieux des faits visés par l'employeur ne permet pas de démontrer une faute pouvant justifier le licenciement d'un salarié ayant plus de six ans et demi d'ancienneté et une expérience professionnelle de trente ans.
Son licenciement brutal a eu de graves conséquences, sa période de chômage a duré un an.
Se référant oralement à ses conclusions récapitulatives visées le 05 décembre 2007, la Sarl GARAGE DU FOSSE demande que la Cour rejette l'appel principal, reçoive l'appel incident, rejette toutes les demandes de Monsieur X..., subsidiairement, réduise dans une très large mesure les montants de surcroît non justifiés, condamne Monsieur X... au versement d'une indemnité de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle réplique que les griefs faits à Monsieur X... sont bien fondés et qu'il y avait de la part du salarié une volonté de saboter le travail qui caractérise la faute grave.
Selon mention au procès-verbal d'audience, les parties ont admis que Monsieur X... n'a plus travaillé à partir :
- du moment où il a été mis à pied à titre disciplinaire,- Monsieur X... a souligné l'antériorité des réparations visées dans la lettre de licenciement à la mise à pied à titre disciplinaire,- la société GARAGE DU FOSSE a opposé que c'est postérieurement à la mise à pied à titre disciplinaire qu'elle a eu connaissance des autres travaux mal exécutés,- la Cour a mis dans le débat l'épuisement du pouvoir disciplinaire.
SUR QUOI, LA COUR ;
Vu la procédure et les pièces produites aux débats ;
Sur la légitimité du licenciement :
La lettre de licenciement fixe les limites du litige.
Selon l'employeur, la demande est fondée sur des faits distincts de ceux ayant justifié la sanction disciplinaire du 22 août 2004.
En effet, les parties admettant que Monsieur X... n'a plus travaillé à partir du moment où il a été mis à pied à titre disciplinaire, les réparations litigieuses visées dans la lettre de licenciement ne peuvent qu'être antérieures à cette mise à pied.
Or l'employeur ne démontre pas que les faits distincts visés dans la lettre de licenciement sont postérieurs à ceux ayant motivé la sanction de la mise à pied disciplinaire, respectivement il ne prouve pas qu'il n'aurait eu connaissance de ces nouvelles malfaçons invoquées que postérieurement à cette mise à pied disciplinaire.
Cependant, force est de constater l'épuisement du pouvoir disciplinaire à la date de la mise à pied à titre disciplinaire.
Ainsi, le courrier-attestation du 15 février 2007 de l'entreprise LATREILLE est inopérant en l'absence de toute allusion à une quelconque date. Il en est de même des photographies produites et des prescriptions techniques. Il n'est produit aucune plainte de clients.
L'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire, il ne pouvait sanctionner une seconde fois les mêmes faits.
Le licenciement litigieux est dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris est infirmé sur ce point.
Sur les dommages et intérêts :
L'entreprise ayant occupé à la date du licenciement moins de dix salariés, les dispositions de l'article L. 122-14-5 du Code du travail s'appliquent.
Il convient, compte tenu de ce que le salarié ne justifie pas d'une recherche d'emploi après son licenciement, de lui allouer en réparation de son préjudice une indemnité de 5. 400 €.
Sur les autres indemnités (préavis, congés payés sur préavis, congés sur mise à pied, prime d'assiduité, indemnité de licenciement, mise à pied) :
Le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, ces indemnités sont dues et le jugement déféré est confirmé sur ce point, étant observé que l'employeur ne critique le bien fondé de ces demandes qu'en leur principe et non en leur quantum.
Sur les frais irrépétibles :
Il n'est pas inéquitable de condamner la Sarl GARAGE DU FOSSE au paiement de la somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, le jugement déféré étant confirmé en ce que la Sarl GARAGE DU FOSSE a été condamnée à verser à Monsieur X... la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance.
Sur les frais et dépens :
La Sarl GARAGE DU FOSSE, partie perdante, devra supporter les entiers frais et dépens des procédures de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après en avoir statué conformément à la loi,
En la forme,
Déclare les appels recevables ;
Au fond,
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
Dit et juge que le licenciement de Monsieur X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
Condamne la Sarl GARAGE DU FOSSE à verser à Monsieur Natalino X... la somme de 5. 400 € (cinq mille quatre cents euros) à titre de dommages et intérêts ;
Confirme le jugement déféré pour le surplus ;
Condamne la Sarl GARAGE DU FOSSE à verser à Monsieur Natalino X... la somme de 1. 000 € (mille euros) au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d'appel, ainsi qu'aux entiers frais et dépens des procédures de première instance et d'appel.