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12/02/2008 | FRANCE | N°06/02086

France | France, Cour d'appel de colmar, Ct0086, 12 février 2008, 06/02086


CB/IK

MINUTE No 08/218

NOTIFICATION :
ASSEDIC ( )

Copie aux parties
Clause exécutoire aux :- avocats- délégués syndicaux- parties non représentées

COUR D'APPEL DE COLMARCHAMBRE SOCIALE - SECTION B

ARRET DU 12 Février 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 06/02086
Décision déférée à la Cour : 07 Avril 2006 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE SAVERNE
APPELANT :
Monsieur Thierry X......67320 DRULINGENNon comparant, représenté par Me Eric FILLIATRE (avocat au barreau de NANCY)

INTIMEE :
S.A. TEDDY SMITH,

prise en la personne de son PDG,205 route de Millau81013 ALBINon comparant, représenté par Me MIRETE du cabinet FIDAL (avo...

CB/IK

MINUTE No 08/218

NOTIFICATION :
ASSEDIC ( )

Copie aux parties
Clause exécutoire aux :- avocats- délégués syndicaux- parties non représentées

COUR D'APPEL DE COLMARCHAMBRE SOCIALE - SECTION B

ARRET DU 12 Février 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 4 B 06/02086
Décision déférée à la Cour : 07 Avril 2006 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE SAVERNE
APPELANT :
Monsieur Thierry X......67320 DRULINGENNon comparant, représenté par Me Eric FILLIATRE (avocat au barreau de NANCY)

INTIMEE :
S.A. TEDDY SMITH, prise en la personne de son PDG,205 route de Millau81013 ALBINon comparant, représenté par Me MIRETE du cabinet FIDAL (avocats au barreau D'ALBI)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Décembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :Mme BURGER, Conseiller faisant fonction de PrésidentM. DIE, ConseillerMme WEBER, Vice-Président placé, faisant fonction de Conseillerqui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme MASSON,
ARRET :- contradictoire- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président- signé par Mme Catherine BURGER, Conseiller faisant fonction de président et Mme Linda MASSON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :Par contrat du 26.1.1996, M. Thierry X... a été embauché par la société TEDDY SMITH comme VRP, avec pour territoire le quart nord-est de la France composé de dix départements ainsi que le Luxembourg.

La société a pour activité la fabrication et la commercialisation de vêtements sportwear.
L'article 5 du contrat de travail stipule notamment l'obligation "d'assister, aux jours heures et lieux fixés par la Société aux réunions, stages, conférences et rapports" que celle-ci juge nécessaires.
L'article 6.2.3 stipule que "à compter du 1er juillet 1997, le salarié fera son affaire personnelle des f rais professionnels exposés pour les besoins de son activité".
Un avertissement lui a été notifié le 7.11.2003 en raison de son absence à la prolongation au 6.11.2003 d'une réunion commerciale prévue initialement le 5 uniquement.
Il a été convoqué par fax du 5 octobre 2004 à une réunion devant se tenir le 13.10.2004 au siège social à Albi, fax confirmé par lettre recommandée avec accusé de réception du même jour.
Il a répondu par fax du 6 octobre 2004 qu'une solution devait être trouvée au vu du coût trop important du déplacement.
L'employeur lui a opposé qu'il pouvait réduire le coût en ne choisissant pas la liaison aérienne Strasbourg-Toulouse et que sa présence était "bien évidemment obligatoire" la réunion portant sur le bilan de fin de tournée de la saison été 2005 et la préparation de la saison hiver 2005.
M. X... ne s'est pas présenté à cette réunion.
Il a été convoqué le 18.10.2004 à un entretien préalable fixé au 27.10.2004 en vue de son licenciement qui lui a été notifié le 2.11.2004 pour faute grave au motif de son absence à la réunion du 13-14 octobre 2004, outre ses insuffisances professionnelles.
Il a saisi le 16.2.2005 le conseil de prud'hommes de Strasbourg qui, par jugement du 7.4.2006, l'a débouté de sa demande, le licenciement étant bien fondé sur la faute grave au vu du refus de M. X... et de l'avertissement précédent de novembre 2003 pour des mêmes faits.
M. X... a régulièrement interjeté appel le 20.4.2006 après notification du 19.4.2006.
Développant à la barre ses conclusions visées le 29.12.2006 auxquelles il convient de se référer par application de l'article 455 du Code de procédure civile, M. Thierry X... conclut à l'infirmation du jugement déféré, à ce que son licenciement soit dit sans cause réelle et sérieuse, à la condamnation de la société TEDDY SMITH à lui payer:- 16.967,40€, subsidiairement 9.826,17€ au titre de l'indemnité de préavis,- 135.739,20€, subsidiairement 78.609,90€ au titre de l'indemnité de clientèle, - plus subsidiairement, 36.762,70€ au titre de l'indemnité spéciale de rupture, respectivement 5.090,22€ à titre d'indemnité de licenciement,- 67.869,60€ à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,- 1.500€ par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Développant à la barre ses conclusions visées le 5.2.2007 auxquelles il convient de se référer par application de l'article 455 du Code de procédure civile, la société TEDDY SMITH conclut à la confirmation du jugement déféré, au débouté de M. X... de toutes ses demandes et à sa condamnation à lui payer la somme de 1.000€ par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
SUR CE LA COUR
Vu la procédure et les pièces produites aux débats ;
Sur le licenciement

La lettre de licenciement est motivée comme suit :
" Absence injustifiée à la réunion de fin de tournée saison Eté 2005, organisée par le directeur Commercial, qui s'est déroulée au siège de notre entreprise les 13 et 14 octobre 2004.
Vous avez été informé de cette réunion le 5 octobre 2004 par courrier recommandé avec accusé de réception vous précisant que votre présence était obligatoire.
Vous nous avez adressé un fax le 6 octobre 2004 nous expliquant que vous ne pouvez pas dépenser 760 Euros pour une réunion intermédiaire. Cet argument est repris dans la lettre recommandée que vous nous avez adressée le 7 octobre 2004.
Ceci traduit un manquement inadmissible de vos obligations.
Votre comportement est d'autant plus inacceptable que nous avons également à déplorer des insuffisances professionnelles qui se traduisent par :
- Nous constatons un manque de développement clientèle de votre secteur. Vous comptez à ce jour 48 clients or, les secteurs du Sud-Ouest et de l'Ouest ont environ 110 clients.Si l'on ramène le nombre de clients à l'indice de population comparable, vous devriez vous situer à un minimum de 70 clients. Dans un premier temps, nous vous avions donné un objectif de 58 clients pour cette saison.

Nous avons dû insister à plusieurs reprises sur les dates de tournée Eté 2005 pour que vous respectiez ces dates convenues lors des réunions de préparation.
Cette situation nous conduit à procéder à votre licenciement".
La lettre de licenciement fixe les limites du litige.
La charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ainsi que l'impossibilité pour lui de maintenir le salarié dans ses effectifs et la nécessité de son départ immédiat.
Le premier grief est relatif à l'absence de M Thierry X... à la réunion du 13 octobre 2004.
Cette absence est fautive alors que suite au fax du 6.10.2004, le supérieur hiérarchique de M Thierry X... a maintenu son obligation de se rendre à la réunion.
Cependant, pour apprécier le degré de gravité de ce fait fautif et la proportionnalité de la sanction, il convient d'examiner son contexte, chacune des parties se devant d'exécuter loyalement ses obligations contractuelles.
Selon l'article 6.2.3 du contrat de travail, M Thierry X... devait faire son affaire personnelle des frais professionnels exposés pour les besoins de son activité, son taux de commission stipulé à l'article 6-1 les englobant.
Au vu de son secteur d'activité, M Thierry X... résidait à Drulingen.
Or et ainsi qu'il l'a fait de suite observer dès réception du fax du 5 octobre 2004, la tardiveté de la convocation - 8 jours avant la réunion - ne lui permettait plus de bénéficier de tarifs aériens attractifs et lui imposait de payer le prix fort, soit outre près de 700€ pour le trajet aller-retour en avion de Strasbourg à Toulouse, les déplacements de son domicile à l'aéroport - 86 km - avec le coût du parking y afférent et le déplacement de Toulouse vers le siège social à Albi - 84 km -.
Compte tenu de la distance de 950 km séparant Drulingen d'Albi et des difficultés des liaisons ferroviaires, il ne pouvait être raisonnablement exigé de M Thierry X... de se rendre en voiture ou en train à cette réunion, chaque déplacement nécessitant une journée de route.
Alors que la lettre de licenciement reproche une absence de deux jours les 13 et 14 octobre, cependant tant la première convocation par fax que la lettre recommandée avec accusé de réception confirmative envoyée le même jour que la réponse du 11.10.2004 ne prévoyaient que la seule journée du mercredi 13 octobre, ce qui met en exergue l'imprécision des convocations et les difficultés en résultant inévitablement pour les représentants éloignés du siège social.
Ainsi, outre que l'avertissement du 7.11.2003 n'est pas rappelé dans la lettre de licenciement, il convient d'observer que c'est un différent de même nature qui s'était alors posé ainsi que cela résulte du courrier de M. Thierry X... contestant cette sanction, à savoir la prolongation imprévue de la réunion alors que sa réservation en avion n'était ni échangeable ni remboursable. Au demeurant, dans cet avertissement, la société TEDDY SMITH avait souligné la possibilité de M. Thierry X... de solliciter la prise en charge de frais supplémentaires et force est de constater que lorsqu'il l'a fait pour la réunion du 13.10.2004, la société lui a répondu négativement.
Enfin, il ne s'agissait selon la convocation initiale que d'une réunion de "fin de tournée", étant observé qu'elle a été suivie d'autres réunions pour la tournée hiver proprement dite ainsi que celà ressort de la note interne du 27.10.2004.
En conséquence, la sanction de ce fait fautif par une rupture du contrat de travail était disproportionnée.
Concernant le deuxième grief, aucun fait volontaire de M Thierry X... n'est soutenu.
À supposer que ce soit une insuffisance professionnelle simple que la société TEDDY SMITH ait voulu sanctionner, celle-ci n'est pas plus fondée.
Aucun objectif contractuel ne liait les parties.
La société TEDDY SMITH ne conteste pas que le secteur géographique de M Thierry X... était plus restreint que celui des autres représentants de sorte que sa comparaison avec ceux-ci n'est pas pertinente.
Au contraire, dans la propre lettre commerciale No 7 de son directeur commercial du 23.7.2004, était notée la progression de ses résultats, deux autres secteurs se voyant reprocher une baisse.
Les résultats du représentant ayant succédé à M Thierry X... sont inconnus.
Enfin, le troisième grief relatif aux dates de la "Journée Eté 2005" n'est aucunement justifié.
En conséquence, le jugement déféré est infirmé et le licenciement de M Thierry X... est dit sans cause réelle et sérieuse.
Sur les montants réclamés
C'est bien comme VRP monocarte que M Thierry X... a été engagé par la société TEDDY SMITH et seule une erreur explique la mention multicartes au-dessus de la signature du représentant, sans que M Thierry X... puisse réellement soutenir une quelconque méprise de sa part à ce titre.
En effet, l'intitulé du contrat sur la première page, en gras, majuscules et souligné est : "CONTRAT DE REPRESENTANT MONOCARTE".
De même, page 2 est à nouveau mentionné en préliminaire et toujours en majuscules que c'est un CONTRAT DE REPRESENTANT MONOCARTE qui est convenu entre les parties et ce qualificatif est encore repris à l'article 1 - 1.
La qualité de "VRP Exclusif" stipulée à l'article 10-1 quant au régime social découle du contrat monocarte.
M Thierry X... l'avait bien compris ainsi, d'où sa demande en décembre 1997 de pouvoir bénéficier du statut de représentant multicartes et sa demande de voir "rectifier son contrat en ce sens".
Le contrat de travail est imprécis quant à l'application de l'abattement de 30% au titre des frais professionnels dès lors qu'il se limite à dire à son article 6.2.3 que M Thierry X... fera son affaire personnelle des frais professionnels exposés pour les besoins de son activité, la commission stipulée englobant le remboursement de ces frais.
C'est donc à juste titre que M Thierry X... oppose l'absence de convention quant à un abattement forfaitaire et son évaluation à 30%.
Selon les bulletins de paie précédant la rupture que la société TEDDY SMITH ne pratiquait pas systématiquement un abattement et que, même lorsqu'elle le pratiquait, il n'a pas été toujours de 30 % :- septembre 2003: brut de 26.784,99€, cotisations de base sur 26.482,99€ soit sans l'abattement de 30%,- octobre 2003 : brut de 5.028,51€, cotisations de base sur 5.028,51€ soit sans l'abattement de 30%,- mars 2004 : brut de 17.212,61€, cotisations de base sur 12.048,82€, soit après abattement 30%,- avril 2004 : brut de 518,04€, cotisations de base sur 362,62€, soit après abattement 30%,- juin 2004 : brut de 8.115,20€, cotisation de base sur 5.834,39€, au lieu de 5.680,64€ après abattement de 30%, - septembre 2004 : brut de 25.056,41€, cotisations de base sur 25.056,41€, soit sans l'abattement de 30%,- novembre 2004 : brut de 6.538,47€, cotisations de base sur 6.538,47 1€, soit sans l'abattement de 30%,- décembre 2004 : brut de 5.502,39€, cotisations de base sur 5.502,39€, soit sans l'abattement de 30%.

En revanche, le brut fiscal déclaré sur chaque bulletin et son cumul ont toujours été le brut avant tout abattement.
C'est donc le brut fiscal tel que déclaré qui est retenu.
En conséquence, le brut fiscal total des douze derniers mois s'élevant à 62.943,12€, la moyenne mensuelle à retenir est de 5.245,20€.
Le préavis est donc de 15.730,60€.
Au vu des circonstances du licenciement, de ses conséquences, M Thierry X... justifiant de son chômage et de sa nouvelle embauche au 31.9.2005; au vu de son ancienneté, le préjudice qu'il a subi du fait d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sera justement réparé par des dommages-intérêts à hauteur de 38.000€.
Concernant l'indemnité de clientèle, la société TEDDY SMITH produit un listing des clients et de leur chiffre d'affaires au titre de l'année 1995 pour exactement le même secteur géographique.
En revanche et alors que la seule augmentation du chiffre d'affaires ne peut suffire pour justifier de l'apport de clientèle, force est de constater que M Thierry X... ne produit aucun document suffisant permettant de connaître l'apport en nombre de clients.

Il en résulte que faute de démontrer un apport et/ou un développement personnel de la clientèle, M Thierry X... ne peut prétendre à une indemnité de clientèle.
Mais dès lors que la société TEDDY SMITH, en procédant à un licenciement pour faute grave, n'a pas cru devoir s'opposer au versement de l'indemnité spéciale de rupture dans le délai de 15 jours prévu à l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 3.10.1975, elle est tenue de la verser à M Thierry X... qui remplit les conditions exigées.
L'indemnité spéciale de rupture étant égale à 0,70 mois par année entière et M Thierry X... ayant une ancienneté de huit années entières avec une rémunération moyenne mensuelle de 5.245,02€, son montant est donc de 29.372,11€.
La société TEDDY SMITH succombant, elle est condamnée aux dépens des deux procédures ainsi qu'au paiement à M Thierry X... d'une indemnité de 1.500€ par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Déclare l'appel de M Thierry X... régulier et recevable ;
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Dit que le licenciement de M Thierry X... est sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société TEDDY SMITH à payer à M Thierry X... les sommes de :- 38.000€ (trente huit mille euros) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- 15.730,60€ (quinze mille sept cent trente euros et soixante centimes) à titre d'indemnité de préavis,- 29.372,11€ (vingt neuf mille trois cent soixante douze euros et onze centimes) à titre d'indemnité spéciale de rupture ;

Condamne la société TEDDY SMITH aux dépens des deux procédures ainsi qu'à payer à M Thierry X... la somme de 1.500€ (mille cinq cents euros) par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs autres demandes.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Formation : Ct0086
Numéro d'arrêt : 06/02086
Date de la décision : 12/02/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Saverne, 07 avril 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2008-02-12;06.02086 ?
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